The ghost writer de Roman Polanski

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Le dernier film de Roman Polanski, auréolé d’un ours d’argent à Berlin sort dans un climat particulier, celui de sa probable extradition aux Etats-Unis. A 77 ans, Polanski signe l’un de ses meilleurs films, peut être son dernier, probablement même.

Et si c’était son opus final, ce serait un beau départ, une compilation de tout ce qui fait le génie du bonhomme, un regard ironique et brillant sur une carrière qui ne l’est pas moins.

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Pour moi, cela faisait 20 ans qu’il n’avait pas signé de film marquant. « Le pianiste », malgré sa palme d’or et ses oscars, m’a profondément emmerdé par sa réalisation ultra académique.

L’histoire de ce « ghost writer » est celle d’un écrivain, Ewan Mac Gregor, choisi par l’entourage d’un ex-premier ministre, Adam Lang (Pierce Brosnan), pour rédiger ses mémoires et lui servir de nègre. Mais voilà, l’homme politique a un passé sulfureux et s’est isolé sur une île proche des Etats-Unis. Le « nègre » doit donc s’y rendre et s’enfermer avec Adam Lang et ses proches  pour pondre son livre en un mois. Et il va faire l’objet de pressions incroyables quand des révélations politiques vont commencer à surgir autour de son hôte…

Quand on visionne le nouveau Polanski, il est impossible de ne pas penser au cinéaste assigné dans sa résidence en Suisse. Nul doute que durant le montage du film, cette situation a du jouer. Pourtant, il ne faudrait pas y voir un parallèle évident mais plutôt une coïncidence. En effet, on reconnait surtout les obsessions de Polanski qui ne datent pas d’hier mais d’il y a 40 ans…dès ses premières réalisations.

En effet, cet écrivain joué par Ewan Mac Gregor est reclus sur une île, qui semble hostile par son mystère, le temps pourri qu’il y fait, l’isolement de la maison dans laquelle il est logé et surtout les énigmatiques personnages qui l’entourent. Une situation idéale pour faire monter une paranoïa hitchcockienne. Mais c’est bien à lui même que Polanski fait des clins d’œil. A sa propre filmographie, à « la neuvième porte » et « frantic » pour la course poursuite et le jeu de pistes, à « pirates » et « le bal des vampires » pour l’humour décalé, à « le locataire » ou « répulsion » magnifique film oppressant avec Catherine Deneuve…et enfin les cadavres dans le placard de politiciens bien sous tous rapports (« la jeune fille et la mort »). C’est donc un film somme.

 

Il est vraiment plaisant de voir un thriller différent, qui a une personnalité et un style, celui du réalisateur. Par exemple, là où la plupart des films du genre mettent la pression très vite, Polanski agrémente de touches d’humour assez surprenantes les premières scènes pour les espacer de plus en plus. Il avait tenté ce genre de mélange dans « la neuvième porte » mais le résultat était hélas totalement raté.

Ensuite, l’utilisation du lieu est toute caractéristique. Cette grande maison aux baies vitrées donnent l’illusion de liberté alors que lorsque le personnage met les pieds dehors, il ne peut rien faire, c’est une île où il n’y a rien. Le temps est triste, venteux, pluvieux, pas très rassurant. L’isolement, le vrai est bien là, glacial. Et une fois cette impression bien présente, le cadre est dressé et le danger peut surgir de nul part, la tension est à son comble. Enfin, les personnages qui peuplent cet univers si particulier ont tous quelque chose à cacher sous leurs dehors pas forcément antipathiques. C’est un peu la même impression que les chers voisins de Mia Farow et John Cassavetes dans « Rosemary’s baby » du même Polanski. Des individus malsains, qui cherchent quelque chose d’autre que la raison officielle du livre de mémoires à écrire.

Polanski réussit quand même à rendre haletant une course poursuite où le héros se ballade avec une valise à roulettes, c’est franchement pas banal, l’ironie est toujours présente et donne à l’ensemble un charme incroyable.

Enfin, il s’amuse de son rapport aux Etats-Unis, cet endroit où il ne peut plus mettre les pieds depuis 30 ans. Il moque par l’absurde l’hypocrisie de leur puritanisme érigé en étendard. Les défenseurs de la bonne morale savent si bien s’assoir dessus quand l’intérêt de l’empire entre en jeu.

Et dans ce jeu du chat et de la souris, Ewan Mac Gregor nous prouve qu’il est un très bon acteur. Un acteur classique certes, un peu le gendre idéal, mais qui connait bien la nuance. Son personnage d’Obi Wan Kenobi dans Star Wars nous a un peu fait oublier le reste de sa carrière, « petits meurtres entre amis », trainspotting », « le rêve de cassandre », « velvet goldmine ». La trilogie star wars lui a fait plus de mal que de bien. Il revient donc au sommet avec ce film,  avec « I love you philipp moriss »  au côté de Jim Carrey (voir ma critique) et dans « les chèvres du pentagone » (sortie cette semaine).

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La « persécution » médiatique de Polanski, que l’on soit d’accord ou pas avec, peut aussi trouver un écho dans celle que subit cet ex-premier ministre britannique (Pierce Brosnan). La fuite, il connait bien, et savoir où se cacher quand l’ennemi a les pleins pouvoirs c’est comment dire ? délicat. De toute évidence, ce thème est un testament de Polanski qui renvoie à sa propre histoire. Que peut-il faire aujourd’hui que la meute a décidé d’accorder les pleins pouvoir aux Etats-Unis. Rien. Game over.

Mais comme tout grand film, vous n’avez pas besoin de connaitre la vie de Polanski ou sa filmographie pour l’apprécier. Allez voir « the ghost writer » non pas pour la polémique entourant l’affaire Polanski mais bien pour voir ce que c’est que le travail d’un grand metteur en scène, un film élégant, sans fioriture, où il n’y a pas de scène inutile. Terriblement efficace et bourré d’adrénaline.

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