Les meilleurs films 2010 du lapin blanc suite et fin (Partie 2 : N°9 à N°1)

Voici la suite du classement de mes films préférés vus au cinéma en 2010. N’hésitez pas à me signaler d’affreux oublis, des pépites que j’aurais loupées.

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N°9- « I love you Philip Morris » de Glenn Ficarra et John Requa

Les meilleurs films 2010 du lapin blanc suite et fin (Partie 2 : N°9 à N°1) dans Bandes-annonces iloveyouphilipmorris01

Je déteste la plupart des comédies « gay » ou « gay friendly », qui tombent systématiquement dans la caricature de l’homo. Et bien ne vous fiez pas à l’affiche du film qui montre un Jim Carrey et un Ewan Mac Gregor en « grosses pédales » flashies…

Le film raconte l’histoire vraie, ce qui semble d’ailleurs hallucinant, d’un homme ayant menti toute sa vie et fait des allers et retours en prison par amour pour un autre homme, Phillip Morris (Ewan Mac Gregor), rencontré en prison justement. Jim Carrey nous livre là un festival de ce qu’il sait faire de mieux, alterner sans cesse entre pitrerie loufoque et tragédie bien sentie. L’histoire est proche de « Catch me if you can » (arrêtes moi si tu peux) avec Léonardo Di Caprio. L’histoire d’un gamin pour qui tout commence au mensonge d’origine de ses parents, qui l’ont adopté, fissure qui dictera toute sa vie, une vie de mythomane jusqu’à l’excès souvent très drôle. L’humour parfois bien trash a choqué l’amérique puritaine et a entrainé quelques difficultés de distribution du film. Il faut dire qu’on voit rarement ce genre de blagues homo sur grand écran. Mais justement, c’est là où le film est très fort. L’histoire n’a rien de communautariste, les personnages principaux auraient pu être hétéros, ceci n’aurait rien changé au fond.

L’intérêt principal du film réside dans cet individu clownesque mais sincère, qui se cache derrière divers masques de personnages afin de disposer d’assez d’argent pour rendre heureux l’homme qu’il aime. Seulement voilà, à force d’empiler des masques, le visage élastique devient de plus en plus rigide et quand ces derniers tombent il n’y a rien derrière…ou plutôt une histoire à écrire, un adulte à construire, juste un gamin qui a joué à être quelqu’un d’autre entre temps, juste l’espace de quelques dizaines d’années. Troublant.

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N°8- « Mother » de Joon-ho Bong

 dans Dossiers
Une mère cherche à disculper son fils d’une accusation de meurtre. Mais son fils a tout contre lui puisqu’il est légèrement attardé…
Le réalisateur coréen surprend à chaque film, que ce soit son film de monstre teinté de critique sociale avec « the host » ou son superbe polar « memories of murder« . Avec « Mother« , il change de nouveau de style tout en gardant un peu des ingrédients de ses précédents longs métrages. En fait il récréé un style, entre le thriller psychologique, la chronique sociale teintée d’humour noir, l’enquête policière classique, ou le mélodrame familial. Il nous brouille les cartes pour mieux entretenir le suspens et l’émotion. Mais pas de l’émotion tire larmes, bien au contraire, il nous montre les limites de la résistance, de la lutte pour un être aimé. Au bout de 2h de long métrage, l’empathie provoquée par cette mère « courage » nous explose à la tronche dans un des plus beaux final des films sortis cette année. Une très grande réussite.

La bande-annonce :

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N°7- « Shutter Island » de Martin Scorsese

shutter_island_movie_poster2 dans Films

Cette adaptation du livre Dennis Lehane, adapté également en bande-dessinée, par l’un des plus grands réalisateurs au monde avait de quoi nous faire crever d’impatience. Et bien le résultat est brillant, notamment grâce à son fidèle acteur et chouchou, Léonardo Di Caprio, qui trouve là un de ses rôles les plus torturés et aboutis et prouve encore une fois qu’il est le meilleur dans sa classe d’âge. Il l’a re-prouvé trois mois plus tard dans « Inception » dans un rôle assez proche. Des quatre collaborations entre Léonardo Di Caprio et Scorsese, c’est la meilleure avec « Gangs of New York ».

C‘est un excellent thriller avec un twist final réussi, une musique oppressante et un Martin Scorsese qui s’intéresse davantage que d’habitude aux tréfonds de l’âme. C’est la première fois je crois qu’il filme des cauchemars ou des souvenirs, le fash back n’étant pas très présent dans son oeuvre. Scorsese utilise toute la profondeur de ses références cinéphiles de Shock Corridor de Samuel Fuller en passant par Hitchcock ou Lynch. Il utilise son aisance de mise en scène pour mieux nous perdre, multipliant les scènes à doubles fond selon l’idée que l’on se fait du récit. C’est à la fois de l’horreur, du suspens, du rêve trouble mais en tout cas c’est un bijou et un grand film dans sa filmographie.

La bande-annonce :
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N°6 – « A single man » de Tom Ford

singleman dans Films - critiques perso

1962, Jim, professeur d’université à Los Angeles, vit reclus dans le deuil de son compagnon, décédé d’un accident de voiture quelques mois plus tôt. Seule sa meilleure amie, Charley (superbe Julianne Moore) pimente un peu sa vie. Il n’a goût à rien, il veut mourir.

Tom Ford, le célèbre couturier, passe à la réalisation dans un film doté d’une photographie et d’une utilisation du bruitage impressionnants. Tom Ford sait très bien filmer les corps, la peau, les regards et leurs non-dits, le souffle léger d’un personnage. Cette élégance dans l’expression des caractères ne les rend pas moins terriblement humains…et ce n’était pas gagné compte tenu de l’excès de style. Ainsi au final, de l’émotion se dégage de toute cette histoire, de la mélancolie, de la tristesse, de l’ironie, de l’espoir…et surtout, une belle allégorie de la vie et de la mort, du couple et de la réussite de ce dernier. Des messages simples ponctuent donc ce film dont la photographie si léchée n’est qu’une façade, tout comme l’image que ce professeur véhicule de lui même. Elle n’est qu’un rempart contre l’extérieur. Rester parfait en apparence pour que rien ne le touche, rien ne l’atteigne. Qu’il puisse conserver tel un trésor l’image du bonheur brisé un soir de pluie. Qu’il puisse s’enfermer dans son deuil et dans son image si parfaite à l’extérieur comme dans un écrin.

Colin Firth exprime admirablement la solitude, la tristesse, le manque de l’autre. Il faut voir la façon dont il pleure à l’annonce de la mort de son homme. Impressionnant de nuances. Julianne Moore et Nicolas Hoult sont au diapason. Le twist final est impérial. Un film tenu de bout en bout avec un soucis du détail vraiment plaisant. 

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N°5- « Inception » de Christopher Nolan

Inception dans Films series - News de tournage

 

Ce qui frappe le plus à la vision de ce film tant attendu, deux ans après « Batman-The dark knight« , c’est la minutie, le timing d’orfèvre, l’exigence avec laquelle Christopher Nolan et son frère Nathan ont écrit le scénario. Un récit labyrinthique et architectural faisant référence lui même à ce voyage dans l’esprit d’autrui, cette Inception.

Nolan nous livre un film intelligent, qui part du postulat que le spectateur l’est aussi. A la fin de la projection, on se dit que c’est très rare de tomber sur de tels films, libres dans leur construction parceque l’auteur a permis au studio Warner d’obtenir l’un des plus gros succès du box office il y a deux ans avec Batman. Et qu’est ce que c’est jouissif de visionner un excellent thriller de science fiction, d’un tel niveau formel et d’une telle rigueur d’esprit là où Hollywood nous assène des remakes, reboots et suites en pagaille.

Christopher Nolan décide donc d’invoquer tous ses thèmes de prédilection pour nous livrer un film somme. Nous retrouvons les références à la mémoire et à ses méandres (Memento et Insomnia), les regrets d’une relation gâchée et la volonté de rattraper le passé, de se reconstruire une identité (The dark knight) ou la manipulation des illusions (Le prestige). Mais à ceci Nolan ajoute ce qu’il a appris sur Batman begins, le cinéma d’action.

Léonardo Di Caprio habite son rôle avec la même intensité que dans Shutter Island et s’affirme à nouveau comme l’un des plus grands acteurs du moment, ayant perdu au fil des derniers Scorcese son physique poupin tête à claque et s’étant masculinisé avec l’âge.

Bande-annonce :

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N°4- « The Ghost Writer » de Roman Polanski

Ghost-Writer-Poster dans Les meilleurs films du Blanc Lapin

A 77 ans, Polanski signe l’un de ses meilleurs films, une compilation de tout ce qui fait le génie du bonhomme, un regard ironique et brillant sur une carrière qui ne l’est pas moins. Pour moi, cela faisait 20 ans qu’il n’avait pas signé de film marquant. L’histoire de ce « ghost writer » est celle d’un écrivain, Ewan Mac Gregor, choisi par l’entourage d’un ex-premier ministre, Adam Lang (Pierce Brosnan), pour rédiger ses mémoires et lui servir de nègre.

Cet écrivain est reclus sur une île, qui semble hostile par son mystère, le temps pourri qu’il y fait, l’isolement de la maison dans laquelle il est logé et surtout les énigmatiques personnages qui l’entourent. Une situation idéale pour faire monter une paranoïa hitchcockienne. Mais c’est bien à lui même que Polanski fait des clins d’œil. A sa propre filmographie, à « la neuvième porte » et « frantic » pour la course poursuite et le jeu de pistes, à « pirates » et « le bal des vampires » pour l’humour décalé, à « le locataire » ou « répulsion » magnifique film oppressant avec Catherine Deneuve…et enfin les cadavres dans le placard de politiciens bien sous tous rapports (« la jeune fille et la mort »). C’est donc un film somme.

Il est vraiment plaisant de voir un thriller différent, qui a une personnalité et un style, celui du réalisateur. Par exemple, là où la plupart des films du genre mettent la pression très vite, Polanski agrémente de touches d’humour assez surprenantes les premières scènes pour les espacer de plus en plus. Il avait tenté ce genre de mélange dans « la neuvième porte » mais le résultat était hélas totalement raté.

Ensuite, l’utilisation du lieu est toute caractéristique. Cette grande maison aux baies vitrées donnent l’illusion de liberté alors que lorsque le personnage met les pieds dehors, il ne peut rien faire, c’est une île où il n’y a rien. Le temps est triste, venteux, pluvieux, pas très rassurant. L’isolement, le vrai est bien là, glacial. Et une fois cette impression bien présente, le cadre est dressé et le danger peut surgir de nul part, la tension est à son comble. Enfin, les personnages qui peuplent cet univers si particulier ont tous quelque chose à cacher sous leurs dehors pas forcément antipathiques. C’est un peu la même impression que les chers voisins de Mia Farow et John Cassavetes dans « Rosemary’s baby » du même Polanski. Des individus malsains, qui cherchent quelque chose d’autre que la raison officielle du livre de mémoires à écrire.

Enfin, il s’amuse de son rapport aux Etats-Unis, cet endroit où il ne peut plus mettre les pieds depuis 30 ans. Il moque par l’absurde l’hypocrisie de leur puritanisme érigé en étendard. Les défenseurs de la bonne morale savent si bien s’assoir dessus quand l’intérêt de l’empire entre en jeu. Un film élégant, sans fioriture, où il n’y a pas de scène inutile. Terriblement efficace et bourré d’adrénaline.

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N°3- « Moon » de Duncan Jones

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Duncan Jones a certes pu monter ce film grâce à l’aide de son papa, un certain David Bowie….mais avec le peu de moyens qu’il avait pour réaliser un film de SF, son premier film, ce jeune homme s’en sort très haut la main et signe l’un des meilleurs films de science-fiction depuis bien longtemps.

Ce huis clos entre ce cosmonaute et lui-même est si bien écrit, si bien pensé, que de multiples sentiments et réflexions jaillissent là où a priori on ne s’attend à rien. Si un film comme Alien et tous ses avatars se base sur l’immensité de l’espace et la solitude d’un personnage pour créer de l’adrénaline, « Moon » au contraire va chercher des thèmes bien plus terriens.

Car si la science-fiction peut certes s’avérer ludique voir régressivement jouissive, elle atteint également des sommets de profondeur spirituelle lorsqu’elle titille des thématiques universelles qu’elle arrive à isoler des considérations terrestres pour mieux en tirer la substantifique moëlle.Tout le talent de Duncan Jones est donc d’utiliser au mieux le jeu de Sam Rockwell, de révéler assez vite les ficelles du scénario tout en gardant sous la pédale quelques éléments de récit surprenants, de laisser filtrer de la poésie au milieu du cauchemar, de l’espoir vu de la lune, espoir qui s’identifie sous la forme de notre planète bleue mais que l’on ne voit jamais, curieusement. En effet, plus la solitude du personnage s’ancre sur cette lune si froide et si vide de tout humain, plus la terre et ce qu’elle représente s’inscrit en creux. C’est assez fort d’arriver à faire ressentir ce sentiment étrange d’isolement et d’espoir lié uniquement à l’appartenance à un monde, à une espèce. Toute la thématique du film est donc l’identité, l’identité en tant qu’être humain, au milieu de l’univers. Une puissante mélancolie s’échappe de cette vision, portée par la superbe bande originale de Clint Mansell (Requiem for a dream, the fountain).

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N°2 – Submarino de Thomas Vinterberg

 

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Thomas Vinterberg revient enfin…12 ans après son chef d’oeuvre écrasant et premier film, « Festen« .

Il est parfois mortel artistiquement de commencer très haut. Et la chute fut dure pour le jeune danois…De retour dans son pays natal avec « Submarino« , Vinterberg n’abandonne aucunement la noirceur sans fond et limite suicidaire de ses protagonistes, balayés par un vent froid, celui d’un certain pragmatisme social. Non, la vie n’est pas belle dans le quart monde, les soucis de certains vont au delà des besoins consuméristes que notre société créé aujourd’hui… Ceci fait un peu Miss France d’asséner ce genre d’évidence… mais tout est une question de support, or celui de « Submarino » est d’une grande classe. Vinterberg nous livre une mise en scène sobre,  dans une grisaille permanente, d’une colorimétrie parfois proche du gris foncé ou au contraire du blanc. Le blanc pur de l’enfance gâchée des deux personnages, deux frères séparés par un drame originel lorsqu’ils avaient une dizaine d’années.

Thomas Vinterberg s’évertue cependant à tordre le cou aux préjugés…déchéance sociale n’est pas synonyme de pauvreté morale ou intellectuelle. Et même sans aucune carte entre les mains, il y a des chemins, des mauvais très souvent, et puis le malheur apporte parfois une occasion de rebondir, de s’extirper dans un dernier souffle de survie. Le film traite de la culpabilité, de l’acceptation de son passé, de l’absence de communication entre des êtres censés se tenir les coudes, souvent par maladresse ou par abandon. Mais c’est dans le lien filial que  le film prend toute son ampleur dramaturgique.  Il est  l’ultime barrière contre la dureté du monde extérieur, l’ultime bouée avant de lâcher prise.

Passer dans ce style de cinéma après Ken Loach, Stephen Frears, les frères Dardenne ou Robert Guediguian n’est pas facile tant de si grands films ont été réalisés. Aronofsky a surpris tout le monde avec « The wrestler » il y’a deux ans. Thomas Vinterberg n’aura pas le même succès mais c’est une grande claque de cinéma à laquelle j’ai eu droit.

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Et le meilleur film de l’année pour moi fut le premier vu cette année ! Impossible de trouver un concurrent sérieux à cette majestueuse claque, à savoir…

 

N°1 – TETRO de Francis-Ford Coppola

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Il y a des moments rares au cinéma où l’on contemple une œuvre en ayant la certitude qu’elle est en train de nous faire chavirer, que l’on regarde un chef d’oeuvre. Et comme le mot est galvaudé, je vais juste préciser ce qu’est un chef d’œuvre pour moi. C’est lorsqu’un artiste arrive à imposer cette œuvre avec un style qui lui est propre, un jeu d’acteur irréprochable, un choix de casting brillant, enfin une histoire qui vous empêche de perde haleine. L’intensité dramatique ne tombe jamais dans le pathos, il n’y a aucun moment de relâche, chaque scène est parfaite. Le noir et blanc rappelle bien entendu « Rusty James » avec Mickey Rourke et Matt Dillon, d’autant que le jeune acteur, Alden Ehrenreich a des similitudes avec le magnétisme de Matt Dillon jeune. Et puis l’utilisation de la couleur est effectuée avec brio. Pourtant TETRO est bien plus abouti. Cette histoire de famille sur deux générations recèle en elle des moments aussi intenses que les tragédies shakespeariennes que sont « le parrain 1″ et surtout « le parrain 2″. C’est en auteur parfaitement libre, produisant son film tout seul, un film d’art et essai, à 70 ans, que Francis Ford Coppola revenait sur la croisette l’an dernier mais hors compétition. Et il n’était pas très content car il était fier de son film, il le disait partout, il n’avait pas signé une telle œuvre depuis fort longtemps.

Et bien il n’avait pas menti, cela fait 18 ans qu’il a tourné Dracula, son dernier film potable. 30 ans son dernier chef d’œuvre, Apocalypse now.

C’est donc une vraie joie de le retrouver. Une leçon de mise en scène car seuls les maîtres arrivent à impressionner sans aucune débauche de moyens.

 

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