« Joe » de David Gordon Green avec Nicolas Cage, Tye Sheridan – critique du Blanc Lapin
Habitué plutôt aux comédies et séries Tv, David Gordon Green a fait son petit effet l’an dernier avec deux films, « Prince of texas« , sorti en catimini (et non vu pa votre Blanc Lapin serviteur) et « Joe« , qui reçu un excellent accueil au festival de Toronto. Le film sort enfin aujourd’hui en France et marque le retour de Nicolas Cage dans un bon rôle, après une bonne quinzaine d’années de films d’action ou séries B qui n’étaient pas à la hauteur de ton talent. Car avant de devenir sujet de rires sur ses chevelures farfelues dans des objets filmiques décérébrés, Cage a été l’égérie d’un cinéma d’auteur exigeant, avec « Sailor et Lula » de David Lynch » ou « Birdy » d’Alan Parker, et de films plus grands publics mais très bons avec « Leaving Las Vegas« , « Arizona Junior » des frères Coen, « Volte Face » de John Woo…depuis 15 ans il y’a bien eu « Lord of War » d’Adrew Niccol, « Adaptation » de Spike Jonze ou le remake de Bad Lieutenant par Werner Herzog…on ne peut s’empêcher de penser à un certain gâchi.
Gordon Green offre donc à Cage un rôle taillé sur mesure, très mâle, en retenue de testostérone, celle de Joe, qui fait bosser des noirs sans le sou pour déforester des grandes étendues d’arbres dans un Texas paumé et à mille lieues des grandes villes américaines.
Joe a merdé dans sa vie, son impulsivité lui a causé des ennuis par le passé avec la police et des ennemis. Mais c’est un mec bien malgré tout, avec des principes, apprécié de sa communauité. Un jour, un adolescent de 15 ans va lui demander du travail et peu à peu s’inserrer dans sa vie. C’est que le gamin vit dans le dénuement le plus total, au grès des humeurs violentes d’un père alcoolique qui ne fait rien de sa vie à part pourrir celle de sa famille.
David Gordon Green nous plonge donc dans un amérique pauvre, au ras des paquerettes, un quart monde glauque où la solidarité ne va pas de soit et où chacun essaie de s’en sortir comme il peut. Il met justement en avant l’humanité des uns et la bestialité des autres. Où comment pauvreté, absence de travail et alcool amènent à briser des vies sur plusieurs générations. Et justement, le personnage de l’adolescent veut casser ce destin et s’en sortir. Il veut se battre et trouver en Joe une figure paternelle qu’il n’a jamais trouvé chez la loque qu’est devenu son père, qui a quitté le monde des vivants, et perdu toute morale depuis bien longtemps.
Tye Sheridan crêve l’écran après avoir déjà bien marqué les cinéphiles dans « Tree of life » de Terrence Malick puis dans « Mud » de Jeff Nichols l’an dernier. Nul doute que le jeune homme va faire carrière car contrairement aux enfants stars habituels, il a su grandir et arriver dans l’adolescence en nuançant son jeu. Voici un acteur à suivre.
Le seul élèment qui m’a un peu géné tout au long de ce long métrage réussi, c’est qu’à certains moments, le glauque était tellement fort et le jeu des acteurs tellement juste, que mon attention a été détournée par des aspects plus…techniques. La mise en scène ou plutôt le montage et l’enchainement de certaines scènes, l’accélération de certains moments, sur un durée quand même de 1h57, ne m’ont pas paru toujours des plus pertinents. Des longueurs apparaissent, des scènes inutiles aussi…trop appuyées. Disons que le trop de tartinage de noirceur a paradoxalement mis en lumière certaines maladresses du réalisateur, peut être pas encore assez habitué à manier cette typologie d’histoires…un peu balourd mais pas décisif pour m’empêcher d’apprécier le film dans son ensemble.
Au final, David Gordon Green a probablement des progrès à faire afin de moins verser dans la démonstration…mais c’est justement ce qui est passionnant tant son « Joe » a déjà de très grandes qualités. Ce récit initiatique a comme force un réalisme glacial et un jeu d’acteurs solide, et c’est déjà beaucoup et suffisamment pour vous inciter à vous déplacer dans les salles obscures proches de chez vous.
La piste aux Lapins :
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