« Money Monster » de Jodie Foster – Cannes 2016- critique du blanc Lapin
Jodie Foster se fait rare au cinéma en tant qu’actrice. En tant que réalisatrice, si on oublie son « Complexe du Castor« , elle nous a livré le très bon « Week end en famille » avec un Robert Downey Junior génial…on pouvait donc douter de la qualité de son retour puisqu’elle a raté un film sur deux.
Mais « Money Monster » s’appuie sur deux axes importants. D’abord son scénario n’est pas d’une originalité folle mais il est efficace, et nous offre un thriller haletant et rythmé. Ensuite son casting est au top avec un Georges Clooney tour à tour insupportable en gourou de la finance star du petit écran qui retrouve un peu d’humanité en frôlant la mort et en étant redescendu violemment sur terre par un preneur d’otage. Julia Roberts lui donne le contre poids nécessaire et assure grâve.
Et puis, l’un de mes chouchous, Jack O’Connell, découvert dans la série Skins puis dans les très bons « Les poings contre les murs » puis « 71« , crève l’écran de son jeune mais immense talent. Il est sur la brèche en victime naïve du système actuel où tout le monde pense être plus malin que les autres en devenant riche du jour au lendemain en jouant au casino boursier.
C’est qu’au delà du pur thriller, Jodie Foster livre un regard critique mais loin d’être caricatural sur les abus combinés des réseaux sociaux, de la télévision et de l’ultra connexion, du show permanent mais aussi un regard cynique sur les excès de l’ultra libéralisme.
Entendons nous, on est loin des frères Dardenne, de Ken Loach ou de Mike Leigh mais justement, son regard est moins dans la dénonciation que dans le constat acerbe. On en est là et le public de ces grandes métropoles, qui vit bien mieux que le reste du monde, s’est enfermé dans une bulle consumériste et d’argent potentiellement facile sans se poser de questions, en se coupant du monde matériel et des vraies valeurs. Ca pourrait être cliché et pourtant çà passe bien car l’approche est fine et mélangée à de la vraie action.
Surtout la fin est très intéressante puisqu’au delà de faire de la morale de bas étages, elle montre toute la dualité et la façon dont notre morale est élastique, dont notre cerveau est capable d’effacer des vérités qui nous gênent. On préfère zapper pour mieux se complaire dans ce petit cocon, cette bulle d’illusion où les conséquences de nos choix de vie restent immatériels et donc pas vraiment réels, tant que l’on n’a pas perdu soit même au grand jeu. C’est une déresponsabilisation de masse entretenue par les médias, les acteurs politiques et économiques et les citoyens en sont complices par leur paresse ou leur intérêt individuel. Dès lors comment des individus rêvant tous de richesse et de gloire et ne souffrant pas des difficultés des classes moins aisées, pourraient vouloir modifier quoique ce soit ? On se donne bonne conscience en s’émouvant un temps puis le train repart.
Le film de Jodie Foster est bien plus profond qu’il ne le parait. Il peut se regarder comme un pur divertissement et se lire à un degré différent. C’est un excellent résultat.
La piste aux Lapins :
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