Archive pour la catégorie 'Les meilleurs films du Blanc Lapin'

Le blanc lapin change de peau !

29 janvier, 2023

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Le blanc lapin change de peau !

 Après 13 ans de blog, voici le site internet…sur lequel il faut migrer si vous voulez des news , critiques et dossiers tous frais.

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Les meilleurs films du Blanc Lapin 2022 : N°15 à n°01

30 décembre, 2022

2022

Suite du classement des films préférés du blanc lapin pour 2022 avec 18 films dont 3 ex aequo…

N°15 -  »La conspiration du Caire » de Tarik Saleh 

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Un peu à la manière d’un Nom de la rose dans un contexte musulman, « La conspiration du Caire » brille par l’intelligence de son scénario, axé sur un rythme et un suspens de tout instant qui pèse sur ce héros malmené, ballotté par le pouvoir militaire en place tout comme les religieux.

Le réalisateur suédois Tarik Saleh, interdit de séjour en Égypte et on comprend pourquoi on voyant le film, signe un thriller de grande tenue qui tout en commençant très  doucement explique comment l’Égypte mêle politique et religion de façon très archaïque.

L’individu pèse au final très peu. La vie humaine a une valeur toute relative face à des enjeux d’un cynisme déconcertant. Le rôle du général de Fares Fares, chargé de l infiltration, est très nuancé et d’une morale baignant dans un gris vraiment intéressant.

Mais Tarik Saleh n’oublie pas le spectaculaire pour autant au sein de cette université religieuse al-Azhar, monde à l’intérieur de la ville et du pays.

La mise en scène accompagne ce jeu de manipulation, de complots tout en délivrant un message politique fort sur l’écart entre les puissants et une population tenue dans sa misère par la religion.

« La conspiration du Caire » est à la fois original, politique et divertissant, un très bon film.

La piste aux lapins :

4 lapins

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N°14-  »Armageddon Time » de James Gray 

Armageddon Time - film 2022 - AlloCiné L’histoire très personnelle du passage à l’âge adulte d’un garçon du Queens dans les années 80, de la force de la famille et de la quête générationnelle du rêve américain. James Gray est le maitre derrière les drames New-Yorkais que sont « little odessa« , « la nuit nous appartient« , « two lovers« . Puis il s’est éloigné de New-York pour la grande aventure avec le très beau « The Lost City of Z« , qu’il mis 10 ans à réussir à produire. Son film de science-fiction Ad Astra, permettait à Brad Pitt d’ajouter en 2019 un nouveau grand rôle après celui obtenu chez Tarantino deux mois avant (Once Upon a Time in Hollywood). Après ses trois incursions dans des genres non contemporains (film en costume pour The Immigrant, aventures pour « The Lost City of Z » et Science-Fiction pour « Ad Astra »), James Gray revient à New York avec Armageddon Time pour ce film autobiographique qui suit l’éducation du réalisateur dans le quartier du Queens des années 80. C’est son film le plus personnel et le plus tendre à travers le regard d’un enfant et une figure tutélaire qui était son grand-père joué par le magistral Anthony Hopkins. Évidemment on ne peut qu’adhérer à ce personnage au crépuscule de sa vie qui va donner quelques leçons de morale bien sentie au petit pour lui apprendre ce que c’est que de résister face aux cons et face au racisme, à l’intolérance, qui ont fait fuir sa famille juive d’Ukraine au moment de l’arrivée des nazis. Mais plutôt que de livrer une démonstration, James Gray filme de façon très classique, peut-être trop pour certains, la montée en puissance d’un conservatisme blanc intolérant, personnalisé par le propriétaire du lycée privé du Bronx où il a été scolarisé, un certain Fred Trump, le père de Donald Trump. Anne Hathaway ou le génial Jeremy Strong (Succession) jouent les parents de ce gamin pas très docile qui s’intéresse plus à des sujets artistiques qu’à l’école et a un peu de mal avec l’autorité. Son amitié avec un jeune noir défavorisé permet au film de montrer ce racisme hypocrite et cette dualité de chances entre blancs et noirs sans pour autant être lourd ou bavard. Les choses s’insinuent peu à peu et forment  un témoignage assez bouleversant d’une forme d’apprentissage des valeurs et de ce que c’est que d’être une personne intègre, ouverte d’esprit et pour qui la notion d’injustice signifie quelquechose. Le film est mélancolique et pourtant tout en retenue sur les émotions ce qui rend certains passages d’autant plus bouleversants car incroyablement universels. On voit dans cet « Armageddon Time » les prémices d’un basculement dans une Amérique moins insouciante et davantage repliée sur elle-même, où l’idéologie mettait en avant les battants en laissant de côté toute une partie de la population considérée comme d’une autre catégorie. La finesse de la mise en scène et des messages impose de nouveau le respect et aboutit sur un grand film. La piste aux lapins : 4,25 lapinsN°13- « La nuit du 12» de Dominik Moll https://www.avoir-alire.com/IMG/arton45985.jpg Le pitch : À la PJ chaque enquêteur tombe un jour ou l’autre sur un crime qu’il n’arrive pas à résoudre et qui le hante. Pour Yohan c’est le meurtre de Clara. Les interrogatoires se succèdent, les suspects ne manquent pas, et les doutes de Yohan ne cessent de grandir. Une seule chose est certaine, le crime a eu lieu la nuit du 12. Dominik Moll revient au sommet avec ce cold case sombre, à la mise en scène et aux choix scénaristiques brillants. Le choix de Bastien Bouillon en rôle d’enquêteur en chef est très bon, tant cet acteur peu connu a un visage énigmatique. Son regard est assez particulier car on se demande toujours si il n’est pas ailleurs, on ne sait jamais ce qu’il pense réellement. D’ailleurs la froideur apparente du personnage, tout comme celle de ses collègues habitués aux affaires criminelles glauques et au sang est l’un des ressorts du film. Ils font leur boulot et leur quotidien c’est de traiter d’histoires de meurtres. Ils n’ont donc pas le temps de s’émouvoir et se sont pas là pour celà même lorsqu’ils annoncent à une femme la mort de sa fille de 20 ans. Au début c’est déstabilisant et petit à petit on comprend que Domink Moll ne veut pas faire du sentimentalisme mais nous immerger dans le milieu de la criminelle, nous montrer que les policiers sont en effets vaccinés et habitués à cela et qu’ils raisonnent froidement, méthodiquement. L’enquête en elle-même n’a rien de passionnant par sa fin mais par le fait que tous les suspects pourraient être coupables mais que la police n’y arrive pas. Le personnage de Bouli Lanners, toujours excellent acteur, donne une caution plus humaine à cette bande de flics au cuir tanné. L’évolution de son personnage et son ras le bol de tant de noir autour de lui raisonnent comme un écho de ce que vivent probablement ses collègues mais qu’ils gardent intériorisés pour rester concentrés. Moll montre parfaitement cette carapace qu’ils se sont construite. Et puis le réalisateur parle des dérives du mâle, de l’homme violent pétri de désirs et des relations homme-femme dans une petite ville de province où finalement les gens vivent en vase clos. Cet excellent polar, chirurgical et calme traite du mal dans toute sa banalité horrifique sans jamais tomber dans la facilité scénaristique et en tenant ses choix de mise en scène et son orientation volontairement désespérée du début à la fin. Une des pépites de l’année 2022. La piste aux lapins : 4,25 lapinsN°12-  »Pinocchio » de Guillermo del Toro  Pinocchio par Guillermo del Toro - film 2022 - AlloCiné Le conte de Carlo Collodi a déjà été adapté plusieurs fois, la dernière version étant celle de Matteo Garrone avec Roberto Benigni et le reboot live de Robert Zemeckis. La version de Guillermo del Toro est bien supérieure. Le problème est que dans notre imaginaire, le dessin animé de Disney a trusté tout l’imaginaire autour du personnage. Del Toro s’est battu des années pour produire sa propre version et alors qu’il avait mis de côté son projet, Netflix lui a ouvert les portes. Il faut dire que produire un film Pinocchio entièrement,nt en stop motion soit image par image avec des marionnettes sur fonds vert, comme L’étrange Noel de Mister Jack, est une gageure et coûte cher. Le résultat est magnifique, les personnages et leurs designs sont évidemment très particuliers et le monstre rappelle le cinéma du maitre mexicain. La profondeur du visuel des personnage est vraiment différente avec cette technologie et donne un rendus moins lisse que leks productions Pixar. Il y a plus de matérialité physique au résultat et je trouve ceci vraiment bluffant. A ceci s’ajoute un scenario que Guillermo del Toro a transposé à l’époque fasciste mussolinienne italienne, lui permettant d’adresser d’autres messages de tolérance qui ne figuraient pas sous cette forme dans le comte original. Il apporte ainsi une vision plus sombre comme dans L’échine du diable. Et puis l’idée géniale est de donner à Gepetto un premier fils de chair et de sang, ce qui rajoute beaucoup à l’histoire et la rend d’autant plus belle. Pinocchio devient un enfant imposé issu d’un délire alcoolique et se transforme en enfant choisi au terme de bien des aventures. Le film aborde le deuil et la renaissance avec une simplicité confondante. En trahissant Carlo Collodi, Guillermo del Toro nous a fait le plus beau cadeau de cette fin d’année avec un conte plus adulte, plus sombre mais magnifique visuellement et porteur de beaux messages. Une grande réussite. La piste aux Lapins : 4,25 lapins   – N°11-  »Great Freedom » de Sebastian Meise Great Freedom - film 2021 - AlloCiné L’histoire de Hans Hoffmann. Il est gay et l’homosexualité, dans l’Allemagne d’après guerre, est illégale selon le paragraphe 175 du Code pénal. Mais il s’obstine à rechercher la liberté et l’amour même en prison… Si « Great freedom » est souvent glauque par le dureté de ce qu’enduraient les homosexuels en Allemagne lorsque l’homosexualité était punie d’emprisonnement, c’est aussi parceque Sebastian Meise choisit de raconter son histoire uniquement en prison. Il a l’excellente idée de raconter l’histoire de cet homme et de sa relation avec un c-détenu hétéro mais héroïnomane sur trois périodes, 1945, 1955 et 1968, à la veille de la fin de la pénalisation. L’oppression subie semble hors du temps tellement elle est moyenâgeuse et dénuée d’une quelconque humanité. Mais le héros est tellement solaire qu’on s’accroche à son sourire et son regard provocateur qui semble dire merde aux autorités en permanence. Franz Rogowski est brillant de bout en bout alors qu’il parle peu, par son visage expressionniste assez bluffant. Face à lui George Friedrich joue un homme rustre et homophobe avec qui il va tisser une relation d’amitié et d’amour assez particulière et hyper émouvante. Mais plutôt qu’une histoire gay classique,  »Great Freedom » parle d’un combat pour survivre et aimer entre quatre murs via plusieurs histoire où le héros s’amourache d’autres jeunes gays emprisonnés et tente de trouver un espoir dans ces relations sans avenir car punies des pires souffrances. Et puis « Great freedom » émeut à bien des reprises par la bonté des personnages ou leur sens du sacrifice pour se serrer les coudes ou sauver un autre détenu. Ce qui marque aussi c’est ce passage direct des camps de déportation nazis aux prisons allemandes à la libération, un fait peu connu de l’histoire. La découverte des personnages et la construction du duo se fait avec beaucoup de finesse et amène sur une fin bouleversante et romanesque. L’émancipation est passée par des crimes d’état qu’on aurait tord d’oublier trop vite. « Great freedom » est non seulement nécessaire dans son devoir de mémoire mais il est beau et poétique par moments, suffisamment pour vous donner une bonne claque salvatrice. La piste aux Lapins : 4,25 lapinsN°10-   »Un autre monde » de Stéphane Brizé Un autre monde - film 2021 - AlloCiné Un cadre d’entreprise, sa femme, sa famille, au moment où les choix professionnels de l’un font basculer la vie de tous. Philippe Lemesle et sa femme se séparent, un amour abimé par la pression du travail. Cadre performant dans un groupe industriel, Philippe ne sait plus répondre aux injonctions incohérentes de sa direction. On le voulait hier dirigeant, on le veut aujourd’hui exécutant. Il est à l’instant où il lui faut décider du sens de sa vie. Pour clore sa trilogie sur le monde du travail en entreprise après La loi du marché en 2015 et En guerre en 2018, Stéphane Brizé retrouve son acteur fétiche, Vincent Lindon. L’acteur de 62 ans est toujours aussi sobre et juste mais cette fois-ci Stéphane Brizé lui fait changer de bord et lui donne le rôle du patron de site industriel, cadre supérieur coincé entre sa fidélité sans faille à son entreprise, sa reconnaissance pour avoir connu une belle ascension sociale. Sandrine Kiberlain est comme toujours excellente en femme ayant sacrifié sa vie professionnelle pour son mari et Anthony Bajon se révèle décidément l’un des plus grands talents de sa génération dans le rôle difficile du fils. Il joue un gamin éduqué dans le culte du succès par son père mais  en mode burn out à 20 ans à peine tellement la compétition pour réussir ses études l’a aspirée. Le film se construit alors de façon assez originale. Le sujet ne surprend pas, on est dans un vrai film de gauche engagé, et les incohérences du capitalisme sans limite sont pointées de doigts comme on s’y attendait. Mais Stéphane Brizé use du cocon familial, ce cocon détruit par l’ambition noble du personnage et sa charge de travail énorme et impossible à refuser. Or c’est ce cocon mal en point qui va porter une lumière dans tout le film et y apporter les plus beaux moments dont une scène de jeu et de rire en famille absolument magnifique de simplicité et de justesse. Marie Drucker est effrayante en Pdg / CEO qui obéit sans broncher à des ordres venus des Etats-Unis sans aucune justification et qui applique froidement une stratégie qui n’en n’est pas une, au risque de mettre en péril l’entreprise mais juste pour poursuivre son ambition et pour être la bonne élève, comme le personnage de Lindon et ses confrères directeurs de sites croient devoir l’être. Une entreprise n’est pas une démocratie ni n’a forcément de vocation sociale, raison pour laquelle les entreprises à mission ont été créées ou pour laquelle la notion d’impact est autant à la mode dans les entreprises « modernes ». Mais derrière les mots, les green ou social washing, qu’y a t il vraiment ? Un employé n’est ni plus ni moins qu’une ressource humaine, un nom et des coordonnées sur un tableur excel, remplaçable par un autre. « Personne n’est irremplaçable » et c’est le jeu de cette pression concurrentielle sur les coûts qu’imposent des pays à moindres protections sociales, moindres charges aussi et qui au final fait pression sur toute la chaine. On raisonne en chiffres, en data mais quid du capital humain et quid du rôle de l’entreprise sur son bassin d’emploi, d’autant plus lorsqu’elle est bénéficiaire et rentable. Stéphane Brizé utilise une situation caricaturale avec évidemment certains patrons qui pensent à leur prime parcequ’ils ont vraiment beaucoup bossé avant une forme de solidarité. Mais il montre aussi que tous les patrons ne sont pas des salauds égoïstes et sans cœurs et que c’est justement quand le grain de sable du doute, de la morale s’installe que le mécanisme ripe fortement. « Un autre monde » parle de morale alors que ce n’est pas une évidence que la morale soit une valeur en entreprise. En démocratie oui. En entreprise et bien çà dépend de laquelle. L’authenticité du personnage de Vincent Lindon est bluffante et donne à ce drame social une tournure non basique où le manichéisme n’a pas sa place. L’évolution du personnage de Lindon est l’une des très grandes réussites de ce film majeur sur l’absurdité du monde du travail actuel, qui pousse des entreprises à des rendements toujours plus élevés et ne pense pas toujours au maintien en bonne santé mentale et physique de ce qui irrigue son fonctionement même, à savoir ses ressources humaines, justement. Le style minimaliste du jeu renforce encore plus ce constat terrible de froideur et d’inhumanité dans lequel la concurrence mondialisée pousse les salariés dans leur quotidien et les cadres dans leur obéissance aveugle. Alors évidemment, et fort heureusement, de nombreuses entreprises ne raisonnent pas que comme cela et pensent au bien-être au travail comme un enjeu fondamental, non par bienveillance mais pour leur propre intérêt, tant en terme d’image que de performance. Un autre capitalisme plus « éclairé » ou plus conscient que la globalisation a des limites locales. Mais hélas, c’est loin d’être le cas partout. Quand le cinéma parle de politique avec intelligence et recul çà donne un grand film. La piste aux Lapins : 4,25 lapins   N°09-  »Elvis » de Baz Luhrmann Elvis - film 2022 - AlloCiné Le cinéma de Baz Lurhmann est rare, il tourne peu de films, 5 films en 25 ans et surtout il se reconnaît dès la première scène. C’est enlevé, ca explose, ca brille et c’est démesuré. Ca peux gonfler certains mais de Romeo+Juliette à Moulin Rouge, moi le résultat me plait plutôt. C’est too much certes mais c’est assumé comme un énorme spectacle qui doit en foutre plein la vue. Son Gatsby le Magnifique était d ailleurs sauvé par l’interprétation de Di Caprio et cette épilepsie dans les travellings qui gommait les côtés chiants et classiques du scénario. Avec Elvis, le réalisateur réussit à m’intéresser à un artiste dont je me fout complètement, qui pour moi est une caricature et dont le style musical m’a toujours laissé de marbre. Il a réussi à m’emballer et me rendre hyper enthousiaste sur son Elvis. Plusieurs atouts font de ce film un must à voir en 2022. Évidemment la mise en scène est prodigieuse, inventive, disruptive et créative, ce qui pourrait à elle seule valoir le coup même en racontant un biopic bateau. Mais Baz Luhrmann a eu le talent de faire trois choix pertinents. D’abord il raconte l’enfance d Elvis et nous fait redécouvrir son attachement à la culture musicale noire mais il le fait via une explication de texte d’un personnage immonde. Tom Hanks joue un vrai méchant à contre emploi total en interprétant ce « Colonnel » qui réussit à s’imposer impresario d’Elvis depuis tout jeune jusqu’à lui sucer tel un vampire ces dernières forces et le pousser à la déchéance par appât de gain et avidité. Rassurez vous le personnage est plus nuancé que cela mais il est fascinant de noirceur et le fait qu’il soit le narrateur est une excellente idée. Ensuite Austin Butler, inconnu au bataillon qui gracc à Elvis va jouer le super méchant Feyd Rautha dans la suite de Dune, est tout simplement bluffant. Il est Elvis et c’est lui qui chante et qui a bossé comme un damné son timbre de voix pour assurer le rôle de sa vie qui lui ouvre les portes d Hollywood. Il est très bon tant dans le charme que la naïveté un peu bovine du personnage. Certes le réalisateur australien le magnifie et pense dans ses décors et sa mise en scène au moindre détail pour embaumer son personnage de toute l’aura qu’il draine encore derrière lui 45 ans après sa mort. Et le troisième choix qui fait d’Elvis un grand film est d’avoir voulu raconter un mythe plus qu’un personnage. A un moment le film se détache de l’homme pour prendre de la hauteur sur les fans, l’entourage immédiat et montrer cet homme hyper généreux et doué tout d’abord rebondir et provoquer l’hystérie alors même que les Beatles et les Stones et tout le mouvement hippie était passé par la. Et la le film raconte l’histoire d’un mythe en construction et comme tout mythe il a besoin d’un échec et d’une renaissance au sommet. Puis le film explique les mauvais choix et l’enfermement dans sa prison dorée de Las Vegas et dans l alcool et la drogue et le film prend une tournure de tragédie grecque assez fascinante. Baz Luhrmann signe son film le plus mature car avec le plus de recul, le plus complet car traitant de sujets au final très universels, le plus abouti car délaissant parfois son énergie pour mieux embraser le destin tragique du king, qui se suffit à lui seul. Un grand biopic et un film remarquable.

La piste aux lapins :
4,5 lapins
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N°08- « Nightmare Alley » de Guillermo Del Toro
Nightmare Alley en DVD : Nightmare Alley DVD - AlloCiné

Après son lion d’Or à Venise en 2017 avec « La forme de l’eau« , et quatre Oscars en 2018 dont ceux du meilleur film, du meilleur réalisateur, Guillermo Del Toro est de retour. Nightmare Alley est le remake du film « Le Charlatan », réalisé en 1947 avec Tyrone Power. Il suit un bonimenteur faisant croire dans son spectacle truqué qu’il avait le pouvoir de lire dans les esprits. il s’aide pour ceci d’une psychologue et d’une diseuse de bonne aventure. Le film suivra la marche vers la gloire et la chute du personnage. On imagine sans mal Del Toro dans un tel univers. Son casting est comme d’habitude impressionnant avec Bradley Cooper, Cate Blanchett, Toni Collette, Willem Dafoe, Richard Jenkins, Ron Perlman et Rooney Mara ! Le film est clairement l’un des meilleurs de Del Toro et il ne comporte pas de monstres ou plutôt il en regorge mais ce sont bien des humains plus viles les un que les autres. Sur un scénario à rebondissement qui parle de parvenu, de manipulation et de traitrise, Del Toro nous dépeints des monstres individualistes au milieu d’un cirque magnifiquement restitué, aux couleurs et l’imaginaire baroque jusqu’à des bureaux très art déco tout aussi splendides. Le casting comme les décors sont tomber par terre et servent au mieux un jeu d’acteurs de premier plan au service d’un thriller noir comme l’âme de ses anti héros. Une splendide démonstration que Guillermo del Toro est un grand maitre qui cette année 2022 a pondu deux bijoux avec son Pinocchio. 4,5 lapinsN°07-  »The Innocents » de Eskil Vogt   The Innocents en Blu Ray : The Innocents [Combo Blu-Ray + DVD-Édition  Limitée] - AlloCiné Le pîtch : Un été, quatre enfants se découvrent d’étonnants pouvoirs et jouent à tester leurs limites, loin du regard des adultes. Mais ce qui semblait être un jeu d’enfants, prend peu à peu une tournure inquiétante… J’ai loupé le film à sa sortie en février mais la sortie en VOD me permet de rattraper ce film norvégien assez fascinant et extrêmement réussi. On y aborde les supers héros comme dans beaucoup de films du genre pour parler d’un sujet plus mature et profond. Ici le réalisateur aborde les affres de la petite enfance lorsque des gamins isolés de 6-7 ans se découvrent des pouvoirs mais les utilisent pour certains de façon négative, agressive voire criminelle. Qu’est ce qui se passe dans la tête d’un être pas totalement formé dans sa personnalité lorsque ce dernier découvre qu’il a une puissance, une possibilité d’agir sur son environnement. Le film est très bon dans ce qu’il traite de l’absence totale de morale et de retenue des enfants qui peuvent être d’une cruauté ahurissante. Je peux en témoigner pour en avoir été victime enfant. Le harcèlement des enfants envers d’autres masque cette absence de cadre intellectuel pas encore suffisamment forgé. « The Innoncents »  traite donc de cela avec très peu de dialogues car la caméra suite les quatre enfants à hauteur d’enfants. Eskil Vogt use vde d’effets spéciaux avec parcimonie et fait montrer le suspens, la pression d’abord par des scènes anodines puis en montrant l’absence de limites et la noirceur de l’un des protagonistes, va installer un climax anxiogène à souhait mais inscrit dans un quotidien de petites familles scandinaves de banlieue sans histoire. La vision cauchemardesque de ces petites têtes blondes n’est pas une première au cinéma mais ici il y a une vraie originalité dans la mise en scène progressive où chaque évènement apporte une graduation supplémentaire dans ce que l’on craint qu’il arrive. La maitrise de ce film et son résultat auquel on pense longtemps après font de ce film une grande réussite de 2022. La piste aux Lapins : 4,25 lapinsN°06-  »Revoir Paris » de Alice Winocour 

Revoir Paris - film 2022 - AlloCiné
A Paris, Mia est prise dans un attentat dans une brasserie. Trois mois plus tard, alors qu’elle n’a toujours pas réussi à reprendre le cours de sa vie et qu’elle ne se rappelle de l’évènement que par bribes, Mia décide d’enquêter dans sa mémoire pour retrouver le chemin d’un bonheur possible.

Sur un sujet aussi casse gueule que les attentats du 13 novembre 2015, qui restent pour tous encrés dans notre mémoire, il était très difficile de témoigner du traumatisme des victimes sans tomber dans un film pleurnichard, voyeuriste ou pathos. Et pourtant, Alice Winocour, qui avait déjà montré toute sa finesse et sa sensibilité dans l’excellent Proxima, réussit l’impossible. « Revoir Paris » reprend des éléments qu’on connait des témoignages, notamment des personnes cachés au Bataclan, des victimes abattues de sang froid alors que les tueurs passaient entre elles mais elle les transpose dans un restaurant et mixte les histoires. On sait que les personnages sont de fiction et que la situation n’est pas exactement la même mais elle arrive ainsi à faire percevoir toute l’horreur des divers attentats pour les victimes. Et au lieu de jouer sur un effet malsain de suspens ou d’horreur déplacée, elle va suivre l’une des victimes durant les mois qui suivent, jouée par une Virginie Efira décidément au sommet de son talent. L’actrice porte le film sur ses épaules avec une telle retenue, une telle dignité et exprime son désarroi, ses interrogations, sa perdition avec un tel talent qu’elle mérite amplement un César en 2023. Virginie Efira s’affirme comme l’actrice française du moment qui sait tout jouer avec un réalisme confondant. « Revoir Paris »est un film magnifique de sensibilité et d’intelligence. L’émotion et les larmes sont difficiles à réprimer et pourtant la pudeur est très présente de bout en bout. Le scenario est également très intelligent car il met en scène la perception différente des victimes selon leur origine sociale et leur place dans la société et çà c’est très très fort. Comment des « invisibles » de la république ont vécu une telle tragédie alors qu’ils en vivent aussi au quotidien. Là aussi la réalisatrice aurait pu s’enliser dans un discours bienveillant et bateau mais non il est simplement universel et efficace. Le film parle de comment se reconstruire avec d’autres vies brisées et faire face ensemble, être résilient et se relever. C’est un très beau film, porté également par un Benoît Magimel décidément de retour au 1er plan et çà fait rudement plaisir. La délicatesse du film et la force de son message sont la plus belle réponse que le septième art pouvait livrer face à la barbarie. La piste aux Lapins : 4,5 lapinsN°05-  »Licorice Pizza » de Paul Thomas Anderson Licorice Pizza - film 2022 - AlloCiné Le grand Paul Thomas Anderson est l’un de mes réalisateurs préférés, un de mes chouchous, et aligne les réussites avec « There Will be Blood » avec l’excellent Daniel-Day Lewis, « Boogie Nights« , « Magnolia« , « Punch Drunk Love« , et bien sûr le film sur le créateur de la scientologie, l’excellent « The Master« . Et puis c’est le drame…il nous sort un « Inherent Vice«   vraiment mal ficelé, pas drôle, censé se rapprocher de Las Vegas Parano mais un peu chiant. Hélas, si son « Phantom Thread » avec Daniel-Day Lewis dans son dernier rôle de cinéma, a séduit la critique, j’y suis resté de marbre. Ce film sur la création trop froid, trop classique dans sa mise en scène, oubliait l’émotion, trop confinée. L’élégance manifeste de « Phantom Thread » ne le rendait pas aimable pour autant, extrêmement rigide. J’espère donc ne pas me prendre une troisième déception avec son prochain film. Et bien soyez rassurés si vous aviez le même sentiment que moi, « Licorice Pizza » est LE film qu’on attendait du maitre ! C’est son retour à un cinéma plus accessible, plus doux et d’une tendresse, d’une légèreté qu’on désespérait qu’il retrouve. On pense évidemment à « Punch Drunk Love » et « Boogie Nights » car le film est unique en son genre,  »insolite » et surtout souvent très drôle ! On y suit un lycéen vivant dans la Vallée de San Fernando dans les années 1970 et ayant connu le succès en tant qu’enfant comédien. Le lycéen est incarné par Cooper Hoffman, le fils de Philipp Seymour Hoffman, grand ami de PT Anderson et immense acteur ayant joué pour lui très souvent (Boogie Nights, Magnolia, Punch Drunk Love, The Master)  avant de nous quitter en 2014. Et vous avez quoi ? Il est brillant comme son papa ! Le mec est confondant de justesse et son duo avec la jeune Alana Haim est tout simplement brillant. Ils sont hyper attachants et PT Anderson nous conte une love story sans clichés, sans sirop mais tout de même avec beaucoup de cœur, d’élan, de vitalité. C’est un tour de force d’émouvoir et de donner le sourire dans un feel good movie sans refaire du déjà vu. Car en plus de raconter cette histoire de deux êtres très jeunes qui se cherchent et préfèrent de jauger et jouer la complicité amicale, PT Anderson aborde des thèmes super intéressants. D’abord sa reconstitution du Los Angeles des années 70 est excellente avec des stats ou pseudo stars sur le retour comme celles interprétées sur des scènes fabuleuses par Sean Penn et Bradley Cooper, complètement dingo. Et surtout il nous parle de la fin d’une époque, les 30 glorieuses, où tout état possible, où un gamin de 15 ans aux Etats-Unis pouvait monter sa boite. Mais c’était avant le premier choc pétrolier et l’arrêt net de cet american way of lie. En prenant ce contexte comme toile de fonds, PT Anderson n’est pas nostalgique mais réussit à donner de la fraicheur, de la vitalité et de l’innocence à une histoire d’amour là où aujourd’hui le cynisme a souvent pris le pas et s’est errigé en armure obligatoire de tout à chacun. D’ailleurs ce jugement permanent incitera certains spectateurs à tordre le nez lorsqu’on voit des enfants s’investir et travailler pour créer une boite. Sauf que c’était il y a 45 ans, dans un autre contexte, un autre pays, une autre culture. C’est donc vivifiant de voir un très grand réalisateur revenir avec son film le plus abordable depuis 15 ans, un vrai film qui donne la banane et dont on ressort le sourire aux lèvres. Une très grande réussite ! La piste aux Lapins : 4,5 lapinsN°04 -  »After Yang » de Kogonoda After Yang - film 2021 - AlloCiné Le pitch : Dans un futur proche, chaque foyer possède un androïde domestique, appelé « techno-sapiens ». Dans la famille de Jake, il s’appelle Yang, et veille plus particulièrement sur la jeune Mika, assurant pour cette petite fille adoptée d’origine chinoise, un rôle de tuteur, d’ami, de confident. La science-fiction est un genre ultra visité depuis des dizaines années mais rares sont les films sur l’intelligence artificielle qui visent juste. La Ai de Spielberg était en partie gâché par les bons sentiments du réalisateur et I Robot d’Alex Proyas d’après Azimov, virait trop vite dans le film d’action. Ex Machina d’Alex Garland avait suscité l’intérêt il y a quelques années et Spike Jonze avait livré le chef d’oeuvre HER. Évidemment il y a LE canon de la SF qu’est Blade Runner et sa suite Blade Runner 2049. Et en série on peut citer notamment Real Humans. Avec cette proposition l’artiste Kogonoda opte pour une SF sans effets spéciaux, dans un monde très proche du notre, d’une dizaine d’années, ne montrant que l’intérieur des voitures autonomes plutôt que de dépenser du fric de son budget à montrer des voitures volantes. Et tout le film est construit sur l’intérieur, celui de cette grande maison d’architecte où vit la famille dans le calme, paisiblement, ou celui de ce musée dont on ne voit jamais l’entrée. On ne voit aucun personnage se déplacer vers un intérieur mais on les voit agir ou réfléchir de façon posée dans un espace clos. Ce choix esthétique est là pour accentuer l’impression de futur plutôt paisible, en sécurité ainsi que la place familiale donnée au robot. Puis progressivement le personnage de Colin Farrell enquête sur le pourquoi de la panne de son robot et au fur et à mesure qu’il découvre qu’il avait des sentiments, on va le voir sortir à l’extérieure en pleine nature. Cà peut sembler bête et naïf écrit comme cela mais cette mise en scène accompagne la révélation des personnages. Le fait de montrer cet être comme un « défunt » dont on veut faire le deuil et découvrir le passé caché, faire un travail de mémoire est une idée absolument géniale. Elle permet de traiter de l’éthique que l’on devra avoir vis à vis de ces êtres que crééra l’homme à n’en pas douter et qui développeront probablement quelquechose de différent de nos sentiments mais dont on ne maitrisera probablement pas la profondeur. C’est par le rapport à autrui et en occurrence à ce robot que les personnages découvrent leur propre attachement et ce qui finalement les liait davantage à cet être synthétique. After Yang est ce genre de film très calme qui vous cueille par les sentiments et vous fait monter les lames à l’œil avec une approche pourtant sans artifice, sans mélo lourdingue mais juste par construction. En fait Kogonada réalise son film comme un peintre ajoute de petites touches de peinture à son tableau jusqu’à ce qu’il a dans sa tête se révèle sur la toile. Le résultat et magnifique de simplicité et d’efficacité. Les concepts déjà vus et revus en science-fiction apparaissent comme neufs et d’une grande finesse. La sérénité qui se dégage de ce petit bijou de science fiction est assez désarmante de tendresse et de poésie. La piste aux Lapins : 4,5 lapinsN°03 – ExAequo -  »Trois mille ans à t’attendre » de George Miller Critique du film Trois Mille ans à t'attendre - AlloCiné Forcément, un film de George Miller, réalisateur des Mad Max est ultra attendu d’autant plus qu’avec son Mad Max Fury Road en 2015, il a calmé tout le monde avec un chef d’oeuvre de SF d’une beauté confondante et d’une mise en scène aussi décoiffante que brillante, faisant renaitre son héros iconique comme on ne l’attendait pas du tout. Mais avant d’en tourner un prequel sur le personnage de Furiosa, qui sortira en 2024 et qu’il a commencé à tourner, le réalisateur de 77 ans nous livre un autre bijou que personne n’attendait. Les films de fantasy qui parlent d’imaginaire, de comment raconter des histoires, comment faire rêver sont au final pas si fréquents que cela. Si on met de côté les films de super-héros, les dystopies, les space opéra, on se retrouve avec peu de réalisateurs qui abordent ces sujets. On pense évidemment à Tim Burton, Caro et Jeunet ou Guillermo Del Toro pour leur talent visuel et les mondes qu’ils sont capables de créer. Terry Gilliam est lui le maitre incontesté des univers fous bercés de rêves folie et si Brazil et L’armée des 12 singes sont des dystopies très axées sur le cauchemar, Bandits bandits, Les aventures du Baron de Munchausen, Fisher King et même Las Vegas Parano parlent de l’importance de se créer des univers, de raconter des histoire et de pourquoi on les raconte. Le summum fut L’imaginarium du Docteur Parnassus dont le thème était précisément la force des histoires pour lutter contre l’adversité du monde réel et évidemment L’homme qui tua Don Quichotte qui résume à lui seul l’ensemble de ces thématiques qui ont traversé l’œuvre de ce grand maitre, mon réalisateur préféré car j’aime, j’adore m’évader et me raconter des histoires pour romancer le réel et rendre ce dernier plus supportable. C’est exactement ce que fait George Miller dans « 3000 ans à t’attendre » en érudit des contes et légendes en donnant beaucoup de lui-même dans le rôle interprété par l’une des plus grandes actrices au monde, Tilda Swinton. Elle joue une professeur de narratologie qui vit seule et vit très bien car son imaginaire est foisonnant et elle connait tout du processus d’écriture et de déroulement d’une histoire pour raconter et emporter le public. Et pour que son film devienne méta et forme une boucle ludique, il lui fait rencontrer un génie joué par un Idris Elba qui trouve enfin un rôle à la hauteur de son talent. Les deux vont beaucoup échanger et parler dans une chambre d’hôtel car elle ne souhaite pas réaliser de vœux, elle est bien comme cela. Et c’est plus un exercice psychiatrique sur le Djin, le génie qui va se réaliser, ce dernier racontant son histoire et son passé. On pense immédiatement à la beauté de certains films de Gilliam (Munchausen) ou au magnifique The Fall de Tarsem Singh. Les visuels sont magnifiques, inventifs et vous feront vous évader alors même que vous ne vous accrochez pas à ces personnages très vite dépeints psychologiquement et uniquement au conteur qu’est le Djin. Tout le talent de George Miller dans sa mise en scène de nouveau brillante et diverse, marquée de ruptures et de trouvailles à tout instant, c’est justement de vous emporter d’histoire en histoire et de vous immerger dans ce flot de rêves sans vous perdre et en y aoutant des clins d’œils et doses d’humour qui vont aboutir sur la dernière demi heure en apothéose. Car le film n’est pas qu’un beau livre d’images et s’avère extrêmement doux et émouvant sur sa conclusion, à l’exact opposé de la furie destructrice des Mad Max. On y voit la rencontre de deux solitudes et c’est d’une universalité qui fait décoller le film très très haut. Il est extrêmement rare de voir un film sur l’imaginaire aussi brillant, aussi passionnant, dévaler sur nos écrans. C’est un énorme MERCI que je donne à George Miller pour ce conte philosophique qui m’a fait rêver, sourire et qui m’a ému par son romantisme classe et adulte. Autant de talent et d’intelligence concentrés durant ces deux heures comme ce Djin qui tient dans une petite fiole. Un énorme coup de cœur que ce « 3000 ans à t’attendre » qui s’avère être l’un des plus beaux films de l’année. La piste aux Lapins : 4,5 lapinsN°03 – ExAequo -  »Un monde » de Laura Wandel Un monde - film 2021 - AlloCiné Ce premier film est une réussite totale. Réussir à parler du harcèlement scolaire de façon aussi vibrante est un tour de force qui se repose sur ses jeunes acteurs incroyables, Maya Vanderbeque et Günter Duret mais aussi sur une mise en scène d’une intelligence remarquable. En se mettant à hauteur d’enfant avec les adultes et les enfants harceleurs/bourreaux quasi hors cadre, la réalisatrice nous immerge directement dans la solitude que ressent l’enfant victime ou sa sœur de par l’isolement ressenti. Car au-delà d’être rejeté du groupe d’enfants et mis au ban, on voit toute la difficulté de la victime à parler aux adultes, à exprimer la douleur de peur d’être encore plus rejeté ou encore plus maltraité par les bourreaux. La réalisatrice montre très bien les mécanismes de mini société à l’intérieur de l’école qui s’installent et rend son sujet universel en parlant du fait que dès l’enfance, on apprend la dureté de la vie en société et la réalité de l’existence du mal à l’état le plus sauvage. On voit aussi l’aveuglement des adultes du corps enseignant qui ont tellement de sujets à traiter qu’ils préfèrent regarder ailleurs car n’arrivent pas à gérer un enfant qui ne se défend pas. J’ai moi-même été victime de harcèlement scolaire en sixième et cinquième soit un peu plus tard en âge que l’âge des enfants dans le film. J’ai vécu un enfer durant deux ans d’humiliation permanente, étant tête de turcs de trois ou quatre connards qui avaient besoin de se défouler et de s’unifier contre plus faible. J’étais « différent » car plus sensible, plus rêveur que les autres. J’en ai pleuré et souffert à tel point que ma personnalité en été fortement imprégnée. En adulte de 47ans je vis les petites injustices de la vie avec plus de difficultés car elles renvoient directement à ces blessures-là. Difficile d’avoir confiance en soit après celà, même 34 ans après. Et c’est rare voir inexistant qu’un film aborde ce sujet. Les enfants ne sont pas mignons. Ce sont entre eux potentiellement des monstres sans aucune retenue car ils n’ont aucune morale à cet âge. Parfois çà dure beaucoup plus longtemps. J’ai vu toute la noirceur du monde dans les yeux de ces enfants tortionnaires et je ne peux qu’être extrêmement touché par ce film sensible d’une grande humanité qui vous prend aux tripes par sa justesse et sa simplicité. Pour ma part j’ai mis fin au cauchemar par la violence, à coup de règle en fer sur les doigts d’un de mes tortionnaires, qui pissait le sang, le reste de la classe se mettant de mon côté. Cà aussi ceci m’a forgé en mode viking quand on m’emmerde ou me veux du mal, je frappe, symboliquement parlant. Je ne me démonte jamais pour cette raison, pour le petit bout tout gentil que j’étais et qui s’est fait détruire de cette situation. Mais c’est triste sur la nature humaine, la nature sauvage avant d’avoir des lignes directrices, une éducation, et dans ce Nomad land d’absence de morale qu’est l’enfance, les adultes ont le devoir de surveiller, d’écouter leurs enfants dans leurs non-dits car toutes les histoires  ne finissent pas bien comme la mienne. « Un monde » est un film nécessaire, court (1h10) et brillant par son impact. La piste aux Lapins : 4,5 lapinsN°02- ExAequo -  »As bestas » de Rodrigo Sorogoyen As bestas - film 2022 - AlloCiné Le pitch : Antoine et Olga, un couple de Français, sont installés depuis longtemps dans un petit village de Galice. Ils ont une ferme et restaurent des maisons abandonnées pour faciliter le repeuplement. Tout devrait être idyllique mais un grave conflit avec leurs voisins fait monter la tension jusqu’à l’irréparable… Curieux film que ce As Bestas qu’on n’avait pas vu venir. Soyons clairs dès le départ, c’est l’un des très bons films de 2022 à voir absolument. Marina Foïs et Denis Ménochet sont brillants et prouvent à quel point le cinéma français a de la chance de les avoir, même si ils jouent dans un film espagnol en espagnol ! Rodrigo Sorogoyen avait marqué les esprits avec El Reino, film sur un politicien corrompu lâché par ses pairs et embarqué dans un cercle destructeur sans fin. C’est un nouveau coup de maitre que ce  »As bestas » qui traite d’un sujet rare, le racisme des autochtones d’une campagne reculée, pétrie d’identitarisme, envers des « étrangers ». Le réalisateur utilise son histoire pour en fait tourner deux films en un. Le premier s’intéresse à ce couple confronté à la violence verbale de voisins qui souhaitent qu’ils partent et les harcèlent au quotidien dans une spirale dont on ne connait pas ni la fin ni la forme qu’elle prendra. Face à cet état de fait qu’ils subissent les deux français venus refaire leur seconde partie de vie restent forts, unis entre eux et ne veulent pas abandonner leur rêve, celui de devenir agriculteurs ainsi que les économies d’une vie qu’ils y ont investi. Ce premier film a des accents de thriller et l’angoisse est portée à son comble dans plusieurs scènes choc vraiment marquantes. L’aspect homme fort et brut de Denis Ménochet  est alors essentiel face à cette adversité injuste qu’on ne comprend pas. Et puis le réalisateur fait s’exprimer cette fratrie d’espagnols joués par les très bons Luis Zahera et Diego Anido qu’on trouve indéfendables et rustres et explique la raison de leur haine, de leur jalousie pour ceux qui ont eu une éducation, une chance de réussir alors qu’eux sont restés miséreux. Là le film devient passionnant car sans excuser la stupidité des individus, il l’explique et rend palpable la profondeur de leur ressenti, et la séparation entre les victimes des déserts ruraux et les gagnants de la mondialisation habitant les villes. Le second film lui vire à l’enquête et à la foi en un projet de vie envers et contre tous et à la soif que la vie reprenne un lit juste. La virtuosité du film secoue, étonne par sa puissance. Un grand film. La piste aux lapins : 4,5 lapinsN°02- ExAequo -  »L’innocent » de Louis Garrel  Critique film - L'INNOCENT - Abus de Ciné Quelle excellente surprise que ce 4ème film réalisé par l’acteur Louis Garrel. Le scénario à rebondissements s’avère burlesque et gentiment perché avec une tendresse folle pour ses personnages qui ont chacun vécu une brisure de vue mais qui restent incroyablement vivants et positifs. C’est toute la force de « L’innocent » que de surfer entre comédie rocambolesque et tendresse romanesque et d’aller de l’une à l’autre avec une grande virtuosité. Les acteurs sont excellents de Louis Garrel en jeune homme triste et inquiet qui déclenche le comique de situation sans le vouloir, Roschdy Zem toujours impeccable et ultra crédible en ex taulard au grand cœur à Anouk Grinberg qu’on est tellement heureux de revoir dans un 1er rôle. Une si longue absence pour l’ex de Bertrand Blier qui a manqué au cinéma français de part sa sensibilité, son visage juvénile et taquin et sa petite voix chevrotante. On l’a revue tout récemment dans « La nuit du 12 » mais là elle explose de légèreté et de blessures mêlées, un très beau rôle. Et puis « L’innocent » est irrésistiblement drôle par le personnage farfelu qu’on aime immédiatement et qui est joué par Noémie Merlant. Connue pour des rôles très divers dans « Portrait de la jeune fille en feu » ou « Les Olympiades », elle explose dans le registre comique et fait éclater de rire la salle à plusieurs reprises de par son personnage fantasque et naturel avant de nous cueillir par l’émotion. Louis Garrel a une direction d’acteurs vraiment très réussie qui alliée au rythme du film de casse, à l’aspect comique assumé qui n’oublie pas de nous émouvoir, nous livre l’un des meilleurs films de l’année sans crier garde. Le cinéma français n’est peut-être pas en forme coté box office mais niveau auteurs de talents je suis très positif en sortant de films comme celui ci. « L’innocent » est un film enlevé, très drôle, lumineux et qui donne du baume au cœur de part l’humanité qui s’en dégage avec une simplicité désarmante. Le film fait des étincelles par son énergie, en faisant rire et en analysant avec subtilité le rapport filial et le deuil. Un vrai tour de force. La piste aux Lapins : 4,5 lapinsAND THE WINNER 2022 IS…   N°01-  »Une jeune fille qui va bien » de Sandrine Kiberlain UNE JEUNE FILLE QUI VA BIEN de Sandrine Kiberlain - Cinémas Les 400 coups -  Angers Sandrine Kiberlain, l’actrice, populaire et très douée, a attendu 53 ans pour réaliser son premier film. Elle l’a travaillé longtemps, peaufiné pour qu’il atteigne ce niveau très impressionnant. Car « Une jeune fille qui va bien » est une excellente surprise. On y suit Irène, jeune fille juive, qui vit l’élan de ses 19 ans à Paris, l’été 1942. Sa famille la regarde découvrir le monde, ses amitiés, son nouvel amour, sa passion du théâtre… Irène veut devenir actrice et ses journées s’enchaînent dans l’insouciance de sa jeunesse. Le parti pris de Sandrine Kiberlain est déchirant car plutôt que de jouer sur le pathos, elle appuie sur un humanisme évident, le regard joyeux sur une jeune femme pour qui la vie reste à être découverte, naïve et fraiche, désarmante de beauté et de vie. On comprend vite que çà ne peut pas bien évoluer, que le nazisme arrive à grand pas avec la montée des mesures anti juifs, leur ostracisation par petites touches. Elle y dénonce sans lourdeur comment une société accepte l’intolérable au nom de la tranquillité quotidienne, de la volonté que rien ne bouge. Alors pour ne pas être dérangé on accepte que les propos violents, excluants montent dans le débat public et deviennent la norme. Les individus sont alors aveugles et l’es extrêmes ont le libre champs. Ceci ne vous rappelle rien ? Évidemment le film fait écho à la France d’aujourd’hui qui ne descend plus dans la rue quand l’extrême droite arrive au second tour et qui ne manifeste plus quand un ex chroniqueur d’ultra droite (et tous les autres) squattent le champs médiatique et fédère autour de lui autant de potentiels électeurs par des propos d’une violence inouïe, faisant de l’exclusion le bouc émissaire idéal et çà ne choque plus autant qu’avant parcequ’on s’y est habitués, à force d’entendre cette merde sur les différents médias au même titre que le reste, au nom de la liberté d’opinion et d’expression… Rebecca Marder, André Marcon, Anthony Bajon, Françoise Widhoff sont tous merveilleux de nuances, de simplicité, écrasés par la tournure de l’histoire, juste avant que le sol s’effondre sous eux, qui n’ont rien fait, juste tenté de vivre heureux avec leurs moyens. Le film est glaçant mais curieusement pas du tout durant son déroulé. En effet Rebecca Marder a cette lumière en elle qui fascine le spectateur et nous fait l’aimer immédiatement. Son coté taquin voire lutin nous fait chavirer en même temps qu’on prends conscience toujours avec un décalage d’avance que la situation va s’empirer. Mais elle et sa famille espèrent car l’espoir est parfois la seule chose à quoi se raccrocher. Non, çà ne peut pas arriver. Pas en France, pas ici. La force inouïe du film est que Sandrine Kiberlain choisit de parler de vie, de faire un hymne à la vie et non un gros film pathos de plus. Elle choisit le beau, la lumière de ses personnages pour raconter en creux l’horreur qui va leur tomber dessus. Mais elle ne raconte pas l’horreur, on la connait déjà. Elle est imprégnée dans notre ADN, enfin sauf des nazillons contestant l’histoire. Pas besoin de cela pour être ému. Mais plutôt de l’avant, de cette belle vie heureuse qui les attendait et qui n’a pas eu lieu parceque la haine ne trouvait aucune limite pour continuer à s’immiscer dans les cerveaux. Par de petites scènes, elle montre aussi comment les français moyens, non juifs, n’ont rien fait et ont laissé faire, pas forcément par détestation des juifs mais parcequ’ils ne se sentaient pas concernés. Choisir les couleurs de l’été et les sourires, la vie pour raconter l’inverse qui va arriver, c’est l’idée géniale de Sandrine Kiberlain. En tant que réalisatrice elle trouve de nombreuses trouvailles et situations qui correspondent totalement au personnage d’elle qu’on connait, mêlant le fantasque à des situations du quotidien. « Une jeune fille qui va bien » allie légèreté et gravité dans un film très poignant, qui reste en tête longtemps de par son côté solaire et la force de son message. Un film d’une grande originalité porté par des interprètes merveilleux. La poste aux Lapins : 4,5 lapins    ET DONC POUR LA 13ème ANNEE, LE PODIUM DU BLANC LAPIN : BlancLapin2022

Les meilleurs films du Blanc Lapin 2022 : N°37 à 15

26 décembre, 2022

Comme tous les ans depuis 13 ans, voici le classement des meilleurs films du blanc lapin.

Sur 115 films vus au cinéma ou sortis sur les plateformes en 2022, cette année a été particulièrement riche avec une forte présence du cinéma français, en mal dans les entées en salles mais en très grande forme du point de vue de la production. Le cinéma français est de retour avec de nouveaux talents chez les auteurs et les interprètes.

J’ai sélectionné 40 films qui ont atteint au minimum les 4 blancs lapins sur 5, ce qui signifie que ces 40 films sont très réussis à mes yeux.

16 de ces 40 films sont français ! De grands auteurs internationaux ont livré de très belles œuvres dans ce classement à l’image de Guillermo del Toro avec deux réussites, James Gray, Paul Thomas Anderson, Baz Luhrmann, Park Chan Wook, Joel Coen, David Lowery, James Cameron, Henri Selick.

Voici donc la première partie du classement du N°37 à 15 sachant qu’il y a des ex aequo.

 

N°37-  »The stranger » de Thomas M. Wright

The Stranger - film 2022 - AlloCiné

Disponible sur Netflix

Deux inconnus se rencontrent. L’un va entraîner l’autre dans une vaste et puissante organisation criminelle, lui offrant ainsi la possibilité de se racheter après un passé violent et de prendre un nouveau départ.

Noir c’est noir avec ce thriller aux allures déroutantes et à la thématique somme toute très originale.

Comment s’infiltrer auprès d’un potentiel assassin d’enfant, monstre froid ou original solitaire ?

L’excellent Joel Edgerton joue un flic qui joue aux criminels et tente de percer à jour un suspect de meurtre interprété par l’impeccable Sean Harris, glaçant. Se noue alors une relation amicale assez particulière et virile dans la forme même si le flic joue un rôle. Les frontières entre les personnages se confondent dans la noirceur profonde de laissés pour compte au sein d’une Australie vide d’habitants.

On les voit trainer de ville en ville avec très peu d’interlocuteurs, des immensités géographiques, une musique perturbante un rythme à la fois lent et créant une montée en puissance vers la découverte de la réalité de l’affaire.

Le film rappelle Animal Kingdom et l’abysse du mal dans lequel le flic regarde à travers le regard froid et sans affect de son interlocuteur, qui n’a aucun futur et une identité passée extrêmement floue. On s’attend à tout moment à une montée d’adrénaline et d’hyper violence alors qu’au final le film joue à fond sur un climax pesant et particulièrement réussi.

« The stranger »est un film dérangeant qui montre un personnage inscrutable qu’on ne sait être un monstre sans morale ou juste un paumé sans famille et sans amis qui fait figure de coupable idéal.

Mais c’est vraiment la mise en scène spectrale qui emporte l’adhésion pour cette très grande et surprenante réussite.

La piste aux Lapins :

4 lapins

 

N°36-  »L’origine du mal » de Sébastien Marnier » 

L'Origine du mal - film 2022 - AlloCiné

Dans une luxueuse villa en bord de mer, une jeune femme modeste retrouve une étrange famille : un père inconnu et très riche, son épouse fantasque, sa fille, une femme d’affaires ambitieuse, une ado rebelle ainsi qu’une inquiétante servante.

Après son excellent « L’heure de la sortie » avec Laurent Lafitte sorti en 2019, et qui mélangeait habilement thriller, fantastique et et film écolo, Sébastien Marnier avec un nouveau film également très surprenant. L’affiche dit qu’on est entre Chabrol et De Palma et pour le coup c’est tout à fait cela.

Le réalisateur y installe un climat malsain d’une famille de riches industriels qui se détestent dans une villa luxueuse, Rocabella, que j’ai eu la chance de visiter et qui se prête admirablement a déroulé de l’intrigue.

D’abord on est hyper content de retrouver l’immense et imposant Jacques Weber au cinéma, lui qui a toujours choisi les planches mais qui a une prestance incroyable. Il est parfait dans le rôle de ce père indigne, manipulateur mais affaibli par l’âge dont on ne sait ce qui est vrai ou faux. D’ailleurs le réalisateur joue des faux semblants tout au long du film avec son casting 4 étoiles, de Dominique Blanc qui se régale en menthe religieuse qui cache de profondes blessures, à Doria Tillier en fille d’une dureté et d’une violence dont ne sait si c’est juste du mépris de classe sociale ou de quels secrets elle est détentrice. Chaque personnage est à la fois dépendant de celui qui détient l’argent et avide de s’en débarrasser mais on ne comprend pas comment et pourquoi.

Et au milieu de ce petit jeu de cruautés bien affutées se balade l’innocente héroïne, toujours impeccable Laure Calamy, qui elle aussi va permettre au long métrage d’atteindre un excellent niveau quand le réalisateur décide de nous révéler son effet de manche pour bien booster le final.

« L’origine du mal » est très réussi car il surprend et que si il est sombre, il est surtout très prenant, son déroulé et la capacité du scénariste-réalisateur à nous balader avec efficacité, forcent le respect.

La piste aux Lapins :

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N°35-  »Le sixième enfant » de Léopold Legrand 

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Franck, ferrailleur, et Meriem ont cinq enfants, un sixième en route, et de sérieux problèmes d’argent. Julien et Anna sont avocats et n’arrivent pas à avoir d’enfant. C’est l’histoire d’un impensable arrangement.

Le quatuor formé par les excellents Sara Giraudeau, Benjamin Lavernhe, Judith Chemla et Damien Bonnard est d’une justesse incroyable et vous emporte dès les premières scènes dans ce film d’une très grande finesse.

C’est en ce moment un peu à la mode d’avoir des films qui parlent du désir d’enfant et de femmes qui ne peuvent pas en avoir. Mais l’aborder sous cet angle, un peu comme dans «  Aux champs  », la nouvelle de Maupassant, est particulièrement judicieux.

Car le réalisateur Léopold Legrand va à la fois confronter deux classes sociales mais aussi y apporter de grandes nuances. Si les pauvres qui vivent en roulote sont croyants et contraints par leur incapacité à élever un sixième enfant, leur description est loin d’être caricaturale et leurs questions existentielles confrontées à leur croyance religieuse, à leur sens de la famille et de la fratrie sont très bien transcrits grâce à ses deux super acteurs, Judith Chemla et Damien Bonnard. Avec eux plutôt que face à eux, car justement le réalisateur ne les confronte pas, un couple d’avocats qui marche bien, qui n’est pas richissime mais qui s’en sort très bien et a un avenir financier assuré si bien entendu ils arrivent à bosser autant dans leur secteur respectif.

Benjamin Lavernhe est parfait en homme de droit qui au delà de la morale, ne veut pas s’engouffrer dans une sortie de route et un inconnu qu’il ne maitrise pas.

Sara Giraudeau est quant à elle pafaite de bout en bout dans ce rôle de femme qui décide de transgresser de façon aveugle pour arriver à son but quite à tout risquer.

C’est un premier film très réussi car d’une sensibilité qui ne fait aucun faux pas et ne tombe jamais dans la facilité, ce qui avec un tel thème pouvait arriver facilement. On parle de filiation et d’abandon en même temps et c’est ce qui rend le film très marquant.

Sobre mais poignant, intelligent et sensible, « Le sixième enfant » est une excellente surprise de cette année 2022.

La piste aux Lapins :

4 lapins

 

N°34-  »The Menu » de Mark Mylod

Le Menu - film 2022 - AlloCiné

Un couple se rend sur une île isolée pour dîner dans un des restaurants les plus en vogue du moment, en compagnie d’autres invités triés sur le volet. Le savoureux menu concocté par le chef va leur réserver des surprises aussi étonnantes que radicales…

Le showrunner de l’excellente série « Succession » se met donc à la mise en scène pour cette satyre de la haute gastronomie, de ses codes mais pas uniquement.

En faisant virer l’expérience culinaire à l’horreur d’un chef fou dangereux et vengeur, Mark Mylod va trainer du même côté que la récente palme d’Or « Sans filtre » en se moquant d’une classe sociale qui méprise les faiseurs et déverse son argent avec snobisme pour gouter des plats qui ne veulent au final plus rien dire et qu’ils ne comprennent pas.

L’esthétisation perchée de cette grande gastronomie, amplifiée et démocratisée par les grandes émissions télévisuelles de cuisine prend quelques bon coups de couteaux dans cette farce portée par un excellent Ralph Fiennes, épaulé de deux très bons acteurs, Anya Taylor-Joy et Nicholas Hoult, parfait dans un rôle surprenant.

Le film va de rebondissements en rebondissements et surprend toujours car on s’attend à du sang souvent là où il n’y en n’a pas forcément ou pas comme on le croit, le réalisateur jouant des codes du film d’horreur pour rire du cynisme des hôtes et de leur punition un peu trop forte pour les péchés qu’ils ont fait.

Un très bon divertissement, original dans son propos.

La piste aux lapins :

4 lapins

 

N°33-  »Icare » de Carlo Vogele

Icare - film 2021 - AlloCiné

A voir en Vod – sorti en mars 2022

Sur l’île de Crète, chaque recoin est un terrain de jeu pour Icare, le fils du grand inventeur Dédale. Lors d’une exploration près du palais de Cnossos, le petit garçon fait une étrange découverte : un enfant à tête de taureau y est enfermé sur l’ordre du roi Minos. En secret de son père, Icare va pourtant se lier d’amitié avec le jeune minotaure nommé Astérion. Mais le destin bascule quand ce dernier est emmené dans un labyrinthe. Icare pourra-t-il sauver son ami et changer le cours d’une histoire écrite par les dieux ?

Excellente surprise que cette production européenne qui reprend le mythe d’Icare et du Minautore en y apportant une vraie touche de modernité et de poésie.

Les dessins sont magnifiques et l’animation n’a rien à envier aux mastodontes américains. Surtout, le dessin est très typé et orignal.

Ajoutez à ceci une histoire certes ultra connue mais pas des petits et que se laisse regarder par les grands et vous trouverez une petite pépite d’animaton à découvrir de toute urgence.

L’idée d’agrémenter le tout de musique de Vivaldi est plutôt bien vue

La mélancolie qui se dégage du personnage d’Icare et de son ami le minotaure, cette complicité simple et naturelle donne au film une dimension très touchante.

La violence du récit mythologique reste présente mais laisse curieusement la place à des accents d’une grande douceur qui font naitre l’émotion.

La piste aux Lapins :

4 lapins

 

N°32-  »Wendell And Wild » d’Henry Selick

Wendell et Wild - film 2022 - AlloCiné

Sortie sur Netflix le le 28 octobre prochain
Henry Selick est culte notamment pour son magnifique chef d’œuvre « L’étrange Noël de Monsieur Jack« .
Depuis 2009 et Coraline, le cinéaste est absent.
Netflix lui donne donc l’occasion de produire son nouveau projet après 10 ans d’absence, Wendell And Wild.
Il s’agit bien entendu d’un film d’animation tourné avec la même technique que Mister Jack en stop-motion. Et franchement, c’est hyper classe. Les personnages sont très caractéristiques avec un design vraiment original et animés de façon incroyable. C’est la première grande réussite de ce nouveau long métrage.
Nous suivrons deux frères démons affrontant une nonne et des adolescents gothiques. Le duo comique Key & Peele prêtera sa voix aux deux frères, Jordan Peele, étant au passage le réalisateur du film Get Out.
Et miracle, l’humour des deux scénaristes se marie à merveille avec le gothique du réalisateur et l’imaginaire bourré à plein de ce dernier. L’univers horrifique et macabre en mode Halloween est extrêmement bien réussi et au service d’une histoire qui se tient et se regarde avec intérêt.
Les familiers de Tim Burton ne pourront évidemment qu’apprécier cette petite pépite créative. On parle de plein de sujets comme le deuil, le racisme blanc, l’état du système carcéral aux Etats-Unis, la quête d’identité, y compris sexuelle…balaise pour un dessin animé !
Décors ultra réussis et mise en scène fluide et surprenante,
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N°31-  »Close » de Lukas Dhont

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Léo et Rémi, 13 ans, sont amis depuis toujours. Jusqu’à ce qu’un événement impensable les sépare. Léo se rapproche alors de Sophie, la mère de Rémi, pour essayer de comprendre…

Le réalisateur trentenaire de Girl revient donc cette année et a raflé le Grand Prix du festival de Cannes 2022 après avoir été le chouchou de la croisette pour la Palme d’Or et ému les festivaliers.

Il est vrai que son histoire est bouleversante et tout en retenue, vue du regard d’un enfant qui grandit et perd une amitié fusionnelle, en voulant bien se faire voir des autres enfants et mieux s’intégrer au monde des grands. E n s’attaquant à ce sujet, le réalisateur s’offre à la fois une introspection très originale de l’enfance et de l’impact du regard des autres au moment de l’adolescence mais il ne va pas toujours jusqu’au bout. C’est ce qui rend à la fois son film très réussi car jamais dans l’emphase et un peu frustrant car laissant le spectateur s’imaginer le pourquoi de l’acte terrible qui va déformer sa vie à jamais.

On ne saura jamais vraiment et le réalisateur nous laisse douter. Ceci a agacé certaines critiques qui auraient voulu absolument sexualiser le propos par rapport à une identité sexuelle alors que justement, ce non choix de monter des sentiments clairs pour les deux protagonistes rend CLOSE assez particulier. Certains seront impatients de voir le sujet éclore et être différé, ce que je peux comprendre et ce qui pour moi empêche le film d’atteindre un sommet plus haut.

Léa Drucker et Emilie Dequenne sont parfaites et évidemment mention spéciale aux deux jeunes acteurs, Eden Dambrine et Gustav De Waele.

Les silences, les regards rendent le film subtil mais peuvent agacer aussi en montrant une mise en scène trop réfléchie, et pas si fine que cela. Bien que partagé sur certains aspects, cette histoire de culpabilité tragique et impardonnable qui ne peut pas s’effacer et fauche une jeune vie m’a tout de même suffisamment ému pour vous le recommander. Je comprend simplement que l’œuvre divise.

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N°30-  »Irréductible » de Jérôme Commandeur 

Irréductible - film 2022 - AlloCiné

Le pitch : Vincent Peltier, paisible employé aux « Eaux et forêts » à Limoges, est incité à démissionner à cause d’une révision des effectifs, ce qu’il souhaite le moins du monde. Une inspectrice trop zélée décide de le muter dans les pires endroits au monde pour le pousser à renoncer. Elle l’envoie donc au Groënland pour protéger les chercheurs d’une base scientifique des attaques d’ours. 

Je ne m’étais jamais intéressé à Jérôme Commandeur avant par curiosité et face aux excellents retours de ses derniers spectacles, de tenter de voir son dernier one man show sur Amazon Prime.

Et j’étais mort de rire du début à la fin avec ce talent très particulier qu’a Commandeur de jouer sur sa bouille ronde mais malicieuse pour envoyer des skuds pas politiquement corrects du tout.

Ma curiosité a donc été éveillée en apprenant qu’il avait gagné le prix du meilleur film au festival de l’Alpe d’Huez. Et soyons clairs, sa comédie est très réussie en jouant des clichés du fonctionnaire avec férocité mais sans tomber dans un humour de droite sans nuances, même si Christian Clavier y tiens un rôle de cheminot vraiment féroce.

Gérard Darmon est hilarant à chaque apparition et Commandeur est aussi drôle que sur scène, alternant vannes toutes les 3 minutes maximum et évitant de tomber dans une niaiserie propre à beaucoup de comédies françaises dès lors qu’on sort de la zone de gags.

Jérôme Commandeur a du respect pour son public et a donc signé un vrai scénario avec une vraie histoire tout en nous amenant dans des paysages dépaysants et hostiles histoire de bien martyriser son personnage.

L’humour est vache mais tendre envers les fonctionnaires qui certes se font défoncer mais avec énormément de carricature au 10ème degré, ce qui permet de comprendre assez vite que ce n’est pas une charge mais plus un clin d’œil aux énormes clichés en les alignant tous les uns après les autres.

La qualité d’écriture et l’humour grinçant allié à une mise en scène rythmée, équilibrée sur un film court en longueur font de cet Irréductible une très bonne surprise.

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N°29-  »Coupez ! » de Michel Hazanavicius 

Coupez ! - film 2022 - AlloCiné

Michel Hazanavicius a toujours aimé les cncepts, du détournement des OO7 avec Oss117 à The Artist et son hommage au muet, sa filmographie déborde d’un amour les genres de cinéma et pour la fabrication de ce dernier, avec tout ce qu’elle a de factice assumé.

En adaptant un petit film japonais où un tournage de film de zombies est perturbé par des zombies, il s’essaie à un film méta hyper casse gueule. La première demi heure est un long plan séquence en forme de film Z fauché avec des effets spéciaux tous pourris et une histoire pas terrible. On se prend à avoir peur car malgré quelques sourires on se dit que çà risque d’être long.

Puis Hazanavicius raconte l’avant et la préparation avec un film plus construit et plus drôle puis dans une 3ème partie de vrai tournage avec l’envers du décors et la prouesse technique de la première demi heure « en direct ».

Et là le film devient hilarant et les deux premières parties trouvent leur entière justification.

Ce procédé n’a rien de révolutionnaire mais il est non seulement original et rend un superbe hommage aux techniciens de petits films fauchés qui se démerdent avec trois fois rien pour créer de la magie.

Et raconter de façon aussi comique les dessous de la fabrique est une excellente idée donnant un très bon film, surprenant.

Romain Duris, Bérénice Bejo et Finnegan Oldfield sont excellents de bouten bout.

Une très bonne surprise.

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N°28-  »A plein temps » de Eric Gravel

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Julie se démène seule pour élever ses deux enfants à la campagne et garder son travail dans un palace parisien. Quand elle obtient enfin un entretien pour un poste correspondant à ses aspirations, une grève générale éclate, paralysant les transports. C’est tout le fragile équilibre de Julie qui vacille. Elle va alors se lancer dans une course effrénée, au risque de sombrer.

Laure Calamy est véritablement impressionnante de nuance dans ce film social construit comme un quasi thriller, avec suspens et montée de tension au fur et à mesure que les emmerdes et les problèmes sans solutions évidente qui se dressent sur sa route.

En mère courage qui tente de joindre les deux bouts et d’élever seule ses enfants tout en travaillant hyper loin de chez elle, Laure Calamy trouve son meilleur rôle, pour lequel elle mériterait un autre César.

Eric Gravel a l’intelligence de ne jamais pointer du doigt les grévistes qui bloquent le pays et les transports et précipitent cette femme dans la détresse et la misère sociale par l’effet indirect de leur action. On ne peut pas dire qu’il leur fait franchement de la pub mais en ne portant aucun jugement et ne faisant que constater l’impact sur les plus pauvres, les travailleurs pauvres qui dépendent des transports en commun, le réalisateur parle d’une France dont on parle finalement assez peu. On voit les salariés qui luttent en entreprise contre des plans sociaux, qui manifestent contre telle ou telle loi mais on voit rarement ces invisibles qui font de petits boulot et n’ont pas d’autre choix que de vivre en dehors des grandes agglomérations où ils travaillent et pour lesquelles ils n’ont pas de véhicule pour s’y rendre car c’est trop cher. Ces victimes indirectes d’une autre franche de la population qui défend ses droits sans s’interroger sur les effets induits, prise en sandwich entre des travailleurs du public et des patrons pour lesquels ce n’est pas le sujet puisqu’il ont d’autres candidats interchangeables pour les remplacer.

Et puis le réalisateur parle du déclassement social avec cette femme qui a fait des études longues, a exercé un travail de cadre sup et par un accident de la vie, un divorce et de l’alcoolisme (on ne sait pas dans quel ordre) a vu tout se dérober sous ses pieds. Et les mauvaises nouvelles s’accumulent mais elle résiste et tient.

Cette course contre la montre qui donne le rythme au film est une idée excellente car elle tient en haleine de bout en bout et nous immerge immédiatement dans ce quotidien cauchemardesque.

Le film social qui a eu ses heures de gloire dans les années 90 et 2000 en Angleterre avec Stephen Frears, Mike Leigh ou Ken Loach, et en Belgique avec les frères Dardenne, est en train de devenir un genre de très haute facture en France.

L’image de cette société bruyante, stressante, axée sur l’immédiateté et le productivisme sans aucune compréhension pour les évènements exogènes, est réellement flippante.

Un film féministe de par le combat qu’il montre de tant de femmes célibataires avec enfants qui doivent gérer l’impossible.

La réussite vient surtout de l’absence de démonstration morale, de discours plombant en filmant juste des faits qui s’empilent et l’enlisement qui s’en suit.

Et pourtant le film reste lumineux grâce à son actrice, qui joue une femme qui garde espoir et se bat et ne lâche pas. Un très bon film.

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N°27-  »Avatar, la voie de l’eau » de James Cameron

Avatar 2 : la voie de l'eau - AlloCiné

Avatar la voie de l’eau est une réussite de par ses effets spéciaux vraiment bluffants et une mise en scène de haut niveau de James Cameron.

On retrouve tout le luxe de détails qui faisait la force du 1er volet avec un monde crédible qu’on va explorer davantage, dans les fonds marins.

C’est souvent de toute beauté et plutôt poétique, antimilitariste et anti colonisateurs comme le prédécesseur d’il y a 12 ans.

Et puis Cameron véhicule des messages écologiques et animalistes avec lesquels on aurait du mal à ne pas adhérer.

C’est peut être là la limite du film. Il est trop bienveillant, trop lisse dans ses messages pour acquérir le charme qui en ferait un excellent film. Évidemment les effets spéciaux sont au service d’une histoire efficace, bien menée, avec des scènes d’action hyper bien réalisées, des personnages secondaires plutôt bien écrits et une grande aventure. Et puis surtout on arrive à plonger dans ce film avec des géants bleus et trouver cela crédible pendant 3 heures!

Mais pour moi il manque un petit quelque chose, une poésie qui s’associerait à une sorte d’artisanat, de carton pate qui la est totalement lessivé par le digital. Ca manque de chien. Bon c’est sur y a plein de bébêtes colorées mais il manque quelque chose car à trop vouloir en mettre plein la vue à l’écran, à trop mâcher le travail de nos cerveaux en déversant ce contenu sencé nous faire nous évader, on oublie la suggestion.

Et parfois de pas montrer et laisser imaginer ceci laisse un effet bien plus fort et personnel, Avatar 2 est donc plus réussi que le 1er mais ce n’est pas ma came. Je préfère la roulotte du Parnassus de Gilliam, bourrée d’imperfections et de trop plein d’idées à cette histoire très lisse et très peu surprenante. C’est très bien fait, c’est un travail sincère et honnête mais voila, le supplément d’âme n’a pas encore réussi à être recréé avec la technologie…

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N°26 ex aequo- « Glass Onion : une histoire à couteaux tirés » de Rian Johnson

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Avec Daniel Craig, Edward Norton, Janelle Monáe, Dave Bautista
Voici donc la suite du succès surprise 2020 « A couteaux tirés« , film totalement inspiré des whodunit d’Agatha Christie et réalisé par Rian Johnson, à qui l’on doit le très décrié 8ème film de Star Wars , Les derniers Jedi, pourtant le plus original de la dernière triste trilogie.
Netflix a déboursé la bagatelle de 400 M$ pour s’offrir une franchise à succès avec Daniel Craig en enquêteur un peu vieux jeu, toujours un peu à côté de la plaque et gaffeur.
Comme dans le précédent, Craig est trè sà son aide mais son rôle est moins porté sur le comique et il s’avère plus fin stratège.
Face à lui, Dave Bautista et surtout l’excellent et trop rare Edward Norton, cabotinent pour notre plus grand plaisir dans ce Cluedo géant et luxueux à multiples rebondissements.
Le scénario est très bien ficelé, fait de flashs backs comme dans le 1er mais avec plus de virtuosité et un plaisir régressif coupable assumé.
Un très belle réussite, meilleure que son prédécesseur et idéal pour terminer 2022 dans un festival de surprises et d’habileté. Les trouvailles sont nombreuses pour vous faire sourire et çà marche.
Pari réussi.
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N°26 ex aequo-  »Tout le monde aime Jeanne » de Céline Devaux

Tout le monde aime Jeanne - film 2022 - AlloCiné

Tout le monde a toujours aimé Jeanne. Aujourd’hui, elle se déteste. Surendettée, elle doit se rendre à Lisbonne et mettre en vente l’appartement de sa mère disparue un an auparavant. À l’aéroport elle tombe sur Jean, un ancien camarade de lycée fantasque et quelque peu envahissant.

Blanche Gardin, Laurent Lafitte et Maxence Tual forment un trio absolument charmant et iconoclaste dans cette surprise de la rentrée, à la fois tendre et très drôle qui aurait pu virer au film anecdotique.

Il faut dire que le rôle est écrit pour Blanche Gardin en mode dépressive désabusée qui gère ou plutôt ne gère pas ce qui lui arrive. Le concept de départ de la raison de sa dépression est à la fois très drôle (l’échec d’un prototype d’appareil écologique assez lunaire) et relevant de l’intime avec le suicide d’une mère froide et pas tendre du tout.

Et c’est un peu le ton général du film qui oscille entre cynisme et humour un peu perché voire rêveur.

Laurent Lafitte trouve un de ses plus beaux rôles dans cet homme cassé aussi par la vie qui choisit l’humour et la désinvolture pour survivre et surnager.

La plupart de ses interventions sont vraiment très drôles. Et enfin l’idée de la réalisatrice d’ajouter un frère tout aussi gentil et perché interprété par Maxence Tual, est excellente car elle donne un contrechamp au duo d’acteurs principaux et de très beaux moment tendres et légers.

Son autre concept qui est d’avoir dessiné un personnage représentant ce que pèse et ressent Jeanne est hyper casse gueule. A la vue de la bande-annonce j’avais très peur du résultat de ces dessins-animés alternant les scènes et dessinés par la réalisatrice elle-même, Céline Devaux.

Et bien au final çà prend même si j’aurais préféré un peu moins d’incartades mais en général ces évasions sont drôles et enlevées ou au contraire apportent du relief au personnage de Jeanne en exprimant la tristesse ou le manque qu’elle ressent. C’est donc bien vu.

Le film est une très belle réussite, drôle et tendre avec des personnages hyper attachants.

C’est assez rare dans le cinéma français pour mériter de le relever ! Un film qui a une vraie identité, une fantaisie et une belle originalité.

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N°25-  »The Green Knight » de David Lowery

 

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Sortie le 3 janvier sur Amazon Prime

David Lowery est l’un des réalisateur que je suis de très près car j’ai adoré « Les amants du Texas » et « A ghost Story » ou « The Old Man and The Gun », qui a marqué le dernier film de l’immense Robert Redford comme acteur.

« The Green Knight » est une adaptation d’un conte anglais où Sir Gauvain, chevalier de la table ronde, relève un défi que lui lance Le Chevalier Vert. Le curieux chevalier demande à ce qu’on le décapite. Contre cet « essai », il aura le droit lui aussi de tenter de décapiter le candidat un an plus tard. Sir Gauvain accepte et quitte son royaume un an après pour rejoindre Le Chevalier Vert.

Dev Patel incarne le rôle principal aux côtés de Alicia VikanderSean Harris et Joel Edgerton.

Disons le d’entrée, le film n’est pas facile d’accès en raison de choix radicaux du metteur en scène. D’abord il n’explique pas par un luxe de dialogues descriptifs qui est qui. On devine que le roi est Arthur par exemple et jamais son nom n’est prononcé. David Lowery invite donc le spectateur à se concentrer pour comprendre ce qui est très bien explicité mais pas présenté en énormes lettres.

Ensuite le réalisateur opte pour une certaine lenteur qui va rebuter une bonne partie du public et le laisser sur le côté. On aime « The Green Knight » ou on le trouve chiant à mourir. C’est ce genre de film qui demande l’effort de s’immerger pour aimer.

Mais lorsque l’on fait cet effort, le résultat est très très bon.

Les images de Lowery et les effets spéciaux sont sublimes et sa vision de la légende arthurienne la plus novatrice et originale depuis Excalibur.

La lenteur est en fait là pour créer une situation quasi hypnotique par rapport aux somptueux décors et mettre en relief cet homme qui veut se créer une image, une histoire alors qu »il est lâche et couard et n’a son titre que parcequ’il est le neveu d’une légende.

Et tout le film va traiter de cette parabole d’un homme médiocre qui souhaite s’acheter une conduite pour mériter de siéger à la table ronde, au milieu de ces vieux chevaliers tous aussi célèbres les uns que les autres. Sauf qu’on est dans la fin d’un monde. Les exploits des chevaliers est derrière, loin derrière et David Lowery se moque en partie de notre société de l’image et du storytelling personnel d’instagrameur en adaptant cette sous histoire des légendes arthurienne. Il en tire d’ailleurs une morale à double fond excellente à la fin.

Le personnage n’a pas tellement de morale, il négocie son aide et n’a rien de chevaleresque, y compris avec la prostituée qui l’aime. Les épreuves qu’il traverse prennent tout leur sens dès lors qu’on comprend dès le début qui est ce personnage.

On va donc croiser des bandits, un fantôme, un renard qui parle, des géants dans une scène fascinante ou un château irréel perdu au milieu des bois.

Le film est donc extrêmement réussi et exigeant mais il est loin des codes d’Hollywood d’aujourd’hui et prend son temps pour atteindre un impact bien plus fort qu’un simple film de capes et d’épées. Là où aujourd’hui le divertissement est roi et l’action est indispensable pour remplir le vide scénaristique, ici le réalisateur assume qu’il n’y a pas 15 000 actions à la seconde et qu’il va falloir prendre le temps de réfléchir au parcours du personnage. La magie opère alors avec force à tel point que si vous aimez, vous repenserez au film pendant plusieurs jours tellement il est marquant et original.

On voit rarement un tel acte nihiliste dans un film, porté avec autant de recul sur le temps qui passe, la mort et les enjeux d’une vie réussie. Un film visuellement somptueux et philosophiquement profond.

C’est très rare, d’autant plus dans ce style de film tourné sur l’imaginaire et le conte.

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N°24-  »The Tragedy of MacBeth » de Joel Coen 

How to Watch The Tragedy of Macbeth - Grounded Reason

Joel Coen réalise son premier film véritablement en solo sans son frère Ethan Coen.

Joel a certes été crédité seul sur certains de leurs chefs d’œuvre mais ils se partageaient en réalité les postes de scénariste et réalisateur sur chaque projet. Et c’est Shakespeare qui va les séparer le temps d’un seul film espérons le.

Joel Coen adapte donc MacBeth avec Denzel Washington et Frances McDormand.

Orson Welles, Roman Polanski et Justin Kurzel ont tous adapté la pièce, les deux premiers avec brio, le dernier de façon plus contrastée.Mais c’est sans doute Le château de l’Araignée d’Akira Kurosawa qui demeure la meilleure adaptation de la pièce.

Frances McDormand a joué très jeune du théâtre et adore Shakespeare. Or elle est la femme de Joel Cohen depuis 35 ans…On lui doit des rôles fabuleux chez les Coen dans Sang pour sang, Arizona Junior, Miller’s Crossing, Fargo (Oscar de la meilleure actrice), The Barber, Burn After Reading. Elle a aussi été excellente chez d’autres dans Mississippi Burning, Short Cuts de Robert Altman, Lone Star de John Sayles, Presque célèbre de Cameron Crowe,  This Must Be the Place de Paolo Sorrentino,  Moonrise Kingdom de Wes Anderson, et Three Billboards : Les Panneaux de la vengeance de Martin McDonagh, qui lui vaudra son second oscar de meilleure actrice et Nomadland de Chloé Zao qui vient de lui permettre de remporter un 3ème Oscar.

Une fois encore elle est au diapason et Denzel Washington, qui est un bon acteur à la carrière franchement pas terrible, trouve enfin un rôle à la hauteur de son talent.

Joel Coen choisit l’abstraction plutôt que des scènes de bataille grandiloquentes et ramasse son film sur 1h45 pour éviter tout temps mort.

Alors certes c’est en noir et blanc mais d’une beauté sublime qui fait penser à The Barber, l’autre film que Joel a réalisé seul.

Le dispositif est volontairement minimaliste avec des décors superbes rappelant rappelant l’origine théâtrale. Mais cet écrin permet au texte de William Shakespeare d’être déclamé dans son entièreté et la puissance qu’on lui connait. Ce choix accentue le cauchemar limite surréaliste dans lequel les protagonistes se sont enfermés et jetés par pure vanité et ambition.

Macbeth illustre ce venin qui rend les hommes fous de pouvoirs quitte à renier tous leurs principes, à commettre l’irréparable et à descendre moralement aux enfers sous le poids de la culpabilité d’avoir mal agi ou la paranoïa qu’un autre tout aussi avide de pouvoir vole la couronne une fois installé.

Le réalisateur culte, le maitre Coen livre un excellent opus, loin de ce qu’on pouvait attendre de lui, un hommage à l’expressionnisme allemand assez fascinant.

Le jeu d’acteurs est sublimé par sa mise en scène et ses effets sombres. Car il joue de ce noir et blanc et de ces décors irréalistes pour assoir la noirceur de plus en plus grande qui envahit les personnages. Le seul bémol est l’absence de grain de folie qui caractérise pourtant tant de film des frères Coen. Ici le sujet traitant de folie aussi, le réalisateur préfère rester d’une grande sobriété, ce qui peut rebuter certains alors qu’un souffle d’originalité sur la mise en scène aurait rendu le résultat plus grand public. Après les Coen utilisent la folie et l’absurde par l’humour, ce qui ne se prête pas du tout à la pièce de Shakespeare. C’est peut être cette peur de sonner faux qui a incité Joel Coen à jouer la prudence. Le résultat est donc très bon mais il manque un je ne sais quoi pour qu’il atteigne une marche plus haute.

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N°23-  »Couleurs de l’incendie » de Clovis Cornillac

Couleurs de l'incendie - film 2022 - AlloCiné

Février 1927. Après le décès de Marcel Péricourt, sa fille, Madeleine, doit prendre la tête de l’empire financier dont elle est l’héritière. Mais elle a un fils, Paul, qui d’un geste inattendu et tragique va la placer sur le chemin de la ruine et du déclassement. Face à l’adversité des hommes, à la corruption de son milieu et à l’ambition de son entourage, Madeleine devra mettre tout en œuvre pour survivre et reconstruire sa vie. Tâche d’autant plus difficile dans une France qui observe, impuissante, les premières couleurs de l’incendie qui va ravager l’Europe.

Cette suite de « Au revoir là-haut » peut se voir sans avoir visionné le film d’Albert Dupontel. Bien sûr, Clovis Cornillac n’a pas le talent et la folie de mise en scène d’Albert mais son film est très réussi. Tout simplement parcequ’il utilise avec beaucoup d’intelligence le second livre de la trilogie des Enfants du désastre de Pierre Lemaitre. La fresque qu’il nous propose est limpide en terme de déroulé tout en restant foisonnante de détails et rebondissements.

Le livre est tellement bon qu’en en tirant un bon scénario et avec une mise en scène classique et d’excellents acteurs, Cornillac nous livre un très bon film en costumes, grand public de qualité. On y parle d’après guerre période années 30 et du glissement insidieux d’une partie de la bourgeoisie vers la catastrophe qui se structure déjà du côté allemand. Le film est même féministe à sa façon et relativement jouissant par son déroulé.

Les personnages de Léa Drucker et Clovis Cornillac sont des vengeurs de bande-dessinée qui donnent au film un air frais et drôle au milieu d’un désespoir et d’une noirceur de l’âme humaine peu réjouissantes. Mais la bande qu’ils forment, un peu comme celle d’Au revoir là-haut donne du peps et des moments très cinématographiques face de sombres personnages interprétés avec délice par Benoît Poelvoorde,Olivier Gourmet ou Jérémy Lopez.

Les décors sont au rendez-vous et vous immergent dans une histoire au rythme qui ne vous lâche pas du début à la fin et rappelle ce talent incroyable de Pierre Lemaitre pour croquer des personnages à fort impact dans un contexte historique ultra documenté.

Fanny Ardant est fabuleuse dans son rôle ambigu à souhait entre ange gardien et monstre effarant.

Du grand spectacle ambitieux et de l’action de qualité aux services d’un scenario malin et d’acteurs au top, franchement ce serait dommage de rater « Couleurs de l’incendie« , en espérant que « Miroir de nos peines« , le 3ème volume, fasse également l’objet d’une adaptation.

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N°22-  »The Batman » de Matt Reeves

CINEMA : The Batman, 2 nouvelles affiches somptueuses dévoilées -  GAMERGEN.COM

Robert Pattinson s’est efforcé après la série de films Twilight, mauvaise mais bankable de construire une filmographie exigeante chez David Cronenberg (CosmopolisMap to the stars), chez l’excellent David Michôd dans le non moins excellent  »The Rover« , dans le  « Life » d’Anton Corbijn, « The Lost City of Z » de James Gray ou le plutôt réussi « Good Time » ou l’excellent « High life » de Claire Denis. Sa filmographie est donc exigeante et commence à avoir une sacrée gueule.

Il est le nouveau Batman et il est très bon, immédiatement crédible. Il faut dire que les scénaristes ont eu deux excellentes idées à propos du personnage. La première a été de lui donner un côté nihiliste de mec reclu et névrosé, vengeur la nuit mais qui n’a pas une très haute opinion de l’âme humaine, avec Nirvana en fond sonore pour bien appuyer l’idéologie du personnage. La seconde est de l’avoir ancré dans la fin de sa deuxième année d’activité. Il fait donc de nombreuses erreurs et se plante parfois, il est plus humain que les précédentes itérations du cape crusader.

Enfin la troisième idée géniale est de donner un ton ultra réaliste comme l’avait fait Christopher Nolan mais sous un angle totalement nouveau. Là où Nolan étant imbibé du monde terroriste et des dangers post 11 septembre avec des méchants tous dans cette optique de destruction, Matt Reeves choisit une autre voie réaliste.

Fort de ses succès sur les deux derniers films « La planète des singes » ou de Cloverfield, le réalisateur utilise son talent de mise en scène indéniable et la noirceur du propos pour nous livrer un vrai film d’enquête sur un tueur en série, façon Zodiac.

Le Riddler joué par Paul Dano (There will be blood et Little Miss Sunshine), est effrayant à souhait à l’opposé du cabotinage insupportable de Jim Carrey dans le très mauvais film de Shummacher. Là le personnage est réellement effrayant et sa folie n’a d’égale que la perversité de son jeu de pistes. L’ossature du film s’articule donc autour d’un film très référencé au travail de David Fincher sur Seven et Zodiac et il y a pire comme comparaison.

Le résultat est le film Batman le plus sombre, à mille lieues du cartoon gothique de Tim Burton, du Batman SF de Zack Snyder ou du Batman rédempteur de Christopher Nolan.

Avoir choisi de rajeunir le personnage sans expliquer son origin story et le meurtre des parents déjà vu et revu est une très très bonne idée. Elle permet à Jeffrey Wright de rentrer dans la peau du célèbre commissaire Gordon sans se coltiner tout l’explicatif du rapport avec Batman.

Andy Serkis joue un Alfred bien plus paternel et proche de Bruce Wayne et donne lieu à l’une des plus émouvantes scènes du film.

Zoë Kravitz (Mad Max, Les animaux fantastiques) fait l’exploit en Catwoman, de faire oublier la prestation de Michelle Pfeiffer dans Batman le Défi ! Car comme son personnage est plus et mieux écrit, plus sombre aussi et moins cartoonesque, on ne peut pas les comparer. Mais sa partition est très réussie.

Colin Farrell a très peu de temps à l’écran en Pingouin, antagoniste culte auquel Danny DeVito avait donné ses lettres de noblesse mais il marque le film pas seulement parcequ’il est méconnaissable mais parceque lui-aussi n’est pas au sommet de sa carrière de criminel, qu’on verra dans une série HBO Max où il reprendra son rôle.

John Turturro complète ce casting très intelligemment constitué, en mafieux Carmine Falcone et apporte comme d’habitude son immense talent pour jouer la duplicité et la violence du personnage.

Matt Reeves impose donc le respect en se réappropriant une icône pour laquelle de très bonnes adaptations ont déjà été produites (ce qui n’est pas le cas de tous les super héros). Mais il le fait à contre courant de ses illustres prédécesseurs en mixant la cultissime Bd « Batman year One« , le film noir de gangters et les références fincheriennes sans oublier l’action et sans oublier l’émotion, bien plus présente que dans les autres films.

Les acteurs sont tous au diapason et on sent le travail d’orfèvre bien fait et très respectueux du public pour livrer un film différent.

Faire du neuf avec des personnages aussi célèbres et tellement de fois adaptés était le grand enjeu du film, base d’une nouvelle trilogie probablement. C’est un pari tenu de bout en bout. Respect total.

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N°21-  »Vesper Chronicles » de Kristina Buozyte, Bruno Samper 

Vesper Chronicles - film 2022 - AlloCiné

Le pitch  Dans le futur, les écosystèmes se sont effondrés. Parmi les survivants, quelques privilégiés se sont retranchés dans des citadelles coupées du monde, tandis que les autres tentent de subsister dans une nature devenue hostile à l’homme.

Onn’a vraiment pas vu venir ce film de science-fiction européen tourné en lithuanie avec des moyens modestes et qui s’avère une excellente surprise de cette été 2022.

Non seulement le film est original de par son univers immédiatement crédible mais il traite d’écologie avec beaucoup d’intelligence.

Le premier sentiment est d’être devant un film ultra maitrisé, aux effets spéciaux dosés pour être impactants et rendre cette faune sauvage dénaturée par l’homme aussi dangereuse que surprenante et parfois poétique.

On s’imagine très bien l’homme être assez con pour en arriver là.

Évidemment « Vesper Chronicles«   utilise des ressorts connus de la SF autour de riches humains s’étant protégés du chaos et traitant les autres en vassaux mais plutôt que d’aller dans l’affrontement, le film préfère raconter un quotidien et y insérer du suspens et de l’aventure avec de très nombreuses surprises de scénario.

Le méchant n’est pas caricatural, il est ambivalent à chaque instant.

Kristina Buozyte et Bruno Samper ont su distiller du merveilleux dans un film post apocalyptique mélancolique et vraiment novateur.

L’univers riche du film, qui fourmille de bonnes idées fait de ce film un des musts à voir cette année !

La piste aux lapins :

4 lapins

 

N°20-  »Les Nuits de Mashhad » de Ali Abbasi

Les Nuits de Mashhad - film 2022 - AlloCiné

Le pitch : Iran 2001, une journaliste de Téhéran plonge dans les faubourgs les plus mal famés de la ville sainte de Mashhad pour enquêter sur une série de féminicides. Elle va s’apercevoir rapidement que les autorités locales ne sont pas pressées de voir l’affaire résolue. Ces crimes seraient l’œuvre d’un seul homme, qui prétend purifier la ville de ses péchés, en s’attaquant la nuit aux prostituées.

Danois d’origine iranienne, Ali Abbasi signe un petit chef d’oeuvre en racontant un fait divers qui s’est passé lorsqu’il était adolescent en Iran.

La brutalité du film tient au fait qu’il suit en parallèle le serial killer et la femme journaliste qui enquête sur les meurtres.

On voit le meurtrier dans son quotidien et la folie qui le gangrène par fanatisme religieux autant que par trouble mental. Mais Ali Abbasi nous fait froid das le dos quand la population se met à soutenir le serial killer et justifier ses aces au nom du Coran. Là le fil bascule dans un puits sans fond où plus rien ne rattache à la morale.

Pour donner de l’ampleur et contre point dans ce polar sombre, le réalisateur utilise une journaliste féministe, en opposition avec le pouvoir en place et rebelle systématiquement jusqu’à la limite. Elle enquête à ses risques et périls dans un monde machiste où la femme n’a aucun droit et où on trouve normal et sain de « nettoyer » la ville de ses prostituées qui font honte au prophète et qui ne valent rien. Leur vie n’ayant pas de valeur, on peut donc les massacrer impunément voire porter aux nues en héros le tueur en série. C’est à la fois affligeant et choquant mais terriblement bien amené.

Car Zar Amir Ebrahimi, prix d’interprétation à Cannes cette année pour ce rôle, est non seulement brillante dans son jeu mais son personnage est confronté à la puissance masculine dans toute l’oppression qu’on peut facilement imaginer sans barrière et totalement décomplexée.

Et par petites touches, apparait l’hypocrisie du régime et de ses codes. Les représentants du régime font bonne figure devant les journalistes mais leur état moral est tout aussi abimé que celui du tueur ou de la population qui le comprends et le porte aux nues.

La dénonciation de la violence envers les femmes ne pouvait pas trouver écho plus impactant que « Les Nuits de Mashhad » , film absolument urgent à voir tant pour son propos que sa mise en scène sobre et efficace et le jeu d’acteurs irréprochable.

 

N°19-  »Decision to leave » de Park Chan Wook

Decision To Leave - film 2022 - AlloCiné

Park-Chan Wook est l’un des trois grands maitres sud-coréens des vingt dernières années. « Sympathy for Mr Vengeance », « Lady Vengeance », « Old Boy », « Thirst » et « Stoker » ont jalonné une filmographie sous le signe de la violence. « Mademoiselle » marquait son retour brillant en 2017.
Decision To Leave suit un officier de police qui enquête sur la mort suspecte d’un homme survenue au sommet d’une montagne. Son suspect n’est autre que la femme de la victime.
Comme à son habitude Park Chan Wook use d’un scénario retord et d’une mise en scène que Sir Alfred Hitchcock n’aurait pas renié. D’ailleurs les clin d’œil à Vertigo sont nombreux, au premier rang duquel le fait que l’enquêteur va tomber dans une passion amoureuse pour son principal suspect.
Si comme toujours il nous réserve des rebondissements à tiroirs, pour la première fois la manipulation de personnages par d’autres laisse le champs à de vrais sentiments voir à une poésie qui se dégage de la relation de chat et souris qui s’installe entre les deux personnages.
Decision to leave est un très bon Park Chan Wook mais il doit se mériter. Ce n’est pas un film aimable au premier abord. Le film commence doucement et il faut clairement s’accrocher les 15 premières minutes et rester concentré par la suite afin d’entrer dans le luxe de détails que nous offre le cinéaste. Quelque part il adapte son style à une grande histoire d’amour impossible et tragique.
Mais là où Mademoiselle traitait de passion lesbienne avec humour et rythme, Decision to leave délaisse l’action au profit du jeu de miroirs entre ce que pense le flic, ce que perçoit sa cible et pas forcément avec la même temporalité. A savoir que Park Chan Wook va nous renvoyer sur des scènes du début du film ultérieurement et construire peu à peu la toile implacable de son récit. Alors certes c’est son style et il l’a déjà fait. Mais là c’est davantage fragmenté et presque plus fin. Le prix de la mise en scène obtenu à Cannes cette année est totalement justifié de part l’orfèvrerie du résultat.
Le principal risque pour le spectateur est d’être perdu au départ et de décrocher d’où la nécessité de tenir suffisamment pour entrer dans ce dédale assez excellent. On vient pour un polar et on repart avec un sentiment plus confus et tragique.
Park Chan Wook reste l’un des plus grands réalisateurs au monde et prouve avec Decision to leave qu’on peut encore compter sur lui pour nous surprendre par sa sophistication, son thème et l’effet à long terme du film dont les images restent.
N°18-  »Nitram » de Justin Kurzel 

Nitram en DVD : Nitram DVD - AlloCiné

Sorti le 11 mai 2022

Son Nitram s’intéresse à la tuerie de Port-Arthur en Tasmanie, en 1996. Le film a marqué Cannes 2021 et son jeune acteur, Caleb Landry Jones est reparti avec le prix d’interprétation !

Alors a priori, çà peut vous rebuter de vous colleter un film de 1h50 sur une tuerie de masse. Et très honnêtement, je ne me suis pas précipité en salles pour le voir car le thème me déprimait grave, alors qu’il en faut pour me déranger. Juste que le côté glauque du pitch ne m’ »incitait pas. L’erreur est réparée fort heureusement car Nitram est excellent et se regarde très facilement.

La raison est simple.  Justin Kurzel s’intéresse sur 10 minutes à la tuerie et sur 1h40 à comment le personnage en est arrivé là. Il nous raconte l’histoire vraie d’un trentenaire australien ayant de gros soucis psychologiques et dès lors du mal à s’intégrer, sans amis, vivant chez papa maman morts d’inquiétude et étant incapable de réprimer ses crises d’hystérie à la limite de la folie.

Le film est à la fois perturbant car il ne quitte jamais son anti héros de vue et il ne juge pas, il fait juste des constats. Ce paumé puceau qui n’a pas eu droit à une vie normale de par son handicap est au final enfermé en lui-même et on comprend les ruptures de vie qui psychologiquement vont l’amener à perdre le peu de raison et d’affect qu’il a pour commettre un crime horrible.

Caleb Landry Jones est en effet remarquable de bout en bout et mérite amplement son prix d’interprétation cannois. Son Nitram est flippant car incontrôlable et peut partir en vrille à tout moment mais malgré cet affect très particulier, on arrive non à s’identifier mais à comprendre le milieu social dans lequel il évolue, milieu pauvre, l’injustice qu’il subit et qui va déclencher l’acte, l’histoire d’amour folle qu’il va vivre et qui là aussi va se rompre d’un coup.

L’histoire est assez incroyable quand on pense que c’est une histoire vraie et le rebondissement qui y est liée, qui est horrible puisqu’il aboutit à la tuerie, est juste hallucinant.

On comprend pourquoi le réalisateur s’est attaché à raconter cette histoire qui rend le film à la fois perché, triste et d’un déterminisme absolu puisqu’on connait la fin dès le début.

Un film assez bouleversant car le personnage est enfermé de par son psychisme dans une vie à part alors qu’il voudrait être normal et c’est ce qui va l’amener à tuer ce qu’il ne peut pas être. Glaçant et fascinant à la fois.

 

N°17-  »Le Lycéen » de Christophe Honoré 

Le Lycéen - film 2022 - AlloCiné

Lucas a 17 ans quand soudain son adolescence vole en éclats. Avec l’aide de son frère, monté à Paris, et de sa mère, avec qui il vit désormais seul, il va devoir lutter pour apprendre à espérer et aimer de nouveau.

Je n’aime pas tous les films de Christophe Honoré. Son côté très libertin me gave parfois et ses pauses de cinéastes très en admiration devant la nouvelle vague peuvent m’agacer. Et puis des fois c’est excellent comme » Les chansons d’amour » ou « Plaire, aimer et courir vite« .

Avec « Le Lycéen« , on est plutôt dans cette catégorie où le réalisateur provoque moins et s’intéresse davantage à ce que ressent le personnage et son entourage qu’à ce qu’il ressent en dessous de la ceinture. Le réalisateur nous parle de deuil, en hommage à son père disparu et transpose l’histoire avec une mère jouée par l’excellent Juliette Binoche, le grand frère joué avec un décalage triste par Vincent Lacoste et le héros donc, ce jeune de 17 ans joué par la révélation du film, Paul Kircher.

On y voit donc un gamin qui a reçu un uppercut en pleine face et ne sait pas comment réagir. Il est homosexuel assumé et se dit qu’il va profiter à fond de son séjour sur Paris chez son frère, pour avoir des expériences. Sauf que ce qu’il cherche est bien sur ailleurs. Il cherche des repères, à la veille de rentrer dans la vie adulte.

Christophe Honoré nous parle de ce que c’est que la profonde tristesse, inconsolable et il le fait avec plus de retenue, plus de noirceur aussi que dans d’autres de ses longs métrages.

Les personnages sont tous immédiatement attachants et crédibles et vont ensemble parvenir à surmonter l’épreuve de la perte du père aimé. L’émotion n’est jamais forcée, elle vient très naturellement et donne au film une puissance sur certains moments forts, qui sentent le vécu du metteur en scène.

Paul Kircher refera parler de lui assurément. Avec sa voix d’Orelsan, qui traine en mode désinvolte, son personnage est provocateur bien que fluet et prêt à se briser à tout moment. Son aspect naïf et pédant en même temps le rendent très attachant, d’autant plus lorsqu’il sombre.

Christophe Honoré signe un film délicat, romanesque, mélancolique mais qui regarde vers la lumière.

Un très bel hommage à l’adolescent qu’il a été et à la cellule familiale comme bateau de sauvetage.

La piste aux Lapins :

4 lapins

 

N°16-  »Freaks out » de Gabriele Mainetti

CRITIQUE] : Freaks Out - Fucking Cinephiles - Le meilleur du cinéma par les  plus BadAss des cinéphiles !

Rome, 1943, sous occupation nazie, la Ville éternelle accueille le cirque où travaillent Matilde, Cencio, Fulvio et Mario comme phénomènes de foire. Les quatre « Freaks » vont tenter de survivre dans un monde en guerre…

Gabriele Mainetti revient 5 ans après son premier film « On l’appelle Jeeg Robot » qui avait déjà titillé la critique. Le réalisateur italien est le digne héritier d’un cinéma qui a finalement très peu de représentants à savoir le cinéma onirique, le cinéma de l’imaginaire. Et comme je suis particulièrement fan de ce genre de films lorsqu’ils sont réussis, j’étais la cible idéale.

Alors entendons nous, le film a des défauts. d’abord son personnage principal est un peu niaise et pas très travaillée. Ensuite sa ligue de super héros aurait mérité une meilleure écriture et la fin est un peu trop longue de 10 à 20 minutes même si on ne n’ennuie à aucun moment.

Une fois qu’on a dit cela, force est de constater qu’outre son inspiration forte d’Inglorious Basterds de Quentin Tarantino, le réalisateur emprunte à de très grands maitres du fantastique que sont Jean-Pierre Jeunet, Guillermo del Toro et mon chouchou des chouchou, Terry Gilliam.

Et ceci fait sacrément plaisir de voir autant d’idées se déverser sur l’écran pour provoquer l’imagination du spectateur et créer un monde très différent des Harry Potter ultra formatés. Le résultat visuel est très beau et certaines idées de mise en scène sont vraiment excellentes.

Un nouvel héritier de Georges Meliès est donc né. Un nouveau réalisateur de ce genre si rare et je ne peux qu’en être ravi.

Outre ces défauts cités plus hauts j’ai carrément pris mon pied tant le film est beau, enlevé, avec un vrai méchant qui a du relief, ce qui est fondamental pour réussir ce type de film. L’idée de ce cirque nazi est tout simplement brillante de folie et d’horreur mêlées.

Freaks out rend évidemment aussi hommage au Freaks de Todd Browning mais contrairement à une certaine presse ayant trouvé trop de citations, je ne suis pas d’accord. Gabriele Mainetti a son propre style, certes inspiré des auteurs vus plus hauts voir de Bong Joon Ho ou Kim Jee Woon les maitres coréens du film d’aventures fantastique. En effet, il insère beaucoup d’humour et de second degré, permettant de pallier peut-être à la moindre écriture des personnages.

Mais vu le résultat assez bluffant, qu’est ce que çà serait si il avait un excellent scénariste à ses cotés ?

Nul doute qu’Hollywood va se jeter sur lui. Espérons qu’il résiste comme tonton Terry et impose sa vision sans se faire broyer par le système.

Son Freaks out a du cœur et un amour du cinéma qui crève l’écran.

Souhaitons lui une brillante carrière et de nombreux films pour nous faire rêve, de l’autre côté de l’écran, perchés avec le blanc lapin ;) ))

La piste aux Lapins :

4 lapins

 

 

La suite du classement avec les 15 premiers films du blanc lapin 2022 d’ici peu…

Les Pires films du Blanc Lapin 2022

24 décembre, 2022

 

Parceque j’ai vu 112 films sortis cette année au cinéma et sur les plateformes, forcément, j’ai vu des ratés !Et c’est important de voir de mauvais films pour apprécier les bons !

Mais reconnaissons que cette année, j’ai vu de sacrées bouses dans les films de fin de classement.

Voici de quoi vous éviter de perdre de nombreuses heures … les pires films du Blanc Lapin !

 

N°19 – « Spencer » de Pablo Larrain

Spencer - film 2021 - AlloCiné

Kristen Stewart est donc Lady Di pour Pablo Larraín et ce faux biopic puisqu’on suit la princesse durant 3 jours pendant ses vacances de Noël avec la famille royale au domaine de Sandringham à Norfolk, en Angleterre. Trois jours où Diana décide de quitter son mariage avec le prince Charles.

Avec Neruda et Jackie, Pablo Larraín a montré qu’il avait un réel talent pour justement ne pas tomber dans un biopic attendu. Il a un vrai regard, de vraies idées de mises en scène qui mettent l’histoire vraie au service du cinéma et de la mise en scène et non l’inverse. Le poète chilien et Jackie Kennedy ont eu droit à un traitement très classe.

On pourrait râler à l’idée d’un biopic sur Lady Di tant le genre est souvent hagiographique et un peu chiant. Sauf qu’au delà de la talentueuse et sous-estimée Kristen Stewart choisie pour incarner l’icône britannique, le choix du réalisateur est très bon.

L’autre excellente nouvelle est que Steven Knight signera le scénario et c’est loin d’être un perdreau de l’année. On lui doit les scénari de la série à succès Peaky Blinders, de l’excellente Taboo avec Tom Hardy, mais aussi des scénars de grands films comme Dirty Pretty Things de Stephen Frears ou Les Promesses de l’ombre de David Cronenberg.

Sauf qu’on adhère ou pas aux choix du réalisateur. Pour ma part l’interprétation de Kristen Stewart m’a ulcéré, avec une voix nasillarde et un accent insupportables qui me donnaient vraiment envie de lui foutre des baffes. Alors, parait-il la princesse Diana parlait comme celà…d’une part je ne m’en souvient pas et d’autre part je m’en fout, c’est juste que cette interprétation précieuse en mode je suis une femme fragile dans un écrin surligné par cette diction est juste méga gonflant.

Et puis la symbolique est lourde, le rythme d’une lenteur plombante qui n’aide pas du tout à rentrer dans le film et une famille royale qui se résume à une bande de connards dédaigneux…caricatural et manquant cruellement de finesse. En adoptant le seul point de vue de cette étrangère sans nuances et en appuyant le trait sur la fragilité, le film s’effrite et perd tout son intérêt.

Jamais le personnage n’atteint le charme que pouvait susciter Diana et le film finit par devenir terriblement emmerdant.

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N°18 – Slumberland (d’après Little Nemo avec Jason Momoa)

Slumberland : l'adaptation (bizarre) de Little Nemo sur Netflix se paye une  série de posters mirobolants | COMICSBLOG.fr

Pas merci à Netflix pour cette sombre bouse adaptée d’un livre et Bd pour enfant censés promouvoir l’imaginaire et faisant exactement l’inverse, provoquant un ennui profond qui peut avoir son utilité pour endormir vos enfants.

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N°17 – « Bones and All » de Luca Guadagnino

Critique du film Bones and All - AlloCiné

Maren part à la recherche de sa mère et rencontre Lee, un adolescent à la dérive qui va l’embarquer dans un road trip enflammé sur les routes de l’Amérique profonde. Leur amour naissant sera-t-il suffisamment fort pour résister à leurs démons, leur passé et le regard d’une société qui les considère comme des monstres ?

J’aurais préféré que le réalisateur de « Call me by your name » retrouve Timothée Chalamet pour la suite que pour ce film extrêmement dérangeant. On y suit la romance entre deux jeunes cannibales qui fuient d’autres cannibales (c’est fou ce qu’il y a comme tarés aux Usa se dit-on en regardant le film) ou qui traquent de potentielles victimes pour tes tuer et les manger. Et aussi l’un des ressorts et qu’ils pourraient se manger entre eux soit plein de combinaison bien sordides.

Disons le franchement, les acteurs jouent bien et c’est très bien réalisé mais c’est juste dégueulasse.

J’ai eu envie de vomir à plusieurs reprises car le thème est juste horrible moralement, éthiquement, philosophiquement parlant. Comment s’attacher à ces monstres dont on montre en plus pas trop de scènes mais suffisamment pour être hyper mal à l’aise.

Le film est au final très creux si on enlève ces imageries gore et traumatisantes et n’a pas un grand intérêt. Beurk

La piste aux lapins :

Mauvais

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N°16 – « My Policeman » de Michael Grandage

My Policeman - film 2022 - AlloCiné

Le destin de Tom, policier, de Marion et de Patrick, conservateur de musée. Tous trois vont vivre un voyage riche en émotions dans la Grande-Bretagne des années 50. Dans les années 90, Tom, Marion et Patrick sont toujours transportés par le désir et le regret, mais ils ont une dernière chance de réparer les dégâts du passé.

C’est certes original de prendre la star de pop Harry Styles, icône hétéro des jeunes filles pour jouer un homosexuel refoulé.

Si l’histoire assez triste qui nous est racontée n’est pas dénuée d’intérêt et s’avère relativement trash pour la femme qui fait office de façade à un amour non assumé durant les années 50, le film prend des raccourcis.

On ne s’explique pas pourquoi et comment Marion et Tom ont réussi à tenir ensemble et pourquoi Patrick, l’homo assumé n’est pas revenu pendant 40 ans. Le script est assez incohérent avec une ellipse de vie absolument pas expliquée. Ceci enlève une bonne part de l’émotion qui aurait du naitre et fait surtout passer les jeunes hommes pour des égoïstes mais sans faire décoller le film qui reste en mode ronron tout du long.

Raté.

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N°15 – « Coup de théâtre » de Tom George

Coup de théâtre - film 2022 - AlloCiné

Dans le West End des années 50 à Londres, la préparation de l’adaptation cinématographique d’une pièce à succès est brutalement interrompue par le meurtre de son réalisateur hollywoodien. En charge de l’enquête, l’inspecteur Stoppard – blasé et revenu de tout – et l’agent Stalker – une jeune recrue du genre zélée – se retrouvent plongés au cœur d’une enquête dans les coulisses à la fois glamour et sordides du théâtre. Ils vont tenter d’élucider ce crime bien mystérieux à leurs risques et périls…

Ce whodunit, terme utilisé pour les histoires de meurtriers à la Agatha Christie, se veut parodique du genre et gentiment décalé tout en se fondant sur des acteurs de talent comme Sam Rockwell, Saoirse Ronan ou Adrien Brody.

Le résultat est affligeant. J’ai vu très peu de films atteignant ce niveau de ratage complet cette année. Les acteurs en font des caisses, l’histoire est vue et revue 15 000 fois et plutôt que de parodier le genre, le film aurait plutôt tendance à l’enterrer six pieds sous terre.

C’est mal écrit, quand çà se veut drôle ou provoquant c’est gênant et donc le casting cabotine entre deux effets de manche calamiteux.

Un vrai désastre que cette comédie faussement subversive et clichée de A à Z.

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N°14 – « EO » de Jerzy Skolimowski

Critique : EO, de Jerzy Skolimowski - Critikat

Auréolé d’un très bon accueil en compétition officielle à Cannes cette année, ce film qui suit les errement d’un âne à travers son regard d’animal est à la fois déconcertant et frustrant.

Déconcertant car le concept est fort en lui-même que de décrire la souffrance et la condition animale à travers le regard de ce dernier, sans parole oui quasi aucune, les humains étant en interaction mais pas les personnages principaux.

Déconcertant également car Jerzy Skolimowski a un talent de mise en scène indéniable et rend l’épopée de cet âne intéressante de par ses choix de visuels et de montage.

Le problème est que ce road movie animalier laisse un curieux mélange d’inachevé. Les scènes s’enchainent les unes aux autres sans réel lien que le hasard et se terminent souvent avec un but trop déterminé pour justement correspondre à du simple hasard. Ceci rend l’épopée un peu toc et un peu trop écrite.

En parallèle l’animal n’est absolument pas traité avec anthropomorphisme et ses réactions sont animales et non raisonnées. C’est totalement compréhensible dans le choix mais ceci créé un manque d’empathie et d’attachement pour l’âne en question, dont on finit par se foutre royalement.

Cette narration très formelle vire alors à un exercice de style un peu maladroit et trop appuyé pour retenir l’attention.

Le film vise à côté de son objectif et c’est dommage.

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N°13 – Le Visiteur du futur

Le Visiteur du Futur : le film - Au cinéma le 7 septembre 2022

2555. Dans un futur dévasté, l’apocalypse menace la Terre. Le dernier espoir repose sur un homme capable de voyager dans le temps. Sa mission : retourner dans le passé et changer le cours des événements. Mais la Brigade Temporelle, une police du temps, le traque à chaque époque. Débute alors une course contre la montre pour le Visiteur du Futur…

Bon alors je n’ai jamais vu la série Youtube qui a cartonné et créé un véritable engouement de fans depuis 10 ans.

La question est comment ne pas défoncer un film qu’on a trouvé franchement pas terrible lorsqu’en même temps on sent la bonne volonté de toute l’équipe derrière et le profond respect voire amour pour leur publique.

Je pense que les fans vont adorer et retrouver ce qu’ils ont aimé dans leur série, avec plus de moyens et d’effets spéciaux et c’est très bien pour eux et pour le réalisateur.

Je tire d’ailleurs à l’équipe mon chapeau pour leur courage et ténacité d’avoir créé tout ceci avec des bouts de ficelles et peu de moyens, avoir trouvé une communauté de fans et arriver aujourd’hui à sortir un film.

Après personnellement je n’ai pas aimé. Je n’aime pas trop le mélange des genres avec cet humour potache dans de la SF, comme Kammelot avec le médiéval. Ca ne me fait pas rire ou au mieux sourire mais je trouve que çà ne prend pas. Ensuite les personnages m’ont semblé plus relever d’une accumulation de délires geeks issus de toute la culture sf du réalisateur.

C’est sympa mais ce n’est pas hyper original. Le scénario est bon …n’en parlons pas, ce serait méchant et je n’ai pas envie d’être méchant. Mais bon quand même les acteurs ne jouent pas très bien et l’ensemble fait super amateur.

Bref, pas ma came du tout mais je comprends qu’un certain public puisse aimer.

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N°12 – « Nope » de Jordan Peele

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Le pitch : Les habitants d’une vallée perdue du fin fond de la Californie sont témoins d’une découverte terrifiante à caractère surnaturel.

La presse est de nouveau dithyrambique sur ce nouvel opus de Jordan Peele, réalisateur de Get out, qui a reçu des louanges pour mettre des castings quasi exclusivement noirs à l’écran, pour avoir un sens de la mise en scène novateur et une approche très politique de films d’épouvante grands publics.

Et là il s’attaque donc aux Ovnis et extra terrestres dans l’ouest américain avec une bande-annonce qui donnait très envie.

Ayant détesté Get out, l’ayant trouvé surfait, surestimé, facile et alors qu’il m’avait vraiment mais alors vraiment gavé contrairement à son accueil critique assez lunaire, je me suis dis « ne sois pas obtus, reviens y ! réessaie !« .

Nope a les mêmes défaut à savoir prétentieux en voulant se draper dans un message sociétal fadasse, ok la sœur est noire et lesbienne comme si c’était des cases à cocher systématiquement aujourd’hui, ok on voit des pauvres ranchers noirs du mid west, rien de nouveau…et l’accumulation de cases de diversité cochées fait du film quelquechose de bienpensant plutôt gavant là aussi.

Mais bon, passons sur ces clichés qui font tellement de bien aux critiques, que çà doit rassurer probablement de ne pas avoir plus de diversité au sein de leur milieu, passons. Le problème c’est que Nope n’a rien à dire, absolument rien. Pire, il n’a pas grand chose à montrer à tel point qu’à force de faire des ellipses et de mettre 15 ans à décoller, on s’ennuie puis quand le méchant Ovni apparait, çà fait flop. Un grand ballon gonflable. Alors oui il y a la critique de la société du spectacle certes. Mais on l’a vue 1000 fois dans des films bien plus fins.

Car là le film est juste d’une subtilité proche d’un éléphant dans un magasin de porcelaine. C’est lourd, c’est appuyé et définitivement je n’aime pas ce que fait ce réalisateur. Pire, je déteste cette espèce de tapis rouge qu’on lui déroule pour de mauvaises raisons.

Son film n’est pas à chier, il est bien réalisé, bien monté, bien joué. Mais qu’est ce que c’est fade ! Attendu ! Pathos à souhait. Et puis c’est super long. Il faut du talent pour susciter du suspens avec peu d’effets et le mec en a mais çà retombe comme un soufflet.

Le réalisateur se regarde trop filmer et la presse surestime ce talent en se gargarisant d’un film pudding où on met un peu de social, un casting black, un peu de frayeur un peu de pathos un peu de tout et au final c’est fadasse. Cà ressemble à que mauvaise recette que le réal suit consciencieusement. C’est au mieux moyen, mais oubliable très vite. J’ai de nouveau eu le sentiment de m’être fait escroquer par la bande-annonce et la presse.

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N°11 – « Fumer fait tousser » de Quentin Dupieux

Fumer fait tousser - film 2022 - AlloCiné

Le pitch : Après un combat acharné contre une tortue démoniaque, cinq justiciers qu’on appelle les « TABAC FORCE », reçoivent l’ordre de partir en retraite pour renforcer la cohésion de leur groupe qui est en train de se dégrader. Le séjour se déroule à merveille jusqu’à ce que Lézardin, empereur du Mal, décide d’anéantir la planète Terre…

Quentin Dupieux fonctionne toujours de la même manière, il trouve un bon pitch, ici la parodie des biomans et autres séries nipponnes débiles des années 80, et étire ce qui pourrait faire un bon court métrage en un long métrage.

Avant il faisait des films plus longs, il a compris que remplir du vide se voyait un minimum et limite la durée à 1h15-1h20.

Pour rendre ses films hype et apporter un peu de drôlerie il engage tous ses potes soit les comiques arty. Ici ce sont  Gilles Lellouche, Vincent Lacoste, Alain Chabat, Anaïs Demoustier Jean-Pascal Zadi, Adèle Exarchopoulos, Blanche Gardin, Benoit Poelvoorde

Seulement voilà, cette-fois ci çà se voit vraiment que c’est un travail bâclé et flemmard d’un enfumer de première. On rigole à certains moments mais il n’y a pas de fond, pas de message, et les blagues sont vraiment moyennes. Le fait que Dupieux insère des « mini histoires pour faire peur « racontées par les personnages, montre toute la vacuité du scénario.

Il n’a rien à raconter au delà de son pitch et comme il n’a pas de lien entre ses scènes, qu’il n’a pas trop d’idées de scénario, ben il colle le tout à la suite.

Ce n’est pas respectueux du public et plutôt que de pondre un film par an voire deux cette année, Dupieux serait bien inspiré de bosser ses scénari.

La paresse çà se soigne. Il suffit de bosser.

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N°10 – Le secret de la cité perdue

Le secret de la cité perdue »: synopsis et bande-annonce

Loretta Sage, romancière brillante mais solitaire, est connue pour ses livres mêlant romance et aventures dans des décors exotiques. Alan, mannequin, a pour sa part passé la plus grande partie de sa carrière à incarner Dash, le héros à la plastique avantageuse figurant sur les couvertures des livres de Loretta. Alors qu’elle est en pleine promotion de son nouveau roman en compagnie d’Alan, Loretta se retrouve kidnappée par un milliardaire excentrique qui est persuadé qu’elle pourra l’aider à retrouver le trésor d’une cité perdue évoquée dans son dernier ouvrage.

Bon c’est censé être drôle mais c’est naze dès la fin du générique…de début. Les blagues filent la gerbe, les acteurs jouent comme des truffes et le botox empêche machine de parler. Horrible. A brûler.

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N°9 – « Belfast » de Kenneth Branagh

Belfast - film 2021 - AlloCiné

Kenneth Branagh a eu une carrière curieuse de réalisateur. Il se constitua une carrière autour de William Shakespeare dans les années 90. Après ses premiers films réussis « Dead Again » et « Les amis de Peter« , il enchaina sur plusieurs adaptations plus ou moins libres de Shakespeare avec « Beaucoup de bruit pour rien« , un énorme « Hamlet » en 1996, puis « Peines d’amour perdues« .

Dans les années 2000, ses réalisations pâlirent avec sa réadaptation râtée de Le Limier de Joseph L. Mankiewicz, La Flûte enchantée et Comme il vous plaira. Il cherche alors en tant qu’acteur à devenir populaire via des blockbusters comme « Wild Wild West« , « Walkyrie« , ou chez Woody Allen avec « Celebrity« .

En 2011 il se met au service de Marvel et réalise le premier Thor, avec plutôt une réussite au final. En 2015, son Cendrillon pour Disney est un succès et recueille une bonne presse. Il enchaine un autre blockbuster en réadaptant le classique de Agatha Christie, « Le crime de l’Orient-Express« , plutôt fadasse. Comme ce fut un succès il adaptera « Mort sur le Nil » et ré endossera le rôle de l’inspecteur Hercule Poirot qui devait sortir en 2020 et a été décalé à l’automne 2021.

En 2020 son blockbuster « Artemis Fowl« , adaptation d’un roman pour ados , a été directement sorti sur Disney plus et s’est fait descendre méchamment par la presse.

Il était donc temps que l’acteur-réalisateur retourne à de plus petits budgets dans lesquels il excelle.

Belfast, on suit la chronique de la vie d’un petit garçon irlandais et sa famille ouvrière au milieu des émeutes de la fin des années 60.

Le problème est que le film pue le long métrage à Oscars bourrés de bons sentiments et c’est très rapidement ennuyeux.

Le noir et blanc n’a pour seul justification que de faire arty mais n’apporte rien. Les idées de mises en scène ne sont pas particulièrement confondantes et pire, certaines scènes font très théâtrales en mode fake et non en mode symbolique. Certes on comprend que Branagh regarde l’histoire à hauteur de petit garçon et donc sur quelques lieux clos autour d’une rue principale. Mais le film est téléphoné, le garçon tellement mignon qu’on a envie de lui foutre des baffes pour qu’il ait un peur moins l’air niais. Les personnages ne sont pas très intéressants, le méchant binaire.

Un véritable échec d’autant plus gonflant que Branagh en fait des caisses à chaque plan à bien montrer qu’il réalise un petit film.

Avec davantage d’humilité, ceci aurait pu passer. Mais non visiblement Branagh a perdu beaucoup en passant par 25 ans de machine hollywoodienne, en commençant par sa personnalité.

A éviter.

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N°8 - Morbius

Morbius en Blu Ray : Morbius Blu-ray - AlloCiné

Tout a été dit sur ce machin que j’ai vu en streaming en fin d’année et non au cinéma tellement ce film sur un antagoniste inconnu de Spider Man, s’est fait défoncer par la presse.

Et c’est vrai que Jared Leto en fait des caisses, le film est laid, les personnages ultra attendus mais curieusement çà se regarde avec un plaisir coupable car on se demande jusqu’où la médiocrité du scénario amènera le film.

Un film inutile.

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N°7 – « Nos âmes d’enfant » de Mike Mills

Nos âmes d'enfants - film 2021 - AlloCiné

L’immense et talentueux Joaquin Phoenix revient donc après deux ans d’absence et son Oscar pour Joker avec ce film d’auteur qui s’intéresse aux échanges entre un oncle et son neveu, enfant intelligent et d’une grande maturité

Journaliste radio, Johnny interroge des jeunes à travers le pays sur leur vision du futur. Une crise familiale vient soudain bouleverser sa vie : sa sœur, dont il n’est pas très proche, lui demande de s’occuper de son fils, Jesse. Johnny accepte de le faire mais n’a aucune expérience de l’éducation d’un enfant.
Entre les deux débute pourtant une relation faite de quotidien, d’angoisses, d’espoirs et de partage qui changera leur vision du monde.

Dire que je me suis emmerdé devant ce film auteurisant sans fond ni projet à part celui de se la péter est un euphémisme.

En optant pour un noir et blanc comme on se nappe d’un drap de vertu, Mike Mills se fout carrément de la gueule du spectateur pour masque la vacuité de son scénario. Les personnages n’ont absolument rien à dire et le gamin est totalement hors sol.

Comme si on voyait régulièrement des gosses de huit ans qui préfèrent philosopher sur la vie avec un adulte plutôt que de jouer et s’amuser. Cette idéalisation d’intellectuel new-yorkais neurasthénique est absolument insupportable d’ennui bavard.

Les personnages ont cependant un superpouvoir comme dans les Marvel. Dès que vous redoublez d’efforts pour vous intéresser au fonds des échanges, ils arrivent à vous endormir en parlant tant le propos est creux. Mais en faisant parler ce pauvres gamin avec des mots d’adulte, on est censés trouver le film spécial, formidable de prise de hauteur.

Comme il n’y a pas d’histoire à raconter, le réalisateur alterne son film d’interviews vérités avec des jeunes qui s’expriment sur leur quotidien en balançant des banalités, ce qui ne rend le propos ni authentique ni ne donne du corps au film, totalement décousu et sans aucune cohérence.

A éviter

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N°6 – « Athena » de Romain Gavras

Athena (2022) par Romain Gavras

Le fils de Costa Gavras a un indéniable talent de metteur en scène et ses deux premiers films, Notre jour viendra puis Le monde est à toi montraient tant la virtuosité dont il est capable que sa volonté de toucher à des genres différents. D’ailleurs, il réalise peu et prend son temps.

Avec Athena, produit par Netflix, Romain Gavras s’associe  à Ladj Ly au scenario, ce dernier ayant marqué la critique et le public en 2019 avec Les Misérables.

La volonté du réalisateur et de son co-scénariste est donc de parler de nouveau des cités en feu, de la rage des jeunes qui y vivent et se sentent exclus du reste du monde et expriment cette colère dans la plus pure violence.

Et pour aborder de façon originale un thème déjà maintes fois abordé, l’angle est de transcrire sous un mode de tragédie grecque l’histoire de ces frères, l’un militaire, l’autre factieux qui n’arrivent plus à communiquer car leur petit frère est mort des coups de policier (enfin c’est comme ceci que la chose estprésentée au début) et la révolte met la cité en rupture totale. La population évacue la cité tandis que les jeunes déchainés s’engouffrent dans la violence et la volonté de se venger.

C’est donc un peu la dernière scène des Misérables de Ladj Ly, qui durerait 1h30…et c’est là le problème principal.

Le scénario est très très léger et n’a pas grand chose à dire, pas de message. Pourtant le film commence très bien via un long plan séquence prodigieux et vraiment bluffant. Sauf qu’ensuite c’est bruit et fureur et qu’à part la mise en scène, on a du mal à accrocher à une histoire trop désincarnée.

Les acteurs ne portent pas le film sur leurs épaules de part leur jeu et donc l’absence de dialogues construits rend le film très agaçant et très m’a tu vu.

On a franchement l’impression d’être devant un film réalisé par un bobo qui se fait une idée de la cité et phantasme un « éveil violent. Car il est clair qu’en terme de violence gratuite, on est bon ! Moi la violence ne me gène pas quand elle s’accompagne soit d’un concept fort soit d’un sous-texte fort. Ici il n’y a ni l’un ni l’autre et surtout le film donne une vision un peu toc du sujet. Ce coté tragédie grecque avec une musique classique bien à fond les ballons c’est juste complétement raté car çà ne vise aucune cible. Heureusement que la dernière scène apporte de la nuance sinon le film serait même un brulot dangereux car réducteur et un peu idiot.

Le film est vraiment embarrassant par l’absence de message qui l’accompagne et le déchainement violent qui donne plus l’impression d’un réalisateur qui se regarde filmer. C’est stylisé à l’extrême, avec des personnages inconstants et donc c’est gavant. L’absence d’analyse et de recul sur un sujet aussi complexe fait franchement froid dans le dos.

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N°5 – « Jack Mimoun et le secret du Val Verde » de Malik Bentalha

Jack Mimoun et les secrets de Val Verde - film 2022 - AlloCiné

Cette comédie française a tout du piège à con. La bande-annonce est très drôle mais concentre les quelques effets comiques des excellents Jérôme Commandeur et François Damiens. Mais si le thème de l’aventurier sous mode comique aurait peu prendre dans l’absolu, le problème est que Malik Bentalha n’est pas Steven Sielberg et que vouloir refaire Indiana Jones en mode low coast s’avère particulièrement pénible.

Le scénariste réalisateur aurait du choisir son camps entre comédie et aventure et non nous infliger des scènes mal écrites, mal jouées. Comment ne pas être mal à l’aise devant certaines scxènes qui se veulent pleines d’émotion alors que l’écriture en elle-même rend le tout non crédible. On a l’impression d’être dans une mauvaise série Z tournée dans des décors en carton pate.

Affligeant de bout à bout à part les quelques répliques des comiques précités mais çà fait long entre chaque vanne.

La piste aux Lapins :

Mauvais

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N°4 – « Petite fleur » de Santiago Mitre

Petite Fleur en DVD : Petite fleur DVD - AlloCiné

Le couple, l’amour et la vie de famille sont de bien belles aventures que vivent José et Lucie. Jusqu’au jour où l’ennui s’installe. Lucie consulte alors un psy pour sauver leur couple. De son côté, José vient me voir, moi, Jean-Claude, leur voisin. Ensemble, nous lançons une nouvelle thérapie. Trinquer, danser et jouer au meurtrier tous les jeudis : la nouvelle recette du bonheur !

Il est rare de voir des films qui cumulent autant de défauts qu’on hallucine totalement sur la raison du go donné par des financeurs pour la mise en production d’un tel projet.

« Petite fleur » dure 1h38 mais il semble en durer 15h tellement le rythme est mou et l’histoire sans queue ni tête, sans intérêt. Tout tombe à plat, çà ne décolle jamais et les acteurs ne jouent pas très bien Même l’excellent Melvil Poupaud semble complètement perdu dans ce film qui a du l’attirer pour le soit-disant running gag d’être tué de mille façons. Sauf que non seulement ce n’est pas drôle mais ceci n’apporte rien au non-sujet et au vide intersidéral du film.

« Petite fleur » est un film pathétique qui m’a non seulement emmerdé gravement mais fait perdre 1h38 de ma vie pour un résultat affligeant et pathétique. Heureusement je l’ai vu en Vod et n’ai pas perdu le temps de trajet pour y aller. J’ai juste perdu 4 € de location que j’ai filés en partie à l’équipe qui a produit cette chose.

Un ratage total très agaçant quand on sait tant il est difficile de trouver des financements pour de vraies scenari.

La piste aux lapins :

Mauvais

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N°3 – « Thor : Love and Thunder » de Taika Waititi

Thor: Love and Thunder - Réservez vos places & bande-annonce | Disney

 

 Thor Ragnarok était une excellente surprise, coloré et pulp à mort avec un humour bienvenu et barré. Et c’est Taika Waititi,  réalisateur de « Vampires en toute intimité« , qui réussissait artistiquement le film qui obtient un excellent score au box-office (854 millions de dollars au box-office en 2017).
Son originalité et sa prise de risque ont été récompensés puisqu’il a été reconduit sur un quatrième film autour de Thor, avec un titre très second degré, Thor : Love and Thunder.
Chris Hemsworth retrouve son rôle aux côtés de Tessa Thompson en Valkyrie. Natalie Portman revient et devient le Thor au féminin.
Seulement voilà, tout ce qui faisait les qualités du précédent opus se retournent contre son auteur et le film.
A vouloir être potache et faire des blagues fun et cools toutes les deux, minutes, la production en a oublié le scénario. Ce n’est pas compliqué, il est affligeant de bêtise, les personnages sont très mal écrits. L’excellent Christian Bale incarne un Gorr absolument nullissime et probablement l’un de ses pires rôles depuis très longtemps.
Je me suis terriblement emmerdé devant cette débauche d’effets spéciaux sans queue ni tête et avec des personnages vraiment inintéressants.
Le film est paresseux et Waititi a clairement bâclé son film en se reposant sur ses lauriers et les multiples films que Disney lui a promis de produire par la suite dont le prochain film Star Wars. Il parlait récemment du scénario pas encore au top pour ce prochain Star Wars qu’il est censé tourner très vite…ben ce n’est pas gagné si c’est fait avec autant de désinvolture.
Le personnage de Thor est au final con comme un balai et détestable ce qui rend compliqué l’attachement au déroulé du film, insipide.
Le film est ennuyeux, réalisé comme un produit de commande et c’est vraiment une énorme déception par rapport au film précédent qui sentait le frais et le pulp. Là çà sent le fric facile et l’irrespect du public. « C’est de la merde ! » comme on dit parfois.
La piste aux lapins :

Mauvais

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N°2 – « Big Bug » de Jean-Pierre Jeunet

BigBug - film 2022 - AlloCiné

Après 9 ans d’absence, Jean-Pierre Jeunet était très attendu pour son retour sur Netflix fin un nouveau long métrage. Le co-auteur de Delicatessen et La Cité des Enfants perdus et le réalisateur de Alien 4, Le Fabuleux destin d’Amélie Poulain et Un long dimanche de fiançailles est ce que l’on appelle un réalisateur culte.

Culte parceque les réalisateurs de l’imaginaire, entre steam punk, anticipation et fable sont extrêmement rares. On pense à Terry Gilliam (83 ans cette année, Le sens de la vie, Sacré Graal, Brazil, L’armée des 12 singes, Les aventures du Baron de Munchausen, Bandits Bandits, Las vegas Parano, L’imaginarium du docteur Parnassus, L’homme qui tua Don Quichotte), Tim Burton (63 ans et un manque d’inspiration cruel depuis 20 ans), Guillermo Del Toro (57 ans, Le Labyrinthe de Pan, La forme de l’eau, Crimson Peak, Nightmare Alley), Michel Gondry (58  ans, Eternal sunshine of the spotless mind, La science des rêves) et puis sinon il y a de plus jeunes réalisateurs dans des genres moins clairement identifiables au rêve comme Wes Anderson, Robbert Eggers (the Lighthouse), Taika Waititi (Thor Ragnarok, Jojo Rabbit), David Lowery (A ghost story, The Green Knight)…

Et donc à 68 ans, alors que ses deux précèdent films étaient bien moins inspirés (MicMacs à tire larigot, L’Extravagant Voyage du jeune et prodigieux T. S. Spivet) Jean-Pierre Jeunet semble, j’en ai peur, avoir perdu toute son inspiration.

C’est triste à dire car j’aurais aimé adorer ce film et je l’attendais car ces grands artistes de l’imaginaire sont rares. Mais BigBug est irregardable tellement il est laid et mal joué.

Le spectacle est affligeant assez rapidement avec ce vaudeville où des humains dans un futur proche ultra robotisé se trouvent enfermés dans un appartement durant une révolte des robots. Déjà les acteurs sont très mal dirigés et en font des caisses tandis que le visuel, le choix de décorum est criard et fait vraiment mal aux yeux.

On a vu tellement de films d’anticipation avec des robots intelligents au service de l’homme et qui se révoltent (de Blade Runner à la série Real humans) que cette version fait ultra cheap et de très très mauvais goût.

Chaque idée de rebondissement semble tomber à l’eau et enfoncer des poncifs éculés ce qui rend au film un côté très daté. Le méchant est absolument insupportable avec son rictus d’un manque de finesse incompréhensible. Tout est raté de A à Z et il n’y a absolument rien à sauver.

Mais pourquoi, pourquoi Jean-Pierre Jeunet s’est il embarqué dans une telle galère ? Il devait bien se rendre compte que ses personnages étaient caricaturaux et l’histoire sans aucun intérêt. Quant à Netflix, mais lisent ils seulement les scenari, pas une seule vanne ne fait rire. On est gêné pour le réalisateur dont on ne reconnait ni la pâte ni le talent. Le rôle du producteur c’est d’éviter ce type de naufrage, y compris pour de grands artistes ayant une très mauvaise idée.

Cette catastrophe artistique serait moins grave si elle ne risquait pas d’enterrer la carrière de cet artiste qu’on aime tant. Et c’est ce qui m’inquiète le plus. Arrivera t-il à retrouver d’une part l’inspiration et d’autre part des financeurs capables de lui faire confiance de nouveau. Avec les 70 ans en vue c’est loin d’être gagné. Et cet échec me rend plus triste qu’en colère d’avoir perdu 2 heures, les rêves et l’imaginaire de Jean-Pierre Jeunet valant tellement plus que ce machin incompréhensible.

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N°1 – Jurassic World: Le Monde d’après

Jurassic World: Le Monde d'après en DVD : Jurassic World : Le Monde d'après  DVD - AlloCiné

Ce 3ème volet de la seconde trilogie autour des dinosaures est le plus mauvais de la trilogie est le plus mauvais de tous les films Jurassic Park. Le scénario est complétement débile. Les personnages « historiques » reviennent pour des rôles ennuyeux à mourir.

Les scènes sont vues et revues dans les précédents mais avec tellement d’incohérences qu’on croierait un pastiche. Et encore toute la première partie ressemble à une série Z avec du fric pour illustrer le scénar complétement con.

Les acteurs ne jouent pas, ils cachetonnent, mention spéciale à Chris Pratt et Bryce Dallas Howard qui décidémment sont de supers mauvais acteurs. On espère juste que leur carrière soit plus intimisdte puisque dans la vraie vie aucun dinosaure ne peut les bouffer pour éclaircir les écrans de cinéma.

Non le flm est pathétique et ennuyeux et c’est un sacage en règle de l’héritage de Spielberg.

 

Voilà c’est fini pour les pires films de l’année 2022 du blanc lapin, je reviens dans quelques jours avec la liste des 30 meilleurs car cette année, il y a eu fort heureusement plein de très bons films aussi ;) ))

Les meilleurs films du Blanc Lapin 2021 : N°15 à N°1

30 décembre, 2021

En cette année 2021 exceptionnelle pour le cinéma, la plus riche des 12 années de blog du blanc lapin de par l’embouteillage des sorties cinés et de très nombreux films qui auraient du sortir sur deux ans, vous constaterez en tête du classement que j’ai un peu triché en mettant beaucoup de monde sur le podium.

Mais très honnêtement les films en question sont impartageables et ne pas les faire figurer juste parceque 2021 est une double année cinéma, aurait été injuste tant ils sont brillants chacun à leur manière.

Une année marquée par un cinéma français dans une forme incroyable (17 des 38 films que j’ai sélectionnés à plus de 4 lapins sur cinq) avec beaucoup de nouveaux talents et la naissance d’un cinéma de genre « à la française » (3 films français de genre fantastique dans la sélection).

Vous noterez aussi un cinéma iranien au sommet avec trois longs métrages dans la liste.

Le cinéma se renouvelle par de nouveaux talents puisque 15 des 38 films sont d’auteurs n’ayant jamais figuré dans mes classements les 11 fois précédentes !

Donc sur 125 films sortis et vus cette année 2021, voici donc la suite du classement des meilleurs films du Blanc Lapin pour 2021 après la première partie ici (classement de N°32 à N°15)

 

 N°15 – « Le discours » de Laurent Tirard

Le Discours - film 2020 - AlloCiné

Laurent Tirard avait surpris en 2018 avec le très bon Le Retour du Héros, comédie très enlevée avec Jean Dujardin et Mélanie Laurent, usant de stratagèmes théâtraux de portes qui claques avec des dialogues et un jeu d’acteurs de très bon niveau. Il faut dire que le réalisateur du Petit Nicolas ou Astérix et Obélix au Service de sa Majesté, n’était pas franchement connu pour être un artiste disruptif. Force est de constater qu’en adaptant au cinéma le livre du dessinateur de BD Fabcaro, le réalisateur a trouvé le matériau idéal pour poursuivre la démarche de son précédent film.

On y suit Adrien, attablé à un repas de famille, famille qu’il connait sur le bout des doigts et qui l’exaspère, alors qu’il attend un sms de sa copine, enfin sa peut être futur ex copine avec qui il est en pause, contre son grès.

Et alors que le repas s’éternise, son beau frère lui demande de faire un discours pour son mariage avec sa sœur. L’angoisse totale car quoi dire à part des banalités, surtout pour un mec timide et réservé.

L’une des grandes réussites du film est sa mise en scène hyper bien rythmée qui joue à fond la théâtralité en revenant toujours à l’unité de lieu de cette salle à manger familiale tout en rentrant dans la tête du héros pour des flashsbacks ou des illustrations vraiment drôles. Dès le début le coté théâtral est hyper assumé avec la présentation des acteurs et du metteur en scène par l’acteur principal, debout sur scène, tordant le cou à une habitude bien ancrée de présentation des équipes au début de chaque film depuis que le cinéma existe.

Les trouvailles et astuces visuelles sont vraiment réussies. Le fait de faire des arrêts sur image avec le héros face caméra qui exprime ses sentiments et ressentis tandis que sa famille est immobile comme sur pause, aurait pu virer au gadget fatiguant et vite lassant. C’est tout l’inverse, puisque le procédé donne du rythme à un scénario qui va chercher par ci par là des moments de vie.

Et le second tour de force de cette comédie est d’être drôle, très drôle, or c’est hyper rare de tomber sur un film intelligemment écrit, avec un scénario ne tombant pas dans le pathos lorsque les messages sont profonds et simples et arrivant à déclencher l’hilarité, oui ! L’hilarité ! Balaise !

Le film a ce coté universel en parlant des petits moments chiants du quotidien et de l’agacement des petits défauts de son conjoint, de ses frères et sœurs et parents. On y voit l’absence d’écoute des un et des autres et l’isolement lié aux habitudes, où chacun raconte sa propre histoire sans toujours parler de l’essentiel parceque c’est rassurant et plus confortable.

L’histoire est tout simplement bien écrite, avec finesse.

Évidemment, ce qui fait que le film décolle c’est son casting. Sara Giraudeau est émouvante et craquante. Kyan Khojandi, Julia Piaton, François Morel et Guilaine Londez sont excellents.

Mais la star, la star qui nait devant nos yeux c’est Benjamin Lavernhe, évidemment !

Bien que sociétaire de la comédie française, il a été découvert du grand public dans Le sens de la fête où il interprétait face à Jean-Pierre Bacri un marié exécrable mais tellement drôle. Puis il enchainait un super second rôle de meilleur copain de François Civil dans Mon inconnue. Et enfin vous l’avez peut-être vu en amant veule dans Antoinette dans les Cévennes l’an dernier.

Benjamin Lavernhe décroche ici son premier premier rôle dans un film suffisamment grand public pour qu’il se fasse un nom. Et sa carrière ne fait que commencer.

A 37 ans, il me fait penser à des acteurs comme Philippe Noiret, Jean Rochefort, Jean Pierre Marielle, Jean Pierre Bacri…des acteurs qui ont explosé sur le tard car ils n’étaient ni des jeunes premiers ni des monsieur tout le monde. Leur visage ou leur dégaine les rendaient atypiques et leur phrasé ou leur façon de jouer les rendait identifiables tant dans la comédie que dans le drame, avec toujours une sensibilité qui renversait le spectateur. Benjamin Lavernhe est exactement de cette veine là d’acteurs. Dans Le Discours, il alterne les émotions avec grâce et humour et porte le film sur ses épaules avec un talent évident. Je suis très content pour lui du succès probable du film et de la réussite artistique du long métrage. Il lui fallait un accélérateur de carrière ciné pour le plus grand bonheur des spectateurs (encore une fois en tant que sociétaire, il a du taf à vie). J’ai hâte de le voir déployer son talent dans plein d’autres rôles divers et variés. Rien que pour lui, le film vaut le coup d’être vu.

Le discours est très réussi et subtil, ce qui est rare sur de la comédie, genre complexe à tenir de bout en bout en équilibre.

La piste aux Lapins :

4,25 lapins

 

N°14 – « Matrix Resurrections » de Lana Wachowski

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Il est toujours casse gueule de reprendre une franchise presque 20 ans après. Pourtant Lana Wachowski a décidé de le faire sans sa sœur et sur un des hits de SF les plus emblématiques des années 2000, à l’époque où elles étaient frères.

Autant j’avais beaucoup aimé Matrix pour son côté révolutionnaire en termes d’effets spéciaux autant les deux suites m’avaient gonflées car je e comprenait rien à l’histoire qui se perdait dans des circonvolutions inutiles.

« Matrix Resurrections » a d’abord l’humour de se moquer de la propre saga Matrix mais aussi sur le fait de faire des suites et des reboots à Hollywood dans des scènes particulièrement drôles et surprenantes au début du film. On commence donc par un film méta qui regarde dans son propre miroir et la raison de faire une suite avec un humour qui faisait particulièrement défaut aux prédécesseurs.

Et là on comprend que Lana Wachowski ne revient pas pour le fric, pas du tout. Elle revient avec l’envie de réer de la nostalgie chez le spectateur tout en le ramenant dans la matrice via des scènes brillamment réalisées. Évidemment vous n’aurez pas l’effet de surprise et elle le sait et axe donc une bonne partie de l’histoire sur des dialogues, des climax, des jeux de dupes distrayant et intelligents. Elle fait évidemment du fan service en raccrochant tous les wagons et en expliquant les liens mais c’est léger et surtout, le film est terriblement fun, comme le premier du nom, et c’est le plus bel hommage qu’elle pouvait apporter.

Les nouveaux personnages introduits sont très bien écrits et utiles à l’histoire. On s’y attache, mention particulière à Buggs (rapport aux bugs et à Buggs Bunny.

Au delà de la virtuosité de la mise en scène que la réalisatrice n’a pas perdu, on est pris d’émotion par le retour de Carrie Anne-Moss et Keenu Reeves, excellents de classe et d’autodérision.

Le plus fascinant dans « Matrix Resurrections » est cette capacité à divertir tout en faisant réfléchir le spectateur sur la notion d’abrutissement par l’écran, les séries et tout le show produit aujourd’hui et qui au final rend le spectateur gavé de productions nouvelles comme les humains sont nourris par les machines pou qu’elles survivent elles-mêmes. Et sans cesse le film utilise des concepts de réalité qu’il introduit dans sans histoire pour les dénoncer à qui saura les déchiffrer, tel un code et tel que le font les personnages. C’est malin voir brillant dans un blockbuster. Ceci va jusque dans le fait de rire du « déjà vu » via un chat appelé ainsi, en montrant des images des précédents films et en montrant que la réalisatrice n’est pas dupe et ne prend pas ses spectateurs pour des idiots, bien au contraire.

C’est d’ailleurs tout l’amour et le respect de la réalisatrice pour son matériau et ses fans qui transpire au visionnage de ce film que je n’attendais pas aussi réussi et mature.

Moi qui ne suis pas particulièrement fan aveuglé des trois films précédents, j’ai tout compris car la réalisatrice prend soin de résumer, expliquer et virer tout ce qui était nébuleux dans les histoires précédentes. Inutile donc de revoir les trois films, vous comprendrez très aisément.

Et puis le film est émouvant en plus d’être drôle, ce que je n’avais pas ressenti avec les trois précédents films.

Le film est déconcertant, complexe sans être inaccessible, spectaculaire tout en ayant un charme fou. Une très grande réussite.

La piste aux Lapins :

4,25 lapins

 

N°13 – « Un Héros » de Asghar Farhadi

Un héros - film 2021 - AlloCiné

Pitch : Rahim est en prison à cause d’une dette qu’il n’a pas pu rembourser. Lors d’une permission de deux jours, il tente de convaincre son créancier de retirer sa plainte contre le versement d’une partie de la somme. Mais les choses ne se passent pas comme prévu…

Le plus célèbre des cinéastes iraniens revient et clôture une année cinéma 2021 marquée par trois grands films iraniens, La loi de Téhéran, Le diable n’existe pas et donc « Un Héros« .

Car avec cette histoire à la thématique surprenante et vraiment original, le maitre iranien, Asghar Farhadi, revient à son meilleur niveau avec un film qui fait penser à l’un de ses chef d’œuvre, Une séparation.

Asghar Farhadi commence d’abord par nous décrire une histoire qui se passe très bien autour d’un personnage naïf mais solaire, à qui la chance semble sourire. On a le sourire aux lèvres devant toutes ces portes qui s’ouvrent, un peu interloqué par l’attitude des geôliers avant de comprendre le poids de l’image et le fait qu’ils utilisent son acte héroïque pour faire oublier leur mauvaise image. Car et c’est là ce qui est très surprenant, l’Iran vit aussi au rythme des réseaux sociaux, de l’immédiateté, du qu’en diras t on ? qui dépend de l’image renvoyée à la société. Ce n’est que dans la seconde partie, lorsque l’histoire s’emballe dans le mauvais sens et que le personnage s’enfonce dans ses mensonges, que l’on comprend l’envers du décors, la face sombre de cet étalage public et de ses conséquences. Au final on n’est pas très loin d’un schéma occidental sauf qu’il est passionnant de le voir appliqué à la société civile iranienne. On voit les gens vivre, se déchirer, se soutenir. On voit le rôle d’associations qui aident les condamnés à mort ou les victimes d’injustices et surendettements. L’auscultation de cet Iran de 2020 est en soit fascinante.

Mais le réalisateur créé une tension, une angoisse qui monte et étouffe le personnage avec le brio qu’on lui connaissait dans ses meilleurs opus. La mécanique kafkaïenne est terrible d’autant qu’on voit les rouages se gripper et l’histoire partir à conte sens, incapables d’agir et ayant envie de crier à cet individu gentil et naïf qu’il fait les mauvais choix.

L’idée de faire mentir un personnage aussi solaire et sympathique, juste par la facilité qu’il pense avoir à simplifier les problèmes, est géniale. Car si au début on se dit que ces mensonges ne portent pas à conséquences, le scénario nous les renvoie en pleine figure. Et le plus intéressant est que le réalisateur ne porte pas de jugement moral sauf sur la police manipulatrice et manquant de décence.

« Un Héros » est un thriller captivant de bout en bout et magistralement mis en scène et interprété.

La piste aux Lapins :

4,25 lapins

 

N°12 – « La terre des hommes » de Naël Marandin

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Le cinéma français est en très très grande forme. Après les superbes films de genre « Teddy« , « La Nuée« , le magnifique comte « Gagarine« , pour ceux qui ont accroché la Palme d’Or Titane, le tour de force de mise en scène « Annette« , l’excellent polard « Bac Nord« , voici un nouveau grand film.

Sur le papier l’histoire de « La terre des hommes«   a tout du sujet ultra casse gueule.

C’est un peu #MeToo rencontre le drame paysan et donc forcément, mélanger deux thèmes sociétaux parmi les plus médiatisés de ces dernières années aurait pu franchement vriller putassier et facile.

Il n’en n’est rien grâce d’une part à une réalisation au cordeau, qui sait alterner caméra qui suit de dos l’héroïne, la prend en plan super serré lorsqu’elle est perdue, sait s’échapper pour filmer la campagne et l’angoisse, l’isolement qui peut se dégager de certains paysages.

Bien sûr, Naël Marandin filme l’emprise avec un Jalil Lespert en prédateur sans scrupules qui piège sa victime par son pouvoir et surtout sa manipulation. Les cadres sont physiquement étouffants. Et c’est en partie la force du film, que de ne pas tomber dans une histoire de viol évidente mais dans un viol perpétré par un prédateur qui met le doute, lui insère dans la tête tout le poids de la culpabilité. La scène est d’ailleurs très importante car elle montre sur quoi le prédateur va se défendre et surtout le fait qu’il est lui-même convaincu d’avoir recueilli un consentement. Cette nuance et ce double regard de l’un et de l’autre est sacrément gonflé mais donne une force, une puissance au propos.

Diane Rouxel est prodigieuse dans ce rôle et mériterait un César pour cette prestation intériorisé, ce regard de doute, puis de détermination, puis de peur, parfois mélangés ensemble.

Car  »La terre des hommes » parle aussi de la dureté du monde payant, avec un Olivier Gourmet en père aimant mais dépassé, toujours aussi excellent ou un Finnegan Oldfield, en compagnon à fleur de peau, qui se bat pour avoir des rêves, qui croit que le couple peut faire son trou dans ce milieu d’une dureté incroyable.

On y voit des ordures, des rapaces prêts à dépecer le premier collègue qui sera mis en liquidation judiciaire, dépendant d’autorités agricoles très politiques où le pouvoir est détenu par quelques uns, dont le loup de l’histoire.

Le film a donc cette double facette, ce double intérêt de traiter de la pauvreté paysanne, de la jeunesse paysanne qui voit tout de même de l’espoir et se bat pour des projets, confrontée à la froideur d’une administration gangrénée par quelques apparatchiks qui ont droit de vie ou de mort sur leurs rêves. Et face à cela, le  réalisateur ajoute le sujet de l’emprise.

La maitrise du sujet…enfin des sujets, le scénario taillé avec justesse, le jeu des acteurs impeccable font de « La terre des hommes«   une excellente surprise de cette rentrée de septembre.

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N°12 – Ex Aequo – « Don’t Look Up: Déni cosmique » de Adam McKay

Don't Look Up: Déni cosmique - Ciné-Feuilles

Le pitch : Deux piètres astronomes s’embarquent dans une gigantesque tournée médiatique pour prévenir l’humanité qu’une comète se dirige vers la Terre et s’apprête à la détruire.

C’est donc l’un des csting les plus hype de l’année que se aie Netflix avec accrchez-vous Leonardo DiCaprio, Jennifer Lawrence, Meryl Streep, Cate Blanchett, Jonah Hill, Timothée Chalamet, Mark Rylance, Ron Perlman ou Ariana Grande pour les plus connus.

Et c’est un uppercut irrévérencieux très réussi pour Adam McKay, réalisateur oscarisé de l’excellent The Big Short en 2015 et qui a depuis officié sur la série Succession.

Le réalisateur livre un film extrêmement rythmé, grâce à la bonne idée de la menace d destruction du monde et un jeu d’acteurs au sommet, tous étant au top et Di Caprio renouant avec la comédie dans laquelle il a finalement peu eu d’occasions à part Attrapes moi si tu peux de Spielberg. Mais surtout le film est extrêmement drôle et passe au vitriol toute la sottise humaine de la société d’aujourd’hui, chacun en prenant plein la gueule.

Les politiques passent pour des demeurés incompétents qui surfent sur le marketing inconscients des dangers qu’ils sont e charge de régler par des décisions courageuses. Sauf qu’ils n’y comprennent rien et s’en contrefoutent tandis que les journalistes font du sensationnalisme et du show ou alors si ils sont plus sérieux, manquent de courage face aux autorités. Quand au quidam moyen, c’est un bon gros consommateur rivé à son smartphone et complétement décérébré. Bref, il n’ a personne à sauver tant l’humanité est devenue décérébrée et l’homme ultra égocentré.

Aux Etats-Unis le film n’a visiblemnt pas fait rire tout le monde et son accueil est divisé, certains se sentiraient ils visés ? Rassurons les ! C’est une satire donc c’est exagéré, comme le Docteur Folamour en son temps… et le problème c’est que se sentir autant visés et le prendre aussi mal, c’est louche non ?

Adam McKay utilise la farce ironique limite nihiliste avec une telle rage que çà fait franchement du bien. Ce n’est pas démago, c’est juste faire rire à partir élèvements qui vous rappelleront des situations pathétiques hélas déjà vues en moins trash et c’est là que le film devient limite flippant. Les fake news et le complotisme, sont évidemment passés au lance flammes.

C’est comme i vous regardiez Mars Attacks en réussi, le film de Burton ayant été l’un de ses premiers pas très inspiré.

Le film est étonnamment sombre, on aurait pu remplacer la comète par les catastrophes climatiques à venir.

Une remarquable réussite dans un style très difficile, celui de faire rire en regardant en face es défis qui attendent le monde.

La piste aux Lapins :

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N°11 – « Boîte noire » de Yann Gozlan

Boîte noire - Film (2020) - SensCritique

Six ans après « Un homme idéal« , le réalisateur Yann Gozlan retrouve Pierre Niney pour un autre thriller basé sur un concept fort et original.

Il nous immerge pour ceci dans un métier inconnu du grand public, celui de de technicien au BEA, autorité responsable des enquêtes de sécurité dans l’aviation civile. Un jour un crash aérien du vol Dubaï-Paris dans le massif alpin amène Mathieu Vasseur, joué par Pierre Niney, en tant que responsable de sur l’enquête.

Et là un cercle vicieux va commencer à tourner avec une logique d’engrenages dont sir Alfred Hitchcock n’aurait pas renié la qualité d’écriture.

Car Boite noire a un scénario excellent, qui aurait pu aller trop loin, à force de rebondissements mais qui sait garder un équilibre juste. Il nous ballade d’hypothèses en hypothèses avec une réalisation de premier ordre, qui ne tombe pas dans la facilité et impulse un suspens comme on en voit rarement dans le cinéma français.

Décidément le cinéma français est en très grande forme en cette année 2021 et Yann Gozlan y apporte tout son talent dans la catégorie film à suspens parano.

Pierre Niney trouve ici un de ses meilleurs rôles, d’une justesse impeccable entre intellectuel persuadé d’avoir raison et jeune homme ambitieux pris par l’hubris au point de semer le doute.

Car au delà d’un scénario haletant et d’excellents seconds rôles dont André Dussollier, l’acteur Pierre Niney nous montre la palette de son jeu, de ses regards épris de doutes puis de conviction à la limite de la folie. C’est très très réussi.

On est scotchés de bout en bout par ce thriller excellent où l’obsessionnel efface toutes les frontières entre conviction complotiste et réelle manipulation.

La sobriété du film alliée à une originalité de climax proche du « Chant du loup » fait de ce « Boite noire » un film à voir de toute urgence !

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N°10 – « Stillwater » de Tom McCarthy

Stillwater (2021) Film. Où Regarder le Streaming Online

En 2015, Tom McCarthy frappait fort avec Spotlight et ce film sur l’enquête sur les prêtres pédophiles au sein de l’Eglise Catholique. Son film était limite documentaire et reçu de nombreux prix à juste titre.

Aujourd’hui il revient avec un film très original puisqu’il immerge un foreur de pétrole du fin fond de l’Oklahoma en plein cœur de Marseille. Mais quelle drôle d’idée !

On se dit que çà ne va pas prendre, que ceci risque de tomber dans les clichés des américains sur la France ou dans le comparatif balourd entre une Amérique beauf et des situations défavorisées de quartiers. Sauf que pas du tout.

Le film est d’une finesse incroyable, porté par un duo tout aussi improbable.

Matt Damon retrouve un grand rôle comme il n’en n’avait pas eu depuis très longtemps dans cette stature de mâle taiseux, qui ne parle pas un mot de français et se déracine totalement de son Amérique profonde pour sauver sa fille, emprisonnée pour meurtre.

A travers son regard, ses expressions très minimalistes, il réussit à insuffler au personnage un attachement et une histoire, sans avoir besoin d’expliquer son passé. Face à lui Camille Cottin est impressionnante de naturel, avec un anglais impeccable qui lui ouvre les portes d’Hollywood puisqu’on la retrouvera bientôt chez Ridley Scott dans « House of Gucci« . Elle est tout simplement excellente de bout en bout en femme moderne, actrice de théâtre qui va aider cet américain complètement perdu qui ne sait pas à qui s’adresser. La construction de leur relation et d’un cocon de protection avec la fille du personnage de Camille Cottin, va dresser un miroir à la relation père-fille que le personnage a ratée. Cette fille jouée par Abigail Breslin est toute en nuances jusqu’au bout et ajoute une autre dimension au film, surprenante.

« Stillwater« est un grand film, ambitieux et qui aborde avec une grande subtilité la construction et déconstruction de liens familiaux, au-delà des frontières linguistiques, des murs de prison ou des océans.

Et c’est une très belle histoire, qui marque et qui reste dans la tête plusieurs jours tellement la mise en scène caméra à l’épaule, en plans serrés et le jeu des acteurs troublants de vérité et de naturel, font de cette histoire un must de 2021. L’action et le côté thriller alternent avec des scènes plus intimistes et donnent à l’ensemble une vitalité, une force qui font que les 2h20 passent très vite, avec une certaine forme d’évidence. L’évidence des très bons films.

Les nuances de « Stillwater » et ses propos plein de délicatesse en font l’une des plus belles surprises de l’année.

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N°09 – « Sound of metal » de Darius Marder

Sound of Metal en DVD : Sound of Metal - AlloCiné

Ruben et Lou, ensemble à la ville comme à la scène, sillonnent les Etats-Unis entre deux concerts. Un soir, Ruben est gêné par des acouphènes, et un médecin lui annonce qu’il sera bientôt sourd. Désemparé, et face à ses vieux démons, Ruben va devoir prendre une décision qui changera sa vie à jamais.

« Sound of metal » est porté par l’excellent Riz Ahmed, vu dans Night call, Star wars Rogue One, la série the Night Of, ou Les frères Sisters de Jacques Audiard.

Ici sa frêle silhouette de petit mec énervé va se confronter au mur du silence comme un coup d’arrêt immédiat à une vie, des rêves, une fuite en avant que le personnage orchestrait avec sa copine. Ils étaient restés adolescents et sentaient une liberté mais aussi un stress, celui de ne pas savoir vers où ils allaient. Ce mélange d’inconnu et de kif pour une musique et un art qu’ils adorent, se trouve stoppé net.

Privé de l’audition, de ce qui créait ses plaisirs, son repère au monde et guidait sa passion, le personnage voit alors tout se dérober sous ses pieds.

Dès lors que faire ? L’immersion de ce dernier dans une communauté de sourds muets va alors lui permettre de retrouver l’espoir et surtout de reconstruire un monde, des liens sociaux. Le film est à la fois très rude par la violence de ce qui arrive et cette cassure à laquelle n’importe qui peut s’identifier.

Mais il est aussi porté d’une lucidité sans pathos, et avec de la lumière malgré out, juste que ce n’est pas celle qu’aurait souhaitée le personnage, c’est un chemin imposé.

Le réalisateur, Darius Marder, dont c’est le premier film de fiction à 48 ans, décide de nous immerger dans ce monde du silence en usant des bruits, des sonorités telles que le personnage les perçoit dorénavant puis en nous faisant écouter le vrai son par les personnages extérieurs. Ceci donne au récit une dimension très particulière et au delà d’une excellente direction artistique et d’une direction d’acteur là aussi brillante, le film provoque un sentiment très étrange.

On est pendant deux heures aux côtés de ce jeune homme qui se bat pour ne pas perdre un monde dont il a été expulsé du jour au lendemain pour toujours. Son combat est très émouvant et encore une fois très sobre, pas de mélo. Mais surtout le film provoque à plusieurs reprises une émotion que je n’ai jamais ressentie de la sorte auparavant grâce au thème et au traitement de ce dernier.

Rares sont les films qui allient aussi bien le fond de leur propos et la forme.

Un des grands films de 2021 assurément.

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N°08 – « La Nuée » de Just Philippot

https://www.cinechronicle.com/wp-content/uploads/2021/06/La-Nuee-affiche.jpg

Le pitch : Difficile pour Virginie de concilier sa vie d’agricultrice avec celle de mère célibataire. Pour sauver sa ferme de la faillite, elle se lance à corps perdu dans le business des sauterelles comestibles. Mais peu à peu, ses enfants ne la reconnaissent plus : Virginie semble développer un étrange lien obsessionnel avec ses sauterelles…

Le film de genre à la française revient en force avec plusieurs films acclamés en festival dont « La Nuée« , premier film de Just Philippot, qui embrasse les cauchemars de monstresmais aussi les réflexions autour du monde paysan et de la grande difficulté économique que ces derniers encaissent. Et c’est là que le film est original, son scénario, écrit par Jérôme Genevray et Franck Victor est très très bien ficelé, faisant monter la pression par strates successives et sans relâche, en intercalant des moments plus axés sur la violence sociale que vit l’héroïne, jouée par  Suliane Brahim, sociétaire de la Comédie-Française.

Souvent en France, il est de bon ton qu’un réalisateur écrive aussi son scénario. Sauf que ce sont deux métiers très différents et qu’on n’a pas forcément le même talent pour les deux. En prenant ce récit via ce découpage des taches entre deux excellents scénaristes et un jeune réalisateur totalement tourné vers l’immersion dans l’étrange, le résultat est indéniablement l’une des plus belles pépites que le cinéma français sortira en 2021 !

Suliane Brahim incarne un personnage trouble dont on n’arrive jamais à savoir quelle sera sa direction entre folie ou raison, entre faire passer en premier ses enfants ou ses insectes. Le lien qui l’unit à ces bêtes est particulier car axé sur sa propre survie, celle de pouvoir vivre de son exploitation. Elle est prête à sacrifier tellement que le scénario surfe sur l’inconscient collectif que l’on a de grands psychopathes du cinéma d’épouvante. Sauf qu’ici le psychopathe travaille avec des monstres en pleine campagne. Strange.

La maitrise incroyable du récit, de la mise en scène, avec une économie de démonstration et peu de scènes horrifiques en soit, montre à quel point « La Nuée » est très original et différent de ce que l’on connait.

La spirale fantastique du film le rend fascinant et terrifiant.

On a hâte de voir la suite de la filmographie tant des scénaristes que du réalisateur et de l’actrice principale.

Un belle et forte surprise et une proposition de cinéma qui fait du bien car elle innove avec talent.

La piste aux Lapins :

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N°07 – « The Father » de Florian Zeller

https://www.cinechronicle.com/wp-content/uploads/2021/05/The-Father-affiche.jpg

Florian Zeller est un auteur de théâtre et un écrivain à succès devenu réalisateur de grand talent avec ce premier film, The Father, encensé par la presse et qui a valu un second Oscar du meilleur acteur à Anthony Hopkins dans le rôle d’un père perdant la mémoire sous nos yeux et étant géré par sa fille, jouée par l’excellente Olivia Colman (La Favorite, The Crown).

Un second oscar du meilleur scénario a couronné le film à très juste titre.

The Father est tout simplement bouleversant de bout en boit car il repose sur un concept brillant. Il nous fait vivre à nous, spectateurs, le perte de repères temporelle, la confusion des lieux, des dates et même des individus en nous insérant dans la tête de cet octogénaire en perdition.

Anthony Hopkins est hyper impressionnant et amène une empathie incroyable pour lui sans aucune forme de pathos ou de condescendance. Il est d’une justesse incroyable avec en face de lui une Olivia Colman tout aussi inspirée.

Le film aurait pu être uniquement lourd et angoissant. Certes le sujet est grave et ne prête à aucune légèreté mais il est amené avec tellement de talent dans le scénario à tiroirs que le film vous scotche devant l’écran et ne peut pas vous laisser indifférent.

Le film trotte d’ailleurs dans la tête un peu plus longtemps car il vous renvoie à votre propre situation, celle de vos parents, grands-parents voir la votre si vous vous projetez. Un sujet si universel méritait un traitement aussi fin, réaliste et regardant les choses en face. Amour de Michael Haneke avait aussi cette force de l’inévitable, du déterminisme de notre finitude à tous tout en charriant des flots de sentiments.

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N°06 – « Le sommet des Dieux » de Patrick Imbert

Le sommet des dieux - Le Méliès - Grenoble - Cinéma art et essai

Quelle idée gonflée pour un réalisateur français que d’adapter un manga culte de Jirô Taniguchi, auteur de « Quartier lointain« , « L’homme qui marche » ou « Le journal de mon père« .

« Le sommet des Dieux » fait partie de ces œuvres fascinantes de simplicité et de beauté et la première force du film est de synthétiser 1000 pages de mangas en 1h30 et de garder toute l’essence de l’œuvre pour la rendre accessible au plus grand nombre.

Le pitch : A Katmandou, le reporter japonais Fukamachi croit reconnaître Habu Jôji, cet alpiniste que l’on pensait disparu depuis des années. Il semble tenir entre ses mains un appareil photo qui pourrait changer l’histoire de l’alpinisme. Et si George Mallory et Andrew Irvine étaient les premiers hommes à avoir atteint le sommet de l’Everest, le 8 juin 1924 ? Seul le petit Kodak Vest Pocket avec lequel ils devaient se photographier sur le toit du monde pourrait livrer la vérité. 70 ans plus tard, pour tenter de résoudre ce mystère, Fukamachi se lance sur les traces de Habu. Il découvre un monde de passionnés assoiffés de conquêtes impossibles et décide de l’accompagner jusqu’au voyage ultime vers le sommet des dieux.

L’animation est tout d’abord fidèle au roman graphique et d’une grande fluidité, permettant de toucher du doigt toute la poésie de ces aventuriers limite nihilistes qui se dépassent pour gravir des sommets quitte à y mourir et qui le font pour l’ivresse du dépassement, pour s’extirper de leur propre vie vers un idéal à la fois fascinant et qui les surpasse.

« Le sommet des Dieux » parle de l’humilité de l’homme face à la nature et se mue en réflexion philosophique sans jamais tomber dans le démonstratif ou l’explication de texte.

Patrick Imbert insuffle un rythme, un suspens qui vous prend aux tripes et vous balance une décharge d’humanité qui fait un bien fou.

La profondeur des thèmes et leur extrême pudeur font de cette adaptation l’un des grands films de 2021.

Arriver à capter le gigantisme des paysages, le danger qui se dérobe sous les pieds, le vertige des risques pris, juste avec des dessins. C’est un tour de force très très respectable.

« Le Sommet des Dieux » allie un scénario et une narration intelligente, une illustration graphique fidèle et qui capte toute la réflexion sur de grandes questions existentielles, et se termine sur l’impression d’avoir vu un très grand film.

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N°05 – « Le dernier Duel » de Ridley Scott

L'histoire vraie de Jean de Carrouges et Jacques Legris, héros du film "Le  dernier Duel" de Ridley Scott - Geo.fr

Pour ce nouveau scénario signé par Matt Damon et Ben Affleck, Ridley Scott renoue avec le meilleur de son cinéma et livre un film miroir à son premier chef d’œuvre et premier long métrage, « Les duellistes« .

Ce qui frappe d’abord est son sens aigu et clair pour filmer des scènes de batailles d’une rare violence avec brio. Papy Scott n’a rien perdu de son talent et même, ce que je pouvais lui reprocher sur Gladiator et des scènes d’action très brouillées où on ne voyait rien, ici et bien c’est l’inverse. On voit toute la brutalité du moyen âge et le peu de cas donné au sens d’une vie.

Ridley Scott use donc d’une histoire vraie, le dernier duel à mort autorisé en France par le Roi en 1386, pour décrire trois versions d’un même récit sous l’angle des trois protagonistes, le mari bafoué, joué par Matt Damon, l’épouse clamant qu’elle a été violée, Jodie Comer, et l’accusé de viol, incarné par Adam Driver.

Et là, avec la même technique que sur le Rashomon d’Akira Kurosawa, le maitre britannique livre son meilleur film depuis 15 ans. Car les scènes sont vues avec de légers décalages de points de vues et chaque personnage prend en épaisseur, en nuance ou au contraire en brutalité et veulerie.

L’évolution du récit est fascinante car l’angle change. Le personnage chevaleresque et soucieux des femmes passe à une brute obligée de faire la guerre pour gagner de l’argent. On y voit la construction d’une rivalité sur le favoritisme fait à l’un et le refus de tout ou l’humiliation infligé à l’autre. Il est alors plus question d’image que d’honneur ou de défense du bon droit. Pareil pour l’accusé violeur dont la vision propre est nuancée dans son regard même si Scott assume de le désigne coupable ou non coupable dans les faits. Il distille juste le malaise que certaines soubresaut donnent aujourd’hui comme The Morning Show.

Ridley Scott fait de son film un brulot féministe dénonçant la crasse de la culture du viol de cette époque et nous ramène au chemin encore à parcourir justement en montrant la vision du mâle et son absence de conscience.

C’est à la fois brillant et très moderne que de parler de sujets très contemporains avec autant de finesse et de recul sur notre propre histoire culturelle.

Le dernier duel est une fresque médiévale pleine de surprises, mise en scène avec brio et portée par un casting quatre étoiles au premier rang duquel Jodie Comer, héroine de Killig Eve, explose comme une énorme star.

La piste aux Lapins :

4,25 lapins

 

N°04 – « The Nightingale » de Jennifer Kent

Critique du film The Nightingale - AlloCiné

Le pitch : Tasmanie, 1825. Clare, une jeune irlandaise, poursuit un officier britannique à travers la Tasmanie pour se venger d’actes de violence qu’il a commis contre elle et sa famille, avec pour seul guide un aborigène.

Disponible sur OCS depuis le 09 mars 2021

OCS : forces, faiblesses, un concurrent sérieux pour Netflix ? Ce qu'il  faut savoir avant de s'abonner - CNET France

 Avec Aisling Franciosi, Sam Claflin, Baykali Ganambarr
On reconnait un grand film assez rapidement. Lorsqu’au bout de cinq minutes, on est happé par la mise en scène, le scénario, le jeu, l’ambiance.
« The Nightingale » est une totale réussite. La réalisatrice Jennifer Kent, repérée avec le film d »épouvante Mister Babadook en 2014, revient avec un film qui parle de condition féminine (ou plutôt d’absence de condition) dans une Australie d’une violence inouïe au 19ème siècle.
Elle décrit le racisme à l’état brut et pur. La violence des morts et des situations est forte mais impactante. On comprend toute l’horreur d’un comportement génocidaire de colons anglais bas du front et capables du pire, de nier l’humanité d’une femme ou d’un autochtone. La bêtise, la cruauté et la stupidité humaine, de ces blancs se sentant supérieurs et civilisés mais détruisant un autre peuple et s’abaissant à l’état de bêtes, c’est hélas le lot commun des envahisseurs sur tous les territoires du monde tout au long de l’histoire de l’humanité.
Jennifer Kent le montre crument et nous fait toucher du doigt la fragilité de la vie, l’absence de valeur donnée à cette vie par ces connards qui ont pavé notre histoire commune et l’ont façonnée. Alors forcément, on ne s’étonne pas de la violence actuelle car l’homme est un loup pour l’homme et encore le loup vit en meute. Ici bien des personnages sont immondes mais mention spéciale est à adresser à celui joué par Sam Claflin, qui trouve enfin un bon rôle. C’est d’ailleurs une bonne idée de confier ce rôle de sadique sans aucune conscience à part celle de son égo, à un beau mec, plastiquement séduisant mais à gerber de par son comportement.
Puis la réalisatrice nous plonge en pleine nature et jungle sauvage, hostile mais non du fait des animaux mais plutôt des hommes blancs qui la traversent avec brutalité. D’ailleurs le symbolisme de l’arrivée à la ville et de l’immersion dans un monde encore plus dangereux est extrêmement réussi.
Aisling Franciosi campe cette jeune femme pleine de rage et qui n’a plus rien à perdre. Mais là où plein de réalisateurs auraient transformé ce film de vengeance en thriller rythmé par une musique omniprésente, Jennifer Kent apporte tant un regard de femme vraiment nouveau sur le genre que des choix de mise en scène radicaux.
La violence n’est pas embellie ou scénarisée avec des choix de couleurs, de ralentis ou autres astuces. Non, elle est brutale, arbitraire et on ne l’attend pas, on la subit. Par ailleurs, l’absence de musique ancre encore plus le long métrage dans une absence d’artifice. C’est ce qui permet au film d’atteindre un niveau supérieur à la moyenne artistique, via également son choix de format d’image carrée, très resserré.
Cette guerre entre Aborigènes et britanniques en Tasmanie est un sujet relativement inédit et une période, un lieu de l’histoire rarement évoqué au cinéma.
Le film est nuancé quant à la psychologie de ses deux protagonistes, la femme et l’aborigène, interprété magnifiquement par Baykali Ganambarr, au regard inoubliable d’humanité, de révolte et de dignité. Leurs mentalités meurtries vont apprendre à se comprendre et à s’associer pour faire naitre une amitié. C’est là que « The Nightingale » décolle littéralement par le souffle de l’émotion qu’il apporte. La grande dignité du récit, âpre et de la volonté de survie pour se venger puis pour l’autre, c’est ce qui fait que le film devient très beau, très fort sans aucun sentimentalisme.
La puissance de « The Nightingale » est qu’il fonctionne comme un uppercut drainant des thématiques sociales très fortes, brulot pour la tolérance entre les peuples autant que divertissement rempli de suspens teinté de déterminisme voire de nihilisme. Cette dimension de vengeance d’une femme et d’un homme à qui on a tout pris sans aucune retenue, sans aucun contrôle, en leur marchant dessus, en niant leur existence, fait du film un objet cinématographique marquant.
Une grande réalisatrice est née, signant un excellent film à voir de toute urgence !
La piste aux Lapins :

4,25 lapins

 

 

ET ET ET …LA TETE DU CLASSEMENT 2021 AVEC PAS MAL D’EX AEQUO CAR CE SONT DES FILMS EXCEPTIONNELS :

 

3ème ex aequo – « Drive my car » de Ryusuke Hamaguchi

Drive My Car - film 2021 - AlloCiné

Il faut faire un certain effort pour vouloir voir ce « Drive my car« , film japonnais de 3 heures soit une complexité à trouver ce temps dans un agenda. Le film était l’un des chocs du dernier festival de Cannes et il est reparti avec le prix du scénario alors qu’on le voyait dans les favoris pour la Palme d’Or après son accueil critique unanimement dithyrambique.

Et c’est vrai que « Drive my car » est un très grand film, une réussite majeure qui fait exploser à l’international un grand cinéaste japonnais, Ryusuke Hamaguchi.

Moi qui déteste les films longs, j’ai trouvé le film fluide et certes baigné d’un rythme particulier mais sans scènes en trop.

Le réalisateur arrive à nous parler du deuil, de l’acceptation de la disparition de l’être aimé avec une très grande finesse dans son scénario justement, d’où cette récompense cannoise hyper logique.

On y suit un acteur de théâtre reconnu qui vit avec son épouse scénariste de télévision, qu’il adore avant qu’un drame le pousse loin de chez lui pour la mise en scène d’Oncle Vania à Hiroshima, avec des acteurs parlant des langues différentes dont la langue des signes. Et afin de ne prendre aucun risque d’accident, le festival qui l’accueille exige qu’une jeune chauffeur conduise sa voiture pendant toute la durée des préparatifs et de la représentation.

Bien sur la durée du film est utilisée pour développer divers personnages secondaires qui donnent énormément d’humanité et de touches fines au tableau que dresse l’auteur.

Surtout il fait se croiser deux être extrêmement seuls qui n’arrivent pas à faire un deuil, à passer à autre chose et qui sont emprisonnés tant dans leur vie passée, leurs souvenirs que l’absence de mots mis sur leurs erreurs, sur les regrets qui les dévorent, ce qu’ils auraient voulu dire au disparu, comment ils auraient pu éviter le drame. Le déterminisme et la fatalité qui se sont abattues sur ces personnages aboutissent à un message de vie et surtout un recul brillant sur comment exister dans un monde où l’être qui était tout pour soit n’est plus là.

Le film réussit à construire cette relation devant nos yeux sur la base de l’écoute. L’écoute de l’auteur dont l’épouse lui raconte ses histoires avant d’en faire des scénari et on comprendra pourquoi plus tard, l’écoute d’une cassette audio pour apprendre son texte, l’écoute par le chauffeur de tout ce qui arrive à son client avant d’interagir, l’écoute de l’acteur lorsqu’elle se confie, l’écoute des sept acteurs de théâtre qui lisent leur texte encore et encore afin d’atteindre une perfection de jeu…le scénario se renvoi des références, des clins d’œils et fonctionne de façon incroyable lorsqu’il explique les scènes passées et redéploie des scènes vues plus tôt qui prennent tout leur ses à la lumière de l’évolution de l’histoire.

Quel hommage aux conteurs et à la force de la parole pour panser les blessures et renaitre. Quel hommage à l’art en tant que tel, à cette pièce de théâtre d’Anton Tchekhov dont le héros dit à un jeune acteur que le texte lui répond quand on se l’approprie et qu’on lui parle, comme un être fascinant et vivant. Et là où « Drive my car » est très très fort c’est qu’il illustre ce propos qui pourrait être ultra théorique via quelques scènes plus loin qui ouvrent l’histoire et vous font dire « ouha, sacré dispositif scénaristique !« .

« Drive my car » est donc un film brillant d’intelligence, à la fois envoutant, sensuel et limpide. Et non le film n’est pas du tout chiant, loin de là. Il s’y passe de nombreuses choses même si elles sont souvent racontées mais c’est justement tout le thème et le tour de force du film.

La suggestion provoquée par les mots et le récit que font les personnages, récits qui s’enchevêtrent, est d’une ampleur assez bluffante, et d’une profondeur assez rare.

La piste aux Lapins :

4,5 lapins

 

 

3ème ex aequo – « La main de Dieu » « The Hand of God » de Paolo Sorrentino

La Main de Dieu - film 2021 - AlloCiné

Le Pitch : Naples dans les années 80. Fabietto Schisa, adolescent mal dans sa peau, vit avec sa famille excentrique et haute en couleurs. Mais son quotidien est soudain bouleversé lorsque Diego Maradona, légende planétaire du football, débarque à Naples et le sauve miraculeusement d’un terrible accident. Cette rencontre inattendue avec la star du ballon rond sera déterminante pour l’avenir du jeune homme. Avec La Main de Dieu, Sorrentino revient dans sa ville natale pour réaliser son film le plus personnel, qui mêle le destin et la famille, le sport et le cinéma, l’amour et les illusions perdues.

Paolo Sorrentino est l’un des grands réalisateurs italiens du moment, qui tourne à l’international et nous a livrés L’Ami de la famille (2006), puis Il Divo (2008) sur l’homme politique italien Giulio Andreotti, This Must Be the Place avec Sean Penn, La Grande Bellezza sur un écrivain romain désabusé, qui reçoit l’Oscar et le Golden Globe du Meilleur Film étranger en 2014 et enfin le sublime Youth où Michael Caine et Harvey Keitel interprètent deux amis artistes au crépuscule de leur existence, un film magnifique. Puis il va marquer les critiques avec sa série en deux saisons géniales sur un Pape jeune mais ultra conservateur joué par Jude Law avec The Young Pope puis THe New Pop tout aussi excellente avec en plus le trop rare John Malkovich.

De par ses thématiques variées, sa mise en scène fluide et très esthétique, usant de bande son toujours originale et de scènes surréalistes venant agrémenter des rêves des personnages, Sorrentino a trouvé son style, assez vite reconnaissable.

Vous retrouverez tout ceci dans cette production Netflix, prête à conquérir de nombreux prix début 2022 après son Lion d’argent à Venise en septembre dernier, car c’est probablement l’un de ses meilleurs si ce n’est son meilleur film.

« La main de Dieu » raconte son histoire à lui, totalement autobiographique, d’un jeune adolescent qui trouva sa voie après un drame familial d’une violence que je ne connaissais pas avant de lire sa bio, après le visionnage. En se livrant ainsi, Paolo Sorrentino nous offre un magnifique hommage à la création, à la liberté et l’insouciance de son adolescence et surtout à ses parents.

Toni Servillo et Teresa Saponangelo sont à tomber par terre et ne pourront que vous rendre fans absolus de leurs personnages, de leurs trahisons, leurs mensonges, leurs fêlures. Le regard sur ses parents de Sorrentino est tendre sans être trop mélancolique car il leur rend vie à travers ces deux portraits iconoclastes. Cette mère blagueuse qui fait des canulars est géniale, ce père volage communiste et banquier est excellent et haut en couleurs. Et toute la familia italienne autour donne lieu à des scènes où l’on est hilares.

Le film est au début très lumineux et très drôle et bien sur le réalisateur choisit la nuit pour les scènes de drame et post drame et le crépuscule pour son entrée dans l’âge adulte.

Filippo Scotti crève l’écran dans le rôle du réalisateur, à la fois naïf et solaire, qui découvre la vie peu à peu. On peut lui prédire une belle carrière.

Je rassure les non fouteux, Maradona n’est qu’un prétexte à un superbe film sur les illusions perdues de l’adolescence, la fin de l’enfance forcée avec toute une galerie de personnages denses, complexes ou tout simplement tellement originaux que le film passe à une vitesse incroyable.

On touche du doigts la solitude et le manque qui ont amené à façonner l’artiste qu’est devenu Paolo Sorrentino aujourd’hui.

Et c’est d’autant plus émouvant qu’avec ce film, il semble parler à ses parents et leur dire « voyez ce que vous m’avez transmis ! voyez ce que je suis devenu grâce à vous ! Pour tout cela je vous aime « . Il est difficile de ne pas être ému par ce message après avoir tant croqué la vie avec lui dans ce Naples magnifié.

Un film sublime.

La piste aux Lapins :

4,75 lapins

 

3ème ex aequo - »Nomadland » de Chloé Zaho

Nomadland - film 2020 - AlloCiné

Voici enfin le film multi récompensé d’un lion d’Or à Venise, Oscar du meilleur film, 3ème Oscar de meilleure actrice pour Frances McDormand (Madame Joel Coen) et Oscar de la meilleure réalisatrice pour Chloé Zaho, seconde réalisatrice oscarisée, d’origine asiatique qui plus est.

A tous ces titres le film est mémorable mais il serait limitatif de le considérer uniquement par ce biais prestigieux. Car si Nomadland a autant séduit, c’est surtout parceque c’est un grand film, d’une puissance rare.

Chloé Zaho avait déjà montré avec The Rider son attachement aux grands paysages montagneux et désertiques d’Amérique. Elle en fait ici un quasi personnage à part entière et s’intéresse à un thème et une population dont on ne parle jamais.

Nous allons suivre durant près de 2h une femme d’une soixantaine d’année qui a perdu son travail et son mari (elle est veuve) dans une région désindustrialisée d’une cité ouvrière du Nevada, rayée de la carte lorsque l’usine a fermé.

Mais plutôt que de tenter de se reconvertir sur place, elle a préféré prendre la route avec son van et vivre sans domicile fixe, en alternant des petits boulots au fil de son voyage.

On ne comprend qu’à la fin la raison de ce chemin et de ce (non) choix de vie. Car si le personnage vit de peu et s’est vue contrainte de tout abandonner pour des raisons d’argent, son périple s’avère aussi être une échappée qui l’empêche de faire le deuil et lui permet de ne pas couper totalement avec le passé. Ces paysages sont autant d’occasions de s’intérioriser.

Le film n’est ni misérabiliste ni bourré de pathos, à l’image de son actrice principale, au regard qui évoque à la fois la tristesse et la ténacité, Nomadland nous fait découvrir des vies brisées qui se sont trouvées un mode de vie empreint de liberté et de volonté de ne pas trop s’attacher au matériel des choses, voire aux souvenirs. C’est toute l’ambiguïté du film que de voir ces personnages tenter de s’en sortir, se serrer les coudes et créer une vrai communauté, mais aimer également ce mode de vie comme une réponse à la société qui les a jetés sur le côté et comme une déclaration de vie face à un passé qui les a brisés à un moment ou un autre.

Le fait d’embaucher des non acteurs, des personnes qui vivent vraiment en nomades rend le film particulièrement authentique. Chloé Zaho aime les silences et illustre la grande solitude de ces âmes vagabondes tout en montrant le lien qui les unit, les fragilités qui créent leur communauté et ce besoin immense de s’oublier dans les étendues désertiques et les paysages à couper le souffle, plus grands qu’eux mêmes. Ils donnent évidemment une résonance toute particulière à leur solitude. C’est comme si les personnages s’abandonnaient à la nature, préféraient l’absence d’attache, fuyant le monde normé des vivants sédentaires car il est derrière eux… avec de très bons souvenirs mais une absence d’envie d’en accumuler d’autres sans les proches qui sont désormais disparus. La vie n’aura plus le même goût alors pourquoi tenter de la recréer de façon factice ?

Le message est très beau et fait pleurer à plusieurs reprises par son extrême simplicité naturaliste.

On est sidéré par tant d’humanité blessée, de résilience et de force qui imprègne le personnage de Frances McDormand. La modestie de la réalisation rend le film encore plus fort et plus attachant envers ces personnages fantomatiques que l’Amérique a oubliés depuis longtemps.

Mais surtout le film se veut un hymne à la vie et à la commuions avec la nature, moins désespéré que le thème ne le laisserait penser, avec une nuance de couleurs crépusculaires où la lumière est encore présente et c’est très très beau.

La piste aux Lapins :

4,5 lapins

 

3ème ex aequo – « A Sun » de Mong-Hong Chung

 

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Surprenant que Netflix diffuse ce type de film, comme quoi la plateforme diversifie son offre et ne pense pas qu’aux séries de qualités diverses ou aux gros films d’auteurs.

Je viens donc de découvrir un nouveau grand nom du cinéma asiatique. Mong-Hong Chung est taïwanais, il n’est pas à son premier long métrage mais ses films ne traversaient pas les océans. Merci donc à la plateforme au N rouge.

Car je me suis pris une vraie claque de cinéma avec cette histoire de famille déchirée par un drame, qui va se déconstruire et se reconstruire sous nos yeux.

Ne vous fiez pas aux 2h30 de durée, ils passent très vite tant le talent de mise en scène rappelle les plus grands, de la finesse de Wong Kar Wai et l’action plus énervée des grands réalisateurs sud coréens.

Le film fascine dès ses premières minutes lorsque le jeune cadet de la famille participe à une vengeance auprès d’une petite frappe. Il se retrouve emprisonné pour trois ans. Sauf qu’il vient de mettre enceinte une gamine de 15 ans, que sa mère tente comme elle peut de gérer, que son frère ainé, beau et intelligent est le chouchou du père qui méprise son autre fils qu’il considère comme un raté…ambiance.

A cette histoire de famille qui s’est construite sur des déceptions, une absence de dialogue, des culpabilités, va se rajouter tour à tour un fantôme, un thriller noir, une histoire de rédemption et d’acceptation, et au final un chemin vers la lueur.

Mong-Hong Chung a une immense tendresse pour ses personnages auxquels on s’attache immédiatement, qu’ils soient dans l’aveuglement, la violence stérile ou qu’ils soient paumés.

Peu à peu les fils entre eux vont se démêler et devenir d’une limpidité confondante, d’une beauté assez remarquable. A de nombreuses reprises l’émotion arrive là où on ne l’attend pas, avec sobriété mais avec l’effet que font les grands films, ceux qu’on ne voit pas venir et qui vous emportent.

Les messages du film sont universels et au final d’une grande simplicité. Mais aussi A sun reste un objet de cinéma divertissant malgré l’alternance de minimalisme formel et de ruptures émotives qui prend garde à ne jamais laisser le spectateur se perdre. Il prend certes le temps de décrire les relations et d’instaurer une ambiance très particulière formée de tension et d’espoir. Mais il ne prend pas trop le temps, usant d’ellipses et d’effets d’accélérateurs de l’histoire pour éviter au spectateur de s’appesantir et l’accrocher à l’étape d’après.

Œuvre à l’esthétique parfois radicale, A Sun use parfois de violence graphique mais toujours au moment opportun, jamais pour de l’esbroufe. A Sun alterne le romanesque et d’autres genres de cinéma avec une fluidité étrange.

Forcément, après ce coup de maitre, je ne peux qu’avoir envie de voir ce que Mong-Hong Chung nous réservera pour la suite de sa carrière.

La piste aux Lapins :

4,75 lapins

 

 

2ème ex-Aequo – « Gagarine » de Fanny Liatard, Jérémy Trouilh

Gagarine de Fanny Liatard, Jérémy Trouilh (2020) - UniFrance

Youri, 16 ans, a grandi à Gagarine, immense cité de briques rouges d’Ivry-sur-Seine, où il rêve de devenir cosmonaute. Quand il apprend qu’elle est menacée de démolition, Youri décide de rentrer en résistance. Avec la complicité de Diana, Houssam et des habitants, il se donne pour mission de sauver la cité, devenue son  » vaisseau spatial « .

Fanny Liatard et Jérémy Trouilh signent leur premier film et c’est une énorme claque !

Comment parler de banlieue sans verser dans les clichés, sans ressasser les sempiternels constats et en positivant. Gagarine n’est pas un feel good movie mais une métaphore surprenante dont vous sortirez des étoiles plein les yeux car le film est très beau.

Il a ce qui est rare au cinéma, quelques fois par an, la grâce !

En choisissant de suivre ce jeune homme à peine sorti de l’adolescence qui rêvait de devenir cosmonaute et tente à tout prix de réparer sa cité pour éviter qu’on la détruise, les réalisateurs ont choisi un angle de vue totalement original et différent. Ils rendent un merveilleux hommage à tous les rêveurs, ceux qui pensent que l’imaginaire est plus fort que le réel et permet de tenir. Forcément, je ne peux qu’être touché par cela, moi qui adore Terry Gilliam et tous les fous capables de s’évader avec trois bouts de ficelles et un carton, juste en se projetant dans leurs fantasmes et en laissant leurs créativité intérieure panser tout le reste.

Car Gagarine n’en demeure pas moins un film social. Mais c’est plus sur la communauté de vies que le film insiste. Sur ces familles reliées par un même lieu, une cité qui tombe en ruines mais qui est leur vrai chez eux car ils y ont noué des liens humains, des souvenirs et bien sur, des rêves. La solidarité des uns et le jamais content des autres donne à l’ensemble une vie de village explosé et de vrais gueules.

Le héros gère sa propre solitude et l’abandon par sa mère par cet objectif totalement fou, celui de réparer sa cité voir de s’envoler comme Youri Gagarine.

Alséni Bathily, Lyna Khoudri, Jamil McCraven et Finnegan Oldfield forment un quatuor de jeunes gens absolument renversants de sensibilité, d’amitié et de solitudes qui s’entrechoquent et s’apprivoisent parcequ’ils ne sont rattachés à rien d’autre que cette cité « Gagarine« .

Celà faisait très longtemps que je n’avais pas vu autant de douceur, de poésie d’une simplicité confondante qui donne le sourire et un message ultra positif sans être naïf pour autant.

Le film est qui plus est superbement mis en scène, entre travelling exposant tout l’urbex de ce batiment en ruines et les idées d’images très originales qui illustrent ce poème salvateur et onirique.

Bouleversant et en apesanteur. Un très grand film.

La piste aux Lapins :

4,75 lapins

 

 

2ème ex-Aequo – « Annette » de Léos Carax

Annette - film 2021 - AlloCiné

Le pitch : Los Angeles, de nos jours. Henry est un comédien de stand-up à l’humour féroce. Ann, une cantatrice de renommée internationale. Ensemble, sous le feu des projecteurs, ils forment un couple épanoui et glamour. La naissance de leur premier enfant, Annette, une fillette mystérieuse au destin exceptionnel, va bouleverser leur vie.

Léos Carax est un réalisateur très rare, adulé mais qui ne sort que son sixième film à 60 ans. Le réalisateur de « Mauvais sang », « Les amants du Pont neuf » et le merveilleux « Holy Motors » était attendu au tournant avec cette comédie musicale, maintes fois repoussée et basée sur un travail étroit avec le groupe Sparks.

Le film a divisé à Cannes et va diviser le public entre ceux qui trouvent le film ridicule et ceux qui adorent et crient au génie.

C’est sur que voir Marion Cotillard en cantatrice qui meurt à la fin de chacune de ses pièces de théâtre, çà peut faire penser à sa mort ratée dans The Dark Knight Rises. Ok, mais ce serait vraiment stupide de s’arrêter à cela. C’est vrai que la voir chanter en cantatrice grimée ceci peur agacer certains. Et enfin c’est vrai que le choix gonflé de Carax de représenter l’enfant du couple de la sorte (surprise, je ne vous dis pas) peut désarçonner une partie du public mais il y a une raison, évidente, que vous comprendrez à la toute fin.

Et bien moi je fait partie de l’autre catégorie qui s’est pris une énorme claque de cinéma !

Le cinéma n’est pas mort, il revient à Cannes et de quelle plus belle manière pouvait-il le faire ?

Léos Carax a l’idée géniale de présenter son film par lui même, muet qui lance le générique avec les Sparks et une chanson qui invite à intégrer le show, « So may we start ?« …et là le film décolle dès le début en chansons et ne quittera jamais le concept. Cà chante tout le temps du début à la fin.

Adam Driver de sa voix grave est juste génial de bout en bout et mériterait un prix d’interprétation.

Certaines scènes sont des moments de fulgurance narrative assez incroyables. La scène à moto, les scènes du comique qui s’adresse au public sont tout simplement brillantes.

Driver est confondant de talent et Carax confondant d’inventivité et de fluidité de sa mise en scène.

Il lie l’histoire de ce couple star d’artistes et leur destin à la construction d’un grand Opéra. Jusque dans les décors, somptueux qui rappellent la scène de théâtre, tout est pensé, millimétré avec une intelligence incroyable.

Léos Carax m’a surpris par un film comme je n’en n’ai pas vu auparavant, pas comme çà.

Annette est d’une poésie sombre, rythmée par une BO des Sparks qui colle au récit avec virtuosité.

Ce récit sur le mal profond né de la jalousie et de la passion, sur l’enfance volée, sur la célébrité est d’un lyrisme impressionnant.

Ce chef d’œuvre instantané est qui plus est très accessible.

Un film sublime et déchirant, d’une beauté rare.

La piste aux Lapins :

5 lapins

 

1er ex-aequo 2021 

 

« La loi de Téhéran » de Saeed Roustayi

 

La Loi de Téhéran - film 2019 - AlloCiné

Le pitch : En Iran, la sanction pour possession de drogue est la même que l’on ait 30 g ou 50 kg sur soi : la peine de mort. Dans ces conditions, les narcotrafiquants n’ont aucun scrupule à jouer gros et la vente de crack a explosé. Bilan : 6,5 millions de personnes ont plongé. Au terme d’une traque de plusieurs années, Samad, flic obstiné aux méthodes expéditives, met enfin la main sur le parrain de la drogue Nasser K. Alors qu’il pensait l’affaire classée, la confrontation avec le cerveau du réseau va prendre une toute autre tournure…

Pour son premier film, l’iranien Saeed Roustayi scotche tout le monde et se fait un nom aux côtés des plus grands dont Asghar Farhadi ou Jafar Panahi.

Dès les premières scènes il dévoile l’ampleur de sa mise en scène extrêmement fluide et qui use du symbole sans en faire des caisses. On y voit des policiers qui arrêtent des centaines de consommateurs de drogue dure, entassés dans un terrain vague entre des silos de bétons, de tous âges par c’est la pauvreté qui les a amenés là. L’exode des cette foule d’anonymes vers d’immenses prisons est juste bluffant car il dit tout de ce fléau ingérable sur place car sa racine est la misère. La première scène est une course poursuite à pied dans Téhéran entre un policier et un dealeur et le final est juste excellent tant il va jouer sur le reste de l’histoire à un moment inattendu.

Roustayi aurait pu être considéré comme ultra classique et peu critique de la société (le film est sorti en Iran et a cartonné) mais justement il montre « les bons », ces policiers qui traquent les dealeurs et tentent de démonter un réseau, avec un regard distant.

Le policier, anti héros joué par la star Payman Maadi (vu chez Asghar Farhadi) est jusque boutiste et d’une dureté incroyable. Alors qu’on apprend très vite que les peines peuvent aller rapidement à la peine de mort.

Il nous parle de corruption de la police comme une chose commune mais fait de ses personnages de bons policiers. Pourtant il n’existe pas de vraie solidarité entre ces flics et la cohésion n’existe pas car le régime l’empêche, chacun a peur des conséquences de ne pas être plus blanc et sans reproches que le voisin. C’est raconté avec suffisamment de finesse pour que le régime ne puisse rien redire au propos du film. Mais c’est bien là comme une déconstruction du lien social.

Puis à la moitié du film, le réalisateur renverse la vapeur et va nous parler du dealer, de l’énorme poisson qu’ils recherchent, après avoir décrit avec méthode et suspens les interrogatoires psychologiques et la façon de remonter la filière. Le personnage qui entre en jeu donne alors une dimension différente au film qui passe d’excellent polar à une introspection du milieu carcéral et d’où viennent ces anonymes dealeurs ou consommateurs. Il ne cherche pas d’excuses au mal, il l’explique juste avec humanité et des petites scènes toutes simples qui emportent autant l’émotion qu’elle révèlent une grande maturité de ce grand cinéaste qui nait devant nos yeux.

Après un film haletant, complexe, qui passe à toute allure telle la première scène de course poursuite, le cinéaste brosse un portrait édifiant et d’une efficacité redoutable, sans aucun pathos, juste factuel.

« La loi de Téhéran« est un très grand film politique et social tout en étant surprenant et en tenant en haleine du début à la fin.

Grosse claque !

La piste aux Lapins :

5 lapins

 

 

1er ex-aequo 2021 

 

« Dune » de Denis Villeneuve

Un nouvelle affiche pour Dune montre la maison Atréides

Dire que j’attendais le film de Denis Villeneuve est un euphémisme tant je suis fan absolu de l’œuvre de Franck Herbert, agacé par la version pudding de David Lynch ou le niveau pathétique auquel la saga Star Wars a pu atterrir. Il faut dire que le cycle de Dune est tout ce que l’on peut rêver sur grand écran. Le scénario orchestre une lutte de pouvoirs à la Games of Thrones avec un sous texte écologique d’une planète dont on exploite les ressources au point de l’avoir transformée en planète de sable. Par ailleurs on y voit naitre une résistance et un fanatisme religieux autour d’un messie vengeur. Dune est incroyablement contemporain des maux de notre monde actuel, ce qui est le propre d’un grand récit de science-fiction que de faire réfléchir sur nous mêmes.

On a beaucoup parlé de l’impossibilité d’adapter ce roman, de la tentative folle d’Alejandro Jodorowsky avec Salvador Dali, Orson Welles, Alain Delon et Mick Jagger et puis du film boursoufflé et frustrant de Lynch et de la série cheap des années 2000.

Denis Villeneuve a donc eu une riche idée de couper le premier livre en deux. Certes, il ne développe pas tous les personnages, le docteur Yueh et Peter de Vries sont très peu présents et certains personnages ont été effacés du récit comme Feyd Rautha, le neveu Harkonnen qu’incarnait Sting ou l’empereur Shadam IV. De même, le Baron Vladimir Harkonnen n’est vu que sur quatre petites scènes, Villeneuve choisissant de le montrer de loin, de ne pas s’attarder et de ne pas en faire un méchant caricatural. C’est plutôt bien vu car il est effrayant à la manière de l’empereur dans les premiers Star Wars historiques. Et le temps gagné sur certains personnages est attribué au climax du film et à plusieurs membres des Atreides comme Duncan Idaho (Jason Momoa), le véritable héros de la saga de Franck Herbert, que l’on devrait retrouver (lui ou une version plus jeune) si les films sont un succès et que la saga est adaptée sur ses six tomes, espérons !!!

C’est donc une totale réussite que cette adaptation dont le casting cinq étoiles est pertinent, chaque personnage étant facilement identifiable de par son physique à son caractère. Oscar Isaac est un Duc Léto parfait de bienveillance et de tragédie, Rebecca Ferguson est une dame Jessica peut-être plus humaine que dans le livre mais ceci permet d’amener une émotion que certaines critiques trouvent trop peu présente. Javier Bardem en Stilgar, Josh Brolin en Gurney Halleck, Charlotte Rampling en révérende mère Bene Gesserit. C’est parfait et c’est classe. Surtout ceci permet de poser les nombreux personnages avec une grande fluidité et simplicité.

Mais surtout, Timothée Chalamet est impressionnant dans le rôle de Paul et trouve son meilleur rôle de sa jeune carrière et porte le film. Sa jeunesse physique rend le personnage de jeune prince qui se cherche (et a 16 ans au début du livre) particulièrement crédible.

Ce qui impressionne également dans ce space opéra c’est le visuel monumental des vaisseaux, des palais, d’une imposante sobriété en terme d’imagerie SF mais surtout qui renouvellement cette imagerie comme l’avait fait Villeneuve avec Premier Contact. Les décors sont d’une beauté confondante qui créé instantanément un monde ultra crédible et à la fois assez proche de nous. On peut croire à la réalité de ce monde tant le côté minéral et simple des palais et des vaisseaux est savamment pensé. L’une des grandes réussites du film est son ampleur qui n’étouffe pas les personnages. On les voit évoluer dans des espaces immenses mais jamais ces monuments n’écrasent l’intimité, la proximité des personnages.

Le visuel du fameux vert des sables comme des yeux bleus des Fremen ou même de l’épice, source de la guerre, sont tous très réussis.

Ensuite, à cette beauté et cette sobriété, Denis Villeneuve va nous présenter des scènes cultes déjà vues mais avec la même précision clinique, libérée du kitch des adaptations précédentes, pour mieux se concentrer sur le décalage entre la planète des Atreides (qui ressemble à la terre) et la planète des sables. Il passe du temps à nous immerger dans ce choc de culture et de civilisation pour mieux expliquer le déracinement de la famille de Paul puis sa confrontation aux résistants Fremen. On y parle alors de surexploitation de ressources naturelles, de colonisation brutale, ce qui place Dune très au dessus de n’importe quelle saga de SF par sa maturité et l’ampleur de ses sujets abordés. Clairement, Dune n’est pas un film avec du comique mais quand on voit la stupidité des tentatives de Disney ou Lucas (hello Jar Jar) de renouer avec Han Solo et se vautrer lamentablement, je préfère l’absence d’humour.

L’humain est au cœur de cet engrenage complexe qu’arrive à restituer de manière limpide Denis Villeneuve. La confrontation est presque plus entre le destin/le jeu politique et une famille sincère qui cherche à gouverner avec sagesse, entre des infrastructures immenses et la proximité avec ces personnages qui paraissent nus. D’ailleurs une scène avec Leto joue à fond sur la nudité comme pour amplifier l’impuissance et l’écrasante petitesse de l’homme par rapport au complot qui s’abat sur lui.

Villeneuve est un cinéaste éminemment visuel qui sait user de l’atmosphère qu’il créé pour simplifier la parole. Et c’est vrai que ce Dune est beaucoup plus contemplatif car moins ramassé que son prédécesseur mais aussi moins bavard. Exit les longues explications en voix off ou les discours trop longs. Ici, une bonne partie passe par les lieux, les lumières et c’est bluffant d’intelligence.

Ce dépouillement s’allie à la bande-son du cultissime Hans Zimmer, qui signe là de nouveau un score envoutant.

La réussite incroyable de ce Dune, part one est donc tout autant dans son casting impeccable et la psychologie des personnages respectée que le design des lieux et des vêtements qui rend le tout organique et ultra réaliste, à mille lieux des délires cosmiques d’une autre saga que Villeneuve gadgétise de part le brio de sa mise en scène.

Il faut évidemment espérer que le filme cartonne pour qu’il y ait la partie 2 de lancée en 2022 mais aussi une adaptation des autres tomes qui, de livres en livres, nous emmèneront plus loin dans ce monde curieux qui fait réfléchir sur nos propres civilisation à travers plusieurs millénaires si l’on va jusqu’à La Maison des Mères.

Denis Villeneuve a signé un chef d’œuvre de science fiction, d’une grande fidélité au roman de Franck Herbert et qui redonne ses lettres de noblesse à une science-fiction adulte et consciente des thématiques profondes qu’elle charrie.

Dune est non seulement une non-déception mais surtout une excellente surprise de l’un des plus brillants réalisateurs au monde et vous devez y courir vite pour soutenir le cinéma d’auteur allié au blockbuster, le cinéma divertissant et exigeant, celui qui vous happe et vous emmène très très loin tout en vous faisant réfléchir à la société d’aujourd’hui.

Denis Villeneuve peut être très fier de lui et de ses équipes, il l’a fait, il a réussi à transposer le monstre Dune à l’écran. Mille mercis pour ce film ambitieux et spectaculaire, confondant de beauté, d’une grande intelligence scénaristique et qui est la plus belle adaptation que l’on pouvait rêver. Dune est enfin incarné.

La piste aux Lapins :

5 lapins

 

 

 

 

 

 

Et le podium exceptionnel du Blanc Lapin pour 2021 !

 

classement blanc lapn 3ème place 2021

 

classement blanc lapin 2021

 

 

Les meilleurs films du Blanc Lapin 2021 : N°32 à N°16

26 décembre, 2021

Cette année 2021 qui se termine fut exceptionnelle de par le nombre de films sortis en salles.

Le confinement de 2020 et les 4 mois et demi de fermeture en début d’année des cinémas ont créé un embouteillage inédit en salles, donnant une durée de vie d’exploitation aux films fragile et complexe. Beaucoup de bon films ont été sacrifiés par un très court temps à l’affiche.

Mais d’un point de vue purement cinématographique, le nombre de bons films sortis a été impressionnant. Du jamais vu en 12 ans de blog du blanc lapin.

C’était même une double année cinéma.

Rendez-vous compte, j’ai vu 124 films sortis cette année au cinéma ou sur les plateformes de streaming légal. C’était complexe de tout voir car mon record était à 103 films en 2018 et généralement c’est plutôt autour des 80 à 90.

La rigueur qu’il a fallu pour voir ces films tout en ayant une vie à côté et d’autres centres d’intérêt n’a pas toujours été simple.

Et donc sur ces 123 films, environ 30% atteignent minimum 4 lapins sur 5 soit de très bons films, extrêmement réussis.

C’est la raison pour laquelle, exceptionnellement, le classement comporte 38 films classés sur 32 places car oui, il y a des ex-aequo en tête du classement tant il est impossible de départager de tels bijoux.

Ce n’est pas par facilité mais bien parceque les films 2021 sont exceptionnellement bons de par le nombre sortis.

Alors que fallait-il voir en 2021 selon le Blanc Lapin et que devez-vous rattraper si vous les avez loupés ?

 

N°32 – « Les choses humaines » d’Yvan Attal

Les Choses humaines - film 2021 - AlloCiné

Le pitch : Un jeune homme est accusé d’avoir violé une jeune femme. Qui est ce jeune homme et qui est cette jeune femme ? Est-il coupable ou est-il innocent ? Est-elle victime ou uniquement dans un désir de vengeance, comme l’affirme l’accusé ? Les deux jeunes protagonistes et leurs proches vont voir leur vie, leurs convictions et leurs certitudes voler en éclat mais… N’y a-t-il qu’une seule vérité ?

Yvan Attal est un très bon réalisateur et prouve à intervalles réguliers que sa maitrise de la mise en scène et sa rigueur donnent de très bons films. Ses récentes adaptations « Mon chien stupide » d’après John Fanté et « Le Brio » avec Camélia Jordana et Daniel Auteuil étaient vraiment d’excellents films.

Avec Les choses humaines, adapté du roman de Karine Tuil, il signe à nouveau un bon film sur la thématique très actuelle du consentement. A l’époque de #MeToo on voit régulièrement dans nos discussions les gens s’opposer entre l’effet de balancier que certains trouvent too much où l’accusé de violences sexuelles est mis au banc des coupables sans possibilité de se défendre, sali de fait et les tenant(e)s de la liberté de parole comme primordiale sur tout, y compris sur la présomption d’innocence. Le Problème est donc ce juste milieu complexe entre laisser des victimes s’exprimer et accéder à une justice efficace et des présumés coupables se défendre sans passer immédiatement pour des monstres sachant que souvent le tribunal médiatique les emporte. Et c’est justement ces thèmes qui sont au cente de ce long métrage extrêmement casse gueule.

Yvan Attal filme le doute dans le regard des parents mais aussi l’impact psychologique, la dimension de distinction de classe entre des élites de gauche nanties et une famille de victimes plutôt religieuse. Le jeu d’acteurs est brillant entre Pierre Arditi en présentateur de gauche bourgeois et profitant de son succès dans sa vie sentimentale, une Charlotte Gainsbourg géniale en mère de son propre fils dans la vie, Ben Attal (fils aussi de Yvan). Ce dernier fait de premiers pas excellents en premier rôle devant la caméra après son passage réussi dans « Mon chien stupide« . Enfin Suzanne Jouannet en victime sincère et perdue et Matthieu Kassovitz donnent un contrechamp troublant tandis que Benjamin Lavernhe joue un avocat d’une grande intelligence à la prestation marquante.

Bref, le casting quatre étoiles permet au film de servir un propos nuancé, éloge même d’un regard distant et de la noblesse de l’institution judiciaire tout en surprenant de part l’issue même du film. « Les choses humaines » prends le temps de l’écoute et c’est précieux dans notre société du jugement hâtif où l’on zappe au fait divers suivant de façon hiératique. Parfois le film aurait mérité quelques coupes pour gagner être un peu plus svelte et efficace.

On pense à Douze hommes en colère pour le film de procès ou au récent « Le dernier duel« , excellent film de Ridley Scott, qui exploite lui aussi cette thématique du viol, du consentement et de l’histoire vue sous l’angle des différents protagonistes.

La piste aux Lapins :

4 lapins

 

N°31 – « Les Olympiades » de Jacques Audiard

Les Olympiades - film 2021 - AlloCiné

Céline Sciamma est l’une des réalisatrices qui compte (Portrait de la jeune fille en feu) mais c’est aussi une scénariste de renom qui s’associe à l’un des plus grands réalisateurs français pour nous livrer cet étonnant « Les Olympiades ».

Jacques Audiard est très loin de ses réalisations et thèmes précédents.
Il nous parle d’amour, de désir et de sexe pour des trentenaires d’aujourd’hui. Ça aurait pu être vraiment raté et casse gueule. Le résultat n’est certes pas sa meilleure œuvre mais vaut le détour.

Outre son magnifique noir et blanc, l’histoire suit des personnages assez attachants et le scénario évite de tomber dans les clichés. Je craignais que trop de personnages féminins soient lesbiens ou bi, ce qui aurait potentiellement viré à une sorte de caricature non représentative. Il n’en n’est rien car l’homosexualité féminine y trouve même la place la plus émouvante et inattendue. Surtout les sentiments prennent le dessus au moment où on ne s’y attend pas, permettant au long métrage de se terminer de la plus belle des manières.

Voir un réalisateur de 70 ans qui n’a plus rien à prouver prendre un tel risque sans se vautrer, çà fait vraiment plaisir. Encore une réussite pour Audiard.

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N°30- « Benedetta » de Paul Verhoeven

BENEDETTA de Paul Verhoeven - Cinémas Les 400 coups - Angers

Voici enfin, avec un an de retard pour cause de pandémie, la présentation du nouveau film de Paul Verhoeven, 83 ans, et toujours aussi alerte et sulfureux après le succès mondial de ELLE.

Virginie EFIRA joue une nonne du 17ème siècle, qui a des visions. Elle voit Jésus. Le premier tour de force est que ces visions ne font pas exploser de rire, ce qui aurait pu être le cas, rappelant un très bon sketch des nuls. Ensuite Virginie EFIRA est comme d’habitude crédible et excellente de bout en bout.

Là où le film est surprenant, c’est qu’il est moins provocateur qu’on aurait pu le penser. Certes on la voit nue, elle et Daphné Patakia (la série OVNI) dans des scènes de sexe lesbienne assez explicites. Mais contrairement à La vie d’Adèle où les scènes de 10 minutes m’avaient super gonflé, là Verhoeven amène la sensualité et l’expression du désir nécessaires, sans en faire des caisses.

Alors que la peste se propage en Italie, Benedetta multiplie les stigmates du Christ et ces miracles inquiètent les autres sœurs dont la mère supérieure incarnée par l’impériale Charlotte Rampling, magnifique. Lambert Wilson apporte également son talent dans la dernière partie du film.

Paul Verhoeven introduit alors un jeu politique entre responsables ecclésiastiques et reste toujours sur le fil de la véracité de ces stigmates et du personnage de Benedetta. Ment-elle ? Est-elle folle ? Il prend bien soin de nous laisser dans le doute en ne montrant que la face qu’elle montre à ses condisciples.

La mise en scène est quant à elle très académique, ce qui ne nuit pas au film, mais lui enlève peut-être la petite touche en plus qui aurait fait décoller le long métrage vers un très grand film. Mais on retrouve ses obsessions que déjà il poussait dans « La chair et le sang » en 1985.

Les dialogues sont finement ciselés, les scènes crues mais qui ne sont pas faites pour choquer car le réalisateur préfère se concentrer sur cette mini société à partir de laquelle il construit une satire du pouvoir, à partir d’un personnage ambigu jusqu’au bout.

Un très bon film, différent et superbement interprété.

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N°29 – « First Cow » de Kelly Reichardt

First Cow - film 2020 - AlloCiné

First Cow de Kelly Reichardt sort enfin après un an de retard et sa présentation à Deauville 2020.

La réalisatrice est une auteur très respectée au sein du cinéma indépendant américain, connue pour Old Joy en 2006, Wendy et Lucy en 2008 ou Night moves en 2014.

Avec First Cow, son style très épuré, économe de mots, s’intéresse à la construction d’une amitié au début du XIXe siècle, sur les terres très sauvages de l’Oregon.

Un cuisinier sans le sou, embauché avec des trappeurs allant vers l’ouest, vient en aide à immigré chinois.

De là, ils se retrouvent et forment un duo extrêmement attachant, se serrant les coudes dans un pauvreté sans nom.

Ils décident de voler le lait de la seule vache du bourgeois du coin pour confectionner et vendre des gâteaux. Et face au succès, ils se mettent à rêver d’élévation sociale.

Kelly Reichardt aborde une époque assez peu connue ou mise en valeur tant la détresse psychologique et le dénuement de ces hommes venus tenter une aventure en pays sauvage semble sans espoir, et d’une violence sordide.

Le manque d’empathie, de lien social qui fait que nous sommes aux prémisses d’une société est particulièrement intéressant.

On est au début de la conquête de l’ouest et il faudra quasi 100 ans de plus pour l’Amérique ressemble à un pays. C’est donc la période de l’avant, juste après l’indépendance, dans des terres hostiles.

Et la réalisatrice nous parle de la lumière que s’apportent ces deux paumés, seuls au monde, qui vont se soutenir et ne plus être seuls, justement.

Le film est très beau de par son naturalisme et la simplicité de son histoire, qui prend certes son temps mais parle au final de l’essentiel, ne pas être seul dans l’aventure d’une vie.

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N°28 – « Lovers Rock » (anthologie Small Axes) de Steve McQueen

 

Small Axe: Lovers Rock (TV) (2020) - Filmaffinity

Salto, la plateforme de streaming de TF1, M6 et France Télévisions,  débarque aujourd'hui !

Second long métrage ou plutôt moyen métrage de Steve McQueen dans son anthologie Small Axes sur la population antillaise de Londres (disponible sur Salto à compter du 26 février 2021), « Lovers Rock » est un film qui aurait mérité une sortie ciné. Pour moi ce n’est pas un épisode de série puisque c’est une histoire unique, un moyen métrage d’1h10 et c’est une réussite totale.

J’avais été déçu par le premier film, Mangrove, qui par son classicisme souffrait la comparaison avec d’autres films de procès.

Mais avec ce film,  Steve McQueen ne se laisse pas enfermer dans un genre et se sent beaucoup plus libre dans son talent de mise en scène.

Il va nous raconter cette communauté, en 1980, à travers une soirée organisée dans un squat par des Dj et va nous conter l’histoire d’une rencontre amoureuse.

Cette fois-ci il n’est pas politique dans les dialogues mais la force du film est bien plus forte. Il arrive à recréer une ambiance et à nous immerger totalement dans une ambiance, avec un minimum de dialogues et un maximum de musique, excellente au demeurant !

« Lovers Rock« est un film envoutant, qui porte à la fois le témoignage d’une jeunesse en quête d’identité et de liberté, mais aussi une culture, un milieu à un instant donné de l’histoire et c’est criant de vérité.

Le résultat est bluffant tout en étant d’une sensibilité incroyable via ce personnage d’une grande fragilité entouré d’autres jeunes qui cherchent aussi le flirt et sont plus ou moins bienveillants. Et puis il y a cette osmose musicale qui réunit les êtres, créé ce lien magique dans une soirée entre des individus qui se sortent pour quelques heures de leur quotidien. Qu’il soit pauvre et dans un petit boulot mal payé, souffrant de racisme et de sous considération des blancs, ou qu’il soit celui d’un milieu pauvre lui aussi mais ultra croyant et attaché à l’image laissée en société, ce quotidien est d’uène grande finesse.

« Lovers Rock » est incroyablement riche de messages sans être lourd dans ses sous-textes ou l’écriture de ses personnages.

Cette légèreté d’écriture font que le film est non seulement agréable à voir et ludique mais qu’il arrive en même temps à son objectif de décrire fidèlement les angoisses et les contraintes d’une jeunesse noire londonienne des années 80 sans aucun didactisme.

C’est très très fort.

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N°27 – « Bac Nord » de Cédric Jimenez

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Le pitch : 2012. Les quartiers Nord de Marseille détiennent un triste record : la zone au taux de criminalité le plus élevé de France. Poussée par sa hiérarchie, la BAC Nord, brigade de terrain, cherche sans cesse à améliorer ses résultats. Dans un secteur à haut risque, les flics adaptent leurs méthodes, franchissant parfois la ligne jaune. Jusqu’au jour où le système judiciaire se retourne contre eux…

Cédric Jimenez réussit un excellent polar en s’inspirant de ce fait divers réel et en assumant de prendre parti pour les policiers. Il faut dire que l’histoire est hallucinante et que l’emballement médiatique, le lâchage par la hiérarchie, les politiques donne un gout très amer, surtout que la partie la plus grave des charges a été abandonnée cotre ces trois policiers border lines. On attendra donc le procès pour savoir exactement ce qui est du domaine de la fiction et du devoir de réhabilitation.

Le film rend les personnages très attachants grâce à des punchlines vraiment drôles, des scènes d’action hyper bien réalisées et un trio d’acteur au diapason. Gilles Lellouche, Karim Leklou et François Civil sont tous les trois excellents, complétés par Adèle Exarchopoulos, toujours aussi juste, comme d’habitude.

La scène de prise de stup du film est impressionnante de violence et tous les échanges d’insultes et de torses gonflés avec les teneurs des cités sont absolument remarquables de mise en scène. Le danger et la noirceur sans retour de ces territoires perdus de la République est jetée à la gueule du spectateur.

La brutalité du quotidien vécue par ces flics qui pour un salaire de merde sont confrontés à la violence et au risque de se faire flinguer sans moyens est évidemment choquante en soit.

Jimenez insiste sur l’hypocrisie du politique qui exige des résultats chiffrés quels qu’ils soient mais demande d’éviter de casser les véhicules et d’entrer dans les cités.

L’intensité du film, son côté anxiogène sont très bien alternés par l’amitié qui lie ces trois individus convaincus de faire ce qu’il faut, d’utiliser les armes de dealers pour les faire tomber. Disons que l’institution policière n’en sort pas grandie de par la bienpensance et la frilosité qui en ressort, chacun cherchant à sauver sa peau plutôt qu’à être solidaire, surtout que la presse et la sphère politique s’emballent.

Le film est donc paradoxalement drôle par moment, testostéroné souvent, rythmé par une très bonne BO et un sens de l’action, un western moderne très bien réalisé.

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N°26 – « Teddy » de Ludovic Boukherma, Zoran Boukherma

Teddy de Ludovic Boukherma, Zoran Boukherma (2020) - UniFrance

Dans les Pyrénées, un loup attise la colère des villageois. Teddy, 19 ans, sans diplôme, vit avec son oncle adoptif et travaille dans un salon de massage. Sa petite amie Rebecca passe bientôt son bac, promise à un avenir radieux. Pour eux, c’est un été ordinaire qui s’annonce. Mais un soir de pleine lune, Teddy est griffé par une bête inconnue. Les semaines qui suivent, il est pris de curieuses pulsions animales…

Le cinéma de genre français se porte extrêmement bien avec de nouveaux réalisateurs qui cassent les codes de films ultra balisés et y ajoutent une french touch tout à fait originale. Une sorte de nouvelle vague français dans le film de genre, détourné. L’excellent « La Nuée » nous scotchait il y a quelques semaines avec cette histoire horrifique de sauterelle en plein désert agricole.

Les frères Ludovic Boukherma et Zoran Boukherma signent leur second film et adoptent le film de loup garou, dans les Pyrénées, sur un ton décalé.

Le décors et surtout la population un peu paumée, en mode France très profonde et très loin des grandes villes donne un cadre très fort à cette histoire de jeune homme lui-même en marge d’une population oubliée des cités modernes, qui vit elle-même dans une beaufitude forcée, entre bling inspiré de ce qui est vu à la TV et pauvreté dans la diversité intellectuelle et artistique. Mais attention, les frères Boukherma sont un peu moqueurs mais pas suffisants pour autant. Ils en font juste assez pour rire de ces personnages sans non plus les juger ni les prendre de haut.

Ils y décrivent une capacité de créer des classes même dans le coin le plus paumé qu’on puisse trouver. Même là, les humains arrivent à se rejeter, à se créer des castes excluantes des marginaux. Ce qui est drôle dans « Teddy » c’est ce miroir déformant où on se demande toujours si le « héros » est si marginal que cela ou si il n’est pas simplement un caractère au milieu de gens fadasses et sans saveur.

Anthony Bajon, découvert dans La Prière et Au nom de la terre, porte le film fièrement sur ses jeunes épaules et prouve qu’il faudra compter sur lui dans le paysage français. Évidemment on passe par les transformations et les codes du film de loup garou mais vu sous un angle totalement inédit, entre social, comique et drame total. Le ton du film oscille en permanence et rend le spectateur curieux.

Mais ne pas parler des talents de metteurs en scène des réalisateurs serait injuste, c’est d’un très bon niveau de découpage, de bande-son à propos, d’alternance de scènes sans une de trop, et d’ellipses qui évitent au film le gore pour lui préférer une réflexion d’une profondeur inattendue sur la difficulté de l’adolescence, de se sentir différent et de ne pas vouloir se fondre dans les autres, la norme ou tout du moins la normalité, trop banale.

Teddy est une totale réussite et on a hâte de voir le prochain film du duo qui donnera cette fois hommage aux films de requins avec Marina Fois, Kad Merad et Jean-Pascal Zadi, tout un programme et une grande joie de voir de nouveaux talents français se faire un nom de si belle manière.

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N°25 – « Le Tigre Blanc » de Ramin Bahrani

Le Tigre blanc - film 2021 - AlloCiné

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Ramin Bahrani revient après son excellent 99 homes qui suivait des usuriers sans scrupules de maison post crise des subprime, et sa moins réussie nouvelle adaptation pour HBO de Fahrenheit 451 de Ray Bradbury.

Le réalisateur change de crémerie et réalise pour Netflix cette adaptation d’un best seller signé Aravind Adiga.

On y suit Balram, chauffeur d’une riche famille indienne, qui nous raconte avec un sourire en coin et une petite voix semblant toujours s’excuser comment il vit dans sa caste et subit le racisme des castes supérieures.

Par son ingéniosité, il va réussir à graver les échelons vers la richesse, en abandonnant à plusieurs moments toute forme de morale. Et c’est là que le film est très réussi.

Sur un rythme effréné sans aucun temps mort, rappelant forcément le « Slumdog Millionaire » dynamique de Dany Boyle, le film évite toute perte de temps et nous prend par la main comme si on était perdus dans une grande ville indienne au milieu de toute cette pauvreté. Mais la malice du film comme du personnage principal et de son interprète, Adarsh Gourav, est de présenter des horreurs culturelles de maltraitance des plus pauvres comme si c’était immuable et avec un large sourire. C’est la culture donc c’est comme çà. Les mafieux corrompus qui frappent de pauvres paysans qu’ils exploitent, c’est normal. Ils les tuent même parfois. On n’y peut rien. Et sous couvert de ce ton cynique, se développe donc l’histoire de ce petit mec qui subissant des règles injustes et inhumaines, choisit de gagner par tous les moyens à sa disposition. La vision de sa famille n’est d’ailleurs pas du tout rose bonbon, bien au contraire, il n’y a aucun affect et seulement des gens qui crèvent de faim et font ce qu’ils peuvent pour faire travailler les enfants et gagner de quoi ne pas crever. C’est à la fois très violent dans le propos et le constat mais dit sur un ton badin et une mise en scène qui édulcore volontairement le visuel.

L’anti héros devient donc un Tigre Blanc en se jouant de ses maitres qui le traitent comme un esclave et comme un sous homme inférieur.

Au passage le film écorne sauvagement la démocratie indienne corrompue et s’attaque même à la suffisance des occidentaux en leur disant avec un grand sourire que les peuples puissants qui donneront le ton demain seront chinois et indiens. Mieux, le réalisateur envoie à la face des spectateurs de Netflix (très majoritairement occidentaux) un avertissement sur les excès du capitalisme, qui appliqué à un cadre non démocratique ou corrompu peu n’avoir plus aucune limite. C’est aussi là que « Le Tigre Blanc » devient encore meilleur, lorsqu’il explique que les principes importés d’occident font des ravages dans une société aussi inégalitaire et injuste que la société indienne. Il explique que ces centaines de millions de pauvres n’auront rien à foutre de notre belle morale que l’on arbore tout en se pinçant le nez et en ne regardant pas ce qui s’y est passé pendant des dizaines et dizaines d’années. Ce sera un capitalisme encore plus dur où la morale n’aura pas sa place car c’est une morale occidentale inapplicable là bas. La vie d’un indigent n’ayant aucune valeur et la richesse évitant la prison, comme le dit le héros, ce sera la loi de la jungle où seuls les tigres blancs s’en sortiront.

Utiliser les codes de la comédie pour livrer un film aussi profond est vraiment une idée géniale. Avec ce rictus faussement obéissant du type prêt à défenestrer à tout moment la famille qui l’exploite et lui marche dessus, Adarsh Gourav est excellent.

A la fin on a presque peur que les personnages nous fassent une danse à la Bollywood comme dans « Slumdog Millionaire« , sauf que ce n’est pas le genre de la maison et que Bahrani vient de nous livrer une petite bombe impertinente et d’une grande intelligence.

Il est à mille lieues des clichés et du positivisme naïf du film de Dany Boyle. C’est même l’inverse qu’il a réalisé et c’est très très réussi.

A voir de toute urgence sur Netflix.

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N°24 – « Onoda, 10 000 nuits dans la jungle » de Arthur Harari

Onoda - 10 000 nuits dans la jungle - film 2021 - AlloCiné

Le pitch : Fin 1944. Le Japon est en train de perdre la guerre. Sur ordre du mystérieux Major Taniguchi, le jeune Hiroo Onoda est envoyé sur une île des Philippines juste avant le débarquement américain. La poignée de soldats qu’il entraîne dans la jungle découvre bientôt la doctrine inconnue qui va les lier à cet homme : la Guerre Secrète. Pour l’Empire, la guerre est sur le point de finir. Pour Onoda, elle s’achèvera 10 000 nuits plus tard.

Je ne connaissais pas cette histoire vraie de ce soldat japonais  resté 30 ans sur une ile des philippines, dans la jungle, pensant assurer la résistance en attendant que ses supérieurs lui donnent un signe.

L’histoire est tout bonnement fascinante tellement on reste incrédule devant la perte de repère au temps et la capacité des personnages (Onoda et 3 soldats fidèles) à se couper du monde en versant dans la méfiance de la manipulation des gens civilisés des villages. Ils vont s’isoler et vivre en autarcie, toujours sur le qui vive, et même tuer des innocents pensant toujours être en guerre.

On peut se dire que les personnages sont fous mais justement, hormis l’autopersuasion qui les incite à poursuivre le maquis sans se poser de questions, qui est en soit un peu dingue, le réalisateur Arthur Harari ne cherche absolument pas à tomber la facilité de ce type d’explication. C’est aussi que le lieutenant Onoda est sorti de cet enfer vert à 52 ans, puis a vécu jusqu’à 94 ans, a construit une seconde vie et a décrit dans une autobiograpophie les multiples détails de cette vie d’ascète qu’il détaillait dans des livrets. Il n’était donc pas fou mais formé comme une élite du guerriers solitaires et silencieux et a cru en la résilience de l’armée de son pays. On est scotché par ce patriotisme comme seul horizon, pour ces jeunes hommes qui n’ont quasi pas connu de femmes avant de s’auto-enfermer dans ce délire qui n’en n’était pas un pour eux.

La réalisation est fluide et Arthur Harari arrive à ne pas créer de longueurs malgré les 2h48 du long métrage ! Pour ma part, j’ai trouvé çà un peu long non que ça ne se finissait pas, le film est passionnant, mais j’aime la concision et les films de 3h demandent un certain effort qui coupera radicalement une partie du public. Un format resserré de 2h10 aurait permis probablement au film de rester plus longtemps à l’affiche et de ne pas rebuter certains.

L’expérience de voir ce film Onoda est cependant vraiment une chose à faire. Le film n’est pas cataloguable, à la fois lyrique et avec des plans très resserrés, à la fois long de par sa durée et parsemé d’aventures, métaphysique et brillant.

Un excellent film.

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N°23 – « House of Gucci » de Ridley Scott

House of Gucci - film 2021 - AlloCiné

Le fameux « House of Gucci » sort enfin avec son casting 5 étoiles ultra hype et un réalisateur cultissime en la présence du stakhanoviste Ridley Scott qui sort deux films en deux mois après le génial « Le dernier Duel« .

Alors le film a divisé, certains le trouvant too much, caricatural des personnages ayant réellement existé. Je ne sais pas mais en terme de pur cinéma, c’est un excellent film sur une famille ultra célèbre, ultra riche et déchirée par une petite italienne de la classe moyenne, vorace et décidée à devenir riche et célèbre elle-même.

Le personnage de vamp de Lady Gaga est génial ! La chanteuse prouve qu’elle sait jouer. Sa partition s’oppose au génial Adam Driver qui poursuit sa carrière fulgurante, prouvant de film en film qu’il peut tout jouer et qu’il est LE nouvel acteur hype d’Hollywood, d’un physique particulier mais d’un charisme qui rappelle les Robert de Niro et les Al Pacino.

Cà tombe bien car Al Pacino est de retour dans un très grand rôle après son excellente prestation dans « The Irishman » de Martin Scorsese. Et c’est un immense plaisir de voir ce monstre sacré dans le rôle du pater familia manipulateur et égocentré qui va se faire faucher dans la tourmente des évènements. Jared Leto en fait un peu trop mais il est assez bon et méconnaissable dans le rôle de ce fils au destin raté, médiocre mais qui se croit avoir un talent alors qu’il est invisible vis à vis de son père.

Et puis il y a la classe incarnée qu’est Jérémy Irons en Rodolpho Gucci, il est juste génial dans chacune de ses scènes. Là aussi ceci fait immensément plaisir de savourer la prestation de cet immense acteur dans un très bon rôle écrit avec soin au sein d’un film réussi.

La réussite de « House of Gucci«   tient au mélange entre saga familiale qui rappelle Le Parrain et autres grandes fresques et le pur thriller avec un suspens bien dosé. Ridley Scott est en très grande forme à 84 ans ! Impressionnant l’animal.

La passion des personnages, leurs secrets et manipulations font froid dans le dos et aucun ne peut rattraper l’autre. Mais c’est prenant et fascinant et puis surtout, divertissant !

Ridley Scott est un maitre de la précision, de l’exigence et pour transposer cet univers du luxe, évidemment, ceci fait mouche.

Le film est élégant et tragique comme je m’attendais à ce qu’il le soit.

Une grande réussite.

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 N°22 – « Illusions perdues » de Xavier Giannoli

ILLUSIONS PERDUES de Xavier Giannoli - Cinémas Les 400 coups - Angers

Casting impeccable pour cette adaptation d’Honoré de Balzac, pas la plus connu_e mais étrangement d’une grande contemporanéité. Xavier Giannoli  s’est attaqué à un gros morceau et s’en sort très bien.

Qu’importe, le matériau du livre est là et l’histoire qu’il nous raconte est passionnante.

C’est celle d’un parvenu, d’un petit poète de province qui monte à Paris et parcequ’il a un peu de talent et une belle gueule va pouvoir accéder à des cercles normalement inatteignables. C’est l’histoire d’un Icare, d’une ascension sociale extraordinaire au prix de bien des sacrifices moraux.

Benjamin Voisin trouve là un premier rôle d’ampleur et prouve que c’est l’un des jeunes premiers du ciné français que l’on va revoir. Il est juste, entre naïveté et perversion et incarne parfaitement ce jeune home qui pète un plomb.

A ses cotés Cécile de France est comme toujours brillante et Vincent Lacoste incarne un écrivain raté transformé en journaliste odieux.

Il personnalise toute la veulerie que Balzac détestait chez les journalistes de son époque, qu’il portait très peu voir pas du tout en estime.

L’absence de morale et les faux semblants sont glaçants de cynisme. Ou comment une sous caste fait fortune en déversant son fiel, ses collets sur les livres et pièces de théâtres qu’ils commentaient ou sur des personnages publics.

Le film est passionnant pour retranscrire cette époque charnière entre Napoléon et la monarchie restaurée et l’opposition des deux intelligentsia.

Xavier Dolan est comme toujours excellent quand il joue et son personnage ambigu qu’on ne sait pas situer, ajoute une touche de suspens et de bonnes surprises.

La reconstitution du Paris de ce second quart du 19ème est bluffante de vérité, et Xavier Giannoli choisit d’en faire une sorte de danse qui virevolte et tourbillonne jusqu’à représenter l’étourdissement du personnage qui perd pied devant son succès.

Les thématiques restent incroyablement modernes et la cruauté médiatique d’aujourd’hui n’a rien à envier à celle de l’époque.

Une très belle réussite.

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N°21 – « L’évènement » de Audrey Diwan

L'Evénement - film 2021 - AlloCiné

Audrey Diwan remporte un Lion d’Or très mérité pour L’événement, un film coup de poing qu’on n’avait pas vu venir.

Anamaria Vartolomei est une véritable révélation, de tous les plans du film en jouant cette jeune étudiante des années 60 qui tombe enceinte et se trouve débuter un chemin de croix incroyable.
C’est assez original et salutaire de rappeler ce que les femmes vivaient avant la loi Veil et ce qu’elles vivent là où c’est interdit ou problématique pour des raisons de religion.

« L’événement » nous montre une société rétrograde et hypocrite dans laquelle l’avortement est condamnable de prison et où le fait d’être enceinte devient un non choix. Une chape de plomb incroyable fige une vie et plus rien n’a d’importance que de se ranger et d’abandonner tous ses espoirs comme celui de faire des études et pour le personnage, dans ces années là, de s’émanciper par la culture et un travail d’enseignant.

Le film est parfois difficile à encaisser car la réalisatrice souhaite nous mettre das les mêmes conditions d’isolement des autres et de souffrance. Le personnage est perdu et ne peut se confier à personne, sachant son destin brisé. Un compte à rebours va alors alterner la montée de l’angoisse et l’horreur des tentatives pour perdre cet embryon non désiré.

La mise en scène est fine et nous laisse seuls avec ce personnage qui sombre peu à peu en même temps que les couleurs du film et les scènes de nuit assombrissent l’avenir de la jeune fille. L’esthétisme du film ne se voit cependant pas, il se ressent, pour mieux porter le propos.

Ce récit viscéral est parfois dur à regarder mais il atteint son but à savoir émouvoir et faire toucher du doigt l’enfer absolu que l’Etat et toute une administration, une société faisaient subir à de jeunes femmes pour des raisons avant tout religieuses, là où l’Eat se voulait laïque.

Un très bon film.

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N°20 – « The French Dispatch » de Wes Anderson

The French Dispatch - film 2021 - AlloCiné

Le pitch : The French Dispatch met en scène un recueil d’histoires tirées du dernier numéro d’un magazine américain publié dans une ville française fictive du 20e siècle.

Wes Anderson a tourné son dixième film en France à Angoulêmeavec un casting totalement dingue et jouissif comme il en a souvent l’habitude avec Bill Murray, Tilda Swinton, Owen Wilson, Adrien Brody ou Edward Norton ou Timothée Chalamet,  Frances McDormand, , Benicio Del Toro, Mathieu Amalric, Léa Seydoux, Jeffrey Wright, Elisabeth Moss, Willem Dafoe, Saoirse Ronan, Cécile de France, Christoph Waltz, Guillaume Gallienne.

Rien que pour cette galerie de personnages complètement décalés, The French Dispâtch est réussi. On retrouve une sorte de synthèse de l’univers unique, du style unique de Wes Anderson, mélancolique, drôle et perché. Ses invitations à visiter ses univers sur mesure d’une précision d’horloger ont donné de grands films parmi lesquels La Famille Tenenbaum, La Vie aquatique, À bord du Darjeeling Limited,  Fantastic Mr. Fox, Moonrise Kingdom, The Grand Budapest Hôtel, L’Île aux chiens.

Alors forcément quand on compare, certains disent que c’est son moins bon film, limite caricatural de son cinéma, où la forme prend le pas sur le fonds.

Je ne suis pas du tout d’accord. Certes le film est très illustratif mais c’est pour accentuer l’aspect vignette de ces quatre récits de journalistes qui décrivent une histoire rocambolesque et permet au réalisateur de déclarer son amour pour une époque, pour une culture et pour les reporters de petits magasines de faits divers.

C’est très charmant et d’une intelligence de mise en scène bluffante. C’est certainement visuellement son film le plus abouti. Les personnages sont un peu désincarnés mais ce sont des héros ou anti héros de papier glacé et en ce sens ceci ne m’a pas gêné, c’est un peu le deal du concept même du film. Ceux qui n’ont pas compris ce troisième degré et bien…tant pis pour eux.

L’inventivité et l’imaginaire du réalisateur explosent pour apporter une palette de nuances, de rires à des situations ou personnages cocasses. Il arrive même à rendre carrément hommage à un autre AndersSon, Roy Andersson et ses plans fixes en forme de tableaux. Mais à la différence du maitre suédois de l’absurde connu pour ses plans épurés, Wes Anderson emplit le cadre à foison de détails qu’on s’amuse à repérer comme dans un magasine justement lorsque des jeux invitaient les lecteurs à faire marcher leur sens de l’observation. C’est très malin  comme concept.

L’humour est évidemment le maitre mot et même quand il est cruel, il apparait comme sorti d’une bande-dessinée burlesque et s’avère vraiment jouissif.

La richesse du film alterne entre acteurs de premier plan, couleur et noir et blanc voir dessin animé.

Mais surtout Wes Anderson est très romanesque cette fois-ci, plus que dans ses autres films même si l’aspect quête de « La vie aquatique », « À bord du Darjeeling Limited, ou L’Île aux chiens sont très présents et apportent un incroyable rythme.

Et puis vous ne verrez nul part ailleurs un film aussi marqué de l’emprunte de son metteur en scène et l’immense poésie qui se dégage de son œuvre.

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4,25 lapins

 

N°19 – « Oxygène » de Alexandre Aja

Oxygène : claustrophobes, le survival d'Alexandre Aja n'est pas pour vous !

Alexandre Aja est l’un des réalisateurs français les plus successfull à l’international même si il est très p)eu connu en France. En effet, le fils d’Alexandre Arcady s’est fait un nom à Hollywood dès les années 2000 dans le cinéma d’horreur avec Haute tension (2003) puis le reboot de La Colline a des yeux, celui de Piranha 3D ou encore Crawl. A chaque fois son talent de metteur en scène fait mouche dans un genre cinématographique où la qualité du réalisateur n’a pas toujours été primordiale de la part des studios, même si cette démarche évolue depuis vingt ans.

Aja a tenté de s’émanciper du genre en allant à de la SF pure avec Horns ou La 9ème vie de Louis Drax, hélas le résultat était en demi teinte, faute à des scénarii pas assez travaillés.

Avec Oxygène, le réalisateur reprend un concept déjà vu dans Burried mais avec un talent autrement plus brillant. Une femme se réveille dans un caisson à Oxygène et ne se souvient de rien, de qui elle est, de pourquoi elle est là. Très vite elle comprend que son Oxygène se vide et qu’elle doit trouver le moyen de sortir, son seul contact étant la voix de l’ordinateur qui gère le caisson.

Le film aurait pu être très chiant très vite et au début on peut se dire que se taper 1h27 dans cet espace clos va être long.

Sauf que Aja use des flashs backs pour introduire de la respiration et surtout d’un talent incroyable dans son scénario pour relancer la machine et créer du stress, de la tension, du rebondissement en permanence.

Évidement, il est aidé par une formidable Mélanie Laurent, excellente dans les expressions, les doutes, les idées qui passent dans son regard, la douleur sur son visage.

Le duo fonctionne donc à merveille pour un résultat détonnant et une excellente surprise qu’on n’avait pas vue arriver. Nul doute que Netflix a eu du nez de financer ce projet qui cartonnera certainement sur sa plateforme, Alexandre Aja et Mélanie Laurent accédant de plus à un public potentiel de 200 millions d’abonnés. Le film aurait pu sortir au cinéma mais il est parfait pour Netflix également.

L’intelligence de la mise en scène et du scénario, le final excellent dans ses révélations et à la hauteur de l’attente, font de cet « Oxygène » l’un des films à voir absolument en 2021 !

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N°18 – « Aline » de Valérie Lemercier

Aline - film 2020 - AlloCiné

Valérie Lemercier çà passe ou çà casse. Ses spectacles, jamais filmés, sont déconcertants de vulgarité et très loin du personnage populaire et drôle qu’on voit à la télévision ou dans des films. En tant que réalisatrice, elle est allée du mieux avec Palais Royal ou Le Derrière au pire et affligeant avec 100% Cachemire et Marie-Francine.

L’idée donc de faire un faux biopic sur Céline Dion, chanteuse iconique relativement kitsch et ultra moquée, pouvait à la fois enthousiasmer tant Valérie Lemercier peut être hilarante ou au contraire s’avérer ultra casse-gueule.

Et bien l’artiste prend tout le monde à contre-pied en faisant plus un vrai biopic idéalisé, enchanté et sérieux qu’un film moqueur. Bien au contraire, Valérie Lemercier a un profond respect pour Céline Dion et un amour pour le personnage complètement perché qu’elle est mais qui au final s’avère très attachant.

Elle joue le personnage de l’âge de 8 ans à aujourd’hui grâce à des effets spéciaux très bien faits. Évidemment le film est plein d’humour voir d’éclats de rire mais ce n’est jamais pour rire du personnage mais plus de situations comiques déclenchées par cette femme si étrangement habitée par la chanson. On y voit un personnage donc assez marrant et iconoclaste, très naïf et en soif de belle histoire d’amour. Mais surtout on y accompagne une enfant de son cocon familial ultra sympathique de famille très très nombreuse à un autre cocon avec son mari et impresario qui pourrait être son père. La grande réussite du film est notamment dans la crédibilité et la beauté de cette histoire qui émeut à bien des reprises.

Sylvain Marcel en Guy-Claude (aka René Angélil, décédé en 2016) et Danielle Fichaud (qui joue la mère) sont juste énormes et explosent littéralement l’écran, permettant aussi à Aline de ne pas juste se centrer sur son actrice principale mais d’apporter un corps à cette histoire, une profonde humanité à l’ensemble.

A noter la performance vocale de Victoria Sio, la doublure vocale de Valérie Lemercier  qui permet d’y croire lorsqu’elle interprète les chansons de Céline Dion.

Et pourtant dieu sait que je n’aime pas du tout le style de Céline Dion, c’est un style que je trouve criard, qui m’agace, que le trouve culcul et à 100 000 lieues de la pop rock ou de la musique alternative voire électro que je prend plaisir à écouter et découvrir. Et bien, ceci ne m’a pas du tout gêné car le film est un véritable tour de force. Il est ultra sympathique et regorge d’amour pour ses personnages. Surtout il est sincère et réussit à montrer la solitude de cet être une fois l’amour de sa vie disparu. Elle est passée d’écrin en écrin tout étant parfaitement heureuse entre son succès fulgurant, sa famille nombreuse aimante et son mari protecteur.

Le film est populaire, généreux, drôle et surtout très émouvant. Un grand film. Bravo Valérie Lemercier !

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N°17 – « Le diable n’existe pas » de Mohammad Rasoulof

Le Diable n'existe pas - film 2020 - AlloCiné

L’année 2021 sera extraordinaire pour le cinéma iranien puisqu’après le génial « La loi de Téhéran » et avant « Un héros » d’Asghar Farhadi, voici un autre grand film, une réussite sobre et sans concession sur la thématique de la peine de mort en Iran, de nos jours.

Il n’est pas étonnant que le film ait été censuré en Iran tant il est dénonciateur de la violence du régime autocratique et l’absence d’empathie qu’il faut pour imposer à des jeunes miliaires qui font leur service, qui sont appelés, de se transformer en bourreaux. On y voit de jeunes hommes tout a fait normaux, qui vivent et aiment mais qui ont été détachés dans l’unité qui amène les condamnés se faire exécuter.

Évidemment les victimes de ce jugement sociétal qui trouvent la mort sont souvent de simples opposants au régime. Mohammad Rasoulof trouve le ton juste en abordant la thématique sous forme de quatre petites histoires toutes liées entre elles par la thématique. Il est juste dommage que les quatre segments ne soient pas plus davantage reliés, ce qui aurait permis au film d’atteindre une marche plus haute dans son impact déjà fort.

Le film trouve sa lumière dans le combat, la résistance des intellectuels ou jeunes hommes qui refusent de servir cette société là et décident de ne pas se soumettre et de résister.

L’ours d’or à Berlin en  2020 sort avec presque deux ans de retard mais allez le voir !

C’est un film sur le libre arbitre, toujours prégnant même dans une dictature religieuse car obliger un individu à en tuer un autre ne peut gagner sur le mental des bourreaux forcés sans les détruire.

La liberté de conscience est portée aux nues avec simplicité et tellement de force qu’on ne peut qu’adhérer au propos et à la réussite du film.  »Le diable n’existe pas » touche à des thèmes universels et s’impose comme un grand film politique.

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N°16 – « Julie en 12 Chapitres » de Joachim Trier

Julie (en 12 chapitres) - film 2021 - AlloCiné

Le pitch : Julie, bientôt 30 ans, n’arrive pas à se fixer dans la vie. Alors qu’elle pense avoir trouvé une certaine stabilité auprès d’Aksel, 45 ans, auteur à succès, elle rencontre le jeune et séduisant Eivind.

J’aime beaucoup le réalisateur norvégien Joachim Trier dont le précédent Thelma, m’avait bluffé tant esthétiquement que par l’utilisation du genre fantastique pour mieux capter le mal être adolescent féminin. Oslo 31 aout l’avait fait découvrir au monde entier comme un réalisateur au formalisme inventif.

Avec « Julie en 12 Chapitres » , il offre un rôle en or à la jeune Renate Reinsve, qui a remporté à très juste titre le prix d’interprétation à §Cannes. La caméra est sur elle tout le temps et elle est lumineuse, même dans les moments compliqués. Ce portrait de trentenaire qui ne veut pas qu’on lui impose un rythme, des choix, un enfant et qui veut profiter de la vie, ne pourra que vous conquérir tant il écrit avec maturité et bienveillance. L’interprétation du rôle principale se complète du fidèle parmi les fidèles du réalisateur, l’acteur Anders Danielsen Lie, lui aussi d’une justesse confondante.

Le rapport de couple, la fuite de ce dernier, trop parfait, et la soif de liberté ou la peur d’enfermement de l’héroïne sont à la fois touchants et libérateurs. Et pourtant le film vous cueille à diverses reprises d’une émotion surprenante, soit de tristesse lucide sur le temps qui passe, sur les erreurs de choix, les vies qu’on n’a pas vécues pour telle ou telle direction prise soit pour la joie de cette vie qui s’écrit au hasard et surprend sans cesse.

Non seulement le portrait est beau mais il est souvent drôle voir inspiré lorsque le réalisateur illustre un choux de vie par une scène ‘arrêt sur image que vous n’oublierait pas ou lorsqu’il fonce dans l’illustration des drogues hallucinogènes sans se planter en tombant dans le cliché facile.

Magnifique portait d’une millenials insatisfaite, le film surprend sans jamais juger.

La mélancolie qui ressort de l’ensemble est d’une élégance rare et la fin s’avère bouleversante.

Un très bon film à voir absolument.

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Et la suite et fin du classement 2021 dans quelques jours ….

Les pires films de l’année du Blanc Lapin

23 décembre, 2021

Comme chaque année depuis 12 ans, le Blanc Lapin vous livre ses classements de l’année…

Bon chaque année il y a des ratés et des films vraiment à ne surtout pas mais alors surtout pas voir.

Alors contrairement au classement des meilleurs films, celui-ci est plus restreint et n’identifie pas tous les mauvais films car je sélectionne beaucoup les long métrages que je visionne même si cette année record j’en ai vu 123 sortis au cinéma ou sur les plateformes de streaming.

Mais bon quand je constate qu’un film est mal noté (même si je ne lis pas les critiques en amont) et qu’en plus je n’ai aucune envie de le voir, j’avoue que je passe mon chemin.

Vous pardonnerez donc le démontage en règle qui suit qui n’est pas exhaustif.

Mais comme les critiques méchantes sont en général les plus drôles, je poursuis cette bonne vieille tradition du blanc lapin.

Enjoy ;) )))

 

Les pires films que j’ai vus sont …tadaaaaaaaaaaaa !!!

 

N°10 – « Madres Paralelas » de Pedro Almodóvar

Madres Paralelas - film 2021 - AlloCiné

Le pitch : Deux femmes, Janis et Ana, se rencontrent dans une chambre d’hôpital sur le point d’accoucher. Elles sont toutes les deux célibataires et sont tombées enceintes par accident. Janis, d’âge mûr, n’a aucun regret et durant les heures qui précèdent l’accouchement, elle est folle de joie. Ana en revanche, est une adolescente effrayée, pleine de remords et traumatisée. Janis essaie de lui remonter le moral alors qu’elles marchent telles des somnambules dans le couloir de l’hôpital. Les quelques mots qu’elles échangent pendant ces heures vont créer un lien très étroit entre elles, que le hasard se chargera de compliquer d’une manière qui changera leur vie à toutes les deux.

Pedro Almodóvar est l’un des maitres du cinéma mondial, il a réalisé bon nombre de chefs d’oeuvres et surtout a su progressé dans son art, atteindre une grande maturité avec La Fleur de mon secret, terminant sa période movida déjà très bonne pour livrer des bijoux tels que En chair et en os, Tout sur ma mère, Parle avec elle, La Mauvaise Éducation , Volver, Étreintes brisées, ou La piel que habito.

Sa particularité est qu’il peut parler de transgenre, de relations lesbiennes depuis 40 ans sans que ceci fasse fake. C’est joyeux et triste à la fois, c’est surtout profond. Si Les Amants passagers était un premier couac depuis 25 ans, manquant de finesse et d’inspiration, Douleur et Gloire a camé tout le monde et s’avère l’un des sommets de sa filmographie.

Av 72 ans, Pedro n’a plus rien à prouver et c’est bien là le problème. « Madres Paralelas » est un film mineur, très mineur même tant il sent la mise bout à bout de deux histoires pas suffisamment consistantes pour faire de chacune d’elle un film. Bien sûr sa fidèle Penelope Cruz est magnifique et il la filme comme personne. Mais l’histoire sonne fake réguilèrement et les retournement de situations sont à chaque fois déceptifs. Quand on espère le thriller c’est autre chose de plus mou qui vient faire retomber le film comme une balle qui va de moins en moins haut. Pourtant la thématique de la mémoire autour des victimes du franquisme était vraiment passionnante mais il la traite maladroitement, avec une fausse émotion qui agace plus qu’autre chose.

« Madres Paralelas » est raté, mal scénarisé et fait penser parfois à une parodie du style Almodovar, une grosse grosse déception.

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N°09 – « Encounter » de Michael Pearce (II)

Encounter - film 2021 - AlloCiné

Riz Ahmed est un excellent acteur qui d’ailleurs porte cette année l’excellent « Sound of metal« .

Ici il porte le film sur ses épaules et joue comme à son habitude très bien.

Mais voilà, si l’idée originale du pitch était bonne, le film ne tient pas sur la durée et s’avère horriblement long, à tel pont qu’ont prie pour que le personnage principal se prenne une balle et qu’on clôture la trop longue fuite en avant du personnage.

L’idée de film d’invasion extraterrestre est assez originale et le basculement dans la paranoïa aurait pu faire un bon twist de fin. Sauf que lorsque le film change de style, déjà on est déçus et surtout la saveur du spectacle qu’on attendait est remplacée par une course poursuite sans aucun intérêt tant on connait la fin, courrue d’avance.

C’est long, fastidieux et au final raté.

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N°08 – « Une affaire de détails » de John Lee Hancock

Une Affaire de Détails - film 2021 - AlloCiné

Avec Denzel Washington, Rami Malek, Jared Leto

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Le pitch : Deke, shérif adjoint du comté de Kern, victime récemment d’un burn-out, doit faire équipe avec le détective du LASD, Baxter, afin de retrouver un tueur en série. Deke est aussi intuitif que rebelle à l’autorité, l’inverse de Baxter. Parallèlement à l’enquête, le shérif adjoint voit resurgir un sombre secret de son passé…

Avec un casting pareil, on pouvait s’attendre à minima à un film bien joué. De ce côté là « Une affaire de détails«   est une réussite, Denzel Washington et Rami Malek arrivant à composer un bon duo fâce à un Jared Leto pour une fois un peu plus sobre, ce qui ne gâche rien.

Rami Malek confirme qu’il est crédible hors de Mister Robot après « Bohemian Rhapsody » et avant de jouer le méchant du futur James Bond, Mourir peut attendre.

Après l’histoire de cette énième chasse après un tueur en série manque cruellement d’originalité. Non que le film ne se regarde pas ou soi mal réalisé, mal écrit. Le film a un bon résultat mais le genre a tellement été vu et revu au cinéma avec des chefs d’œuvres (Seven ou Zodiac de David Fincher, Tueurs nés d’Oliver Stone, Le silence des agneaux, No country for Old Men des frères Coen etc…), de multiples films moyens et plein de séries en tout genre, que forcément, c’est dur d’être original.

Or ici l’originalité ne tient pas au fait qu’on connait le coupable tout de suite (déjà fait plein de fois dont l’excellente série The Fall) mais au fait qu’on a un doute. Qu’il manque des détails. Sauf que la conclusion du film rend tout le procédé très limite d’un point de vue moral.

Et oui, on a un peu l’impression que la fin justifie les moyens, que le délit de salle gueule vaut condamnation et le film devient limite très très tendancieux, en mode républicain bien réactionnaire. Et çà, c’est moche, ce n’est pas ma came et c’est surtout dangereux. Montrer ce genre de morale à des américains déjà bien complotistes et capables de voter pour Trump malgré tous ses mensonges et sa déformation de la réalité, ce n’est pas sérieux.

Je ne pense pas que le film visait ce message et le message n’est d’ailleurs pas hyper clair mais justement il génère une gêne certaine.

Donc le fait que le film soit extrêmement classique et ne se distingue pas dans son genre mais en plus développe une morale très limite, çà vaut deux lapins, pour la présomption d’innocence.

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N°07 – « Comment je suis devenu super-héros ? »

Comment je suis devenu super-héros - film 2021 - AlloCiné

Comment je suis devenu super-héros ? est un film de supers héros français ! Ouh là !

Pio Marmai et Leïla Bekhti portent le premier film de Douglas Attal, fâce à Swan Arlaud en super vilain et Benoit Poelvoorde en vieux héros.

On y suit Gary (Pio Marmai), en flic forcé de travailler avec  Cécile (Vimala Pons) pour traquer une drogue synthétique qui donne des supers-pouvoirs pour de brefs instants.

On peut dire qu’avec ce film, à peu près tous les clichés du genre sont réunis sans les moyens des blockbusters américains et avec plein de mauvaises idées de scénario.

Les personnages sont attendus, les situation comiques pas vraiment drôles et le temps passe incroyablement lentement comme si le film avait le super pouvoir de vous faire durer l’absence de plaisir plus longtemps.

Un vrai raté. Mais alors bien.

 

N°06 – Sous le ciel d’Alice

Sous le ciel d'Alice en DVD : Sous le ciel d'Alice DVD - AlloCiné

Dans les années 50, la jeune Alice quitte la Suisse pour le Liban, contrée ensoleillée et exubérante. Là-bas, elle a un coup de foudre pour Joseph, un astrophysicien malicieux qui rêve d’envoyer le premier libanais dans l’espace. Alice trouve vite sa place dans la famille de ce dernier. Mais après quelques années de dolce vita, la guerre civile s’immisce dans leur paradis…

Alors la presse était tellement bonne que j’ai accouru voir ce film très piégeux. Je me suis rarement autant emmerdé cette année que devant ce film d’1h30 qui avait l’incroyable don de paraitre durer 3 heures.

Toujours fascinant quand les personnages vous gavent d’entrée, dès les 5 premières minutes et que les situations qui s’enchainent empirent le ressenti de minute en minute comme si la terre entière avait décidé de se venger de vous en vous infligeant le visionnage d’un film totalement abscons, imbu de lui-même et qui se regarde tellement le nombril que vous avez l’impression d’être seul dans une pièce avec un artiste insupportable qui vous raconte son scénario avec moults détails… sauf que vous trouvez cela très mauvais.Et que vous vous dites « mais pourquoi moi ? pourquoi ? » en hurlant très fort espérant que c’est un cauchemars.

Comme sur l’affiche, le pire arrive avec le petit cœur, à savoir les moments d’émotion où évidemment vous n’êtes pas ému et rêvez que les personnages se prennent vite une bombe pour que le film se termine plus vite.

Et que dire des idées loufoques de délires du personnage et d’imaginaire décalé qui se veulent originales mais agacent encore plus tellement l’auteur se donne un genre qu’elle n’a pas.

Horrible ! Après si j’étais poli je dirais que je suis « passé à côté » sauf que je n’étais pas seul et que les avis étaient partagés…on est donc tous passés à côté de la « poésie du film », très probablement, notre continuum espace temps étant différent et j’en suis super fier en fait.

 

N°05 – « Bergman Island » de  Mia Hansen-Løve

Bergman Island en DVD : Bergman Island DVD - AlloCiné

Le pitch : Un couple de cinéastes s’installe pour écrire, le temps d’un été, sur l’île suédoise de Fårö, où vécut Bergman. A mesure que leurs scénarios respectifs avancent, et au contact des paysages sauvages de l’île, la frontière entre fiction et réalité se brouille…  

« Dis moi Blanc Lapin, c’est quoi un film chiant ? »

Ben, là j’ai un super exemple. Une réalisatrice adulée par quelques critiques snobes cinéphiles parisiens, sélectionnée systématiquement en festivals, qui nous livre un film, sélectionné à Cannes pour la Palme d’Or, d’une ineptie assez confondante.

Déjà on se prend facile 50 minutes avant de voir apparaitre la moitié du casting, Mia Wasikowska et Anders Danilsen Lie n’arrivant que très tard, ce qui rend la bande-annonce ultra trompeuse. D’autant qu’elle est rythmée, à l’inverse du film. Alors certes, le film est imprégné du grand Ingmar Bergman de partout et le réalisateur suédois était réputé pour l’extrême lenteur de son cinéma.

Sauf que la réalisatrice n’a pas son talent et que pour donner envie à la jeune génération de se pencher sur l’œuvre du maitre, c’est mal barré avec ce film.

Pauvre Ingmar Bergman, qui se serait bien passé d’un hommage pareil, d’un poncif aussi plat, sans histoire, sans relief, sans la profondeur qui caractérisait et irriguait son œuvre.

Le film est long, pénible et sans aucun souffle. Il est en roue libre à l’image des personnages qui font du vélo dans de nombreuses scènes et pédalent dans la semoule, amenant le personnage vers une autre scène sans intérêt.

Le peu de fantaisie qu’elle essaie de créer tombe à plat et s’avère factice à tel point que je me demandais pendant tout le film si le scénario avait été écrit avant ou pendant le tournage voire après lors du montage.

On dirait un film réalisé en mode Bergman soit avec le rythme ultra lent mais sans les thématiques passionnantes qui faisaient tout l’intérêt du cinéma du maitre suédois. C’est donc du Canada drye de Bergman, où on ne garde que le coté le moins sympa, sa lenteur ! C’est balaise !

« Bergman Island » est un film paresseux et désincarné et heureusement que je l’ai vu en Vod payante et non au cinéma car çà m’aurait encore plus gonflé de faire le déplacement pour voir çà. Je mets un lapin pour les acteurs que j’aime bien.

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1 lapin

 

N°04 – « The guilty » d’Antoine Fuqua

The Guilty - film 2021 - AlloCiné

Remake du film danois de 2018 qui avait reçu des critiques élogieuses, The Guilty pour Netflix est la parfaite illustration du mauvais remake.

Le concept est le même, à savoir suivre des sons et ne rien voir à l’image que le policier des urgences qui tente de repérer et sauver une femme en détresse.

Seulement voilà, Antoine Fuqua a la finesse d’un pachyderme et son film est grossier de bout en bout.

 Jake Gyllenhaal, qui d’habitude est un bon acteur, en fait des caisses et pleurniche ou fait des têtes pas possibles tout du long. On a juste envie de lui foutre des baffes pour qu’il arrête de cabotiner et de mal jouer. Ce n’est pas parceque la caméra est toujours sur lui et qu’on doit écouter les sons u téléphone qu’ »il doit tout surligner.

L’échec de ce remake est total avec une direction d’acteur au singulier, absolument catastrophique.

Un film qui se fout de la gueule de ses spectateurs.

Très agaçant.

 

N°03 – « Sos Fantômes : l’héritage » de Jason Reitman

S.O.S. Fantômes : L'Héritage - film 2021 - AlloCiné

Voici donc enfin le 3ème opus des chasseurs de fantômes, annoncé depuis 25 ans, qui a eu droit à un épisode navrant avec des chasseuses qui fit à juste titre un four milieu des années 2010.

Cette fois-ci on nous promettait du fan service et le retour des héros d’origine, Bill Murray, Dan Aykroyd et tout le casting sauf Harold Ramis, décédé en 2014.

Mieux, Jason Reitman, le fils du réalisateur des deux premiers épisodes prenait la tête du projet, gage de respect du travail de popa.

Et bien tout ce que vous ne vouliez surtout pas voir, dites vous que tout sera présent et rien de vous sera épargné.

Dans un film pudding totalement inconsistant au scénario décalqué sur l’original qui reprend à l’identique des scènes en moins bien, Jason Reitman vomit sur l’héritage familial à force de s’empiffrer du guimauve. C’est au mieux un hommage au fantôme glouton vert « bouffe tout » qui empiffre de n’importe quo pour le recracher.

L’idée de donner le rôle principal à des adolescent est nullissime, ces derniers étant super agaçant et donnant des envies de meurtre à épisodes réguliers. Le film a zéro humour là où le film d’origine surfait sur le talent comique de ses interprètes. Le pire est qu’on attend 90% du film, très long de 2h04, pour apercevoir le casting d’origine durant quelques minutes où ils sont excellents en deux répliques et font entrapercevoir ce qu’aurait été un film avec eux de bout en bout.

Encore aurait-il fallu écrire un scénario digne de ce nom ce qui n’est pas du tout le cas présentement. Pire, l’hommage à Harold Ramis est navrant et je serait sa famille je porterait plainte pour viol de sépulture en osant raviver son fantôme dans des scènes aussi culcul et inutiles.

Une des pires idée de suite concrétisées ses vingt dernières années. Horrible !

La piste aux lapins :

1 lapin

 

N°02 – « Synchronic » de Justin Benson, Aaron Moorhead

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Avec Jamie Dornan, Anthony Mackie

Deux agents des services ambulanciers de la Nouvelle-Orléans voient leurs vies chamboulées lorsqu’ils découvrent une série de morts liées à une drogue expérimentale aux effets secondaires paranormaux.

Il fallait bien deux réalisateurs pour mettre en image une idée aussi débile sur le papier. Car question voyage dans le temps, il est vrai que la plupart des tentatives se soldent par des films assez mauvais, n’est pas Terry Gilliam qui veut, L’armée des 12 Singes restant l’un des chefs d’œuvre du genre.

Ici on en est loin, très loin, à des milliers d’années même. Le concept prend exactement celui du film Netflix Project Power. Dans ce dernier une drogue donnait des supers pouvoirs et au delà des effets spéciaux réussis, le fil était d’un consensuel et d’un cliché assez hallucinants.

Avec ce « Synchronic » , c’est pareil mais on voyage dans le temps mais au même endroit physique. Wahouh !!!! Super idée pour réduire les coûts des décors !!! Pas con ! Sauf que c’est vraiment naze et que les explications du héros qui découvre les effets de la drogue sont franchement navrantes. A chaque immersion dans le passé, on se prend à se dire qu’on est en train de regarder un bon gros film de merde et à perdre du temps pour lequel aucune machine à remonter quoique ce soit ne nous permettra d’éviter cela.

Sauf peut être si vous avez la chance de lire cette critique, qui du coup sera une machine à vous gagner 1h30 !!! merci qui ? merci monsieur le blanc lapin.

Vraiment il faut toujours voir de mauvais films pour avoir une échelle de valeur avec les bons et l c’est le premier film pourri que je vois en 2021, mais je l’ai bien choisi celui là ! Ah oui 81% des critiques sur l’agrégateur Rotten Tomatoes trouvent le film bon…il est temps que la pandémie se termine parceque la drogue c’est mal.

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Mauvais

 

N°01 – « The tomorrow war » avec Chris Pratt

The Tomorrow War - film 2021 - AlloCiné

Le monde est stupéfait lorsqu’un groupe de voyageurs arrive du futur – précisément de l’année 2051 – pour délivrer un message urgent : dans 30 ans, l’Humanité va perdre une guerre d’envergure mondiale contre une espèce d’aliens meurtrière venue détruire notre civilisation.

Cette superproduction rachetée une fortune par Amazon laisse pantois.

Entendons nous, le film a un énorme budget et çà se voit dans les effets spéciaux, même si le voyage dans le temps a quelquechose d’assez ridicule et manque totalement d’imagination.

C’est d’ailleurs le sentiment général qui se dégage du film. Il y a comme un condensé de tout ce que vous avez vu dans des films de SF dont Chris Pratt, qui n’a pas l’air super à l’aise quand il ne fait pas le con comme dans Les gardiens de la Galaxie, et des monstres très très vilains.

Le film est sans surprise, sans odeur, sans saveur. Quand on compare à Sans un bruit 2, on se dit que les scénaristes ne vivent pas sur la même planète.

Bref, c’est mauvais, ne perdez pas votre temps.

La piste aux lapins :

Mauvais

 

Les meilleurs films du Blanc Lapin N°10 à N°1

27 décembre, 2020

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Après la première partie du classement (N°25 à 11), voici la suite et fin du classement du 10ème au meilleur long métrage du blanc lapin 2020.

 

N°10- « Eté 85″ de François Ozon

Eté 85 - film 2020 - AlloCiné

En 22 ans, François Ozon a signé 19 films dont 14 très réussis soit une production des plus rythmées jamais vues en France de la part d’un auteur de sa trempe. Ozon fait partie de ces hauteurs qui déplace le public sur son nom et c’est mérité.

« Eté 85 » rend donc hommage probablement en partie à sa jeunesse, il y a 35 ans alors qu’il avait 18 ans.

Après, la pudeur du cinéaste et son talent pour surprendre font de ce film bien autre chose qu’une idylle amoureuse d’été. Difficile de ne rien révéler et donc je serai très prudent.

« Eté 85 » compte sur un casting de deux jeunes qui vont faire parler d’eux, Félix Lefebvre, très convaincant et Benjamin Voisin, qui commence à devenir connu avec pas moins de quatre films sortis en 2020 (La dernière vie de Simon, Un vrai bonhomme et bientôt Comédie humaine d’après les Illusions perdues d’Honoré de Balzac). Leur alchimie à l’écran fonctionne à merveille. Valeria Bruni Tedeschi, Isabelle Nanty et Melvil Poupaud sont excellents.

Ozon nous conte la découverte amoureuse, la première passion avec tout ce qu’elle a de beau et de violent, de délicieux et de cruel. Il fait toucher du doigt à l’écran ces moments hors du temps et la chute qui suit quand l’un des deux se lasse et détruit le château de sable, à un moment forcément inattendu pour l’autre.

Le fait de saisir ces émotions si fugaces et de les retranscrire de la sorte tient à une somme de talents humbles et juste dans l’intimité des personnages.

Le film est efficace, sans aucune scène de trop, bercé par une bande originale eighties et vintage à souhait. Cet air d’été qui se poursuit dans une noirceur violente est construite avec finesse et beaucoup d’émotions romanesques.

Le rapport à la mort ou au professeur est aussi très présent comme une synthèse de thématiques traversant la dense filmographie du cinéaste. François Ozon nous montre un adolescent qui découvre la vie avec ce qu’il y a de plus surprenant, de plus glauque. Il explique de façon très simple l’idéalisation d’un être par un autre et le besoin parfois de se construire en creux par rapport à un idéal.

La mise en scène, brillante comme toujours et la direction d’acteurs font de ce film une belle réussite dans cette filmographie déjà riche.

La piste aux Lapins :

4 étoiles

 

N°09- « Monos » de Alejandro Landes

Résultat de recherche d'images pour ""Monos" de Alejandro Landes"

« Monos » est l’une des grandes surprises de ce début d’année et la découverte d’un nouveau réalisateur brésilien, Alejandro Landes, sur lequel votre Blanc Lapin préféré mise beaucoup pour la suite de sa carrière.

Entre Sa Majesté des Mouches, « Aguirre, la colère de Dieu » d’Herzog ou Au Cœur des Ténèbres de Joseph Conrad, le réalisateur sud américain nous plonge dans un monde à la limite du fantastique. On est tout de suite happé par la beauté des paysages, de cette mère nature sauvage dans laquelle huit adolescents vivent avec pour mission de veiller sur une otage américaine au sommet des montagnes colombiennes. Ils s’entrainent pour la lutte prêt à prendre la relève de leurs ainés révolutionnaires, et vivent d’une façon militaire. Ils obéissent à un adulte qui de temps en temps vient les voir et filmer l’otage. Sauf que cet adulte est nain et très dûr, sans empathie, ce qui créé un décalage immédiat. Cette prison n’a pas de barreaux car la nature est plus forte qu’eux. Mais surtout on comprend très vite que ces enfants sont eux mêmes prisonniers de cet état de fait, de cette vie loin des intérêts qu’un adolescent peut avoir. On ne nous explique pas pourquoi et comment ils sont arrivés là, pourquoi ils ont été choisis ni quelle fut la durée de leur endoctrinement.

La violence de leurs rapports se fracasse au primitif de leur vie quotidienne, laissant s’échapper des pépites d’humanité, de joie, de désirs lorsque leur surveillance se relâche.

Mais leur absence de compassion pour leur otage renvoie également à l’absence de limites des enfants, pour qui les barrières morales et la remise en question de ce qu’on leur a inculqué passe par des chemins différents de ceux d’un adulte.

A ces images magnifiques qui alternent avec le danger, le questionnement sur ces personnages, Alejandro Landes ajoute un accompagnement musical excellent de Mica Levi, accentuant la rudesse ou l’effet des narcotiques.

Puis le réalisateur opère une rupture de paysage et de cadre au milieu du film, passant du froid des montagnes à la chaleur moite de la forêt tropicale. Il passe d’un enfer à un autre ou plutôt d’un endroit dangereux qui pourrait être paradisiaque à une nouvelle prison naturelle.

Le réalisateur filme ces corps meurtris et qui s’imposent une discipline atroce, avec un regard bienveillant mais suffisamment de distance pour ne jamais permettre au spectateur de tomber dans une empathie profonde pour ces enfants sauvages qui peuvent à tout moment exploser de violence.

Ce parti pris est souvent radical et ne cherche pas l’explicatif, ce qui donne au film un charme extraordinaire, hors du temps.

La puissance des évocations visuelles de ce thriller de survie en zone naturelle ultra dangereuse, confrontée aux protagonistes en apparence fragiles mais extrêmement durs et mentalement entrainés, donne à « Monos » un statut très particulier. C’est un film étrange qui ne cherche pas à donner du confort au spectateur de part la prévisibilité d’une histoire mais justement à le tenir en haleine tout en restant fasciné par son mixte de poésie et de mort.

Ce voyage nihiliste donne un résultat qui n’a pas de comparable évident et joue sur le sensoriel de façon magistrale. Un grand metteur en scène est né, de toute évidence.

La piste aux Lapins :

4 étoiles

 

N°08- « Effacer l’historique » de Gustave Kervern et Benoît Delépine

Affiche du film Effacer l'historique - Affiche 1 sur 1 - AlloCiné

Gustave Kervern et Benoît Delépine, les deux compères issus de Groland, ont réussi à construire une belle filmographie en 20 ans, depuis Aaltra. Que ce soient Louise-Michel, Mammuth, Le grand soir ou Saint Amour, tous ces films très réussis ont su parler de gens invisibles, déclassés, avec une grande tendresse et un humour ravageur et salvateur.

« Effacer l’historique » est clairement dans cette veine, avec ce même souci de ne pas être réaliste tout du long et d’insérer des scènes surréalistes bienvenues pour imager leur regard social sur un monde qui tourne bizarrement.

Ils s’attaquent à l’omniprésence d’internet, des réseaux sociaux, de l’horrible système de notation des uns et des autres. Sur une scène courte avec Benoit Poelvoorde, excellent, ils arrivent à dénoncer l’exploitation des livreurs à domicile et leurs conditions de vie mais aussi la responsabilité aveugle du consommateur. C’est bref et efficace comme toutes les scènes du film.

Blanche Gardin, Denis Podalydès et Corinne Masiero forment un trio très attachant de gens laissés en marge, qui se sont rencontrés sur un rond point au moment des gilets jaunes. Face à la déshumanisation du quotidien, à la marchandisation de tout, les trois sont largués pour des causes différentes. Alors ne vous attendez pas à une conquête burlesque des Gafa, la bande-annonce est trompeuse et cette partie est toute petite. Non, ici on les suit dans leur quotidien limite orwellien où ils tentent de comprendre et d’appliquer les règles de ce monde à peine caricaturé. Et c’est ce qui fait la force du rire dans le film. C’est drôle mais les réalisateurs-scénaristes n’ont pas à pousser beaucoup les situations, c’est très proche de la réalité !

L’engagement et la pertinence des scénettes qui s’enchainent laisse cependant place à une poésie pessimiste et encore une fois des personnages que les réalisateurs affectionnent. Cà se sent à l’écran. Blanche Gardin est excellente avec son phrasé et sa diction si particulière. Ceux qui ont vu ses excellents spectacles ne seront pas dépaysés.

Le fantasque et le loufoque anar font de ce « Effacer l’historique » un excellent cru pour notre duo de réalisateurs socio-comiques.

La piste aux Lapins :

4 étoiles

 

N°07- « Dark Waters » de Todd Haynes

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Il est très surprenant de voir le réalisateur de Loin du Paradis et Carole, habitué aux drames intimistes, s’attaquer à un sujet de société comme le scandale du téflon et de l’entreprise DuPont qui a empoisonné sciemment ses employés, les habitants des villes autour de ses usines et les millions de clients à travers le monde pendant 50 ans.

Il faut dire que Mark Ruffalo qui tient le premier rôle, a porté le projet à bout de bras comme co-producteur et on ne peut que saluer son combat de David contre Goliath tout autant que son jeu nuancé.

Il incarne donc, Robert Bilott, un avocat spécialisé dans la défense des industries chimiques, qui va prendre parti pour les petites gens victimes de cette impunité cynique d’une énorme industrie chimique usant de son poids économique, de son poids sur les emplois, de son impact politique.

Le combat semble perdu d’avance mais la ténacité de ce travailleur acharné va le balloter pendant 15 ans de combats. Certes le film n’est pas très cinégénique mais l’enquête est vraiment intéressante et bien menée.

Todd Haynes apporte toute la pudeur de ce drame humain et on comprend au fil du film pourquoi Mark Ruffalo l’a choisi. Le film est fin et militant tout à la fois car il parle de dignité face à une inconscience morale inconcevable.

La force tranquille et l’humilité de « Dark Waters » rend son visionnage nécessaire.

Un film écologiquement engagé mais mené à la façon d’un thriller vraiment intelligent.

La piste aux Lapins :

4 étoiles

 

N°06- « The Gentlemen » de Guy Ritchie

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Voici enfin le retour en grande forme de Guy Ritchie après deux blockbusters impersonnels qu’étaient La légende du Roi Arthur et Aladdin. Le réalisateur a été critiqué à ses débuts pour sa façon très clipesque de réaliser ses films. Issu du monde de la pub et du clip, il est vrai que « Crimes Arnaque et botanique » ou « Snatch« , sortis il y a 20 ans, avaient un côté épileptique qui pouvait déplaire à certains. Moi perso, j’adore et son passage par Sherlock Holmes était vraiment très réussi lui aussi. Disons que Guy Ritchie a créé son style, qui parfois agace et donne de mauvais films (Revolver, RocknRolla) et des fois c’est jouissif et du divertissement surexcité mais ultra efficace (cf films précités et Des Agents très spéciaux).

Avec The Gentlemen, il choisit de revenir au style de ses deux premiers opus avec le même cadre d’une histoire de gangsters et d’arnaque. Comme dans Snatch, les groupes de gangs sont nombreux, cinq en l’occurrence, ce qui permet au scénario de surprendre en permanence et d’empêcher de savoir où il va nous amener. L’ironie est corrosive et la salle éclate de rire à plusieurs moments car Ritchie n’en oublie pas son comique de situation souvent malin et ses personnages très bien écrits.

Pour se faire aider, son casting est juste hyper classe. Matthew McConaughey est royal en lion de la jungle qui veille sur son empire de la weed et cherche à éviter qu’un prédateur plus malin lui vole son trône. Un rôle écrit sur mesure pour lui et très classe qui lui permet de tordre le cou à la direction pas très bonne prise par sa carrière ses trois dernières années.

Charlie Hunnam a le 1er rôle à ses côtés et prouve que c’est un très bon acteur, cool. Après bien des efforts et des films pas forcément réussis au final, l’acteur accroche un bon film de plus à sa filmo après Crimson Peak et surtout The Lost City of Z.

Quant à Hugh Grant, c’est un réel plaisir de le voir de nouveau en haut de l’affiche dans un rôle de manipulateur, sombre et retord. Il est juste excellent.

Colin Farrell joue de nouveau un contre emploi délicieux comme il en a le secret et l’exigence.

Le film est malin et rythmé mais peut être moins dans l’épate et l’esbroufe qu’on pouvait reprocher à ses deux premiers films. Il est plus pausé même si le terme n’est pas adapté dans le rythme et le montage sont la marque de fabrique de Ritchie.

La virtuosité de l’ensemble donne la patate et le sourire tant l’histoire est jubilatoire.

La coolitude de ces ficelles de scénario font du bien. C’est certes un film sans prise de tête ni message. Mais ce type de récit à double fond, qui surfe sur un humour potache, parsemé de scènes d’actions en général comiques et de rebondissements en cascade, est le film idéal pour vous divertir intelligemment.

La piste aux lapins :

4 étoiles

 

N°05- « L’histoire vraie du Gang Kelly » de Justin Kurzel

Achat Le Gang Kelly en DVD - AlloCiné

Le réalisateur des Crimes de Snowtown, Macbeth et le moins réussi Assassin’s Creed, revient avec ce faux western sur l’un des plus grands hors la lois qu’ait connu l’Australie, le billy the kid australien, Ned Kelly.

Le film sort hélas en dvd et streaming pour cause de pandémie bien que passé à Venise.

J’attendais beaucoup ce film et force est de constater que je n’ai pas été déçu.

Synopsis : En Australie, certains le considèrent comme un criminel, d’autres comme un héros révolutionnaire. Dans le bush, Ned Kelly est une figure historique. Il incarne le symbole de la lutte contre le gouvernement britannique à une époque perturbée où ce continent rude et sauvage gagnait peu à peu son indépendance. Découvrez l’épopée de Kelly et de son gang de bushrangers qui ont à la fois fait régner la terreur et allumé une lueur d’espoir chez ceux qui n’avaient rien.

Justin Kurzel livre un film punk aux sons parfois électriques et au découpage très particulier. Il choisit de montrer l’épure de ces paysages quasi désertiques ou la police britannique traite avec mépris les autochtones du 19ème siècle. Il joue beaucoup sur les couleurs tantôt froides avec une touche de couleur tantôt très chaudes pour illustrer l’environnement et le danger pour le personnage principal.

Surtout, le protagoniste est d’abord montré durant 45 minutes dans son enfance et dans ses traumas sans que ce soit lourd et démonstratif. Son père est à moitié fou et sa mère se prostitue et accepte de le vendre à un hors la loi, incarné brièvement par un Russell Crowe imposant et bicéphale dans sa personnalité.

La mère est quant à elle un personnage central que l’enfant adore et qui recherche un amour qu’elle ne peut pas donner, autocentrée qu’elle est sur elle-même et sa propre survie, faisant passer son intérêt avant celui de ses enfants.

Et puis surtout, elle l’incite à aller dans le mauvais chemin alors qu’on sent un enfant sensible et qui n’aime pas la violence. Charlie Hunnam incarne avec finesse ce policier à la fois protecteur et profiteur, manipulateur qui ne donne rien sans un retour sexuel de la mère. Il y a de quoi traumatiser le gamin, forcément.

Puis entre en scène George McKay dans le rôle de Ned Kelly adulte et ce dernier, de par son jeu et son visage si particulier, explose l’écran. Il est brillant de sensibilité et de violence voir d’accès de folies venues de son héritage génétique paternel. Le personnage n’est pas antipathique, au contraire, il est perdu et très seul au milieu de son gang. Kurzel nous l’a expliqué enfant et le suit dans sa fuite vers l’échafaud.

Le déterminisme nihiliste du film n’est pas triste, il est même plutôt beau à bien des reprises.

Nicholas Hoult joue un second rôle très important avec toujours le même talent. C’est même son meilleur rôle. Il joue un autre policier britannique, ambivalent et quelques peu sadique. A la fois dans l’empathie et la volonté de pactiser avec le gangster, de devenir son ami et à la fois à vouloir lui soutirer ce qu’il a de plus cher et lui négocier une liberté en forme de chantage. Le personnage est lui aussi pervers car on ne sait pas pourquoi il joue ainsi avec la mort, peut être aussi par dépit, parcequ’il tue le temps jusqu’à se mettre grandement en danger. Le personnage est vraiment super bien travaillé dans sa relation homo-érotique avec celui de Georges McKay (ie Ned Kelly) et l’alchimie prend comme une danse macabre fascinante.

Et puis il y a la grande scène finale qui calmera tout le monde de part son brio et son originalité.

Vraiment, « The True History of the Kelly Gang« , traduit « Le gang Kelly » est une totale réussite, un film étrange et différent de ce qui sort habituellement. L’ambition de Justin Kurzel, son équipe et de son excellent casting est récompensée par une des meilleures réussites de l’année.

La piste aux Lapins :

4,5 lapins

 

N°04- « SOUL » de Pete Docter

Soul - film 2020 - AlloCiné

Le dernier film des studios Pixar sort exclusivement sur Disney Plus et pas au cinéma et c’est la première fois qu’un film Pixar est privé des salles obscures. C’est un coup dur pour le cinéma et c’est surtout fort dommageable tellement ce dernier opus est très réussi.

Alors que le studio à la lampe s’est perdu dans des suites consensuelles durant les années 2010, SOUL raisonne comme le rappel que lorsque les artistes du studio se mettent à créer un nouvel univers, parfois c’est juste génial. Si « En avant » était très pauvre scénaristiquement avec des personnages trop consensuels, SOUL fait évidemment penser à VICE VERSA du même Pete Docter. On y croise non plus des sentimets qui créént la personnalité mais carrément des âmes.

L’idée conceptuelle est excellente et le rendu graphique original par rapport aux créations précédentes. L’identité visuelle fonctionne à merveille et alterne avec le monde des humains.

Les deux personnages que sont la jeune âme perdue et l’âme du héro jazzman sont super bien croquées. L’humour est comme souvent très fin et parfois ravageur mais surtout le film touche à l’universel avec une profonder qu’on n’avait plus vue depuis Là-haut ou Wall-E.

SOUL est drôle et sur la fin très émouvant, en suivant des chemins non attendus et plus adultes que VICE VERSA. J’ai d’ailleurs préféré SOUL  à son predescesseur, pour sa thématique plus profonde et pour ses personnages plus attachants.

Une vraie grande réussite.

La piste aux Lapins :

4,5 lapins

 

N°03 – « Drunk » de Thomas Vinterberg

Drunk - film 2020 - AlloCiné

Le réalisateur danois découvert avec son chef d’œuvre « Festen » en 1998, a connu une chute d’inspiration durant les années 2000 avant de revenir à un excellent niveau en 2010 avec le superbe « Submarino » qui parlait déjà d’alcool, puis il a enchainé avec les très réussis « La chasse » en 2012 où Mads Mikkelsen excellait dans le rôle d’un instituteur accusé à tard d’attouchement par une enfant, puis le très émouvant « Loin de la foule déchainée » en 2015, La communauté et Kursk.

Thomas Vinterberg construit une filmographie qui garde certains préceptes du dogme qu’il a créé avec Lars Von Trier, un certain réalisme voir naturalisme qui renforce certaines émotions lorsque les scènes prennent. Mais contrairement à son compatriote qui provoque visuellement et cherche souvent à choquer, Vinterberg opte pour des histoires autour de personnages très bien écrits, déchirés par la vie, souvent cassés même. Il apporte un regard à la fois non consensuel et qui cherche le débat. Si dans « La chasse« , Vinterberg interrogeait sur les excès de nos sociétés mettant au pilori sans preuves et n’hésitant pas à broyer un homme sans le laisser se défendre, avec « Drunk« , il s’intéresse à un sujet passionnant et très original car peu traité de la sorte à ma connaissance.

Le pitch est simple. Quatre amis professeurs dans le même collège et tous ayant passé largement a quarantaine, décident de mettre en pratique la théorie d’un psychologue norvégien selon laquelle l’homme aurait dès la naissance un déficit d’alcool dans le sang. Avec une rigueur scientifique, chacun relève le défi en espérant tous que leur vie n’en sera que meilleure ! Si dans un premier temps les résultats sont encourageants, la situation devient rapidement hors de contrôle.

Vinterberg n’aborde pas uniquement que le thème de l’alcoolisme. Non son thème principal est celui du vieillissement, du temps qui passe, des responsabilités familiales et des échecs ou espoirs déçus qui font que des hommes de 50 ans se retrouvent fatigués et avec peu d’entrain pour les années qui leurs restent. A ceci, il oppose et filme l’insouciance de la jeunesse qui boit beaucoup, au delà de l’excès et qui s’éclate. A aucun moment il ne fait l’apologie ou ne juge grâce à ce système d’expérimentation où les professeurs vont retrouver de la joie de vivre, vont se désinhiber et même retrouver des projets, être meilleurs au quotidien.

Mads Mikkelsen est immensément bon et les trois autres acteurs qui l’entourent sont bouleversants de justesse et d’humanité.

« Drunk » est souvent très drôle car les situations sont iconoclastes et l’alcool fait faire n’importe quoi parfois et permet de rire, entre amis. D’ailleurs il s’intéresse à son lien social, à cette amitié de ces quatre personnages qui se tiennent les coudes, qui s’aiment et se pansent leurs blessures pour repartir.

Mais vers où ?

Et c’est là que le film devient fascinant. Il montre les limites des paradis perdus et le choix ou pas de s’y enfoncer plutôt que de revenir à une réalité que l’on sait soit peu modifiable soit vouée à se terminer mal car la vie, çà finit forcément mal. Ce regard vraiment particulier sur le sens d’une vie au sein de ses proches, de sa famille, de ses relations fait de « Drunk » un très grand film incorrect.

Thomas Vinternerg nous fait rire l’essentiel du film et met aussi mal à l’aise avec un ton politiquement incorrect mais sans cacher la vérité, l’effet néfaste de l’alcool à haute dose, avec un dénuement total de moralisation et ceci fait un bien fou, dans un monde souvent tellement policé et tellement consensuel.

En refusant d’avoir un regard unique sur l’alcool et d’y appliquer une multiplicité liée à la diversité des individus, de leurs propres histoires, de leur propre maitrise et de leurs fragilités respectives, le réalisateur apporte une vision d’une grande intelligence avec une belle palette de nuances.

Il offre aussi un superbe film sur l’amitié comme moyen le plus fort de ne pas sombrer dans une société qui ne facilite pas l’épanouissement personnel.

Il ne juge pas la drogue mais porte un regard bienveillant sur ces gueules cassées de la vie et leur retour même fugace à l’insouciance, tout en étant conscients que le retour à la jeunesse n’aura pas lieu. C’est un message à la fois plein de nostalgie, de réalisme et de déterminisme. C’est juste excellent comme angle de vue.

La finesse et la transgressivité de « Drunk » restent d’ailleurs longtemps dans l’esprit après la projection.

Si cette année cinéma a été désertée d’une partie de ses films, la subtilité de « Drunk » en font l’un des meilleurs. D’ailleurs le film va probablement faire partie des sorties de fin d’année qui vont sauver le cru 2020 et le rendre pas si vide que cela.

La piste aux Lapins :

4,5 lapins

 

N°02- « Mank » de David Fincher

Mank - film 2020 - AlloCiné

Six longues années après Gone Girl, après avoir livré trois séries pour Netflix dont House of Cards et Mindhunter, le réalisateur David Fincher est de retour, considéré aujourd’hui à juste titre comme un maitre et l’un des meilleurs cinéastes au monde. Alien 3, Seven, The Game, Fight Club, Panic Room, Zodiac,  L’étrange histoire de Benjamin Button, The Social Network, Millenium et Gone Girl...que des films réussis et cinq chefs d’œuvres.

Il est trop tôt pour appliquer un tel qualificatif au nouvel opus de Fincher mais une chose est sûre, le réalisateur livre son film le plus personnel, le moins grand public et le plus libre. Son idylle avec Netflix se poursuit puisque la plateforme lui a permis de réaliser ce projet dans les cartons depuis 1996 et dont son propre père, journaliste, était scénariste. La première tentative échouât début des années 2000 et son père mourut en 2003.

Évidement, le film est fait avec cet hommage à tous les scénaristes du monde et s’avère une superbe reconstitution de l’univers du Hollywood des années 30. En choisissant de raconter l’envers du décors de Citzen Kane, considéré comme LE chef d’œuvre du cinéma, David Fincher veut parler avec une grande modestie des équipes qui entourent un metteure en scène. Car même culte, Orson Welles n’apparait pas sous un jour hyper flatteur, ce dernier avait quand même en tête de s’arroger l’écriture du scénario par son scénariste, Herman J. Mankiewicz, frère du réalisateur Joseph L Mankiewicz (L’Aventure de madame Muir, Ève, L’Affaire Cicéron, La Comtesse aux pieds nus, Soudain l’été dernier, Cléopâtre, Le Limier).

Herman, surnommé Mank, est un alcoolique notoire, rebelle et revêche mais libre. Malgré ses idées ouvertes et progressistes, ce dernier est devenu l’amuseur d’un grand magnat de la presse via le créateur actionnaire de la Métro Goldwyn Meyer. Et alors qu’Orson Welles lui donne deux petits mois pour boucler le scénario d’un film sur lequel il ne lui a donné que très peu de lignes directrices, Mank choisit de s’inspirer fortement de ce magnat, incarné par l’excellent Charles Dance (Tywin Lannister dans Games of Thrones).

Mank va donc raconter cette inspiration créatrice entre retraite bloqué au lit et flashs backs dans cet Hollywood des années 30 que le scénariste critique pour son hypocrisie et parcequ’il a l’occasion en or de traiter d’un personnage hors norme. Il va pouvoir parler de pouvoir, d’un individu aux idéaux qui se sont dilués dans la réussite et qui a vendu ses rêves pour de la puissance.

L’histoire du film est donc déjà passionnante car méconnue et c’est un vrai plaisir même pour des non cinéphiles que de voir ce qui a amené à un tel chef d’œuvre .

Ensuite David Fincher, en maniériste obsessionnel qui rend fou ses acteurs à les faire rejouer 50, 70, 100 prises, va livrer un objet filmique vraiment fascinant. Son noir et blanc est superbe et même le son est retravaillé pour nous faire penser aux films des ces années là.

Évidemment le film a une bien meilleure qualité sonore et d’image mais vous avez le sentiment d’être immergés dans ce cinéma là.

Évidemment Gary Oldman est juste excellent et cours droit vers un second Oscar, qui est amplement mérité. Sa prestation est fluide, contrastée, ironique, enlevée. Il est parfait dans le rôle de ce trublion d’un grand esprit mais d’une incapacité totale à se rabaisser devant le pouvoir.

Forcément, ce personnage est éminemment attachant tant il est cabot et juste à la fois.

Le rythme du film est tambour battant et empêche le spectateur de décrocher une seule seconde.

Le travail admirable de David Fincher comme directeur d’acteurs et virtuose de la mise en scène éclate avec évidence au grand jour mais hélas pas sur un grand écran. Et pour le coup, je suis certain que la diffusion en dehors d’une salle fait perdre une partie de l’impact au film…c’est dire !

La piste aux Lapins :

4,5 lapins

 

 

N°01- ex aequo – « La Communion » de Jan Komasa

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Excellent premier film, « La communion » permet à Jan Komasa, 38 ans, de se faire un nom avec un film magistralement mis en scène, d’une singularité surprenante.

L’histoire est celle de Daniel, 20 ans, qui vit en centre de détention et ne peut pas suivre les études de séminariste malgré sa foi, les crimes qu’il a commis l’en empêchant. Alors que le centre l’envoie en réinsertion dans un village pour travailler dans la menuiserie locale, un concours de circonstances l’amène à se faire passer pour un prêtre. Sauf qu’il va y prendre goût et s’y révéler …

« La communion » est un film curieux car rien ne laisse présager le déroulé de l’histoire ni sa fin marquante. Le réalisateur a trouvé un personnage fascinant et use du regard de son acteur principal, Bartosz Bielenia, qui découvre le monde et les possibilités qui lui sont offertes avec des yeux grands ouverts. L’acteur est tout bonnement excellent, incarné jusqu’au bout des ongles.

La bienveillance du personnage et sa volonté de bien faire, de se racheter et de trouver une rédemption pour soit et pour les autres est particulièrement réussie et emporte l’adhésion du spectateur par l’humanité qui s’en dégage. Le personnage est à la fois naïf et sauvage, provocateur et bienveillant.

Jan Komasa dresse le portrait de ce faux prêtre idéal qui se démarque de l’hypocrisie morale de dogmes souvent non respectés par les croyants. La jeunesse et la crédulité de Daniel sont sa force. Son enthousiasme comme sa douleur pour son prochain touchent juste. Les personnages secondaires sont tous très bien décrits, sans écriture rapide, avec ce poids d’un petit milieu clos frappé par un drame atroce et qui préfère trouver et exclure une coupable que d’appliquer les préceptes de l’église.

« La communion » est un film sur le choix, la rédemption mais aussi sur le pardon et le sens qu’on lui donne. A ces thématiques déjà denses, le réalisateur ajoute celle du déterminisme social, des fers qu’on met au pied de certains individus.

La grâce du film, de ses choix scénaristiques, du jeu des acteurs, est une excellente nouvelle pour le cinéma polonais.

La tension qui se dégage du film est à la hauteur de ses ambitions, un grand premier film.

La piste aux Lapins :

4,5 lapins

 

N°01- ex aequo - « Adieu les cons » d’Albert Dupontel

Adieu Les Cons - film 2020 - AlloCiné

Albert Dupontel en tant qu’acteur réalisateur, c’est une aventure que les cinéphiles partagent avec cet amoureux fou de cinéma depuis Bernie en 1996. Au début ses films étaient un peu trop fous, partaient dans tous les sens, parfois avec maladresse mais un humour corrosif avec succès public (Bernie) ou sans (Le créateur). Les années 2000 virent Enfermés dehors et Le Vilain caricaturer son humour mais lui permettre de perfectionner sa mise en scène en faisant des erreurs de longueurs, de frénésie.

Puis il connut un succès populaire avec une comédie vraiment hilarante grâce à « 9 mois ferme« , où Dupontel alliait virtuosité visuelle et gags comiques de situation avec ses dialogues percutants et un duo d’acteurs (lui et Sandrine Kiberlain) entouré de sa famille de gueules de cinéma. Puis en 2017,  son adaptation du succès littéraire « Au revoir là-haut » fut primée et eut beaucoup de succès à juste titre. Il ajoutait une dimension émotionnelle qu’il cachait auparavant derrière son style punk qui limitait quelques peu son talent.

Non que l’irrévérence de Dupontel et sa seine colère soient un problème, bien au contraire. C’est juste qu’il manquait quelque chose d’indéfinissable. Que peut-être en adaptant un autre, il trouvait le ton de l’émotion mais que ceci sonnait un peu bizarre avec son style. Je me suis souvent dit en sortant d’un Dupontel que j’adorais le personnage, dans ses interviews (regardez son interview récente passionnante sur Thinkerview), ce qu’il véhicule, que j’adorais son talent, son humour cynique et semi dépressif, sa mise en scène.

C’est un type bien, autodidacte très cultivé, ultra référencé, qui cite en permanence les autres par une humilité maladive. J’espérais qu’un jour, cet ami de Terry Gilliam lui rende hommage tout en assumant son style Tex Avery et en trouvant de l’émotion et un ton juste. « Adieu les cons« , c’est tout cela à la fois, avec des citations visuelles évidentes à Terry Gilliam en plus du caméo…mais c’est bien plus encore.

Quelle claque ! Albert Dupontel nous parle de paumés, comme souvent, et même il incarne un paumé qui a plutôt réussi mais s’est enfermé dans la réussite sociale telle que la dénonce Ken Loach (dont il connait toute la filmographie évidemment). Il s’attaque comme ses copains Gustave de Kernvern et Benoit Delépine à la déconnexion du réel qu’entraine l’ultra surveillance, les smartphones, les réseaux sociaux, les gafa avec une forme de désespoir plus que de lutte mais avec beaucoup d’humour car il est poli…forcément. « Effacer l’historique » était l’un des meilleurs films du duo issu du Grosland, sorti en septembre dernier et « Adieu les cons » est le meilleur film de Dupontel.

C’est son plus abouti, son plus percutant. Le film est court, 1h27, et cela suffit amplement. Pas une scène n’est superflue. Le burlesque est roi grâce à des trouvailles visuelles iconoclastes qui illustrent le propos social sans le rendre lourd. Son fidèle Nicolas Marié apporte lui aussi de nombreuses scènes comiques absurdes et vraiment drôles. Et puis Dupontel ose le romanesque et assume le risque casse gueule de sonner faux, d’être lourd. Sauf que « Adieu les cons » ne dérape jamais et reste sur le fil tout du long entre tragédie et humour, émotion et explosion comique. Cette émotion se transforme alors en message bouleversant d’une grande maturité qui vous emporte sur un final magistral.

« Adieu les cons«  est son film le plus équilibré, nourri de son expérience de ses autres longs métrages et de sa grande tendresse pour ses personnages. La bienveillance et le regard lucide et intelligent d’Albert Dupontel sur le monde qui l’entoure font qu’il vient de signer un très grand film. J’en suis ravi pour cette année cinéma 2020 qui finalement ne sera pas si désertée que cela. J’en suis surtout ravi pour lui et pour les cinéphiles auxquels il offre un si beau résultat. Merci Monsieur Dupontel.

La piste aux Lapins :

4,5 lapins

 

2020

Les meilleurs films du Blanc Lapin : N°25 à 11

26 décembre, 2020

Sans titre3

L’année 2020 a été terrible à bien des égards. Les salles de cinéma ont beaucoup souffert tout comme l’ensemble des métiers liés au septième art. Et pourtant, malgré quasi la moitié de l’année avec des salles fermées, malgré le décalage à 2021 de nombreux blockbusters et films d’auteurs de renom, le cru 2020 n’est pas si mal que celà.

Alors vous me direz, mais où as tu vu tous ces films ?…question que j’ai eu un paquet de fois ;) ))

Et bien outre les 50% du temps où les salles étaient ouvertes, la VOD a fonctionné comme refuge de sortie de certains longs métrages ne pouvant attendre une sortie décalée d’un an. Que ce soit sur des plateformes comme Netflix, Amazon ou Prime vidéo ou que ce soit sur des plateformes de streaming payant dédiées au ciné.

Et donc au final, évidemment il y a de grands absents qui étaient attendus, mais la sélection qui suit a une sacrée gueule compte tenu du contexte. Il y a juste moins de films à 4 ou 4,5 lapins sur cinq et aucun chef d’oeuvre à 5/5, ce qui est logique.

Mais j’ai vu 81 films sortis et diffusés en 2020 (ce qui est ma règle de visionnage critique sur Le blanc Lapin). L’an dernier en 2019 c’était 90 longs métrages soit pas tant que celà en plus et j’étais sur une année quasi reccord.

Bref, la diversité artistique fut tout de même au rendez-vous et de qualité.

Voici le classement du 25ème au 11ème meilleur long métrage du blanc lapin 2020.

 

N°25 – « La voie de la justice » de Destin Daniel Cretton

Disponible en VOD – sorti au ciné

La Voie de la justice VF | Dbserie.com

Le pitch : Le combat historique du jeune avocat Bryan Stevenson.  Après ses études à l’université de Harvard, Bryan Stevenson aurait pu se lancer dans une carrière des plus lucratives. Il décide pourtant de se rendre en Alabama pour défendre ceux qui ont été condamnés à tort, avec le soutien d’une militante locale, Eva Ansley. Un de ses premiers cas – le plus incendiaire – est celui de Walter McMillian qui, en 1987, est condamné à mort pour le meurtre retentissant d’une jeune fille de 18 ans. Et ce en dépit d’un grand nombre de preuves attestant de son innocence et d’un unique témoignage à son encontre provenant d’un criminel aux motivations douteuses. Au fil des années, Bryan se retrouve empêtré dans un imbroglio de manœuvres juridiques et politiques. Il doit aussi faire face à un racisme manifeste et intransigeant alors qu’il se bat pour Walter et d’autres comme lui au sein d’un système hostile.

« La voie de la justice » fait partie de ce genre de film d’enquêtes et de procès où il est révélé au public des injustices profondes hallucinantes. C’est un genre en tant que tel aux USA et récemment le très bon Dark Waters suivait le scandale écologique du téflon.

Ici le thème est encore plus fort puisque Destin Daniel Cretton s’intéresse aux condamnés à mort noirs, jugés sans preuves par une institution raciste, des policiers qui les arrêtent, aux témoins manipulés pour finir par des juges uniquement intéressés par le fait de trouver un coupable. Le récit du film, basé sur une histoire vraie, est sidérant et suffit à lui-seul à justifier le visionnage. On entend souvent parler de cette justice à deux vitesses mais avec un film, au ton juste, bien interprété, forcément, ceci vous arrache des pincements et des révoltes. On comprend mieux cette situation héritée de l’esclavagisme puis du Klu Klux Klan et le gap énorme qu’il reste à accomplir. Et ce ne sont pas les évènements récents de bavures policière ayant entrainé la mort d’un innocent, qui vont calmer ce feu.

Michael B. Jordan et Jamie Foxx sont impeccables comme d’habitude.

Évidemment on peut reprocher au film la platitude de sa réalisation, très classique, mais bon nombre de spectateurs retiendront le fond, salvateur et nécessaire d’une plus grande prise de conscience en Europe.

La sincérité de ce plaidoyer contre la peine de mort ne peut pas vous laisser insensible. Après, ce témoignage désarmant atteint ses limites par une mécanique déjà vue et maintes et maintes fois dans des films plus puissants.

La sobriété évite le mélo qui aurait pu plomber le film mais anéantit également toute prise de risque dans cette mise en scène. Certes le cinéma c’est fait pour raconter des histoires et témoigner mais tout le problème est le comment et au final c’est important. M le Maudit de Fritz Lang a traversé le temps depuis les années 30 alors qu’il parlait du lynchage et de la peine de mort pour un tueur d’enfant. Et le film qui était violemment contre la peine de mort est resté actuel et moderne parceque Fritz Lang l’a magnifié par ses choix de mise en scène, de découpage, de rythme.

« La voie de la justice » est donc un bon film à voir car son thème et son jeu sont réussis mais il ne traversera pas le temps.

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N°24 -  « The current war » de  Alfonso Gomez-Rejon

Disponible en VOD – pas de sortie ciné

The Current War - film 2017 - AlloCiné

« The current war » est sorti en 2017 aux USA, accueilli par une presse pas très cool, avant d’être remonté par son réalisateur et de voir sa note réévaluée à 60% sur Rotten Tomatoes (agrégateur critique).

Mais que s’est il passé avec ce film au très bon casting et au thème passionnant ?

Le film revient sur la compétition que se livrèrent deux géants de l’industrie électrique, Thomas Edison, joué par l’excellent Benedict Cumberbatch et George Westinghouse, joué par l’excellent Michael Shannon. A ce duo s’ajoute Nicholas Hoult qui interprète Nicholas Tesla et prouve de nouveau qu’il a du talent. On aimerait juste qu’il trouve des premiers rôles inspirés même si il accumule les bons seconds rôles (X-men first class, X-men days of future past, Mad Max Fury Road, The banker, Young ones, La favorite).

Alors comment expliquer cet accueil critique ? Le film est très bien interprété, la reconstitution et de qualité et la joute entre les deux industriels est réellement hyper intéressante. Probablement le premier montage manquait-il de punch. Je ne sais pas, je n’ai vu que le second. En tout état de cause, « The current war » ne mérite pas le traitement qu’il a reçu et se doit d’être réhabilité.

La suffisance et l’égo d’Edison sont à la fois tempérés par son génie et le sort qui s’acharne sur lui et son personnage arrive à nous toucher alors qu’il n’a rien d’attachant. Mais son histoire le rend humain, par ses faiblesses, ses petitesses et le film garde un grand intérêt dans cette définition de la concurrence dans ce qu’elle peut avoir de pernicieux, écartant un individu de certaines valeurs alors qu’à la base il les défendait. Certes, on pourra reprocher de faire de Westinghouse un parangon de vertu un peu trop facilement dessiné. Mais l’intérêt du film est de parler de morale, de respect dans un univers concurrentiel et professionnel et le message est intéressant. Peut-être que la culture américaine est moins sensible à ce type de fil directeur.

Le film n’a pas une patte de réalisateur visionnaire, sa mise en scène reste assez classique. Mais l’intérêt de l’histoire m’a véritablement captivé et si le film n’est pas mémorable en tant qu’œuvre qui fera date, il vaut le détour et un visionnage tant pour l’ambiance historique et la fébrilité de ces découvertes qui ont révolutionné le monde que pour le jeu inspiré des acteurs et la toile de fond de cette bataille industrielle.

C’est donc une bonne surprise que de découvrir enfin ce film qui a sui un bashing quelques peu exagéré.

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N°23 – « Honey Boy » de Alma Har’el

Honey Boy - Film (2019) - SensCritique

Disponible en VOD – pas de sortie ciné

Ce biopic est centré sur le comédien Shia LaBeouf, qui n’a seulement que 33 ans et a défrayé la chronique par ses excès, son alcoolisme et ses addictions aux drogues après avoir tourné dans les blockbusters comme I, Robot, Transformers, Indiana Jones et le Rayoaume du Crane de Cristal avant de se tourner  vers du cinéma indépendant comme Nymphomaniac de Lars Von Trier, ou des happenings Arty.

A première vue on pourrait se dire que c’est un peu tôt et qu’on n’en n’a un peu rien à foutre de cet acteur certes doué mais qui n’a pas brillé dans de grands films.

Sauf que le long métrage en question est écrit par lui-même et s’intéresse à son enfance d’enfant star, qui commença tout petit à tourner dans des séries et des publicités, managé par un père en recherche de revanche sur la vie.

Le film est très déstabilisant puisqu’il parle de ce père totalement looser, qui a fait fuir sa mère et est à peine sorti de ses problèmes d’alcool et de drogue.

Cet ancien vétéran du Vietman n’a rien d’empathique. On se demande si il aime son fils ou si ce dernier est sa planche de salut et sa planche à billets pour vivre. On ne sait pas, il est impénétrable dans sa pseudo virginité sortie de sa cure de désintoxication.

Cette scène où son fils lui reproches de se servir de lui pour vivre et lui dit qu’il souhaite le licencier, est juste lunaire. Shia LaBeouf y exprime un cri sincère contre cette enfance gâchée, où il n’a pas pu vivre comme les autres gamins, instrumentalisé par ce père à moitié braque et obnubilé par la réussite de son fils à Hollywood. Au delà du cas des enfants stars et du côté malsain de ces parents qui se font de l’argent sur leur progéniture, Honey Boy prend un parti mitigé et donc troublant.

L’acteur est sans concessions pour ce père souvent dur et égoïste mais il lui a pardonné et cette catharsis s’est faite en écrivant le film. Il l’explique d’ailleurs. Pire, il interprète son propre père, ce qui rajoute une dimension décalée au long métrage. On y voit également tous les ravages de cette éducation où la drogue était monnaie courante avec un père fier de ses plantations et faisant fumer son fils de 12 ans. Les ravages également de l’alcool sont présents ainsi que cette addiction quasi génétique liée à une éducation reproduite de génération en génération.

« Honey Boy » est donc troublant mais vraiment réussi tant le recul qu’a Shia LaBeouf sur son parcours mérite le respect et l’intérêt.

C’est un bon film, poignant et rude. Une belle réussite.

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N°22 – « La Fille au bracelet » de Stéphane Demoustier

Disponible en VOD – sorti au ciné

La Fille au bracelet - film 2019 - AlloCiné

Le pitch : Lise, 18 ans, vit dans un quartier résidentiel sans histoire et vient d’avoir son bac. Mais depuis deux ans, Lise porte un bracelet car elle est accusée d’avoir assassiné sa meilleure amie.

L’impassible adolescente au cœur du récit fascine par ce qu’elle cache et sur lequel on ne sait si c’est de la culpabilité, de l’absence d’empathie ou le simple détachement d’une adolescente par rapport à une situation d’une gravité absolue qui se déroule devant nos yeux. Son avenir et sa vie sont en jeux et pourtant elle ne fait rien pour convaincre le jury de son innocence.

Melissa Guers est à ce titre parfaite et tête à claque comme peut l’être une adolescente tête brulée qui ne veut rien entendre du monde des adultes.

Roschdy Zem et Chiara Mastroianni jouent des parents largués face à cette enfant qu’ils ne comprenant plus et qu’ils découvrent en même temps que le jury et le public de la cour d’assises. La violence des révélations et le côté cru de ses relations sexuelles alternent ce film de prétoire et lui donnent un suspens à chaque scène. La prévenue est trop mutique pour être innocente mais après tout le réalisateur nous surprend à nous montrer ce que c’est que la vraie présomption d’innocence ou nous tendant un miroir dans lequel ces préjugés sont clairement établis.

Le réalisme du sujet est ancré par l’alternance de scènes de familles entre les audiences et du déroulé des débats. Ce huis clos austère rend hommage à la justice française et au travail de chacun, du procureur au juge en passant par les avocats impliqués dans ce théâtre aux enjeux absolus pour la personne dans le boxe des accusés.

La subtilité de la mise en scène et du scénario font de « La Fille au bracelet » un long métrage très bien maitrisé de bout en bout. Surtout, le film traite de l’émancipation par rapport au monde de l’enfance tout autant que de la résolution par la justice d’un cas peu anodin.

Le spectateur est déstabilisé par le flou volontairement entretenu autour du caractère de la jeune femme et de ce qu’elle a réellement commis.

Une très bonne réussite française du 1er semestre 2020.

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N°21- « Jojo Rabbit » de Taika Waititi

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Disponible en VOD – sorti au ciné

Taika Waititi  est un réalisateur iconoclaste, quelques peu surestimé en ce moment mais vraiment doué. Son film  »Jojo Rabbit » est un très bel objet empli d’émotion et de messages salutaires sur l’acceptation de l’autre.

Il adapte la même approche que « La Vie est belle » en se mettant à hauteur d’enfant.  Jojo est un petit allemand qui croit dur comme fer au nazisme et qui a comme ami imaginaire un Adolf Hitler de pacotille, aussi grotesque que nauséabond.

L’histoire aurait pu être maladroite et casse gueule et c’est la grande réussite du film que d’avoir su éviter des clichés, des facilités, et de prendre le spectateur par l’humour et l’émotion avec un dosage très fin. Forcément le film interroge de par son approche qui consiste à ridiculiser les nazis comme Chaplin le fit dans Le Dictateur. Ce n’est certes pas nouveau de vouloir se battre contre des préjugés racistes et immondes par l’humour mais ce qui inquiète davantage, c’est qu’en 2020, on trouve ceci de nouveau « original ». N’a t on pas un peu perdu de notre second degré dans ce monde très puritain et très violent où les avis se confrontent ou se jugent sans aucune nuance ?

« Jojo Rabbit » a cet immense atout qu’il est désarmant de sincérité et de justesse et que même si le film n’est pas un très grand moment de cinéma, inoubliable et bouleversant, il rappelle de façon salutaire l’une des missions du septième art. Curieusement, il fait réfléchir non pas à sa thématique principale même si un bon coup sur le pif des fachos n’a jamais rien de superflu, mais il convient donc de le re-contextualiser dans notre vingtième siècle qui s’est particulièrement tendu depuis cinq ans, y compris dans les discussions et échanges de tous les jours. A tel point que certaines évidences ne le sont plus et que de plus en plus de gens trouvent çà normal ou pire, bienvenu, ou sont fatalistes devant l’arrivée de l’extrême droite au second tour d’une présidentielle. On en oublie l’historique du parti en question et tout un discours ambiant de rejet de l’autre accompagne cette montée vraiment flippante. Évidemment, ce n’est pas que français et c’est donc grave.

La normalisation de l’inacceptable est donc tournée en ridicule. Le ridicule et l’humour sont une arme imparable pour se moquer de ceux qui croient de sombres personnages, une efficacité dont « Jojo Rabbit » use avec brio.

Ce joli doigt d’honneur aux escrocs racistes qui cherchent à modeler les esprits fait tout simplement chaud au cœur. La générosité de Taika Waititi, servie par de très bons acteurs, permet au film de décoller. Le film est donc plus complexe qu’il n’y parait et cette satire pleine d’espoir vaut vraiment le coup d’être soutenue.

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N°20 – « Les Sept de Chicago » de Aaron Sorkin

Netflix

Une première bande-annonce pour Les Sept de Chicago - POPKULT

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Netflix a racheté ce projet initialement porté par Steven Spielberg, « The Trial of the Chicago 7 » et qui a atterri dans les mains de Aaron Sorkin, scénariste de The Social Network, A la maison Blanche ou Steve Jobs.

Ce dernier a réalisé son premier film avec « Le grand jeu« , avec Jessica Chastain en 2018.

Le film raconte le procès de sept personnes accusées de conspiration par le gouvernement après des manifestations anti guerre du Vietnam. Ces manifs furent organisées à l’occasion de la Convention démocratique de Chicago en 1968.

Sacha Baron Cohen ne surprend pas particulièrement mais il assure dans son rôle d’activiste cynique et perturbateurs aux côtés Jeremy Strong (Kendall dans l’excellente série Succession), méconnaissable et d’un casting 4 étoiles composé de Eddie Redmayne, Joseph Gordon-Levitt, Michael Keaton, et Mark Rylance (Le Pont des espions).

Les Sept de Chicago est bien réalisé et surtout bien monté, en mode film de procès, style en soit qui a toujours plu aux américains. Forcément depuis « 12 hommes en colère« , chef d’œuvre du genre, qui a été suivi par bien d’autres, on se dit à chaque fois que l’on risque de s’emmerder. Sauf que Aaron Sorkin mène très bien son suspens, en scénariste de génie qu’il est, alternant flashs backs au moment des émeutes pour sortir de la salle, debriefings des activistes le soir et procès lui même.

Il use de la force des dialogues, très bien ciselés, de la joute verbale et du tragi-comique de situations hallucinantes où l’on voit un juge incompétent, borné et réactionnaire dérouler une parodie de justice.

Si cette histoire fait froid dans le dos tant elle n’est pas si vieille que cela, on regrettera juste que Aaron Sorkin n’ait pas une patte à lui en tant que metteur en scène. Il s’efface trop derrière la force de son récit et de son scénario et le talent de ses acteurs et c’est ce qui fait que le film est très bon et vaut la peine d’être vu mais qu’il ne passe pas le 4 lapins …

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N°19- « Les filles du Docteur March » de Greta Gerwig

Disponible en VOD – sorti au ciné

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Cette 4ème adaptation du roman « Les quatre filles du Docteur March » comportait à peu près tout pour me désintéresser dont le côté gentillet de l’histoire et son happy end super relou. Mais c’était sans compter sur Greta Gerwig, qui au delà d’être une excellente actrice, s’est transformée en réalisatrice de talent avec Lady Bird. L’épouse et muse de Noah Baumbach (Marriage Story, Frances Ha) a un don pour l’empathie qu’elle donne à ses personnages, il est vrai joués par de jeunes et talentueux comédiens. Elle retrouve sa fidèle et hyper douée Saoirse Ronan en garçon manqué au caractère combatif et bien trempé et offre un rôle plus effacé à Emma Watson, et un rôle empli de contradiction à l’excellente Florence Pugh (the Young Lady).

On suit la fin de leur adolescence où l’argent n’est pas toujours là et comment une famille de femmes se sert les coudes, avec un casting de seconds rôles brillant composé de Meryl Streep et Laura Dern, décidément très en forme depuis son rôle dans Big Little Lies. Et puis il y a Timothée Chalamet, le chéri des jeunes femmes, qui cartonne depuis Call me by your name (on le verra cette année dans le Dune de Denis Villeneuve et dans The French Dispatch de Wes Anderson). Et il faut bien l’avouer, il joue super bien et il est balaise le gamin. Son personnage est à la fois agaçant et très touchant. C’est un peu le cinquième March du film.

Au delà de cette excellente direction d’acteurs, Greta Gerwig axe son film sur le combat de jeunes femmes pour avoir des droits, celui de gagner sa vie, d’être indépendantes et de ne pas que dépendre des hommes et du mariage à l’époque de la Guerre de Sécession. Cette relecture est pertinente et justifiée car elle est incroyablement moderne et prend du recul sur ce qui a été accompli et ce qu’il reste à accomplir pour l’égalité des sexes. Et puis évidemment elle narre cette fin de l’enfance, lorsque l’on doit faire des choix, se prendre en main et se jeter dans le grand bain, sur une thématique proche du premier film de la réalisatrice, Lady Bird. La nostalgie du cocon et la difficulté de s’en couper sont brillamment retranscris.

La tendresse de la réalisatrice pour ses personnages et l’intelligence des thématiques qu’elle pousse masque en partie mais pas totalement le côté plombant des valeurs morales du livre. Il n’en reste pas moins un film féministe d’une grande fraicheur pour débuter cette année 2020.

La piste aux Lapins :

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N°18- « Invisible Man » de Leigh Whannell

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Disponible en VOD – sorti au ciné

L’homme invsible est l’un des monstres cultes d’Universal. Il a été adapté de nombreuses fois au cinéma, la dernière version datant d’il y a 20 ans avec un Paul Verhoeven pas au meilleur de sa forme. Pourtant, avec ce film de bonne facture, Universal peut se frotter les mains et se dire que ses fameux monstres que le studio cherche à ramener sur grand écran avec difficulté (échec de la Momie avec Tom Cruise etc…) ont peut être trouvé le bon angle. Au départ Universal voulait filer le rôle de Frankeinstein à Javier Bardem, celui de Docteur Jekyll et Mister Hyde à Russell Crowe, celui de l’homme invisible à Johnny Depp…et donc un 1er rôle à Tom Cruise dans un film la Momie qui s’est grave vautré artistiquement et financièrement.

Ici, l’homme invisible est joué par un illustre inconnu et c’est vrai qu’on s’en fout car on ne le voit pas, par définition. Pas con ! Haha.

Ensuite le concept reprend celui de Verhoeven à savoir un chercheur complètement taré qui découvre comment devenir invisible. Sauf que le film de Leigh Whannell (repéré pour le sympathique Upgrade) se centre sur la victime et c’est  tant mieux. Car qui de mieux que Elisabeth Moss pour interpréter une femme aux abois terrorisée ? Certes de mauvais coucheurs trouveront qu’elle joue comme dans la série The Handmaid’s Tale qui l’a rendue célèbre. Bon ce n’est pas faux, et ceux dont les mimiques avec les gros yeux inquiets sont gavés le seront peut être ici également. Moi, perso, ceci n’a m’a pas dérangé, du tout.

Le suspens est très bien découpé, avec très peu d’effets spéciaux au début et un jeu de dupe et d’ambiance absolument réussi ou comment créer de la tension avec rien.

Le film est malin, surprend au bon moment et fait palpiter les cœurs, ce qui est quand même l’objectif numéro un. Mais là où le scénario est très bon, c’est qu’il hume l’air du temps, la dénonciation salutaire des violences conjugales et un monde post #MeToo. Il fait de son héroïne une victime de ce Mal tout puissant qui peut harceler jusqu’à la folie perverse. Impossible de ne pas penser à tous ces prédateurs, invisibles et à leur manipulation pour faire passer les victimes pour des menteuses et retourner l’accusation.

La grande force de ce « Invisible Man«   est que personne ne l’attendait et qu’il surprend agréablement par ce qu’il a à raconter. Un très bon thriller.

La piste aux Lapins

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N°17- « Le goût de la haine » de Jan Komasa

Netflix

Le Goût de la haine - film 2020 - AlloCiné

Désolé de critiquer autant de films Netflix en ce moment mais il se trouve que dans la pénurie de sorties intéressantes au cinéma, seule cette plateforme sort des productions originales cet été.

Mais pour une fois, c’est un très bon film, réalisé par un talent à suivre de près, Jan Komasa, à qui l’on doit l’un des meilleurs films de l’année sorti au cinéma, l’excellent « La Communion« .

Le réalisateur polonais de 38 ans est en train de se faire un nom et c’est amplement mérité.

« Le goût de la haine »  (Hejter, hater) suis un jeune homme sans scrupules qui pour se venger d’être un exclu de la réussite sociale et universitaire, va travailler dans une entreprise qui diffame sur les réseaux sociaux et détruit des réputations d’influenceurs ou de politiques. Les méthodes utilisées sont effrayantes et Komasa a eu deux excellentes idées.

La première est son acteur, qui tout comme dans celui de « La Communion« , porte le film, notamment via un regard entre tristesse et détermination. Là où Bartosz Bielenia dans « La Communion » était solaire, Maciej Musialowsk est sombre et on a du mal à déterminer dans quelle mesure la réelle souffrance qu’il a subie toute sa vie peut creuser sa détermination.

Sa seconde bonne idée est d’utiliser l’univers du jeu vidéo interactif, utilisé par des terroristes, complotistes et fous dangereux à travers le monde. C’est la première fois que je vois cet outil mis en avant dans un film et utilisé avec une grande qualité de rendu graphique.

L’endoctrinement via les réseaux est d’actualité tout comme le bashing sans limites et d’une violence inouïe que des anonymes déversent avec haine via ces outils. La puissance destructrice des haters tout comme l’absence de morale de certains community managers de l’ombre font vraiment froid dans le dos.

Le personnage principal rejeté car pas de la bonne classe sociale, pas avec la bonne tête va donc trouver la réalisation de son ego dans cette manipulation. La toute puissance appartient à celui qui maitrise dans ce monde où les attaques virulentes et sans bornes se font masquées derrière des profils anonymes voire des sociétés qui s’en chargent. Le pouvoir qu’il va y trouver va contenter ses frustrations, ses humiliations passées car il peut agir caché.

L’hypocrisie et la bienveillance à options de ses protecteurs nantis, qui s’achètent une conscience en étant généreux, est également très bien décrite. Avec finesse, Jan Komasa explique cette condescendance de gens bienpensants mais qui ne manquent de rien face à des individus paumés, largués et faibles face à la facilité des extrêmes, du rejet de l’autre. Une nuance de gris bienvenue lorsque la morale affronte le vide.

C’est donc un film d’actualité à double titre via le décryptage du fonctionnement et des modes opératoires du hating d’une part et l’endoctrinement fascisant de paumés vivant dans la misère intellectuelle de l’autre.

« Le goût de la haine » confirme la naissance d’un très bon réalisateur.

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N°16- « Tout simplement noir » de Jean-Pascal Zadi et John Wax

Tout simplement noir : que pensent les critiques du film de Jean ...

Disponible en VOD – sorti au ciné

On ne pouvait pas rêver meilleur film que « Tout simplement noir », un mois et demi après le lancement du mouvement #blacklifvesmatter et alors que des manifestations ont eu lieu partout dans le monde, y compris en France.

Jean-Pascal Zadi choisit l’humour pour faire passer son message et c’est sacrément efficace car il le fait en se moquant des propres excès d’un certain communautarisme tout en pointant du doigts l’essentiel.

Le personnage qu’il interprète est un acteur raté et sans talent qui veut organiser une grande marche noire en France pour dénoncer l’esclavagisme, l’absence de visibilité dans les médias et la discrimination des blancs.

Mais il est surtout pétri de clichés sur les noirs, ne connaissant pas les dates importantes, et balançant des énormités aux personnalités noires qu’il rencontre pour les convaincre de rejoindre sa marche.

« Tout simplement noir » est déjà très drôle, ce qui est loin d’être une habitude dans les comédies françaises.

Il joue la provocation et c’est vraiment marrant avec son casting de stars jouant leur propre rôle et se moquant d’elles mêmes avec un second degré ravageur. Fary joue l’humoriste entrepreneur et cynique, plus intéressé par son image que par le fonds, mention spéciale à sa fausse bande-annonce de film noir engagé (« Black love »). Lilian Thuram, Claudia Tagbo, JoeyStarr, Fabrice Eboué, Lucien Jean-Baptiste, Eric Judor, Ramzy Bedia, Jonathan Cohen, Mathieu Kassovitz, Soprano et bien d’autres s’envoient des répliques bien corrosives qui rappellent la diversité dans la diversité et tordent le cou à l’intolérance de classe ou de milieu. Le film, en prenant les choses avec recul, livre au final un message bien plus profond qu’il n’y parait. La plupart de ces stars ne se définissent pas avant tout comme noirs là où le personnage va jusqu’à exclure les femmes noires par machisme ou refuser la main tendue d’artistes arabes ou juifs par pur aveuglement identitaire.

Le fait de démonter tout un tas de clichés tout en rappelant l’horreur de l’esclavagisme, de la colonisation et le manque de diversité est un vrai tour de force. Surtout Jean-Pascal Zadi et John Wax le font avec finesse et dénoncent l’identitarisme dans ce qu’il a de plus con.

Le brio du film est donc de ne pas s’essouffler dans son concept d’aller de star en star vanter les mérites de cette marche mal pensée et avec des fondements très légers. Chaque rencontre est une occasion de faire exploser une idée reçue soit par les noirs soit par la population dans son ensemble. Les incohérences et paradoxes du personnage sont mis à mal et le ridiculisent tout en faisant émerger sa sincérité et ce qu’il y a de vrai. La scène avec Omar Sy, très courte soit elle, montre qu’il se trompe de cible.

« Tout simplement noir » use de burlesque et de folie, de répliques hilarantes et arrive à atteindre son but grâce à cette satire de clichés vus par une communauté qui déjà n’est pas une communauté mais plusieurs.

Le film est jubilatoire tout en apportant de la complexité à l’identité noire à la française.

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N°15- « Swallow » de Carlo Mirabella-Davis

Swallow : Photos et affiches - AlloCiné

Disponible en VOD – sorti au ciné

Le pitch : Hunter semble mener une vie parfaite aux côtés de Richie, son mari qui vient de reprendre la direction de l’entreprise familiale. Mais dès lors qu’elle tombe enceinte, elle développe un trouble compulsif du comportement alimentaire, le Pica, caractérisé par l’ingestion d’objets divers. Son époux et sa belle-famille décident alors de contrôler ses moindres faits et gestes pour éviter le pire : qu’elle ne porte atteinte à la lignée des Conrad… Mais cette étrange et incontrôlable obsession ne cacherait-elle pas un secret plus terrible encore ?

Bon, je vous rassure, le film est regardable sans scènes dégueulasses, ce qui m’avait perso un peu rebuté avant. Le film Carlo Mirabella-Davis est vraiment original de par son thème. Il nous parle d’un gamine américaine qui a rencontré le prince charmant, beau comme un Dieu, richissime et qui va reprendre la boite de son père. Elle est belle, il est beau, les parents leurs ont payé une baraque qu’on ne voit que dans magazines. Oui mais cette femme a un secret et c’est ce dernier qui provoque chez elle la maladie de Pica, où elle ingurgite sans pouvoir s’en empêcher de multiples objets dont certains sont très dangereux.

Ainsi nous voyons devant nous cet American way of life se craqueler et se détruire au fur et à mesure que l’on comprend d’où viennent ses troubles. Il y a ce secret et il y a aussi cette vie atroce de prisonnière, de femme soumise à la maison, juste bonne à faire le ménage, la cuisine et faire l’amour avec son beau gosse de mari pour le contenter quand il est fatigué.

Le réalisateur filme ceci dans un décors de rêve mais d’une froideur et d’un manque de personnalité flippants auxquels il ajoute des touches chromées de couleurs pastel qui fixent bien l’ambiance étouffante dans laquelle elle évolue. Elle croit avoir atteint la sécurité mais c’est un leurre.

Dans cette monomanie où elle ingurgite comme pour combler le vide de son existence et se détruire en même temps, le personnage est terriblement seul. Le côté papier glacé de sa vie de famille et le cocon faux cul de ses beaux-parents donnent le tournis. Derrière les faux semblants bienveillants, le réalisateurs dépeint une Amérique à deux vitesses sans jamais montrer celle qui est à l’arrêt soit une très grande subtilité dans son propos. Les racines nous rattrapent toujours et il ne sert à rien de les nier, il vaut mieux s’y confronter et régler ses problèmes pour avancer ailleurs, dans une direction que l’on s’est choisie. C’est un peu la morale forte de l’histoire mais elle détaillée autour de ce personnage très silencieux à qui son entourage a tout retiré. Elle n’a pas de personnalité car on veut qu’elle soit une belle poupée qui coche tous les codes sociaux et s’y plie en silence. La scène du restaurant est, parmi d’autres, une scène extrêmement bien réussie avec un minimum de forme. Les silences du film sont d’ailleurs en général emplis de messages.

La maîtrise formelle de ce premier film et son message sont donc très réussis.

« Swallow » est visuellement élégant. Il dresse le portrait d’une rébellion métaphorique face aux traumas d’une jeune vie mal entamée mais aussi d’un monde aseptisé qui ne la laissera pas trouver son chemin.

Un très bon film.

La piste aux Lapins :

4 étoiles

 

N°14- « 1917″ de Sam Mendes

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Disponible en VOD – sorti au ciné

Sam Mendes est l’un des grands réalisateurs hollywoodiens, qui a signé les magnifiques American Beauty, Les Sentiers de la perdition et Les Noces rebelles avant d’être accaparé par James Bond et ses deux énormes succès critiques et publics que furent Skyfall et Spectre.

Et c’est son ami Steven Spielberg qui l’a sorti de son repos de cinq ans pour produire 1917, film de guerre où son talent de mise en scène impressionne et signe le 1er grand film de 2020.

Sam Mendes a vendu son film sur la promesse d’un long plan séquence à savoir une seule scène que ne s’arrête jamais. Si l’exercice n’est pas nouveau (plus récemment Inarriru optait pour ce concept pour Birdman), et qu’il est en fait un faux plan séquence puisque évidemment le film a été tourné en de nombreuses coupes, le résultat donne une dynamique toute particulière et une immersion totale.

Le réalisateur fait avec son scénariste des choix qui mettent en danger les personnages à tout instant et nous empêchent de nous appesantir, livrant un film de guerre différent, axé sur le suspens. L’histoire suit deux jeunes soldats britanniques, qui sont chargés durant la Première Guerre Mondiale, de porter un message à des lignes avancées pour leur éviter de tomber dans un piège allemand et de se retrouver massacrés.

La course contre la montre est donc rythmée et passe de la journée à découvert aux superbes plans d’un village en feu en pleine nuit, alternant une dizaine de scènes de bravoure.

Ces scènes sont non seulement léchées et liées entre elles par le stratagème de mise en scène mais elles donnent à la guerre toute son horreur et son absurdité par des images plus que par des mots. Le Luxe de détails est impressionnant, que ce soit des tranchées allemandes bétonnées ou du jusque boutisme suicidaire de certains militaires à la folie de ces massacres entre adolescents.

Car Mendes nous montre de très jeunes hommes lancés les uns contre les autres comme de la chair à canon, accrochés à une pauvre médaille pour des raisons qu’ils ignorent. Il ne traite certes pas trop de la vie des tranchées elles même, de l’alcoolisme et des conditions sanitaires puisque les deux héros sont dans une fuite en avant à la fois utopique et impossible sur le papier.

Le réalisateur a évidemment l’intelligence, à la différence de son copain Spielberg, de garder tout patriotisme relou de côté et de bannir tout écart de pathos mal venu. Son film est éclatant et sobre dans les sentiments. Ses moments d’émotion sont d’autant plus précieux qu’ils montre la fragilité d’une vie et montre une mort organique, disséminée au milieu de terres et villages dévastés comme dans un enfer de Dante. Les images de ces corps déchiquetés, abandonnés dans la boue, suffisent à elles seules à illustrer la violence et la boucherie humaine qui ont marqué cette guerre de 14-18.

Au-delà du tour technique dont on parle partout, il ne faut donc pas oublier que 1917 s’articule autour d’un scénario très solide basé sur les carnets du grand père du réalisateur. Le film en devient d’autant plus touchant, avec ce petit fils devenu grand artiste reconnu à Hollywood et rendant à son aïeul le plus bel hommage qu’il aurait pu espérer.

 La piste aux Lapins :

4 étoiles

 

N°13- « Police » de Anne Fontaine

Police - film 2020 - AlloCiné

Sorti au ciné

Anne Fontaine est une réalisatrice pas toujours régulière dans la réussite de ses films mais ce « Police » est une excellente surprise.

Le pitch : Virginie, Erik et Aristide, trois flics parisiens, se voient obligés d’accepter une mission inhabituelle : reconduire un étranger à la frontière. Sur le chemin de l’aéroport, Virginie comprend que leur prisonnier risque la mort s’il rentre dans son pays. Face à cet insoutenable cas de conscience, elle cherche à convaincre ses collègues de le laisser s’échapper.

Le film use d’un procédé assez simple, suivre ses trois acteurs principaux et revenir en arrière à chaque personnage pour montrer des scènes déjà vues selon l’angle d’un autre personnage. C’est malin et surtout utilisé sans être lourd et çà ne dure que le temps de nous attacher aux personnages. Ensuite le film entre dans le thème à partir d’une superbe scène d’incendie d’un centre de rétention pour sans papiers. L’impression de fin du monde et d’absence d’ordre et de morale, faisant écho aux périodes sombres de l’histoire, donne à cette scène le rôle de courroie de transmission pertinent.

La force du film réside évidemment dans Omar Sy, Virginie Efira et Grégory Gadebois, tous les trois brillants de justesse, de profondeur, de nuance, un vrai film de personnages hyper bien écrits. On s’attache à eux pour diverses raisons et leurs personnages surprennent à plusieurs reprises.

Et puis surtout, la réalisatrice use du code du thriller, du film romantique ou du film de police sans jamais les souligner avec lourdeur. On passe d’une atmosphère à l’autre, d’un film à l’autre et ceci surprend, à bon escient. Cette diversité de points de vues, de choix de mise en scène sont vraiment excellents. Et il n’ y a aucune scène de trop. 1h39, light et efficace.

Enfin le film s’intéresse moins à la fonction de policier, qu’elle traite avec justesse comme un métier difficile et raide durant le premier tiers, qu’à la morale des personnages, tant privée, professionnelle que citoyenne ou en tant qu’être humain contraint par une règle, un cadre, mais qui a aussi des ressentis, des impressions, un jugement de valeur.

La force du film est qu’il est libérateur dans son propos sans être naïf, sans être revendicatif, sans être donneur de leçons à personnes. Ce n’est pas un film politique mais un film à hauteur d’homme et de femme qui exerce un métier ingrat et ultra codifié.

Un film très intelligent et mature porté par de grands acteurs.

La piste aux Lapins :

4 étoiles

 

N°12- « Light of my life » de Casey Affleck

Light of my Life - film 2019 - AlloCiné

Sorti au ciné

Dans un monde où toutes les femmes sont mortes d’un virus mondial, un père tente de  protéger Rag, sa fille unique, épargnée sans savoir pour quelle raison.

Casey Affleck revient donc en tant que réalisateur et acteur devant sa caméra, après son faux documentaire « I’m Still Here« , en 2010.

Soyons clair, au début on se dit « merde », le film va durer 2 heures, avec quasiment que le personnage du père et de sa fille vu qu’ils fuient le monde pour éviter qu’elle soit kidnappée par les hommes en recherche d’une femme. On se dit aussi que le film va faire redite avec l’adaptation de Cormak McCarthy, La Route en 2009 avec Viggo Mortensen, puisque c’est exactement le même concept, un père et son enfant seuls face à un monde dévasté et dangereux.

En effet la première scène filme le père et sa fille allongés avec caméra les filmant du dessus, et le père raconte une longue histoire à sa fille qui dure 10 minutes !!

Sauf qu’à travers cette scène, deux choses apparaissent. D’abord le film va être d’une grande tendresse sur cet amour sans limite que porte ce père à son enfant. Et à plusieurs moments, l’émotion sera très forte et très sobre, sans éclats, juste le minimum nécessaire, dépouillé, pour vous émouvoir.

La seconde évidence est que Casey Affleck est un bon réalisateur. Il va faire des choix de cadrage très marqués, de longs plans fixes, ou des plans tels des tableaux où les héros prennent une petite partie de l’image et tout le reste est l’immensité de la nature, que ce soit une forêt immense ou une étendue enneigée à perte de vue.

Et ces images, cette réalisation, sont hyper léchés et çà se voit, çà se sent et çà prend peu à peu, servant ce récit de survie qui va prendre corps devant nous.

Ensuite, le film va faire rencontrer d’autres protagonistes mais souvent sans s’attarder sur leurs visages car ce sont les autres, le danger, la nature humaine violente et qui n’a plus rien à perdre puisque l’humanité risque fort de s’éteindre. Et puis parfois il nous montre les visages car ce sont des humains ayant gardé une morale et étant de bonnes personnes. Ce procédé peut sembler caricatural à la lecture de cette critique mais vous ne vous en rendrez compte qu’à la sortie du film, en y réfléchissant.

« Light of my life« est ce genre de film épuré qui vous emporte peu à peu et pour lequel en sortant de la séance vous vous dites que oui, c’était très réussi et avec du caractère, une identité.

La grande différence avec « La Route » est que Affleck a choisi de plus parler d’amour et d’espoir et le film est parfois lumineux là où « La route » m’avait parfois refroidi par son nihilisme sans retour et son côté glauque voyeuriste.

Ensuite le film parle du pouvoir de l’imagination pour survivre en situation d’extrême précarité et d’insécurité permanente.

Il est parfois lyrique et donne au film post-apocalyptique un ton intimiste et délicat surprenant.

Casey Affleck serait inspiré de faire comme son grand frère, et de continuer à réaliser des films.

Quand on a ce talent là, il faut poursuivre.

La piste aux Lapins :

4 étoiles

 

N°11- « Play » de Anthony Marciano

Play - film 2018 - AlloCiné

Disponible en VOD – sorti au ciné

Max Boublil retrouve Anthony Marciano après « Les gamins » et replonge dans les souvenirs des 25 dernières années, souvenirs d’une génération ayant vécu son adolescence dans les années 90 à sa jeune vie adulte dans les années 2000.

Pour se faire, ils osent un stratagème de mise en scène qui aurait pu tenir du gadget et s’avérer hyper rapidement fatiguant.

On retrouve le personnage de Max en 1993, à l’âge de 13 ans, alors que son père lui offre un caméscope. Dès lors il se met à filmer son quotidien, sa famille, ses amis, tout. Et on ne voit à l’écran que ces images de cassettes vidéos.

Ou comment reconstituer le puzzle de 35 ans à travers des images prises pour témoigner de l’instant présent et remontées comme un fil rouge.

Le pari du film est plus que réussi. Le long métrage est particulièrement tendre sans jamais tomber dans le pathos et surtout, il est drôle.

Tous les personnages de cette bande d’ados sont touchants d’autant plus qu’on les voit grandir sous nos yeux, avec un peu de la magie qui marchait dans Boyhood de Richard Linklater, à la différence près que les acteurs changent. Mais le choix de ces derniers est hyper bien casté.

La nostalgie fonctionne à fond les ballons et vise juste. En fait le film est juste et transpire la sincérité de la part de cette équipe et déstabilise par l’émotion qu’il apporte avec finesse et intelligence.

Ces faux rushs sont criants de vérité et ont beaucoup de charme. Une excellente surprise.

La piste aux Lapins :

4 étoiles

 

La suite du classement très vite….

Les pires films de l’année 2020 du Blanc Lapin !

26 décembre, 2020

Comme chaque année, débute la période des dossiers bilan de l’année cinéma écoulée et projets de l’année à venir.

Avant de s’intéresser au meilleur de 2020, qui au final a bien résisté artistiquement malgré les multiples reports et fermetures de salles, intéressons nous aux plus grands flops selon votre humble lapin serviteur !

 

N°12 – Underwater

Underwater - film 2019 - AlloCiné

Kristen Stewart est très belle, elle joue très bien mais elle et son agent n’ont aucun flair pour lui trouver de bons rôles dans un blockbuster. Autant côté films d’auteurs, elle se débrouille bien après Twilight même si un peu moins bien que son acolyte Robert Pattinson. Sur la route, Sils Maria, Café Society sont des réussites. Mais Blanche Neige et le chasseur, Equals, American ultra, Charlie’s angels…çà fait mal…aux yeux.

Cet « Underwater » n’est pas mauvais. Il est juste fadasse. On reprend tous les codes d’Alien, éculés, vu, revus, détournés et même recopiés en moins bien par leur propre créateur Ridley Scott dans Prometheus et Alien Covenant. Alors forcément passer après est ennuyeux car on connait à peu près tous les rebondissements, ce qui est un peu con pour un film de suspens. « Life » avait, il y a deux ans, réussi à apporter un peu de fraicheur dans le genre. Mais ici même la bébète ressemble à un des aliens, le plus mauvais d’ailleurs.

C’est donc de la série B qui à coûté quand même 60 M de dollars. Alors çà se voit à l’écran, c’est bien fait mais le producteur doit s’en bouffer les doigts et le bras étant donné le four monstre qu’a connu le film au box office. Le vrai monstre est donc là…dans l’immensité du bide abyssal.

Mais quelle idée saugrenue ? Déjà tourner des films sous l’eau coûte une blinde même si aujourd’hui la technologie permet de limiter le nombre de scènes. Ensuite le concept a été tiré jusqu’à la corde. Même voir Kristen Stewart en bikini un peu dans le même délire que Sigourney Weaver en Ellen Ripley, fait jute rire tant le procédé est au mieux putassier. Et puis Sigourney n’avait pas la même classe. Même si j’aime beaucoup Kristen.

Grossier et trop basique, le film se regarde en mode cerveau en off. Le film est écrasé par les classiques auxquels il fait référence et devient ennuyeux sur la fin.

A éviter.

 

N°11 – An american pickle

An American Pickle - film 2020 - AlloCiné

J’ai une affection particulière pour Seth Rogen, qui fait des films de potes, potaches, avec son copain producteur Evan Goldberg. Les deux ont une culture geek vraiment excellente. Ce sont eux qui sont derrière l’adaptation en série du comic book Preacher puis de The Boys, carton mérité chez Amazon Prime.

Hélas cette production d’un Hibernatus version moderne est tout simplement à chier. Pourtant c’est HBO qui est derrière soit un gage de qualité. µLe problème de l’humour c’est que si çà tombe à plat, çà devient vite super rasoir. Seth Rogen a en plus un très mauvais gout pour les clichés et les bons sentiments. Il a déjà joué dans des films vraiment bas du plafond à ce niveau là.

Disons que l’animal était excellent lorsque lui et ses potes acteurs ou scénaristes écrivaient des sketchs débiles et provocateurs.

Là il s’est assagit et son humour est naze.

Un calvaire.

 

N°10 – « Mulan » de Niki Caro

Mulan - film 2020 - AlloCiné

Dernier blockbuster révisionniste du catalogue de dessins animés Disney, Mulan est tout petit peu original.

En effet, contrairement à d’autres réadaptations, le film n’est pas un copier-coller exact des scène du dessin animé et nous évite toute chanson.

Le film a un budget colossal et çà se voit à l’écran. C’est très beau et plusieurs scènes font penser à Tigre et Dragons.

Le seul problème est en fait l’histoire, plutôt très ennuyeuse et attendue. Voir un film de guerrière chez Disney où çà se bastonne tout le temps, c’est second degré en soit mais avouons le, c’est un peu chiant, souvent.

Disney nous balance un discours féministe bien lourdingue mais aussi une absence de goutte de sang et juste les méchants qui meurent, et puis des valeurs famille, patrie qui sont quand même ultra simplistes.

Le plus grand intérêt du film est la petite révolution qu’il représente. Il n’a pas du tout marché en Chine et fait même un fours, ce qui tend à montrer que le public chinois n’est pas dupe des produits qui ne sont pas culturellement de chez eux. L’entrée sur ce marché qui pèse de plus en plus lourd dans les recettes mondiales des blockbusters américains, n’est pas si simple.

Ensuite Disney a opté pour diffuser le film en VOD payante à 30 $ sur sa plateforme Disney + plutôt que de le sortir au cinéma aux USA et en Europe. Et là pour le coup sa stratégie a fonctionné puisqu’il est déjà à plus de 250 millions de recettes au bout d’une quinzaine de jours et que le public achète le film. Cette stratégie est à comparer à celle de la Warner qui a sorti TENET en espérant profiter du box office sur le long terme et qui s’en mord les doigts car le film de Christopher Nolan encaisse trop peu de recettes. Alors c’est aussi du au fait que de nombreuses villes américaines voient les cinémas encore fermés et au fait que l’opus de Nolan est de loin le moins réussi et le plus critiqué.

Mais cette stratégie risque de peser sur les mois à venir et hélas par pour le bien des exploitants de cinéma qui souffrent déjà beaucoup du Covid.

Bon si on en revient au film, il est assez sans saveur et trèèèès familial.

La piste aux Lapins :

2 étoiles

 

N°9 – « Une sirène à Paris » de Mathias Malzieu

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Le pitch : Crooner au cœur brisé, Gaspard s’était juré de ne plus retomber amoureux. Quant à Lula, jolie sirène, elle n’a que le chant pour se défendre des hommes, en faisant s’emballer leur cœur jusqu’à l’explosion. Lorsque la Seine en crue vient déposer Lula au pied du Flowerburger, la péniche-cabaret où chante Gaspard, c’est un mini-tsunami qui va bouleverser leur existence. 

Jack et la Mécanique du Cœur était un petit bijou d’animation, inventif, poétique, steam punk dont la grâce tenait beaucoup à Mathias Malzieu, chanteur du groupe Dionysos.

Avec Une Sirène à Paris, le réalisateur passe au film en prises de vues réelles avec de vrais acteurs. Et la déception est sévère. Pire, le film met mal à l’aise à plusieurs reprises tant la mécanique ne prend pas cette fois-ci. On est triste et gêné devant cette histoire de sirène qui tient sur un ticket de métro et n’a donc aucun autre intérêt que l’univers créé par le metteur en scène. Si Mathias Malzieu nous apporte de très belles images ou idées de décors ou d’illustrations, souvent steam punk ou théâtre de l’imaginaire, genres que j’adore en soit, il se plante complètement sur deux aspects.

D’abord son pitch n’est pas assez fort et sa mise en scène pas suffisamment enlevée et inventive. On compare forcément à Caro / Jeunet. D’un côté il y a de l’amateurisme maladroit et de l’autre un talent assuré.

Le scénario n’est pas assez construit, le montage souvent hasardeux et le jeu des acteurs est tout simplement raté. On n’ y croit pas et pire, l’émotion est totalement absente là où ce film aurait du être poétique.

C’est hyper casse-gueule de tourner un film de genre de la sorte et le film est bourré d’idées et d’imaginaire. Le problème est que le lien entre ces idées n’est pas fluides et manque de profondeur.

C’est vraiment dommage et on espère que Mathias Malzieu ne se laissera pas décourager et retentera un autre long métrage mais avec une ossature plus forte et une meilleure direction d’acteurs.

La piste aux Lapins :

2 étoiles

 

N°8 – « Notre dame »  de Valérie Donzelli

Notre Dame - film 2019 - AlloCiné

Le pitch : Maud Crayon, est née dans les Vosges mais vit à Paris.Elle est architecte, mère de deux enfants, et remporte sur un énorme malentendu le grand concours lancé par la mairie de Paris pour réaménager le parvis de Notre-Dame…

Le film de Valérie Donzelli commence bien, avec des incohérences, du burlesque, de l’imaginaire. On se dit que çà va être sympa ce conte de fées moderne et gentillet.

Et puis en fait la mécanique s’enraye très vite et tourne à vide à force d’accumuler des stratagèmes pour cacher le petit budget et l’absence de scénario.

J’ai même fini par m’emmerder fermement et regretter mon choix.

Le film se retourne alors contre lui même et devient prétentieux et long, trèèèès long et tellement bobo. Véritablement agaçant.

Un raté. Mais bien par contre.

La piste aux Lapins :

Mauvais

 

N°7 – « Le Prince oublié » de Michel Hazanavicius  : Omar Sy en prince de conte de fées

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Michel Hazanavicius est revenu après l’échec de « The search » et l’accueil plus chaleureux du film sur Godard, « Le redoutable« , avec une comédie fantastique qui s’appelle « Le Prince oublié« .

Heureusement pour lui, le confinement a tué le film dans l’œuf, ce qui donne une excuse à son échec cuisant.

On y suit Djibi, qui vit seul avec sa fille de 8 ans. Or tous les soirs, il lui invente une histoire pour l’endormir. Lorsque Sofia s’endort, ces récits extraordinaires prennent vie quelque part dans un monde imaginaire peuplé de chevaliers, pirates et autres dragons.

Lorsque Sophia entre au collège, la fin de son enfance marque la fin de ces histoires.

Que va devenir le prince qu’il incarne dans ce monde des histoires ?

L’ultra bankable Omar Sy en rôle titre, accompagné de Bérénice Bejo, l’épouse à la ville du réalisateur et de François Damiens jouent dans cette comédie extrêmement gênante et probablement très chère.

Passés les surprises liées à l’imaginaire du film, parfois marrant, le constat est tout simplement que le film ne sait pas à qui il s’adresse. Les enfants s’emmerderont fermement et trouveront le résultat très niais. Les adultes auront du mal à ne pas s’endormir et les clichés s’accumulent tellement qu’on finit par regarder sa montre très souvent.

Hélas ce n’est pas le prince qui est oublié mais plutôt le film, que l’on enterrera bien vite très profond en espérant que Michel Hazanavicius nous revienne avec du bon cinéma car c’est un bon réalisateur.

 

N°6 – « Da 5 Bloods » de Spike Lee

Da 5 Bloods - film 2020 - AlloCiné

Spike Lee est encensé car il est doué certes mais aussi parcequ’il est un symbole de lutte, particulièrement important en ces temps de manifestation #BlackLivesMatter.

Son dernier film, « BlacKkKlansman » avait séduit critique et public par son message d’une efficacité redoutable et le côté jouissif de son humour. J’étais hyper content de revoir le réalisateur au sommet de sa forme.

Son nouveau film, produit par Netflix a reçu certaines critiques élogieuses mais pas que. Hélas, je me retrouve du côté des spectateurs laissés sur le bord. 2h32 pour raconter aussi peu de choses c’est long, très long et l’impression d’être en vacances au Vietnam avec le réalisateur et son équipe pour un tournage un peu trop à la cool se ressent.

La faute revient à ce pitch déjà un peu particulier de vétérans noirs du Vietnam qui retournent sur les lieux 50 ans après pour retrouver le corps de leur cinquième camarade, un héros mort au combat. Mais pourquoi avoir attendu 50 ans ? Les acteurs sont des papys et évidemment on se tape des scènes soit-disant du vieux cool qui sont hyper gonflantes et clichés de ce type de films.

Ensuite les personnages sont peu intéressants et l’histoire de trauma de l’un d’entre eux peu crédible si longtemps après. Et puis l’idée de faire des flashs backs en mode Apocalypse Now et voyant les vieux acteurs jouer des mecs de 20 ans, c’est juste ridicule et pas du tout du tout crédible. Certes je comprend le parti pris de mise en scène qui aurait pu marcher. Sauf que c’est ridicule.

La satire ne prend pas à force de ne pas se prendre suffisamment au sérieux. Ces vieux ont l’air de guignols et donc l’empathie nécessaire pour croire à l’histoire fait défaut.

Le film est trop long, brouillon, inégal et au final bâclé.

 

N°5 – « Eurovision Song Contest »

Eurovision Song Contest: The Story of Fire Saga aurait été ...

Le pitch : Deux musiciens en herbe, Lars Erickssong et Sigrit Ericksdottir, ont l’opportunité de représenter leur pays, l’Islande, à l’Eurovision.

La bande annonce du nouveau film de Will Ferrell laissait espérer un bon gros délire kitch se moquant de l’Eurovision.

Et bien pas du tout. Le film est incroyablement long pour une comédie (2 h !) et a un gros problème, il n’est jamais drôle. Pas un sourire esquissé tellement les blagues sont pourraves.

C’est plutôt une histoire d’amour fleur bleue et ridicule mais on ne comprend pas à qui s’adresse le film. Will Ferell joue un abruti post adolescent alors qu’il a 52 ans soit 11 de plus que sa partenaire Rachel McAdams, qui s’est vraiment perdue dans cette sombre parodie.

Ce qui me navre c’est que Netflix investisse du fric dans des projets aussi nazes, à l’aveugle. A force d’arroser partout et en prenant de temps en temps quelques grands noms, forcément, le catalogue Netflix grandira. Mais quelle gabegie !  Alors que plein de bons projets n’attendent que de l’aide pour se monter.

Un film parfaitement inutile, stupide et qui prend le spectateur pour un idiot.

A éviter à tout prix.

La piste aux Lapins :

Mauvais

 

N°4 – The boys in the band

The Boys In The Band - film 2020 - AlloCiné

Remake d’un film mineur des années 80 sur la population homosexuelle des années anté sida et adaptation d’une pièce à succès de Broadway, The boys in the band est un film très efficace pour attiser l’homophobie primaire. En effet, ses personnages sont encore plus caricaturaux que ceux de La cage aux folles et donne une image très ciblée du milieu gay. Certes, les choses ont changées depuis les années 80 mais tous les homosexuels ne sont pas de grandes folles qui adorent se travestir et féminiser tous les prénoms.

Ce film m’a donné la gerbe au bout de 10 minutes et j’ai tenu 50 tellement c’est médiocre.

A ceci rajoutons l’inintérêt total de l’histoire, un scénario inexistant et des numéros d’acteurs homosexuels jouant des caricatures avec une conviction affligeante.

Un film contre productif et inutile.

La piste aux Lapins :

Mauvais

 

N°3 – « TENET » de Christopher Nolan

Tenet : explications, critiques, making-of... Tout comprendre au dernier  Nolan

Christopher Nolan revient en sauveur des salles de cinémas après des mois de fermetures, une programmation vidée de ses blockbusters estivaux et des spectateurs réticents à voir un film avec un masque ou tout simplement craintifs d’être contaminés.

Nolan est l’un des réalisateurs que j’apprécie pour sa rigueur, l’originalité des styles qu’il aborde et le fait qu’il est l’un des rares à monter des blockbusters hollywoodiens qui sont aussi de vrais films d’auteur et qui cartonnent au box-office. Nolan est comme Spielberg, une marque de qualité et de respect du spectateur.

Avec « Tenet« , il tente de refaire le coup du brillant « Inception« , avec un concept de science-fiction fort et un imbroglio scénaristique cherchant volontairement à perdre le spectateur pour mieux l’impressionner par l’action, la réflexion post séance sur les connections incomprises du film et même inciter à retourner voir le film.

Le problème c’est que cette fois-ci, pour moi en tout cas, çà n’a pas pris et çà m’a même particulièrement gonflé à certains moments.

Entendons nous, on voit le budget à l’écran, la scène avec avec un vrai avion qui se crashe est impressionnante, celle du théâtre également.

Non le problème est l’histoire d’une part et surtout le concept de base que j’ai trouvé fumeux et d’un manque de finesse assez rare. Au nom de ce concept de temps inversé expliqué en une scène assez ridicule et d’une grande froideur, les scènes s’enchainent sans explication ou tout du moins des explications faciles d’un personnage joué par Robert Pattinson. L’impression d’être dans un jeu vidéo à plateaux laisse un goût bizarre et glacial, ce qui pouvait être ressenti sur « Inception » mais que Nolan avait alors compensé. Le réalisateur avait en effet usé de l’écriture de ses personnages et leur avait donné suffisamment d’émotion pour nous tenir par la main dans ce dédale scénaristique. Mais n’est pas Léonardo Di Caprio qui veut. Et le fils de Denzel Washington, John David, est loin d’arriver à jouer la même palette. Ses expressions sont limitées à deux ou trois et il ne joue pas uuultra bien. A sa décharge, son personnage est un « protagoniste » comme il se nomme lui-même qui aurait pu être joué par n’importe qui avec la même passivité et absence d’étonnement sur quoique ce soit. Le personnage est particulièrement raté et pas du tout attachant. La relation avec le personnage de Pattinson n’est pas non plus bien exploitée ce qui rend la conclusion ridicule.

Je n’ai pas passé un mauvais moment car j’essayais de bien comprendre et Nolan reste un metteur en scène d’action brillant. Mais ce rythme frénétique ne laissant jamais respirer finit par lasser et surtout, il vire à l’autocaricature épileptique du style nolanien. C’est vraiment dommage et triste.

Cela m’agace d’être déçu par un grand réalisateur que j’affectionne mais honnêtement son film est une arnaque intellectuelle, suffisante qui plus est.

Espérons qu’il redescende d’un cran pour son prochain film.

 

N°2- « Enola Holmes » de Harry Bradbeer

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Le pitch : Enola, la jeune sœur de Sherlock Holmes, met ses talents de détective à l’épreuve pour tenter de retrouver sa mère disparue et déjouer une dangereuse conspiration.

Millie Bobby Brown, la star de Stranger Things a co-produit cette adaptation d’un bouquin pour ados suivant la petite soeur de Sherlock Holmes, joué ici par Henry Cavill.

Et le film, a trois problèmes.

Le premier c’est son actrice, qui en fait des caisses en s’adressant à la caméra avec ses petits clins d’œils et mimiques. C’est insupportable et vraiment ultra relou car c’est en permanence durant le film, pour souligner  qu’elle est pas con la gamine…mouais. Deux fois on a compris, toutes les deux minutes c’est chiant.

Le second problème est que le film est adressé aux ados, avec les codes d’aujourd’hui à savoir un montage trop clipé, amis épileptiques, s’abstenir !!! Ou appeler le 15 pas trop longtemps avant de lancer le film sur Netflix.

Le troisième problème est que j’ai décroché au bout de cinq minutes, tentant sincèrement et sérieusement de revenir pour re-dérocher à phases répétitives. Incroyable ce montage et super mauvaise idée. Cà va très vite et en plus c’est monté comme l’excellente série Pushing Daisies, avec des couleurs très flashy et un univers très marqué, des dessins et illustrations, bref un style qui pourrait prendre mais pas sur la durée et surtout, pas pour ce type d’histoire d’enquête.

Car si vous larguez le spectateur par le montage, compliqué de l’accrocher sur le scénario et l’enquête du personnage principal.

Ce « Enola Holmes » est très stigmatique de 2020 et des produits télévisuels adressés aux ados mais le film ne s’adresse qu’à eux. Et franchement, çà fait flipper vu le résultat qui n’a pas grand chose de cinématographique et se contente de cocher des codes avec une mini star imblairable.

Ne vous fiez pas à certaines bonnes critiques.

A éviter, c’est franchement mauvais.

La piste aux Lapins :

Mauvais

 

N°1 – « Je veux juste en finir » de Charlie Kaufman

Je veux juste en finir : Photos et affiches - AlloCiné

Le nouveau film du scénariste de « Dans la peau de John Malkovich » et « Eternal sunshine of the spotless mind » porte très bien son nom.

« Je veux juste en finir« , c’est un peu le sentiment du spectateur face à ce pensum abscon d’un ennui à se jeter par la fenêtre, plusieurs fois si on est highlander, tant le film est ahurissant d’ennui.

C’est prétentieux, incroyablement long (2h14) et statique.

Soit disant incursion du metteur en scène dans l’horrifique, le film suit une jeune fille pas vraiment amoureuse de son récent petit ami, qui l’amène à la campagne la présenter à ses parents.

Le doute s’installe lors de la première scène qui se passe intégralement dans une voiture durant plus de 20 minutes de dialogues intellos entre le petit copain super chelou et la nana blasée qu’on entend réfléchir et on se dit « wowwwwww!!! c’est quoi le plan du film ? »

On a alors droit à des analyses d’œuvres d’art ou du sens de la vie comme si Charlie Kaufman était affalé sur le divan de son psy et nous déblatérait ces thèmes sans aucun lien entre eux.

Le film est d’entrée excluant et donne l’impression que Netflix a filé du pognon au réalisateur sans lire le scénario, juste pour s’acheter un nom à son catalogue et permettre au Monsieur de faire son auto analyse pour très cher. Un film fait pour lui seul, only one spectateur qui se fout complètement de qui va regarder son film.

Puis arrivent le moment dans la maison des parents joués par les excellents Toni Collette et David Thewlis. Ils sont complétement frappés et flippants et on se dit que l’horreur va enfin démarrer. Et pam, pas du tout, ils vieillissent, rajeunissent dans des scènes qui ne signifient pas grand chose et n’apportent rien à l’histoire. Mauvaise pioche.

Pour les survivants des spectateurs atterrés, l’héroine, qui devient de plus en plus à baffer tant sa dépression est agaçante, convainc son petit copain à la gueule de tueur en série, de reprendre la route. En pleine tempête de neige et dans ce même putain de véhicule bleu ! Et qu’est ce qu’ils font les connards ? Ils parlent 25 bonnes minutes de tout et de rien, de « Une femme sous influences » de John Cassavetes, sympa pour ceux qui ne l’ont pas vu ! Donc Kauffman s’invente critique de cinéma en mode super chiant et se permet de cracher à la gueule du grand Cassavetes, qui lui, écrivait aussi ses scénari mais les écrivait pour qu’ils soient regardables et regardés. Et au passage Gena Rowlands est juste géniale dans le film cité et a droit de se faire insulter par les deux personnages, un comble !

Bon et puis çà continue, de pire en pire, de plus en plus perché, sans queue ni tête.

Le pire film vu depuis un bail.

Merci pour cette perte de temps !

La piste aux lapins :

Mauvais

 

Les meilleurs films 2019 du Blanc Lapin : N°11 à N°1

30 décembre, 2019

Allez on termine l’année 2019 avec le classement des 11 films préférés, la première partie étant ici si vous l’avez loupée.

 

N°11 – « L’heure de la sortie » de Sébastien Marnier

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Lorsque Pierre Hoffman intègre le prestigieux collège de Saint Joseph il décèle, chez les 3e, une hostilité diffuse et une violence sourde. Est-ce parce que leur professeur de français vient de se jeter par la fenêtre en plein cours ? Parce qu’ils sont une classe pilote d’enfants surdoués ? Parce qu’ils semblent terrifiés par la menace écologique et avoir perdu tout espoir en l’avenir ? De la curiosité à l’obsession, Pierre va tenter de percer leur secret…

Porté par un excellent Laurent Lafitte, le film de Sébastien Marnier est l’une des très bonnes surprises du cinéma français en 2019. Il est en effet rare que le cinéma de genre soit traité en France de façon fine et sans tomber dans trop de clichés ou sans décevoir par son épilogue.

« L’heure de la sortie » arrive à créer une atmosphère pesante entre thriller psychologique et codes du film horrifique voire fantastique pour nous parler d’écologie. Oui, je sais, ce n’est pas évident en lisant le pitch et c’est tout l’intérêt de cet excellent film que de se laisser porter et surprendre par son récit et là où il veut nous mener au final.

La bande d’adolescents supérieurement intelligents est à baffer du début à la fin et c’est super car ceci accentue la destination des personnages que l’on peut avoir et le mélange des pistes que souhaite créer le metteur en scène.

Cette mise en scène est d’ailleurs léchée et déconcertante de par certains de ses choix, surprenante toujours. Le film nous parle de la jeunesse d’aujourd’hui ou d’une certaine jeunesse, de leur prise de conscience via une ambiance sonore et hypnotique rare.

Un film étrange qui fait réfléchir sur notre avenir.

La piste aux Lapins :

4 étoiles

 

N°10 – « The Lighthouse » de Robert Eggers

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Robert Pattinson est typique du genre d’acteur qui m’a considérablement gonflé et a conquis peu à peu mon respect de cinéphile par ses choix intelligents de carrière et par son talent qu’il développe. Issu des irregardables Twilight, il a su enchainer Cosmopolis et Maps to the stars de David Cronenberg, il est passé chez James Gray dans l’excellent « The lost city of Z« , il s’est ensuite fait diriger dans le très bon « Good time » des frères Safdie, puis dans l’excellent « High life » de Claire Denis. Avant de faire partie du Tenet de Christopher Nolan en 2020 et d’être le nouveau Batman en 2021, l’acteur nous prouve ici qu’il peut aller très loin dans cet Ovni qu’est « The Lighthouse« . Il y joue un jeune homme embarqué sur un phare avec un vieil homme tiranique pour garder ce dernier. Et le duo composé par l’excellent et régulier Willem Dafoe et Pattinson offre une joute assez bluffante. Les deux vont tomber dans une spirale de folie assez prodigieuse portés par une mise en scène ultra référencée de Robert Eggers.

Au-delà de ses trouvailles visuelles, de son superbe noir et blanc, de son découpage, de sa musique, le talent de ce réalisateur prometteur éclate au grand jour et nous fait espérer la naissance d’un grand cinéaste.

Le réalisateur use certes d’artifices déjà vus par ailleurs mais bien souvent les plus grands s’inspirent de leurs prédécesseurs et les citent pour mieux créer leur propre univers. Cette démonstration est en tout cas très convaincante.

On ne sait pas si l’auteur se rapproche de Sartre et nous dépeint une allégorie de l’enfer ou simplement l’enfoncement d’un être dans la folie et dans sa propre tête malade.

La forme et l’esthétique n’empêchent pas la tension de se créer et les interrogations d’apparaitre entre fulgurances horrifiques et dialogues illuminés d’un Willem Dafoe au sommet. Le film est anxiogène mais pas plombant, jouant sur l’épouvante sans jamais s’y plonger totalement, dans le but ultime de laisser le spectateur interrogatif.

Une très grande réussite pour terminer 2019.

La piste aux Lapins :

4 étoiles

 

N°9 – « Portrait de la jeune fille en feu » de Céline Sciamma

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Après « Naissance des pieuvres« , ‘Tomboy » et « Bande de filles« , la réalisatrice et scénariste Céline Sciamma est revenue en compétition à Cannes avec ce film en mai 2019.

Le film est reparti avec le prestigieux Prix du scénario même si il pouvait viser plus haut tant la presse fut excellente. Mais il y avait d’autres concurrents dont le génial Parasite.

Il est vrai que l’histoire est somme toute très originale, ce qui fait un bien fou dans cette période où remakes et reboots envahissent Hollywood.

Le pitch : 1770. Marianne est peintre et doit réaliser le portrait de mariage d’Héloïse, une jeune femme qui vient de quitter le couvent. Héloïse résiste à son destin d’épouse en refusant de poser. Marianne va devoir la peindre en secret. Introduite auprès d’elle en tant que dame de compagnie, elle la regarde.

Céline Sciamma ne fait pas que filmer la condition d’une femme et la marchandisation future de sa vie pour le bien de sa mère et de sa famille. Elle filme surtout la retenue que leur impose leur éducation et qui enserre la passion qui va s’enflammer.

Cette frustration immense qui nait devant nos yeux est dévorante et s’appuie sur grande délicatesse du découpage de son scénario sur la durée.

Voire le désir naitre, entre deux femmes du 18ème siècle qui plus est, aurait pu prendre de multiples formes mais la réalisatrice choisit une poésie et un naturalisme qui vous attachent aux personnages malgré la rigueur de leur quotidien, de leur destinée et des conventions avec lesquelles elles jouent. C’est une ode à la littérature et la peinture, à l’art tout simplement pour s’échapper de l’archaïsme social.

Le travail sur les gestes, les postures et la couleur des scènes est remarquable. Céline Sciamma capte le temps et le souvenir avec un talent évident.

« Portrait de la jeune fille en feu » est une œuvre solaire et moderne portée par deux interprètes excellentes, Adèle Haenel et  Noémie Merlant.

C’est un film élégant, esthétique et déchirant à la fois. Un des très bons films français de 2019.

La piste aux Lapins :

4 étoiles

 

N°8 – « Les Misérables » de Ladj Ly

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Ladj Ly  adapte son long métrage qui avait déjà reçu de nombreux prix et a décroché le prix du jury au dernier festival de Cannes.

Le film suit les premiers jours de Stéphane, policier tout juste intégré à la BAC du 93, ,la Brigade Anti-Criminalité de Montfermeil. Ses deux co-équipiers  se font respecter étant eux mêmes aussi provocants et violents dans leurs attitudes que la population et la jeunesse qu’ils côtoient jusqu’à …

Évidemment le film force le respect par la justesse et le recul que prend le réalisateur sur l’état des cités et de leur abandon, sur la déliquescence du lien social. Son constat est sombre même si l’humour alterne avec l’extrême tension et violence qui gère les rapports entre chaque groupe. Il y montre notamment l’impact et l’enracinement d’un Islam radical qui apporte un certain cadre ou la gestion mafieuse par quelques caïds ou le climax de guerre civile entre clans. Mais le réalisateur se concentre aussi sur le rapport des policiers aux très jeunes délinquants, de plus en plus jeunes sans porter de jugement. Il n’excuse ni les adolescents ni les flics aux comportement souvent discutable mais il tente d’expliquer pourquoi ils en sont arrivés là.

Leur quotidien sous pression est évident de par l’antagonisme extrême entre leur rôle et la perception ou la haine de la population. Quant aux enfants, il ne juge pas non plus leurs parents mais fait un constat, celui que la cité enferme des enfants qui deviennent des bêtes en cage, dangereux pour eux mêmes et pour les autres et qu’il y a peu d’espoir dans l’état actuel.

L’empathie profonde de Ladj Ly pour ses personnages transparait, aucun n’étant caricaturé. Sa narration est très bien maitrisée de bout en bout, nous amenant par petites touches de ce quotidien déjà hallucinant à une conclusion sous forme d’uppercut.

L’état des lieux a beau être catastrophique, le film a le mérite de soulever des questions qu’on aborde certes depuis des décennies mais sur lesquels des visages ont plus d’impact. Le réalisateur n’a aucune solution et c’est ce qui est flippant mais il pose un diagnostic édifiant.

Un grand tour de force narratif et un talent de mise en scène évident servi par une excellente distribution.

La piste aux Lapins :

4 étoiles

 

N°7 – « Marriage Story » de Noah Baumbach

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Noah Baumbach est un réalisateur de grand talent, sensible, intellectuel New-Yorkais jusqu’au bout des ongles. On se souvient de son magnifique Francès Ha.

Pour son second film produit par Netflix, il décide de nous conter l’histoire d’un divorce entre un scénariste de théâtre et son épouse, comédienne. On y voit les déchirements classiques autour de leur fils, du lieu de résidence, des petites choses et mesquineries qui s’infiltrent peu à peu, exacerbés par deux avocats horribles campés par les excellents Laura Dern et Ray Liotta. Ou comment le système judiciaire américain est une industrie de la confrontation ou les avocats coûtent une fortune et peuvent accroitre les problèmes pour justifier leurs honoraires.

Mais surtout le duo d’acteurs est exceptionnel. Scarlett Johansson est tour à tour touchante, resplendissante, furieuse et surtout particulièrement sur le fil du rasoir. Elle exprime tous les doutes qui la traversent quant à son choix et toute la difficulté de faire le deuil d’un amour et d’une vie de couple.

Face à elle, Adam Driver est brillant et confirme qu’il est l’un des acteurs qui compte désormais à Hollywood. Sa démarche masculine et sa voix rauque, les certitudes de son personnage et son incrédulité de départ face à ce qui lui arrive, face à l’évidence que son monde ne peut s’effondrer, rendent encore plus touchant ses moments de solitude comme de rage. Une scène d’insultes entre les deux époux en plein divorce est assez déchirante en soit.

Bien souvent « Marriage Story » vous tire des larmes. Parfois c’est devant la rudesse de ces combats et de la petitesse des attaques, parfois face à la nostalgie des moments heureux où le simple constat du temps qui a passé et a finis par faire son œuvre.

L’ambivalence des sentiments des deux protagonistes donne à leur lutte un côté déréglé et factice qui trouble lorsque la réalité de leurs choix refait surface. Car bien souvent, c’est cette nuance qui prédomine quant la colère s’endort.

La finesse d’écriture du scénario tout comme le choix des scènes et de leur découpage saccadés sont brillants de bout en bout, prouvant une fois de plus que Noah Baumbach n’est pas qu’un excellent directeur d’acteurs, c’est aussi un réalisateur inspiré et doué. Son film est sobre et d’autant plus puissant dans ses émotions. Il utilise des moments si criants de vérité et de simplicité que l’effet du film est forcément décuplé.

Il utilise un rythme parfois violent, faisant des allers retours entre orages et accalmies sur les sentiments des protagonistes, laissant espérer que ce fleuve n’ira pas jusqu’au bout mais la vie avance et pas toujours dans le sens voulu et c’est tout le sujet de son film, un film sur le temps et la mutabilité des sentiments face à ce dernier, voulue ou forcée.

Un grand film.

La piste aux Lapins :

4 étoiles

 

N°6 – « Grâce à Dieu » de François Ozon

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François Ozon s’intéresse pour la première fois à une histoire vraie et quitte la fiction pour signer un brulot politique auquel on ne peut qu’adhérer.

Il va suivre plusieurs libérations de la parole et plusieurs combats d’hommes adultes ayant subi les sévices sexuels d’un prêtre, inspiré sans aucune précaution de l’histoire du prêtre Bernard Preynat, dont l’affaire est aujourd’hui traitée devant la justice. Ozon ne s’embarrasse pas de changer les noms puisque non seulement on le sent révulsé par l’affaire mais surtout le prédateur a avoué ses crimes. De la même façon, le cardinal Barbarin voit son nom utilisé tel quel, Ozon préférant prendre le parti des victimes et assumer jusqu’au bout, sans hypocrisie aucune. Il nous montre l’aveuglement du cardinal lyonnais et son incapacité à agir voire à minimiser les faits, axant sur le pardon de la première victime qui se manifeste en 2014 et utilisant la profonde croyance du personnage, joué par un Melvil Poupaud au sommet.

Son personnage est écartelé. Il a soif de faire éclater la vérité et surtout d’empêcher le monstre de briser d’autres enfances mais il est issu d’un milieu bourgeois très pratiquant qui ne peut se résoudre à accepter la vérité, quitte à trouver des excuses ou des simili solutions via le pardon. Certaines scènes sont d’ailleurs surprenantes car Ozon arrive à faire rire la salle de remarques complétement surréalistes d’individus vivant dans le déni total.

Denis Ménochet et Swann Arlaud vont chacun interpréter une autre facette sociologique des victimes issues de milieux sociaux différents. Leur jeu est excellent, juste, écorché pour Arlaud et empli de colère pour Ménochet. On va suivre leur combat, leur catharsis avec force et respect pour leur courage.

Le film est sidérant par l’absence de réaction de l’église, la peur de la société mais aussi porteur d’espoir et rassurant sur l’humanité de chacun grâce au combat juste et évident des personnages.

Ce film engagé et brillant fait tout de même halluciner à bien des reprises face à l’aveuglement général. On se dit que forcément les prédateurs sexuels d’enfants se portent naturellement vers ce type de métiers ou vers ceux liés à l’enfance et le malaise est présent. Combien doit-il être difficile pour un homme de pratiquer un métier au milieu d’enfants, avec cette peur sans cesse de déclencher la suspicion. Je ne pourrais que vous recommander le brillant « La Chasse » de Thomas Vinterberg pour vous donner un panel complet du sujet. Mais c’est hélas un mal nécessaire que cette suspicion et cette vérification permanente des parents. Et comme le dit le personnage de Melvil Poupaud à ses enfants, ces derniers doivent savoir que désormais ils savent qu’ils doivent parler, tout de suite.

Le propos de « Grâce à Dieu«   est donc très puissant, la narration qui suit chaque victime avant de les réunir est d’une grande fluidité et les 2h17 passent au final assez vite. Ozon a dû sacrément se documenter pour donner autant de détails sur les réactions et comportements des uns et des autres et son caléidoscope social est tout simplement brillant de vérité et de complétude.

Un grand film sur la parole et un film bouleversant.

La piste aux Lapins :

4 étoiles

 

N°5 – « Once upon a time in Hollywood » de Quentin Tarantino »

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Un film de Quentin Tarantino est toujours un évènement tant le trublion cinéphile s’avère populaire, dispose de hordes de fans inconditionnels de par le monde et se trouve être l’un des rares cinéastes qui monte à Hollywood des films sur son nom et n’a aucun problème à trouver les budget et surtout trouve son public en salles.

« Once upon a time in Hollywood » est d’ailleurs bien parti pour devenir l’un des plus grands succès de sa carrière tant son démarrage est explosif aux USA et dans le reste du monde. Il faut dire que Tarantino a un don pour le casting exceptionnel.

Brad Pitt dans « Inglorious Basterds » était génial et se troube être l’un des plus grands acteurs au monde.

Léonardo Di Caprio dans « Django Unchained » était délicieux de perversité et se trouve être l’un des meilleurs acteurs au monde.

Réunir ces deux monstres sacrés d’Hollywood pour rendre hommage à une parenthèse enchantée des années 70 où un vent de liberté soufflait sur l’usine à rêves, c’était évidemment gage d’un rendez-vous immanquable.

A ce titre aucune déception n’est à pointer puisque Brad Pitt a une classe hallucinante dans « Once upon a time in Hollywood » et Léo est comme toujours au-delà du parfait. Les rôles sont taillés pour eux, leurs scènes communes sont certes rares mais excellentes et leurs scènes solo leur donnent des moments de cinéma qui resteront imprégnés dans nos rétines. Que ce soit le quotidien d’acteur raté du personnage de Di Caprio ou la dégaine cool et mâle de Pitt quand il va voir les hippies de Charles Manson ou encore quand il se bat avec Bruce Lee…c’est juste excellent et drôle.

Mais Tarantino peut décevoir sur ce flm à deux titres même si personnellement je n’ai pas du tout été déçu, bien au contraire.

D’abord son film est long et dure 2h44 et certains pourront trouver qu’il manquait des coupes. Moi je trouve qu’au contraire cette durée permet de sentir et d’ humer l’odeur de cette époque. La reconstitution des années 70 est fabuleuse et Tarantino nous fait errer avec ses personnages en prenant son temps, souvent sans dialogues, pour nous immerger dans cet Hollywood passé pour lequel une profonde mélancolie se dégage. Et c’est là le second point qui va désarçonner certains. Quentin Tarantino abandonne quasiment l’une des caractéristiques majeures de son cinéma à savoir les dialogues chelou hyper longs mais très drôles. Il s’efface dans la narration au profit de silences, de climax et c’est très très réussi. On a parlé de film le plus personnel pour son auteur lors de sa présentation à Cannes et c’est vrai. J’ai bien sur beaucoup rigolé car Tarantino garde soin  humour mordant mais il aime et adore ses deux personnages, ces deux loosers magnifiques, leur complicité et il nous envoie une superbe déclaration d’amour au cinéma. Bien sur il le fait en utilisant les tournages auquel son personnage principal participe ou les extraits de ses films, ou en montrant ce Hollywood insouciant et cool de cette époque. Mais comme bien évidemment il n’est pas dupe et nous on plus, on comprend peu à peu qu’il embellie cette image du passé et qu’il donne à ce Hollywood et au cinéma en général tout ce pouvoir de raconter les histoires différemment, de rendre la vie quotidienne plus distrayante, d’effacer ce qui est moche et laid dans la vraie vie et de donner à la fiction toutes ses lettres de noblesse.

Tarantino nous livre un conte. Il était une fois…et c’est excellent. En ce sens son film est proche de Django Unchained et de Inglorious Basterds.

Il est comme un gamin qui utiliserait son incroyable culture pop de 50 ans de cinéphilie pour nous livrer un film mature, sensible et drôle à la fois.

Merci donc à Quentin Tarantino pour ce nouvel opus, c’est un profond respect pour son public et c’est une preuve très classe de son immense talent.

La piste aux Lapins :

4,5 lapin

 

N°4 – « Douleur et Gloire » de Pedro Almodovar

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Pedro Almodovar pourrait remporter la Palme d’Or avec ce grand film, lui qui court après depuis si longtemps et s’est vu snobé si souvent.

Car « Douleur et Gloire » a un atout considérable. Il est à part dans la filmographie du maitre espagnol. Pour une fois il ne s’intéresse pas à des femmes comme personnages principaux mais à lui. En signant un film très autobiographique, il aborde sa masculinité et sa propre vie avec une grande finesse.

Almodovar parle donc d’un cinéaste célèbre qui vit reclus chez lui et a perdu l’envie et l’inspiration.

Il donne à son double fictif le visage d’un de ses plus fidèles acteurs, qu’il a fait découvrir il y a 30 ans, Antonio Banderas.

Ce dernier est d’une classe folle pour 58 ans et donne au personnage toute la fatigue d’une vie de douleurs physiques et de maladies mais surtout de dépressions chroniques. Il est parfait dans le rôle et véritablement super attachant même quant il est ignoble d’égocentrisme artistique.

Les flashs back avec son enfance sont autant de pépites qui rythment l’explication de la construction de son imaginaire de cinéaste. On y retrouve une grande nostalgie jamais mièvre. Bien au contraire, ces souvenirs sont les racines de cet être qui regarde son passé en prenant de la hauteur et fait le bilan d’une vie. Il fait également la paix avec cette mère solaire qu’il a déçue, dont il s’est éloigné avec la célébrité. Elle est interprétée par Pénélope Cruz, autre actrice phare d’Almodovar, comme une évidence.

Le personnage se réconcilie avec un ancien amant perdu de vue depuis vingt ans et se réconcilie avec son parcours. « Douleur et Gloire«   est un film extrêmement mature, moins pétillant que d’autres œuvres du cinéaste mais plus profond, tout en conservant son style connu mondialement.

Le film est généreux, intelligent, drôle parfois, il parle de l’inspiration, rend un très bel hommage au cinéma et s’offre même une conclusion de film méta qui créé une boucle et une fin excellente. Le dosage de son histoire est parfait, il n’y a aucune longueur, aucun dialogue ou personnage de trop. C’est un long métrage délicat, tout en retenue, tout simplement brillant de profondeur.

Le film marque longtemps après son visionnage et devient instantanément l’un des grands monuments de sa carrière. Parfois on parle de chef d’œuvre trop vite. Je ne le ferai donc pas même si vraiment, çà me démange. Mais je serais très surpris que le film ne marque pas sur la durée.

La piste aux Lapins :

4,5 lapin

 

N°3 – « La Favorite » de Yórgos Lánthimos

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Si The Lobster avait un pitch et une première partie très décalée, le film m’avait vite fatigué par son concept tournant à vide. Avec « Mise à mort du Cerf Sacré« , le grec Yórgos Lánthimos arrivait à poursuivre son talent sur un film entier, avec un scénario jusqu’au-boutiste implacable et glaçant. Une vraie réussite.

« La Favorite » est un cran au dessus encore et prouve qu’il va falloir compter sur ce réalisateur à l’avenir car son talent se muscle et aboutit à un très grand film.

Pour raconter la folie de la reine Anne d’Angleterre, au début du XVIIIème siècle, Lánthimos use de son talent évident de direction d’acteurs avec un trio féminin époustouflant mais il ose surtout des choix de mise en scènes radicaux qui lorgnent ouvertement vers ceux de Stanley Kubrick, et il faut être gonflé pour tenter le coup.

Alors bien sûr, la comparaison s’arrête à cette reconstitution millimétrée et ses choix de focales et de grands angles mais le résultat est d’une efficacité redoutable.

L’image est belle, léchée et ces personnages poudrés et décadents sont excellents.

La reine est incarnée par une Olivia Colman complètement barrée qui mérite l’Oscar de la meilleure actrice pour sa composition riche, drôle, monstrueuse et pathétique à la fois. Le rôle de sa carrière probablement. Un rôle inoubliable.

Pour s’arracher ses faveurs, une favorite historique va devoir lutter contre un petit ange qui se trouve être une arriviste. Rachel Weisz et Emma Stone se livrent une guerre de manipulation dont les joutes politiques rappellent toute la perversité des Games of Thrones et autres House of cards. Il y a la même violence contenue dans un guant de velours, les mêmes sourires carnassiers qui font froid dans le dos. Il y a surtout le côté jubilatoire du jeu à mort entre deux êtres qui luttent pour leur survie dans un royaume dirigé par une folle à lier.

Le film est irrésistiblement comique à bien des reprises et joue la digression et l’humour décalé à fond. La scène de danse est juste complètement dingue et hilarante et c’est loin d’être le seul moment où la salle est pliée en deux.

C’est un grand tour de force que de livrer un film esthétiquement de grande qualité, intelligent, drôle et souvent triste par la solitude inhérente à ces personnages rongés par le pouvoir et la survie. « La Favorite » est un film de monstres assez fascinant et l’une des premières grandes réussites de 2019.

La piste aux Lapins :

4,5 lapin

 

N°2 – « Parasite » de Bong Joon-Ho

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Bong Joon-Ho est l’un des plus grands réalisateurs au monde, issu de la nouvelle vague sud-coréenne avec Kim Jee Woon et Park Chan Wook. Son style si particulier est celui du polymorphe, à même de mélanger les genres tout en réalisant un cinéma souvent porteur de messages et grand public. Très inspiré par le cinéma européen, Bong Joon-Ho a livré quelques bijoux avec « Memories of Murder« , « The Host« , « Mother » ou « Okja » et a moins bien réussi le passage Hollywoodien avec « Snowpiercer« .

Lui décerner la Palme d’Or cette année est une bouffée d’oxygène pour Cannes et l’élitisme que l’on reproche trop souvent au festival.

« Parasite » est une très grande Palme d’Or populaire. Comme à son habitude le maitre sud-coréen mixe les genre mais un peu moins que d’habitude, donnant à l’ensemble une couleur très sociale sous forme de domination d’une classe sociale par une autre. Le début du film verse dans la comédie d’arnaque et s’avère brillant dès le début, soutenu par d’excellents acteurs et un sens du découpage et du comique de répétition subtil. Une famille pauvre arrive à se faire embaucher par un jeune couple vivant dans l’opulence et ayant deux enfants rois. Puis Bong Joon-Ho distille tout au long du film les germes du dénouement en montrant que cette famille bourgeoise en apparence bienveillante et bien sous tout rapport a un mépris de classe sidérant qui se distille par petites touches.

Le réalisateur change alors de code et surprend passant du thriller horrifique au film catastrophe pour revenir à son sujet de base, l’exclusion de classe et le déterminisme implacable.

La mise en scène est excellente de bout en bout, pas une scène n’étant de trop. Les rouages de ce brillant exercice fascinent encore après être sorti du film. Le génie de Bong Joon-Ho vient de son sens du rythme et de la puissance de sa satire sociale. Il va jusqu’à se moquer de lui-même et de l’image qu’on a des réalisateurs suds-coréens si malins et qui ont toujours des plans extraordinaires pour leurs personnages en faisant expliquer clairement au personnage principal qu’il est inutile d’avoir des plans car la vie se charge de les dénouer et que tout est imprévisible…sauf le milieu dans lequel on nait et qui s’impose. Et justement, le réalisateur arrive même à imager cette lutte décuplée d’individus issus des milieux pauvres pour contrecarrer ces plans tout tracés par le destin ou plutôt, le hasard.

A partir d’un film de genre (le film d’intérieur), Bong Joon-Ho pousse les murs pour y faire entrer différents styles et rendre son propos universel, tout en restant hyper accessible. C’est en celà que le cinéma peut traiter de thématiques universelles avec une efficacité fascinante.

Cette parabole de lutte des classes est un film à voir absolument, un film puissant sur la forme et dans le fond et une Palme d’Or qui fera enfin  l’unanimité !

La piste aux Lapins :

4,5 lapin

 

N°1 Ex aequo – « Ad Astra » de James Gray

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James Gray est l’un des très grands réalisateurs américains des 25 dernières années. Même si les européens reconnaissent davantage son talent que ses propres concitoyens, « Little odessa« , « The yards« , « La nuit nous appartient » ainsi que « Two lovers » sont très bons. « The immigrant« , avec Marion Cotillard et Joaquin Phoenix a été accueilli plus froidement mais reste un bon film. Et il est revenu avec son arlésienne de 10 ans de gestation, « The Lost City of Z » en 2017, un bijou. Et alors que ce projet devait se faire avec Brad Pitt et que ce dernier a finalement co-produit « The Lost City of Z » sans y jouer, les deux artistes se retrouvent pour un film de SF !

James gray qui sortait de ses contrées New-Yorkaises pour faire un film historique sur la recherche d’une cité en Amazonie, c’était énorme et ceci lui libérait encore plus ses thématiques autour du lien père-fils.

Mais avec Ad Astra, le réalisateur signe un nouveau chef d’œuvre de science fiction, un nouvel étalon et c’est suffisamment rare pour le noter.

Son personnage principal est joué admirablement par un Brad Pitt qui force le respect par sa filmographie très impressionnante, ses choix intelligents et son doublé de cette année avec le Quentin Tarantino, « Once upon a time in Hollywood« .

Je ne connais pas d’acteur hollywoodiens qui soit resté au top aussi longtemps et qui puisse aligner une quinzaine de très grands films.

Son jeu minimaliste donne à son personnage d’astronaute toute la rigueur de sa mission et tous les sentiments dont s’est coupé le personnage. Il s’est enfermé dans une profonde solitude que l’on ressent à chaque instant et qui donne à ses moments d’émotion une force encore plus puissante.

C’est donc l’histoire d’un homme qui part à la recherche de son père, qui est parti trente ans plus tôt dans une mission pour Neptune dont il n’est jamais revenu.

Il vit l’image de ce père qui l’a abandonné comme un exemple car il est considéré comme un héros par l’humanité et comme une souffrance car il s’est retrouvé seul. Seul au point de ne pas vouloir faire d’enfants, juste se concentrer sur son métier d’astronaute comme son père et marcher dans ses pas. Dans le genre de trauma et de symbolisme du nœud œdipien on peut difficilement trouver plus énorme. Et pourtant, ceci fonctionne car Gray n’est pas du genre pathos, il le fuit.

La grande maitrise de son scénario permet donc au film d’alterner entre grandes réflexions sur le sens d’une vie, de la solitude, tout en y insérant de vrais éléments de science fiction à grand spectacle. Pas moins de cinq scènes très impressionnantes ponctuent la quête de Roy McBride, qui cherche à rejoindre son père. Et ces scènes sont fascinantes car elles semblent réelles. James Gray use de la colorimétrie de la lune , de l’espace et de Mars puis Neptune avec des images somptueuses. Mais il use surtout d’un travail sur le son remarquable. Les scènes de violence sont comme empaquetées dans l’absence de son qu’il y a parfois dans l’espace ou l’incidence de la pesanteur. C’est non seulement novateur en SF mais ce choix narratif donne un parfait mélange entre grand film d’auteur et aventure spatiale.

Le scénario est limpide, sans délire méta comme certains films SF peuvent le tenter parfois pour le meilleur et parfois pour un résultat navrant.

La mise en scène de James Gray est d’une élégance folle, alliant l’intimiste du personnage à l’infiniment grand.

Que son personnage soit dépressif en pleine quête spirituelle est une excellente idée. La dimension vertigineuse de sa mission se confronte à sa psyché et James Gray nous le montre avec de simples images et une voix off qui ne s’avère ni plombante ni prétentieuse. Elle se confond avec le personnage et nous lie à lui vers cette plongée vers le néant dans laquelle on ne peut deviner quel sera l’épilogue.

Ce résultat est tout simplement brillant d’intelligence. Cet éloignement du monde des vivants pour renouer à ses sentiments est une superbe Odyssée.

Les plans de planètes contemplatifs concurrencent la vision épurée des intérieurs de vaisseaux. Le film est vraiment très beau d’un point de vue visuel.

Le découpage du scénario est très bon, ne laissant jamais place à des longueurs.

Le réalisateur signe un film précieux, ambitieux et d’une grande humilité. Brad Pitt est quant à lui d’une classe magnifique et trouve l’un de ses plus grands rôles.

James Gray signe un chef d’œuvre sur la quête de soi et la recherche de son identité, montrant qu’en tutoyant les étoiles, l’essentiel, à savoir l’humanité et la terre n’en deviennent que plus précieux.

La piste aux Lapins :

5 étoiles

 

 

N°1 Ex aequo – « Joker » de Todd Philips

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L’annonce du projet était curieuse puisque, initialement, Martin Scorsese devait le co-produire. En tant que lecteur assidu de comics books et de BD, je n’ai jamais compris pourquoi le génial personnage du Némésis de Batman n’avait jamais eu droit à son film. J’étais méfiant sur le résultat tant DC Comics et la Warner se sont perdus ces dernières années après la fin de la trilogie Batman de Christopher Nolan. Leur volonté de copier Marvel m’a laissée de marbre tant je trouve ces personnages colorés lisses et unidimensionnels alors que ceux de DC sont plus sombres et potentiellement profonds.

Le fait de voir Joaquin Phoenix entrer dans la danse m’avait rassuré car c’est l’un des meilleurs acteurs au monde et qu’il choisit intelligemment ses projets toujours pour leur qualité scénaristique.

Les bandes annonces avaient vendu un rêve de fan de Batman à savoir voir ENFIN le Joker exploité dans ce qui fascine sur son personnage, à savoir le chemin vers sa folie. Le Lion d’Or obtenu à Venise en septembre a fait exploser les attentes et aujourd’hui le succès au box office est incroyable pour un film aussi adulte. C’est une petite révolution pour les studios que de voir un tel Ovni rencontrer critique et public.

Car oui, « Joker » est le chef d’œuvre annoncé et oui, Joaquin Phoenix aura l’oscar du meilleur acteur. Ne pas lui accorder serait une insulte au bon goût.
Le film est un uppercut fortement inspiré de « La valse des pantins » et de « Taxi driver » de Martin Scorsese, ce qui explique l’implication du réalisateur dans la première phase de production. On y retrouve non seulement les thèmes mais aussi l’ambiance et l’acteur, Robert de Niro, dans un très bon second rôle comme on ne l’a pas vu depuis longtemps.
Quant à l’histoire, elle brasse divers thèmes en collant à Arthur Fleck, un looser à l’esprit fragile, qui n’a rien réussi dans cette société violente où les laissés pour compte voient des ultra riches leur tenir des discours complètement éloignés et perchés par rapport à leur quotidien. Cette société qui fait croire que quelqu’un parti de rien peut devenir une star de télévision, un showman et se sortir de sa condition et que quelques part tout le monde peut tenter sa chance. Mais ce discours s’accompagne d’une grande violence, celle de la réalité, celle du rêve qui se fracasse sur le mur du constat. Et Arthur Fleck n’a aucun talent comique et a tous les feux sociétaux au rouge, depuis toujours. Or cette société américaine parle des winners et raille les loosers, leur donnant accès à des armes car c’est du business mais refusant un minimum de protection sociale au nom de cette même liberté chérie mais sauvage pour les plus faibles.
Se déroule alors un film très politique par son discours et donc dérangeant par ce qu’il véhicule. Sans empathie face à lui et avec pour seule réponse le cynisme d’un ultra libéralisme sans gardes fous, quel choix a ce personnage qui sombre dans l’isolement et la folie, à part la violence et l’apologie de l’anarchie ?

Alors bien sûr Arthur Fleck a un problème psychiatrique mais le film ne met pas tout sur le compte de la maladie mentale qui s’envenime. Et c’est ce qui rend le film fascinant. Joker montre que la sédition des laissés sur le coté peut être le résultat d’un aveuglement idéologique et d’une société qui refuse de prendre du recul.

Car face aux excès de l’idéologie ultra libérale, le risque n’est il pas l’absence d’idéologie tout court ? Après les gilets jaunes et le déferlement de colère et de violence, on ne peut pas regarder ce Joker de la même façon. Et quelles que soient vos idées politiques, le film vous fera réfléchir.

Pour un film DC comics basé sur le plus grand méchant et le plus connu des comics books, c’est tout simplement un parti pris brillant et qui prend le spectateur pour un adulte responsable capable de discernement et de recul. Faire du Joker un symbole de l’absence de solution, une conséquence d’un cynisme sociétal, c’est l’idée géniale du long métrage.

Que Todd Philips, un réalisateur pas très côté, connu pour ses comédies « Very bad trip » nous réalise ce chef d’œuvre sur ce thème, c’est également une énorme surprise. Sa mise en scène est hyper découpée, sèche et sans une scène de trop. Il alterne l’évolution d’Arthur vers le Joker de cinq scènes de courses poursuites où le futur Némésis de Batman cours dans les rues ou les couloirs à toutes enjambées. D’abord c’est par peur, ensuite pour fuir ce qu’il devient puis parcequ’il enfreint de nouveau les règles et s’en émancipe, puis parcequ’il est poursuivi et trouve celà fun, et enfin parcequ’il est devenu un autre pour qui rien n’a de valeur et tout n’est que comédie. Il cours toujours comme un clown mais le rire a changé de signification et surtout, il a changé de camp…
Et puis évidemment, il y a l’acteur, ce type dont je n’aime pas la gueule et qui me bluffe à chaque fois. Ce type qui à 44 ans, a une filmographie impressionnante (Walk the line, the Master, les James Gray dont Two Lovers, Her, A beautiful day, Les frères Sisters).

Sa prestation en Joker est prodigieuse. Il danse avec une souplesse et une agilité qui font froid dans le dos tout comme son regard. Il nous amène avec lui comme spectateurs d’une conquête du rêve américain vouée à l’échec et il s’explose avec nous sur le bitume.

Entre temps il a rendu son personnage attachant et non pathétique puis effrayant car sa folie guette à tout instant.

Comme possédé par son personnage, son rire a plus des airs de cris de douleur, douleur d’être né ainsi et d’en être prisonnier.

Le spectateur accompagne ce glissement de l’autre côté de ce que la société peut tolérer, choc après choc, jusqu’à ressortir bouleversés par ce naufrage impossible à éviter du fait du déterminisme social allié à la fragilité psychiatrique. On en sort également fascinés par cette renaissance car le personnage en quête de figure paternelle et en quête d’identité finit par se la construire dans le mal absolu, dans un monde qu’il se créé plutôt que d’accepter de le subir.
Joker est un grand film car il allie le génie d’un acteur à un scénario imparable et profond ainsi qu’un personnage complexe qui ne peut que provoquer le malaise.

Ce chef d’œuvre nihiliste est tout aussi surprenant que dérangeant.
Un très grand film.

La piste aux Lapins :

5 étoiles

 

 

Et le podium pour la dixième foix sur le Blanc Lapin et nul par ailleurs :

 

2019

Les meilleurs films 2019 du Blanc Lapin : N°25 à N°12

29 décembre, 2019

Cette année 2019 se termine et le Blanc Lapin a vu plein de films, 90 très exactement sortis cette année soit au cinéma soit sur plateforme mais ayant été produits comme un film de cinéma. C’est moins que l’an dernier (103 films en 2018) et plus que les années précédentes (70 maximum).

Grosse année donc, d’autant plus que vous vous en doutez, je sélectionne beaucoup les films pour en connaitre un bon nombre depuis l’annonce du projet jusqu’à suivre les sélections en festivals et les accueils critiques.

Alors commençons le classement que je commence à partir du 25ème cette année soit minimum 4 lapins sur cinq ! Et oui, 25 films tout à faits conseillés à voir si vous les avez loupés !

 

N°25 – « Rocketman » de Dexter Fletcher

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Je me fout complètement de l’histoire d’Elton John, dont je ne suis pas particulièrement fan. Souvent je trouve les biopics ratés et encore davantage lorsqu’il s’agit de biopic sur des chanteurs. Le « Bohemian Rhapsody » commencé par Brian Singer et terminé par Dexter Fletxcher après que Singer se soit fait virer du plateau, m’a moyennement convaincu. Heureusement il y avait la musique de Queen et un bon acteur pour interpréter Freddy Mercury. Et bien justement, c’est ce même réalisateur appelé en rescousse pour terminer le film sur Queen qui s’est chargé de ce « Rocketman » !

Et vous savez quoi ? C’est très très réussi !

Il y a plusieurs raisons à cela. D’abord Elton John a collaboré en tant que producteur et n’a pas été particulièrement tendre sur son addiction à toutes les drogues possibles et inimaginables, à l’alcool, au sexe débridé des années 70/80 mais aussi à son caractère mégalo suite à son succès fulgurant.

Et cette liberté de ton est non seulement bienvenue mais elle s’exprime dès les premiers instants lorsque le film explose en comédie musicale ! JE DÉTESTE AUSSI beaucoup de comédies musicales !!!!!! Sauf si elles surprennent comme La La Land pour les dernières réussies. Et bien là, non seulement je me fout d’Elton John, je n’aime pas trop sa musique, je suis rétif aux comédies musicales, et pourtant, c’est très bon. C’est coloré, sans concessions sur le personnage et le milieu du show bizz tout comme sur les parents du chanteur, absolument flippants.

Ce qui ressort c’est une mise en scène inventive qui frôle avec le cinéma fantastique, un film généreux qui ne prend pas le spectateur pour un fan aveugle et un Taron Egerton décidément très bon et qui prouve qu’après Kingsman, on devrait le revoir souvent. Il avait besoin d’un rôle construit de la sorte pour s’émanciper de la franchise. C’est chose faite.

Et puis on sait que le film ne couvre pas tout et n’est pas fidèle, surtout avec le chanteur en producteur mais justement, on sent qu’il s’en amuse et nous envoie justement un message simple, il a galéré personnellement et a été très seul une bonne part de sa carrière. Et c’est surtout un survivant parmi les pop stars de cette époque.

Ce conte au regard cynique et tendre à la fois, bourré d’autodérision est probablement le plus beau cadeau qu’Elton John pouvait offrir à ses fans et aux autres dont moi, à savoir un film qui a LA classe et c’est énorme.

La piste aux Lapins :

4 étoiles

 

N°24 – « Edmond » de Alexis Michalik

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Décembre 1897, Paris. Edmond Rostand n’a pas encore trente ans mais déjà deux enfants et beaucoup d’angoisses. Il n’a rien écrit depuis deux ans. En désespoir de cause, il propose au grand Constant Coquelin une pièce nouvelle, une comédie héroïque, en vers, pour les fêtes.

J’ai vu toutes les les pièces d’Alexis Michalik. Ce type est brillant par ses mises en scène à tiroirs, du « Cercle des Illusionnistes » au « Porteur d’histoire« . Son « Edmond » était LE carton de fin 2017. Est-ce que son art se traduira avec la même fougue sur grands écran ?

Et bien la réponse est clairement OUI !

Alexis Michalik arrive a retrouver la même joie communicative de ses personnages et de ses enchevêtrements, en faisant voler en éclats les incongruités et passages de scènes à scènes peu réalistes. Ce n’est pas grave car il nous raconte une histoire de théâtre sur le théâtre et donne non seulement envie de lire ou relire la pièce d’Edmond Rostand mais aussi de revoir certaines adaptations célèbres comme celle avec Depardieu.

Il livre un hommage sincère aux acteurs et au plaisir de créer et d’inventer pour le spectacle. Certains personnages sont caricaturaux et proches de personnages de Georges Feydeau, dont il fait un personnage, qu’il campe lui-même à l’écran. Il se moque ainsi de lui-même, de sa propre exagération comique dans le trait de ses personnages et c’est plutôt malin et humble. Il cabotine certes mais c’est enlevé et donc çà passe.

Thomas Solivérès décroche son premier rôle d’envergure et fait oublier Les aventures de Spirou…fort heureusement pour lui. Olivier Gourmet excelle comme à son habitude et donne toute sa générosité à ce rôle d’acteur égocentrique mais au final très constructif.

Il est réjouissant de voir que Michalik ne se plante pas et arrive à donner le même souffle à son travail tant à l’écran que sur les planches.

Le film est empathique, enthousiaste, optimiste, émouvant à plusieurs reprises. Il est rare de voir des comédies élégantes au cinéma.

Il semble que le panache de Cyrano ait inspiré Alexis Michalik jusque derrière la caméra et c’est tant mieux.

La piste aux Lapins :

4 étoiles

 

N°23 – « Hors normes » de Eric Toledano, Olivier Nakache

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Eric Toledano et Olivier Nakache signent toujours des films où l’humour côtoie un dessin relativement fin d’un univers social. Ici on se rapproche davantage d’ »Intouchables« , le film étant plus engagé que « Le sens de la fête« .

Vincent Cassel et Reda Kateb incarnent Bruno et Malik , qui chacun ont monté une association pour former des jeunes des cités en difficulté à encadrer des  adolescents autistes complexes, que le système de soins public ne peut plus ou ne veut plus prendre en charge.

Forcément le thème est compliqué à développer et probablement ne fera pas l’unanimité tant le film dénonce en creux l’impuissance des pouvoirs publics, par faute de moyens notamment, à gérer des enfants autistes lourds quand ces derniers grandissent.

Le duo de réalisateurs a réussi  à faire un constat certes partial mais qui a le mérite de poser le problème, avec humour et beaucoup d’émotion. Comme toujours le pathos est évité avec une grande classe et les réalisateurs préfèrent se marrer lorsque çà coince un peu.

Le duo d’acteurs est parfait, très bien entouré d’enfants autistes et de jeunes tous au diapason. On y vit donc une immersion dans un milieu où se cumule insertion sociale de jeunes de banlieue et gestion d’adolescents forcément complexe. Ou quand deux éducateurs font prendre conscience à des adolescents en difficulté scolaire qu’ils ont de la chance et qu’ils peuvent donner aux autres et non toujours se recroqueviller sur eux-mêmes. Le message peut sembler facile mais il est délivré dans un sens positif et constructif. Car « Hors normes » ne choisit pas une description idyllique de ces deux intégrations parallèles et au contraire décrit parfois avec humour et parfois avec gravité le combat qui doit être mené pour ne pas exclure totalement ces derniers.

Comme tout film du duo, le long métrage se veut optimiste et porteur d’espoir, partant du principe qu’il ne faut rien lâcher, bouger, agir et capitaliser sur la différence.

Le courage des personnages à gagner petite victoire par petite victoire donne du baume au cœur et le sourire tout en faisant prendre conscience d’un sujet qu’on préfère cacher ou auquel on préfère ne pas s’intéresser.

Les dialogues du duo sont comme toujours très bien ciselés et d’un humanisme qui fait du bien.

« Hors nomes » fait partie de ces films utiles car il touchera un large public sur une thématique pas évidente.

Un très beau film.

La piste aux lapins :

4 étoiles

 

N°22- « Mon chien stupide » de Yvan Attal

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Yvan Attal signe un très bon film adapté du grand John Fante, écrivain unique que je ne peux que vous recommander de lire (Bandini, Demande à la poussière, Pleins de vie).

Attal joue donc Henri, écrivain qui a eu un succès il y a 25 ans puis n’a fait que de la merde. Il s’est acheté une superbe maison au bord de la mer et y vit avec son épouse et ses quatre enfants qui vivent à leurs crochets à 20 ans passés. Il n’en peut plus de les supporter et va trouver un échappatoire dans un chien idiot qu’il va recueillir.

La transposition du livre en France ne pose aucune difficulté et l’acteur réalisateur trouve un rôle sur mesure dans cet homme qui ne croit plus en rien et veut juste qu’on lui foute la paix. La description de sa famille et des conneries que déclenche son chien stupide sont souvent très drôles et d’un cynisme juste bien équilibré.

On y retrouve la noirceur de Fante et son humour grinçant, loufoque et caustique à la fois. Mais cette crise de la cinquantaine est surtout touchante. Charlotte Gainsbourg est comme à son habitude excellente de justesse et le parallèle qu’on ne peut s’empêcher de faire avec leur vrai couple à la vie, renforce les effets du long métrage.

La mélancolie du film vous attrape alors et vous cueille dans une émotion inattendue après avoir bien rigolé de cet humour froid et sec. Le rythme des saillies pourfendeuses des clichés sur la famille laisse place à un recul sur la vie et son but, sur comment et avec qui vieillir et pourquoi. S’ouvre alors une profondeur insoupçonnée au début qui laisse un goût doux amer. Un très beau film.  Intelligent et fin.

La piste aux Lapins :

4 étoiles

 

N°21 – « A couteaux tirés » de Rian Johnson

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Après s’être pris des insultes pour des générations pour son Star Wars, les derniers Jedi, le réalisateur Rian Johnson revient avec un film hyper malin inspiré de Cluedo et d’Agatha Christie.

Son casting est au top porté par un Daniel Craig à contre emploi qui parait parfois limite concon, ainsi que Chris Evans, Ana de Armas, Jamie Lee Curtis, Michael Shannon, Don Johnson, Toni Collette.

Il débute son film sur un mode classique pour ce genre d’enquête sur un meurtre dans un vieux manoir avec tous les codes du genre, titillant et installant le spectateur dans un certain confort et plaisir coupable.

Et c’est alors qu’il choisit de tordre son scénario et de dynamiter la logique habituelle, un peu comme dans son Star Wars.

Le résultat a le mérite de surprendre et souvent de faire rire. La mécanique du film évite tout doute sur l’issue de l’intrigue malgré les révélations qui semblent tout clôturer très vite.

Rian Johnson signe un super divertissement, malin et bourré de rebondissements dont l’objectif est de jouer avec les codes d’un style ultra balisé.

Une éclatante réussite jubilatoire à souhait !

La piste aux Lapins :

4 étoiles

 

N°20 – « El Reino » de Rodrigo Sorogoyen

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Je n’ai pas pu voir le film à sa sortie en avril 2019 et fort heureusement j’ai pu réparer ce visionnage.
El Reino fait en effet partie des très bons film du cru 2019.

Les premières minutes, on a du mal à savoir si l’homme qu’on suit est un mafieux ou un homme politique.

Très vite on comprend qu’il est bien un homme politique respecté et qu’il est amené à prendre des fonctions importantes au niveau national. Sauf qu’une affaire de corruption l’éclabousse et que ses petits camarades le lâchent un à un et décident d’en faire un bouc émissaire.

Une spirale infernale se met alors en route et s’accélère sans savoir jusqu’où la chute vertigineuse de cet Icare politique s’arrêtera. Cette plongée dans les marécages de la corruption est menée tambour battant, se glissant peu à peu vers un mode thriller/

Le suspens vous tient à la gorge et l’on se prend de compassion pour cet homme qui a cru tout dominer et s trouve aux abois. On est happés par la noirceur de cet effondrement et le film se transforme sous nos yeux en cauchemar comme celui que vit le protagoniste.

Un parti pris brillant pour un résultat tout aussi efficace.

La piste au Lapins :

4 étoiles

 

N°19 – « Mon inconnue » de Hugo Gélin

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Raphaël rencontre Olivia au lycée et c’est le coup de foudre. Ils emménagent ensemble et lui va connaitre le succès littéraire en devenant écrivain de science fiction ultra connu tandis qu’elle se passionne pour le piano mais sa carrière ne décolle pas. Elle se consacre à lui, qui devient de plus en plus autocentré jusqu’à devenir imblairable. Le soir où elle le quitte, il est transporté dans une dimension parallèle où Olivia est une pianiste renommée, lui est professeur de français et n’a pas connu le succès mais surtout…elle ne le connait pas et il doit la reconquérir.

 » Mon inconnue » est une formidable surprise dans le genre comédie romantique qui d’habitude est un cimetière de poncifs et clichés donnant envie de butter les tourtereaux plutôt que de sourire béatement.

Et bien François Civil et Joséphine Japy vont vous faire sourire, rire et même vous émouvoir. Le scénario est super bien ficelé et François Civil prouve une nouvelle fois qu’il va devenir la futur star française masculine. Notez le ! On en reparle dans deux ans. Il joue bien, il a une belle gueule et il est drôle. Face à lui Joséphine Japy assure grave et je suis content de découvrir ce nouveau talent. Mais surtout, pour compléter ce casting, il y a le référent, le tuteur qui fait office de centre de gravité du scénario et lui permet de rester les pieds sur terre. Ce tuteur c’est Benjamin Lavernhe (le mari dans « Le sens de la fête« ) et il est prodigieux !

Il vous fait éclater de rire à bien des reprises et vous cueille dans la minute qui suit en étant super émouvant. Vraiment le casting est excellent et donne au tout une dynamique très réussie. Leur spontanéité fait plaisir et les rend attachants.

Et puis bien sûr il faut saluer le travail d’Hugo Gélin qui dirige parfaitement ses comédiens et nous livre une image léchée, ce qui là aussi n’est pas une évidence quand on parle comédie française.

Cette comédie aborde au final des sujets universels comme le sacrifice d’un conjoint pour la carrière de l’autre, la distance que les années peuvent créer à cause de l’investissement dans le travail ou une passion, les petits rien qui font basculer une vie.

« Mon inconnue » est un film qui a du charme et une fantaisie salvatrice. Une très grande réussite.

La piste aux Lapins :

4 étoiles

 

N°18 – « Le Chant du loup » de Antonin Baudry

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L’auteur de la Bd « Quai d’Orsay » passe donc à la réalisation pour un projet très original dans le paysage cinématographique français.

Il s’attaque en effet au film de genre, de sous-marin et a eu accès à des lieux de tournage exceptionnels de l’armée française.

Porté par un casting excellent, Antonin Baudry arrive à créer une crédibilité et une rigueur immédiate au climax de son film.

Le suspens est réel et monte crescendo sans virer jamais à du déjà vu et il est clair qu’il faut faire preuve d’un certain sens du rythme pour intéresser votre blanc lapin serviteur qui s’est mangé des centaines de films à suspens et qui est plutôt rétif au film de sous-marin justement.

François Civil est parfait en premier rôle et prouve que le cinéma français va pouvoir compter sur lui dans les années à venir pour la relève. Mathieu Kassovitz est une nouvelle fois excellent avec son visage émacié et son rôle est vraiment intéressant, écartelé entre la bienveillance et le poids de la charge de responsabilité qui pèse sur lui. Reda Kateb incarne un rôle surprenant pour lui et Omar Sy est sobre et çà lui va très bien.

Ce drame géopolitique est donc d’une grande intelligence et permet de comprendre de façon vulgarisée la mécanique millimétrée de ces sous-marins de combat nucléaires.

La psychologie des personnages est soignée, le son est très bien utilisé pour faire toucher du doigt tous les enjeux. La dramaturgie du film surprend.

« Le Chant du loup » est donc un ambitieux pari, totalement relevé et ceci fait du bien au cinéma français.

La piste aux Lapins :

4 étoiles

 

N°17 – « J’accuse » de Roman Polanski

J'accuse : Affiche

Voici enfin le film sur l’affaire Deyfus que Roman Polanski tente de réaliser depuis une dizaine d’années. Sa thématique retentit selon lui avec sa propre histoire et ce qu’il estime comme un harcèlement à son encontre. Loin de vouloir polémiquer sur ce sujet, n’étant ni juge moral ni  partisan d’une différentiation totale et aveugle entre la vie d’un auteur et son œuvre, je ne saurais que vous renvoyer vers cet excellent article publié sur Ecran Noir, qui résume bien le dilemme et les réactions possibles à avoir : voir ou ne pas voir J’accuse.

Polanski signe un grand film en s’intéressant aux dessous de cette célèbre affaire qui bâtit et triât certaines idéologies à la gauche de l’échiquier politique français pour le siècle suivant. L’antisémitisme latent et pas du tout caché présent dans l’armée, l’appareil d’Etat et le peuple est alors très virulent.

Le maitre choisit de raconter l’enquête de l’intérieur menée parle colonel Picqart, interprété sobrement par Jean Dujardin. Cette figure du héros moralement droit sans ses botes impose le respect par son courage et la machine  qu’il a dû affronter pour ses valeurs et l’idée de l’Etat qu’il se faisait lui-même.

Le réalisateur nous livre un film historique à suspens, très bien découpé et réalisé avec rigueur et âpreté.

Les évènements qui ont jalonné l’affaire Dreyfus sont incroyables et Polanski en tire tout l’aspect cinégénique évident, dans une ambiance paranoïaque fidèle à l’ensemble de sa filmographie.

Le casting est impressionnant et au service de cette grande histoire nationale.

A 85 ans, Roman Polanski réalise de nouveau un grand film soigné là où on pensait l’avoir perdu sur ses dernières tentatives.

La piste aux Lapins :

4 étoiles

 

N°16 – « Une vie cachée » de Terrence Malick

Une vie cachée : Affiche

Terrence Malick est un immense réalisateur. A chaque fois que j’en parle au sein d’un groupe, je trouve minimum une personne pour me dire que c’est trop chiant, trop contemplatif, que « La Ligne rouge » c’est complètement perché, que « Le Nouveau Monde » on s’ennuie ou que « Tree Of life » oh oui, la scène avec le diplodocus…je l’ai bien entendu 20 fois celle là…

Que dire ? Que dire sans passer pour un snob ? Malick a signé deux chefs d’oeuvre au début de sa carrière avec La Balade sauvage et Les Moissons du ciel en 1978. Il faudra attendre 20 ans d’absence où personne ne savait ce qu’il était devenu pour qu’il sorte cette fameuse « Ligne rouge » qui fascine de nombreuses personnes et en exclue d’autres. Tout simplement parceque c’est un cinéaste de la nature et du temps et que le temps il le prend, ainsi que les silences. Les mêmes reproches sont faits au superbe « Le Nouveau monde » qui suivit. Sa palme d’Or « Tree of life » est pour moi son point d’apothéose et de rupture. Il abandonne certains critères formels ainsi que les dialogues pour entrer dans la tête des personnages et de ce qu’ils pensent et se libérer de la parole. C’est un parti pris radical qui a lâché une bonne partie des personnes ayant vu les deux films précèdent et je comprend la difficulté d’être patient dans le monde de zapping et d’immédiateté d’aujourd’hui. Mais cette patience est le prix d’une certaine délicatesse du propos.

Je trouve ceci juste dommage que cela se fasse au détriment de la possibilité de rester éveillé, ouvert à la mise en place d’un univers cinématographique par son auteur. Ce manque de patience du public tue la capacité à être contemplatif et à se poser. Les trois films suivants furent il est vrai carrément perchés voir ennuyeux car poussé à l’extrême, Malick sortait totalement d’un cadre narratif.

Avec ce très beau « Une vie cachée » , Malick trouve un bel équilibre entre sa période anté et post Tree of life. Il retrouve une narration facile à suivre et des dialogues sans abandonner l’introspection des personnages. Le seul écueil de son film est sa longueur. 2h50 ce n’est pas ennuyeux, c’est juste qu’il aurait pu couper une heure et il aurait réalisé un chef d’oeuvre à la hauteur des films précédemment cités.

Malick s’inspire de faits réels pour nous présenter le combat d’un héros, d’un vrai, Franz Jägerstätter, paysan autrichien, qui refusa d’intégrer l’armée nazie. Le réalisateur trouve son Christ, son personnage qui manquait à ses précédents longs métrages et qui donne une force incroyable à son récit ou plutôt à son chemin vers sa foi et son choix. Le personnage est d’une grandeur, d’une noblesse et d’un courage qui vous fait pleurer, pour de vrai. Car au milieu du chaos, alors que l’être humain est lâche et se fond très vite dans le pire régime et les pires infamies sans penser même à résister, lui se dresse simplement contre ce qui lui parait être contre la nature, contre-nature.

Cette morale chrétienne peut gonfler les non croyants mais ici elle est d’une beauté vraiment touchante. La simplicité de sa vie familiale et de son bonheur quotidien, pourtant de dur labeur est l’alpha et l’omega de son existence. Malick filme cette mère nature à nouveau avec des plans prodigieux et arrive à lier ses personnages à leur morale par ce biais, avec une sincérité et une évidence qui désarçonnent. Mais il filme aussi l’inhumain, la bête sale et haineuse, la peur et la brutalité avec nous comme témoins effondrés de tant de beauté et tant d’horreur dans une même espèce.

Ce chemin spirituel se révèle malgré sa durée, que l’on oublie sorti du film, tant l’impact est profond.

« Une vie cachée«   est un très grand film pacifiste dont l’impact dure longtemps après la projection.

La piste aux Lapins :

4 étoiles

 

N°15- « Brooklyn Affairs » d’Edward Norton

Brooklyn Affairs : Affiche

Edward Norton est un excellent acteur très connu des quarantenaires et plus puisqu’il a explosé il y a 20 ans avec Fight Club et American History X. S’en sont suivis 10 ans de carrière plutôt riches avec pas mal de bon rôles avant qu’il ne tente l’aventure Marvel et se plante dans le second Hulk, avant que la firme ne fasse des milliards avec sa nouvelle stratégie. Est-ce la raison pour laquelle il s’est fait si rare ou juste qu’on l’a de moins en moins appelé. En tout cas comme de nombreux brillants acteurs, il y a eu un creux de 10 ans avec trois apparitions géniales en second rôle chez Wes Anderson (Moonrise Kingdom et The grand Budapest Hotel) ou chez Inarritu (Birdman).

Quelle grand classe pour cet homme, à défaut d’avoir de bon premiers rôles proposés que de s’en créer un aussi touchant pour sa seconde réalisation, particulièrement réussie.

« Brooklyn Affairs« est certes de facture très classique et rend hommage aux polars noirs avec un académisme assumé. Mais son scénario est vraiment intelligent et ses personnages bien trouvés et bien castés de Alec Baldwin en magnat de l’urbanisation de New York (personnage réel d’ailleurs) à Willem Dafoe en idéaliste au mystérieux passé et toute une galerie de seconds rôles excellents. La bande-son jazzy berce et imprègne le film.

Mais là où le film brille c’est par sa thématique de l’acceptation de la différence, la couleur de peau ou le syndrome Gilles de la Tourette qu’a le personnage principal. On y accompagne des losers magnifiques qui croient en une morale et se battent contre plus forts qu’eux. Le film se veut réaliste et pragmatique. L’existence des personnages est broyée par un système plus puissant, sans pour autant verser dans le glauque, ou la facilité de dénonciations béates et naïves des dérives d’un pouvoir. Au contraire, on y voit un prisme final surprenant. Il fait preuve d’une belle nuance de tons.

Edward Norton est un acteur de grande finesse et un réalisateur très élégant. Une des très belles surprises de cette fin d’année.

La piste aux Lapins :

4 étoiles

 

N°14 – « The Irishman » de Martin Scorsese

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Voici donc LE film, l’évènement de fin d’année à savoir un vrai film de cinéma du maitre Martin Scorsese qui sort sur Netflix et exclusivement sur Netflix. La plateforme aurait déboursé environ 150 M de dollars pour réunir Robert de Niro et Martin Scorsese 24 ans après Casino, leur dernière collaboration ensemble.

Mais le budget a explosé par le rajeunissement numérique de plusieurs acteurs. Si on sent bien que la technique n’est pas au point pour rajeunir de façon crédible des acteurs jusqu’à de jeunes âges, elle fonctionne pour ce rajeunissement limité à un âge d’environ 4o ans.  C’est certes perfectibles mais très honnêtement, l’artifice ne gène pas le visionnage.

Au delà de cette prouesse, Martin Scorsese renoue avec l’un de ses genres majeurs, le film de mafieux et retrouve également Harvey Keitel et Joe Pesci. Ce dernier surprend par son rôle calme de vieux parrain loin des excités qu’il a joués dans Casino et Les Affranchis. Il est excellent et rendons grâce à de Niro d’avoir convaincu son copain de revenir faire un dernier tour de piste. Pour notre plus grand plaisir de cinéphile, De Niro retrouve un rôle en or de tueur à gage pour la mafia qui va gravir les échelons. Son personnage est à la fois un exécutant qui ne se laisse pas dévier sentimentalement mais aussi un père raté et un homme qui s’attache à Jimmy Hoffa, le patron des syndicats. Pour l’incarner, un autre monstre sacré joue pour la première fois de sa carrière pour Martin Scorsese. Le concurrent et ami de de Niro débarque donc et Al Pacino nous livre, à 79 ans, une immense prestation, celle d’un homme bulldozer que jamais personne n’a arrêté et qui s’aveugle dans son passé tout puissant.

L’élégance crépusculaire de ce 25ème long métrage de Scorsese est envoutante. Et pourtant le film dure 3h29 ! Alors certes, il aurait pu faire plus court mais sincèrement jamais l’ennui ne pointe tant Scorsese tient son film, ses acteurs et son histoire. Et puis le maitre nous dit adieu, non à son cinéma car on espère qu’à 77 ans, il a encore une dizaine d’années devant lui pour livrer quelques autres bon films. Mais il dit adieu à un genre de films qu’il a modernisé et popularisé et à qui il a livré plusieurs chefs d’œuvres, Mean Streets, Les Affranchis ou Casino.

On parle de film testament parfois, là effectivement, ceci y ressemble furieusement et la bande de potes qui a conquis Hollywood nous livre une sortie très classieuse.

Si le film n’est pas pour autant un sommet de la filmographie du maitre, notamment pour sa fin quelques peu alambiquée ou parfois sa durée, on gardera The Irishman comme un de ses très bons films, dont les personnages marquent de leur singularité., avec un talent de mise en scène toujours au sommet.

La piste aux Lapins :

4 étoiles

 

N°13- « Les invisibles » de Louis-Julien Petit

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Le Blanc Lapin profite du mois d’août pour rattraper quelques oublis. On commence par « Les invisibles » de Louis-Julien Petit, sorti en janvier 2019.

Suite à une décision municipale, l’Envol, centre d’accueil pour femmes SDF, va fermer. Il ne reste plus que trois mois aux travailleuses sociales pour réinsérer coûte que coûte les femmes dont elles s’occupent : falsifications, pistons, mensonges… Désormais, tout est permis !

Voici un feel good movie excellent sur un thème rarement abordé, celui du traitement des femmes SDF. Les actrices non professionnelles et professionnelles (Audrey Lamy, Corinne Masiero, Noémie Lvovsky) sont fabuleuses dans cette tragi-comédie que Ken Loach aurait très bien pu signer à sa grande époque.

Louis-Julien Petit choisit de rester léger et de ne pas plomber son sujet en donnant de l’espoir sans pour autant être aveugle sur la situation désespérée de ces femmes pour qui la vie s’est brisée. Il donne aussi toutes ses lettres de noblesse aux femmes qui se dévouent corps et âmes dans ce centre d’accueil pour réinsérer leurs protégées.

Le film est très drôle à plein de moment par un sens des répliques hyper bien écrit et joué. La simplicité du jeu et des rires alternent avec quelques bons moments sans aucun pathos.

C’est un très bel hommage aux travailleurs sociaux qui donnent de leurs temps ou acceptent des boulots mal payés pour aider les exclus, sans aucun moralisme ou discours plombant.

Une excellente réussite de cette année cinéma 2019.

La piste aux Lapins :

4 étoiles

 

N°12 – « Adults in the Room » de Constantin Costa Gavras

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Qui de mieux que le réalisateur grec culte pour s’attaquer à un tel sujet politique ? Depuis « Le couperet » en 2005, le réalisateur de « Compartiment tueurs« , « Z« , « L’Aveu« , « Etat de Siège« , « Section spéciale« , « Missing« ou « Amen » avait plutôt perdu de son inspiration. Il faut croire que ce que le diktat financier a fait subir à son peuple a réveillé le vieux maitre, âgé de 86 ans, et livrant son meilleur film depuis 40 ans !

Le pich : Après 7 années de crise le pays est au bord du gouffre. Des élections, un souffle nouveau et deux hommes qui vont incarner l’espoir de sauver leur pays de l’emprise qu’il subit. Nommé par Alexis, Yanis va mener un combat sans merci dans les coulisses occultes et entre les portes closes du pouvoir européen. Là où l’arbitraire de l’austérité imposée prime sur l’humanité et la compassion.

Il fallait oser raconter une histoire de négociation de dette et de relations avec la bureaucratie européenne. C’est non seulement complexe d’intéresser le spectateur mais surtout casse gueule d’en tirer des traits dramaturgiques et des enjeux suffisamment clairs.

Yanis Varoufakis, célèbre ministre des finances et héros du film est interprété brillamment par Christos Loulis tandis que Alexandros Bourdoumis joue un Alexis Tzipras empli de doutes et de convictions de façon tout aussi convaincante.

Costa Gavras nous parle d’hommes sincères politiquement et mandatés par leur peuple, qui se confrontent à la brutalité de fonctionnaires européens obtus mais aussi de politiques dont le ministre des finances allemand, qui ne croient qu’à une seule doctrine et sont totalement sourds à tout dialogue. Il y montre un courage politique de David contre Goliath, d’individus d’extrême gauche au départ qui tentent de trouver des compromis face à la réalité mais n’arrivent pas à trouver la moindre envie d’échange de la part d’une Europe unie et inflexible.

Les conséquences sociales pour le quotidien des grecs est alors le dernier souci des « partenaires » européens qui vont traiter leurs homologues avec déférence, mépris, suffisance et colonialisme. On peut en effet s’émouvoir du n’importe quoi et des mensonges des politiques grecs durant des décennies. Mais rester sourd à la souffrance des individus pour de sacro saintes règles financières vire à l’absurde, surtout lorsque le ministre Varoufakis apporte des débuts de plans pour s’en sortir, rééchelonner la dette et faire repartir le pays. Le cercle vicieux d’étouffement du pays est très bien expliqué tout comme le caractère vautour de prêteurs tirant sur un ambulance en prêtent à des taux usuraires à un pays en plein naufrage. On y voit également comment des fonctionnaires de grandes instances exigent que le pays brade ses aéroports et autres entreprises à de vils prix.

Le cauchemar de l’hypocrisie et de la manipulation politique puis du lynchage médiatique font froid dans le dos.

On peut certes ne pas être d’accord avec la vision partisane du réalisateur mais on peut difficilement ne pas trouver dangereux le poids de certains individus européens zélés sur les choix démocratiques. Pourtant très pro européen, je ne peux que constater l’impact de cette suffisance et cette certitude d’avoir raison face à des politiques publiques qui ne fonctionnent pas toujours et la montée des extrêmes. Costa Gavras nous montre une Europe qui s’éloigne des peuples et refuse d’évoluer, de se remettre un tout petit peu en question et même de dialoguer, au nom de dogmes qui n’ont pas fait leurs preuves.

Ce récit palpitant et éminemment politique est à la fois drôle, courageux et d’une grande pédagogie.

Merci Costa Gavras de poursuivre votre enragement à votre âge vénérable et j’attends de pied ferme votre prochain film.

La piste Lapin :

4 étoiles

 

Et la suite arrive ….

 

 

 

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