Archive pour la catégorie 'Les meilleurs films du Blanc Lapin'

Les pires films du Blanc Lapin 2014 !

7 décembre, 2014

Mauvais

Pour la sixième année consécutive, voici le pire du pire des films vus par le blanc lapin en 2014 !

Alors oui, j’avoue, ce classement ratisse moins large que celui des meilleurs films, qui suivra la semaine prochaine. Votre blanc lapin dévoué hésite en effet à voir les sagas pour ados, certains films de supers héros aux critiques catastrophiques et certains ratages avérés…Dès lors ces films ne sont certainement pas les pires mais disons qu’ils m’ont soit bien déçu soit bien gonflé !

Commençons par les singes !

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N°7 – « La Planète des singes : l’affrontement » de Matt Reeves

Il y’a trois ans, le reboot de la célèbre série « La planète des singes » par Rupert Wyatt avait surpris tout le monde. En effet, si le film original de 1969 avec Charlton Heston est et reste uun chef d’oeuvre, les suites demeurent de piètre qualité et la tentative de Tim Burton fut un four artistique en 2000. Mais là, l’utilisation de la performance capture donnait une nouvelle dimension à l’histoire et l’avancée technologique s’avérait être un véritable atout, allié à un très bon scénario.

Ce qui fit donc le succès de ce blockbuster pourtant craint se retrouve en partie seulement dans cette suite réalisée par le metteur en scène du film de monstres « Cloverfield« .

Le décalage et les progrès techniques sont visibles et sautent aux yeux dès le début. La finesse des poils, la fluidité des mouvements sont bluffants. Andy Serkis, qui est devenu mondialement célèbre pour ses rôles de Gollum, King Kong ou Capitaine Haddock, est LA star de ce film et son incarnation de César montre au monde entier qu’il s’agit bien de jeu au sens le plus noble. C’est seulement qu’il a compris avant tout le monde l’étendue de la pallette d’acteur qui s’ouvrait grâce à cette technologie où l’acteur s’efface derrière le personnage et son apparence physique pour mieux l’habiter. Serkis a par ailleurs monté sa boite de production d’effets spéciaux et non seulement assure le travail créatif sur les singes avec ses équipes mais revend aujourdh’ui ses prestations aux blockbusters dans lesquels il tourne, y compris Star Wars VII. Malin comme un singe…

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Passée cette indéniable réussite, que nous raconte le film ? Quelques années après que le virus ait décimé une très grande majorité de la population humaine, les rescapés tentent de se reconstruire. Exit James Franco et place à un casting dont seul Gary Oldman est connu. Jason Clarke assure le lead, lui qu’on a découvert dans de nombreux films ses dernières années dont « Zero dark Thirty« , « Des hommes sans loi », et que sera du cinquième Terminator en 2015. Il fait le job.

Les singes se sont créé une mini société autour de leur charismatique leader, César et detestent tout comme craignent les hommes, leurs anciens maitres. Certains n’ont gardé que la cruauté de leurs maitres en tête tansis que César est plus tempéré.

L’affontement n’est pas loin et l’équilibre serta difficile à maintenir. Le contexte est donc toujours basé sur des rapports sociaux entre dominants et dominés, classe sociale auparavant surpuissante et exploitatrice et asservis qui découvrent la liberté, l’indépendance et le droit à l’égalité. C’est tout ce qui fait le charme et l’intérêt de cette SF très ancrée dans la mode des seventies. Matt Reeves est doué dans sa réalisation, et se débrouille pour rester fluide dans des scènes de combat complexes à gérer.

Mais voilà, il manque l’autre ingrédient du précédent film, à savoir un scénario original. Le film est manichéen, avec ses bons… très bons et ses gentils…très gentils, des deux côtés. Aucune finesse n’est laissée à part celle de César. Le propos ne vole pas très haut et surtout on s’y attend. On s’attend à l’évolution de chaque personnage. Les clichés sont assez nombreux et seule la technologie arrive à vous scotcher au fauteuil, ce qui est déjà pas mal, mais est ce suffisant ?

Certes Matt Reeves passe de scènes intimistes à des scènes de conflits armés avec aisance mais encore une fois ce n’est pas tant lui qui est responsable de cette impression amère mais plutôt les scénaristes, qui ne se sont pas franchement cassés pour trouver une quelconque originalité ou angle de récit qui surprenne un peu le spectateur. Les métaphores sont lourdes, simplistes, et les héros humains un peu trop clean pour déclencher un quelconque attachement à leurs fadasses problèmes existentiels.

C’est dommage. Espérons que Matt Reeves aura davantage la main sur l’écriture du troisième volet.

 

zero_theorem_fr dans Films - critiques perso

N°6 – « The Zero Theorem » de Terry Gilliam

Celles et ceux qui me connaissent ou sont passés régulièrement par ici savent que Terry Gilliam est mon réalisateur préféré, que ce que j’ai dans la tête est très proche des délires qu’il est capable de nous livrer..ceux là même me disent toujours que je ne suis pas objectif, que ma critique sera forcément biaisée, d’autant plus que Terry a un mal fou à monter ses films et trouver les budgets, son Don Quichotte étant l’une des plus grandes arlésiennes du septième art, auquel je crois encore, car les rêves font avancer.

« The Zero Theorem » est un projet que je connais bien, pour l’avoir suivi depuis sa première évocation en 2009 lorsqu’un professeur d’anglais de l’Université de Floride, Pat Rushin, envoya son scénario à Terry Gilliam…qui commença le tournage seulement fin 2012, suite à l’échec d’une énième tentative de Don Quichotte.

Le film réunit un casting pas forcément all stars mais porté par un Christoph Waltz (Inglorious Basterds, Django Unchained) et une Mélanie Thierry inspirés. Il revient surtout à la dystopie qui fut le succès de Gilliam et son chef d’oeuvre le plus évident, Brazil.

Le-Theoreme-Zero2 dans Films series - News de tournage

On y suit Qohen Leth, génie de l’informatique vivant dans un futur proche dirigé par un certain Management, où tout est controlé et surveillé dans une apparente féérie du consumérisme. Les gens ont l’air heureux et évoluent dans un univers coloré où les publicités murales ou les boites à Pizza vous parlent. En ce sens le film se veut différent de Brazil car livrant une image moins sombre mais tout aussi désespérée du futur. Qohen Leth attend un coup de fil quasi divin qui lui donnera un sens à sa vie et se voit chargé de découvrir le secret du Théorèm Zéro par Management, sorte de Big Brother de ce 1984 version 2010.

Le premier reproche fait au film par certaines critiques, est justement de livrer un imaginaire daté et très eighties comme si Gilliam n’avait pas évolué depuis Brazil. La critique est idiote et provient d’une presse n’ayant aucun recul par rapport à l’oeuvre de l’ex Monty Python. Gilliam choisit volotairement ce futur old school, ce qui est la définition même de la dystopie, faite d’élèments futuristes mixés à des élèments du passé. Quand on n’aime pas la SF ou qu’on n’a pas lu Philip K. Dick, il est parfois conseillé de moins la ramener avant de faire ce genre de commentaires à coté de la plaque.

Non, pour ma part, le problème du film de Gilliam n’est ni la direction d’acteurs, excellente, ni la photo ou l’univers volontairement criard et bourré comme d’habitude d’imaginaire débordant. Le film ressemble à du Gilliam mais justement, avec tous les défauts du maitre.

Le principal écueil se trouve hélas dans le côté brouillon du film, dû pour une part à un scénario manquant de contenu, de relief et de sens là où l’anticipation fait en général passer des messages. Or ici, le sous-texte semble peu original et rescussé par rapport à l’historique du genre et par rapport à Brazil, auquel le film ne peut forcément qu’être comparé. Le manque d’intérêt du fond fait beaucoup de mal au propos. Par ailleurs « The Zero Théorem » patine sérieusement dans la semoule durant ses 20 premières minutes qui ont un mal fou à décoller. Or quand l’univers ne vous hape pas d’entrée, il est diffiile de rattraper la suite, surtout avec un personnage froid et peu empathique comme celui du personnage de Christoph Waltz.

Le second écueil tient en revanche à Terry Gilliam himself, dont le choix de montage m’a semblé pas toujours des plus opportuns. De son propre aveux, il a coupé le début et la fin de certaines scènes afin de provoquer davantage de rythme. Si l’effet est effectivement réussi, il provoque parfois une certaine rapidité dans l’évolution des personnages et ajoute plus au côté grand bordel qu’à la fluidité de l’histoire. L’aspect anarchique du récit chez Gilliam a toujours été critiqué et source de son style. Mais ici, combiné à cette impression de rescussée de Brazil en moins bien et sans aucun message fort, le bordel donne au film un goût amère.

On y voit tout le talent d’un grand monsieur du septième art, au profit d’un petit film au script trop light, qu’il essaie de rendre intéressant par la performance d’acteur et son talent de cinéaste.

Sauf que la sauce ne prend hélas pas et que si le film reste regardable et pas désagréable, pour ceux qui ont adoré Brazil, L’armée des 12 singes ou Las Vegas Parano, il sonnera plus comme le douloureux constat d’un réalisateur contraint de signer des projets mineurs, plutôt que d’avoir accès à des projets de son calibre. Le film s’avère donc frustrant car il n’est pas mauvais, il est juste sous-dimensionné, et vire parfois à la caricature d’un film de Gilliam. Il est extraordinaire de voir ce que Gilliam a fait d’un script et d’un budget si modestes , avec moins de 10 M$, livrant un film qui aurait pu en coûter le double.

J’ai mal au coeur de critiquer si sévèrement mon Terry adoré, mais objectivement son film est râté et s’avère un film mineur dans sa filmographie. Ce qui m’énerve en revanche, c’est la horde de critiques flinguant toute l’oeuvre de Terry Gilliam sous prétexte qu’il n’est pas à son plus haut et que ses derniers films furent des fours au box office, mis à part L’imaginarium du Docteur Parnassus, qui rentra amplement dans ses frais. Ces gens n’ont aucune tolérance et reconnaissance pour la bataille que livre chaque jour Gilliam pour rester libre des studios et restituer sa vision non déformée de son cinéma. Par ailleurs, ses deux précédents films,  « Tideland » et « L’imaginarium du Docteur Parnassus » verront probablement leur côte remonter tant ces deux oeuvres mal aimées recèlent une profondeur bien plus sombre et passionnante que ce que ces critiques faciles ont retenues. Ce ne sera hélas pas le cas de « The Zero Théorem ». J’espère que Terry Gilliam réussira enfin en 2015 à monter son « The Man who Killed Don Quixote » avec John Hurt et que son scénario sera à la hauteur du film tant espéré. J’aimerais que Terry arrive à tordre le cou à cette presse injustement violente et amnésique.

Si « The Zero Theorem » n’a pas le panache et la complexité de ses oeuvres les plus illustres, il reste un film plus riche et intelligent que nombre de productions de SF actuelles…pour moi ce n’est pas assez car je suis fan et exigeant…pour vous, peut être serez vous cueillis par tant d’ingéniosité…

 

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N°5 – « Noé » de Darren Aronofsky

J’adore le travail de Darren Aronofsky, de « Requiem for a dream » à « Black Swan« , en passant par « The Wrestler » et l’incompris et poétique « The fountain« .
Avec cette fresque autour du déluge et du personnage de Noé, l’athée Aronofsky réalise un rêve d’enfant, lorsque vers 13 ans il écrivait le premier jet du scenario.
Il passe aussi à la barre d’un énorme blockbuster de 120 M$, qui, au vu des premiers chiffres du box office, ne sera pas rentable sur le territoire américain mais bien plus confortable à l’international.

Alors que penser de cet énorme film?

Et bien tout d’abord, Darren Aronofsky prouve qu’il maîtrise son arche et que les effets spéciaux et sa façon si particulière de conter de façon parfois très épurée, sont au rendez vous.

L’autre constat évident est qu’il a eu deux idées phares plutôt inspirées.

Tout d’abord il opte pour l’inclusion de surnaturel et tourne une version heroic fantasy de la bible, pas du tout réaliste mais bon ce n’est pas un bouquin d’histoire. Certes, l’aspect fable de l’ensemble a pu gêner des catholiques intégristes mais pourtant le récit reste très fidèle à l’ancien testament. En une scène, il nous raconte la genèse et tente de la faire coller à la théorie de l’évolution en rappelant justement que le texte n’est que métaphore.

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Ensuite, il fait de Noé un intégriste, justement, qui, sincère tout au long de l’histoire dans sa foi et sa mission, va devenir peu à peu un antagoniste alors même qu’il était censé être le guide, le sage. Un choix intéressant qui pointe du doigt les excès de la religion même lorsque leur point d’origine est pur.

Et puis bien sur, Noé reste une fable écologique faisant de l’homme le cancer de notre planète. Mais pour le coup, la naÏveté de l’ensemble, que l’on retrouvait déjà dans « the fountain« , manque cette fois ci de poésie. Ou tout du moins, elle ne m’a pas touchée là où la symbolique pompière de « The fountain » m’avait emporté malgré tout.

C’est vrai qu’Aronofsky est généreux et talentueux mais la question qui me trottait dans la tête en sortant de la projection était « pourquoi ? » « Pourquoi tout cet investissement pour livrer un film au message finalement assez simpliste et banal ?« .

Car oui, si Noé ne m’a pas ennuyé, il ne m a pas surpris non plus, je m’attendais à tout ce qui se déroulait à l’écran. Le message est bateau pour faire un jeu de mot facile. Mais le film, si il a dû être complexe techniquement à réaliser, reste un objet pour lequel l’empathie est difficile à développer. Les personnages sont trop archétypaux, l’enjeu dramatique est inexistant puisqu’on connait la fin, le message est trop 1er degré voire un peu concon.

Bref, ce Noé est une semi déception car je craignais déja un film pudding indigeste. Au final la fluidité de la réalisation d’Aronofsky permet au déluge de ne pas faire sombrer son film dans le ridicule mais ne lui permet pas non plus de livrer un opus digne de son talent. Le sujet Darren, le sujet ! C est bien d’avoir des rêves de cinéma quand on est enfant…mais après les opus passés, c’est un peu léger…

 

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N°4 – « Black Coal » de Diao Yi’nan

Pas de critique mais un long et profond ennui…

 

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N°3 – « Enemy » de Denis Villeneuve

Denis Villeneuve avait impressionné les critiques et reçu un oscar du meilleur film étranger avec « Incendies« .

Puis l’an dernier, il changeait de style avec l’excellent thriller « Prisoners« . Cette filmo de cinéphile talentueux, sachant utiliser ses références avec brio, ne pouvait que nous exciter avec son troisième film, ou plutôt second puisqu’en réalité il fut tourné avant et présenté à Toronto en 2012. La presse était excellente sur « Enemy », film dans lequel Villeneuve retrouve le caméléon Jake Gyllenhaal, dans le rôle d’un professeur de fac, à la vie paisible, qui va se trouver confronté à son double.

Je n’aurais qu’un avertissement à vous donner… »méfiez vous des critiques ! » …sauf de celles du Blanc Lapin bien sûr…

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Le traitement que choisit Villeneuve de son sujet est radicalement différent de ses précédents films, rythmés dans leur mise en scène. Ce dernier instaure davantage une ambiance, une impression d’irréalisme des situations, comme si le personnage était claustrophobe et que le spectateur devait douter en permanence sur ce qui relève du réel ou de la projection. Si j’ai bien compris le but de cette mise en abymes et de ce rythme particulièrement lent, je me suis hélas ennuyé à plusieurs reprises, ce qui ne devait pas être l’objectif initial.

Disons que le film fait attendre un rebondissement, une chute et que lorsque cette dernière intervient, elle peut tout simplezment vous laisser sur le bas côté de la route et vous frustrer méchamment.

Le long métrage n’est en effet pas aimable, il est stressant et avec trop peu d’aspérités pour comprendre là où il veut nous amener. Or le problème, c’est que la clé du film est tout aussi nébuleuse. J’ai pensé à certains films des années 80 comme le « Possession » de Żuławski, soit un cinéma hermétique et chargé de symboles. Sauf que les symboles, par leur manque d’évidence et le trop peu dit, ont l’incroyable capacité d’agacer une partie des spectateurs, en les livrant à un énorme point d’interrogation. Ici bien entendu, l’intérieur de la psyché des protagonistes est représentée. Mais comme aucune frontière n’est dressée entre le dedans et le dehors, il faut s’accrocher pour comprendre le sens.

Personnellement, je préfère une vision plus imagée. Dans le domaine du dédoublement, l’excellent et récent « The double » de Richard Ayoade avec Jesse Eisenberg, m’a davantage convaincu de part sa forme et ses choix stylistiques. Mes préférences culturelles pour Terry Gilliam et les univers Kafkaïens expliquent probablement cette appétence pour avoir moins de subjectif dans le récit.

C’est dommage car la prestation de Jake Gyllenhaal est très bonne, l’ambition du film est là mais voilà, je n’ai juste pas accroché aux choix. Et le fait de devoir réfléchir hyper longtemps pour ne serait que comprendre ce que Denis Villeneuve voulait nous raconter, m’a tout simplement gonflé. Une fois compris, je reconnais que le film a des qualités indéniables mais son aspect volontairement élitiste et opaque m’a laissé de marbre. L’étrangeté comme réponse m’agace, l’ellipse également. Fermer toutes les portes et ne refiler aucune clé au spectateur n’est pas très « wellcome » comme attitude. Et j’ai été déçu de la part de Denis Villeneuve, que je pensais plus généreux. On ne fait pas toujours du cinéma pour un très large public mais c’est bien de penser aux spectateurs de temps en temps.

Et puis surtout, lorsque j’ai trouvé l’explication bien plus tard, le concept m’avait déjà exclu depuis longtemps d’un plaisir de cinéphile. Le film ne m’a pas envouté, pas subjugué, juste énervé, d’autant plus lorsque j’ai compris que le scénario tenait sur un ticket de métro. Et puis la mise en scène se prend trop au sérieux, beaucoup trop. Un film tour à tour frustrant ou agaçant.

 

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N°2 – « Nebraska » de Alexander Payne

« Nebraska » est précédé d’une excellente presse a reçu un excellent accueil à Cannes en 2013 et a valu le prix d’interprétation à Bruce Dern…

Alexander Payne revient avec une chronique sur une Amérique de gens délaissés du système et pauvres, paumés dans une région où il n’y a pas d’économie florissante, pas de développement et pas de perspective et où le chômage est record.

On va donc suivre un vieillard à moitié sourd et qui commence à oublier pas mal de choses et dont l’unique but est d’aller chercher un gros lot d’un million de dollars qu’il est convaincu d’avoir gagné mais qui n’est qu’une publicité mensongère. Son fils va décider de jouer le jeu, au mépris de sa mère et de son frère, afin de donner un sens à la vie pathétique de son père et peut être un peu à la sienne…

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Je crois que je n’aime pas le cinéma d’Alexander Payne…car ce n’est pas la première fois que je me fais avoir par une presse à mon avis bien trop conciliante avec cet auteur disons…anecdotique.

« Monsieur Schmidt » avec Nicholson et « Sideways » m’avaient gentilment ennuyés et surfaient tous les deux sur un très bon pitch autour de performances d’acteurs…mais très vite la machine s’enlisait dans un certain consensualisme et surtout, une impression que Payne se contentait un peu trop de surfer sur sa bonne idée première et sa thématique.

« The Descendants » il y’a deux ans avec Georges Clooney avait failli rafler plein d’Oscars et j’avais senti une espèce de grande solitude face à cette chronique fade et paresseuse, recyclant toujours les thèmes des racines, du rôle de parents râtés, des petites gens qui pêtent un cable dans leur vie de merde…Ouais…pas bon…car il y’a des orfèvres comme les Coen depuis une petite trentaine d’années, qui font çà mieux, de façon inspirée, plus drôle, plus noire, moins chiante pour être clair !

Ce « Nebraska » comporte un peu tous ces défauts mais n’est pas si mal…deux trois scènes sont vraiment drôles mais pour certaines tellement attendues et surtout tellement caricaturales. Je conçois que certains de ces américains moyens voire pauvres n’aient rien dans le ciboulot, lessivés par les deux seules activités qui les interessent, boire et regarder la télévision…mais j’ose espérer que le niveau est plus élevé et surtout moins uniforme. La vie c’est moche quand on est pauvres et on se fait chier ! OK…

Devant tant de nuances, j’ai un peu de mal j’avoue à adhérer au cinéma pompier d’Alexander Payne. Son film se regarde, mais il souffre la comparaison avec tant de confrères plus fins…

Oui je crois qu’en fait, j’ai trouvé çà facile…parfois drôle, souvent long…bref, allez plutôt voir « Her » de Spike Jonze ou « The Grand Budapest Hôtel » de Wes Anderson, eux ils ont du style et des idées…

 

 

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N°1 – « Still the Water » de Naomi Kawase

Le pitch : Sur l¹île d’Amami, les habitants vivent en harmonie avec la nature, ils pensent qu’un dieu habite chaque arbre, chaque pierre et chaque plante. Un soir d’été, Kaito, découvre le corps d¹un homme flottant dans la mer, sa jeune amie Kyoko va l’aider à percer ce mystère. Ensemble, ils apprennent à devenir adulte et découvrent les cycles de la vie, de la mort et de l’amour…

Naomi Kawase s’est construite une réputation internationale avec « La Forêt de Mogari » ou encore « Hanezu« . Elle est revenue à Cannes cette année en croyant dur comme fer qu’elle remporterait la palme d’or. C’était d’ailleurs l’une des favorites. La sortie de son « Still the Water » est encensée par la presse.

Cà, c’est pour le rappel du contexte critique de cette chouchoutte de la presse. Pour ma part, pauvre Blanc Lapin, j’avoue bien bas m’être particulièrement emmerdé devant cette pose de 2h et quelques et être même sorti de la salle tellement l’ennui était fort, insupportable. Bref, chiant, très très chiant.

Je ne suis pas sensible au cinéma de Kawase, contemplatif et vouant un culte à la nature certes louable mais pénible. Pourtant j’adore Terrence Malick, mais bon, sa façon se filmer à lui est différente. Les longs plans de Naomi Kawase sur un bol de riz s’enchainant avec un rythme mou du genou de scénettes en scénettes sans grande histoire ou action, m’ont achevé ! Pourtant c’était en pleine après-midi, en pleine forme.

J’ai trouvé son propos poseur et lourdingue derrière son apparente finesse et pudeur. Elle nous raconte l’éveil de deux adolescents à l’amour, à la prise de conscience de la mort, du temps qui passe. Le thème est très bon mais tout de même largement exploré. Dès lors nous infliger cette épure sans rythme apporte quoi ? De la poésie? Je ne dois ni être assez fin ni être assez imprégné de spiritualité mais je suis passé totalement à côté de cette interminable histoire où rien ne se passe.

« Still the water » est une carricature du film de festival auquel le public ne peut pas adhérer car sa cinéaste filme pour elle avant de filmer pour les autres. Qu’elle ait un style naturaliste c’est très bien, mais qu’elle arrive à capter les émotions et surtout à emporter le spectateur c’est autre chose. L’extrême retenue de son récit conjuguée à sa durée rend son film esthétique mais opaque. Un calvaire.

 

Et voilà pour le pire du pire…des films dont certains ont reçu d’excellentes critiques mais que j’ai trouvés pour ma part assommants et snobs…

Semaine prochaine, rdv avec la première partie des meilleurs films de l’année…

 

Le Blanc Lapin a 5 ans ! et toutes ses dents !

22 novembre, 2014

L'ouest Américain 1856 bis

5 ans! 5 ans que le « De l’autre côté, perché avec le Blanc Lapin » existe et que je tiens bon. Et un blog çà marche sur la durée…enfin pour moi çà court !

Poster des news de ciné quasi quotidiennement et écrire une critique par semaine, c’est comment dire ? …du flux tendu !

C’est 1752 news de cinés publiées, 618 bandes-annonces, 949 musiques, et 16974 vistes par mois en moyenne…

Après je me demande tout le temps ce qui fait que les gens viennent lire…les mots clés probablement…un des articles les plus lus fut « Marion Cotillard prostituée chez James Gray » ,…hum…le doute m’assaille…parceque bon 20 700 personnes qui lisent un de mes articles je veux bien croire que ce soit pour son style littéraire incomparable…mais bon, j’ai peut être été aidé…pareil, les articles parlant de la gayfriendly attitude de James Franco cartonnent, toujours…

Alors quels mots clés pour attirer du lourd ? Faire exploser la jauge du nombre de visites et propulser le blanc lapin très très haut, perché…

Je n’ose pas trop écrire un article en insérant des associations un peu trash pour tester l’effet…genre « c’est comme si  Nicolas Hoult était gay dans un film alors qu’il aime les gros seins de Jennifer Lawrence« …pas facile à caser dans un article. Ou bien « et pourquoi pas un film érotique avec Brad Pitt et Angelina Jolie où ils divorceraient pour de faux ? « …Non ce n’est point sérieux, je n’ai pas envie qu’on me fasse la peau pour si peu…et puis ce serait mal perçu et tellement racoleur. Je ne préfère pas l’écrire, c’est mieux…

Ah et puis, je me suis amusé à reprendre mes classements des films préférés de cinq premières années…et çà donne le podium suivant (cliquez sur l’image pour agrandir) :

2009

 

2010

2011

2012

2013

2014

 

Allez je m y remet! Merci pour le passage!
Votre blanc lapin dévoué

Les meilleurs films de l’année du blanc Lapin – partie 2 (N°10 à N°1)

21 décembre, 2013

Après les n°20 à 11, voici les dix films préférés du blanc lapin, comme chaque année depuis 4 ans.

Et pour rappel les 20 à 11 premiers sont ici : Les meilleurs films de l’année du blanc Lapin – partie 1 (N°20 à N°11)

Et les pires films de l’année sont là !

 

N°10 – « Trance » de Danny Boyle

 

Les meilleurs films de l'année du blanc Lapin - partie 2 (N°10 à N°1) dans Dossiers 10779

Le pitch : un jeune commissaire priseur est complice du vol d’une oeuvre de Goya mais au cours du vol, les choses tournent mal et il perd la mémoire. Ses ex complices vont tout faire pour retrouver cette dernière car avec elle s’est envolée la toile…une femme spécialiste de l’hypnose va tenter d’y remédier…

Après l’excellent « 127 heures« , Danny Boyle a choisi de mettre de côté tous ses autres projets dont « 28 mois plus tard » ou la suite de « Trainspotting » pour se concentrer sur un thriller, tourné en 2011 puis monté un an plus tard, après qu’il en ait eu terminé avec la cérémonie d’ouverture des  JO de Londres.

Est force est de constater que Boyle n’a pas perdu la main et revient en très grande forme, avec un retour aux sources, celui de la comédie noire qui fut son premier succès, « Petits meurtres entre amis« . Ici, c’est moins le côté immoral du récit qui est mis en avant mais cette même noirceur et cette même ironie donne aux deux longs métrages un goût de parenté.

Sauf qu’entre temps, Danny Boyle s’est essayé au film de zombie, au film de Sf, au film hommage à Bollywood et qu’il maitrise encore mieux ses talents de mise en scène. Comme toujours la bande originale est excellente et le travail sur les effets visuels, quasi clipesque, qu’on a pu lui reprocher, est toujours aussi présent, mais au service de son histoire.

Le film est malin et se tourne et se retoune comme prévu entre twist scénaristiques qu’on attend de découvrir mais qui arrivent à surprendre. Boyle sait que son public est averti, il joue donc avec lui d’autant mieux que les codes du thriller et les codes de son propre cinéma ont été défrichés depuis longtemps. James McAvoy et Vincent Cassel sont parfaits. Je suis content de voir Cassel poursuivre sa carrière internationale avec brio. Fâce à eux, Rosario Dawson assure grâve et pas que physiquement.

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Le film est brillant car il se déroule sans temps morts, sans certitude sur qui manipule qui et avec des ruptures de tons soulignées par la mise en scène habile mais jamais tappe à l’oeil. Mais surtout Boyle n’use jamais de facilité, à aucun moment il ne laisse une grosse ficelle porter l’histoire d’une rive à l’autre. Le suspens est total car le jeu des possible est ouvert, multiple. Et puis toujours pour retourner à Trainspotting ou Petits meurtres entre amis, chaque personnage a la caractéristique d’être protéiforme, ni bon ni mauvais ou tout du moins, on ne sait jamais vraiment jusqu’au bout du bout.

J’attend donc avec toujours le même enthousiasme le prochain opus du réalisateur britannique, quel que son soit le projet, il aura le respect du travail ultra bien ficelé. Son film est une vraie réussite.

 

 

N°9- « Stoker » de Park Chan Wook

 

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Sur un scénario de Wentworth Miller (celui de Prison break, oui, oui!), le maitre coéren à l’origine des brillants Sympathy for Mister Vengeance ou Old Boy, passe donc à Hollywood pour son premier long américain.

Le film ne fait visiblement pas l’unanimité. Pourtant, dès les premières images, le génial réalisateur marque sa présence par un style qui a du chien, avec une violence tappie prête à bondir à tout moment.

Ce qui marque c’est bien cette mise en scène de très haute volée au service d’un seul but, la tension et le mystère qui entoure cet oncle pervers qui vient habiter chez sa belle soeur et sa nièce à la mort de son frère. Matthew Goode était un choix parfait, avec son beau visage au sourire énigmatique et son allure de dandy. Nicole Kidman a certes droit à une scène très Oscar « regardez comme je joue face à la caméra » mais c’est un peu la rançon du succès.

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A force de la voir exceller, ses prestations sont encore plus regardées de près et on en oublierait presque le niveau qu’a atteint l’actrice depuis 15 ans. Bon en revanche niveau botox, ça se voit….son visage est un peu trop de cire et c’est bien dommage. Quant à Mia Wasikowska, elle confirme qu’elle est l’une des actrices indispensables du moment. A seulement 23 ans, sa carrière est déjà bien remplie car elle fait des choix exigeants.

Le trio d’acteurs est donc parfait et peut se mouvoir avec aisance dans ce superbe écrin stylistique que Park Chan Wook semble dédier au Maitre Alfred Hitchcock. On est toujours en plein suspens, on fleurte joyeusement avec l’immoralité des personnages et surtout, on y prend du plaisir, un plaisir coupable, celui de voir une histoire sombre se dérouler devant nous avec classe.

Park Chan Wook prend dès la première scène un parti pris. Il filme le parcours d’une araignée et dès lors nous incite à tout regarder de très près, maintenant une tension lorsqu’il n’y a rien qui se passe scénaristiquement à l’écran. La perfection de cette mise en scène est bouleversée parfois par des cadrages un peu particuliers ou inhabituels, comme pour montrer que cette maison familiale n’est pas un refuge, que le mal est à l’intérieur. L’atmosphère se fait alors ambigue, perverse et envoûtante à la fois. La sensualité de certaines scènes s’explique par la thématique à peine voilée du film, celui d’une adolescente qui découvre le désir, le sexe et qui passe à l’âge adulte, de façon certes particulière.

Je ne suis donc nullement déçu par ce film que j’attendais depuis trois ans et qui se trouve comme prévu être une réussite et l’un des longs métrages à ne surtout pas louper cette année.

 

 

N°8 – « L’inconnu du lac » de Alain Guiraudie

 

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« L’inconnu du lac » a fait son petit buzz à cause de maires un peu trop zéllés ayant retiré les affiches pour une raison ridicule. Mais si le film s’est distingué des autres sorties ciné, c’est surtout parcequ’il a marqué les esprits à la quinzaine des réalisateurs cette année.
Alain Guiraudie choisit une histoire se situant exclusivement dans un lieu de drague gay, au bord d’un lac. Pas une femme n’apparait à l’écran. En revanche des hommes on en voit, nus, totalement, puisque c’est une plage nudiste et qu’on les voit aussi se ballader dans le bois d’à coté pour baiser. C’est cru, homophobes s’abstenir…mais je crois que le buzz de l’affiche évitera les cris d’orfraie dans la salle…
Il y a beaucoup d’hommes murs, de gras du ventre et on se retrouve très loin des clichés pink du marais parisien. Ces corps qui s’entelacent n’ont rien de beau, c’est réaliste et c’est du sexe triste. Guiraudie aurait il pu s’abstenir d’aller si loin dans ce qu’il montre ? De montrer autant de bites ? Oui, bien sur mais son choix permet d’évacuer très vite la gêne de voir ces corps nus et de s’y habituer, laissant le champ au fond de l’histoire. La nudité fait partie du cadre, ne pas la montrer aurait été compliqué et n’aurait pour le coup, rien apporté. Et pourtant, le film n’est pas réel et semble parfois relever du conte par l’atmosphère qui s’en dégage.

En effet le réalisateur choisit l’économie de lieux et de plans. On voit le parking sur lequel la voiture du jeune personnage principal arrive, scène multipliée pour souligner l’habitude et l’addiction. On voit la plage et le lac et on voit le bois de tous les ébats. Point. Les scènes sont cadrées à l’identique au plus près des corps et des visages. Certains peuvent trouver cela ennuyeux, d’autant que ce que se disent les personnages n’a rien de passionnant, mais c’est justement ces partis pris de mise en scène qui resserrent l’étau sur un final oppressant à souhait.

Le film m’a fait monter l’angoisse peu à peu jusqu’à un niveau étouffant. La fascination qu’a le « héros » pour un être mortellement sensuel, sexuel et mystérieux, attire le personnage malgré tous les signaux qui devraient l’alerter. Ce rapport de fascination, cette ambiance crépusculaire mélangée à la solitude de ces types qui ne viennent là que pour baiser, qui ne semblent pas avoir de vie sentimentale, donnent à cet « Inconnu du lac » un gout effrayant. Mais un gout irréel aussi.

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Le réalisateur transforme un film qui pouvait sembler voyeuriste en thriller noir et flippant avec une efficacité redoutable. La frontière du bois des désirs fait basculer l’ensemble dans un conte pour adultes où le petit Pd se trouve face à un inconnu manquant d’humanité, au point de n’être homme qu’en apparence. La photo et la lumière du film baignent l’ensemble dans ce même mystérieux. L’humour arrive même à s’immiscer entre deux scènes de cul.

Jusqu’où désir et passion peuvent elles amener un individu à s’aveugler alors qu’il sait qu’il fonce dans un mur ? Alain Guiraudie situe son film simplement dans un milieu et un cadre qu’on ne voit pas si souvent, avec des protagonistes pour lesquels classe sociale et cadre familial n’ont pas d’incidence. Le lien de ces hommes est le sexe bestial dès lors comment se prémunir d’un prédateur? Le long métrage peut choquer certes mais pour ma part j’ ai trouvé l’exercice de style brillant.

 

 

N°7 – « Jodorowsky’s Dune »

 

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Dès l’annonce du projet, votre blanc lapin préféré s’était fait l’écho d’un enthousiasme débordant à l’idée de voir enfin racontée l’une des histoires de tournage les plus extravagantes de ces 30 dernières années. Car ce documentaire allait nous détailler comment Alejandro Jodorowsky, réalisateur barré chilien et scénariste de bd cultes comme l’Incal, Juan Solo, ou « la caste des méta-barons », avait tenté un rêve impossible au milieu des années 70.

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Ce dernier a en effet failli adapter Dune de Frank Herbert , l’un des plus ambitieux romans de SF avec un casting de malade mental, Salvador Dali en empereur de l’univers, Orson Welles en immonde baron Harkonnen, Mick Jagger en Feyd Rautha, les Pink Floyd à la Bo, le dessinateur Moebius au storyboard et HG Giger, créateur d’Alien pour les décors de la planète harkonnen…

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C’était un projet fou, produit par Jérome Seydoux, mais c’était un projet de passionnés.

Le film avait réuni 2/3 du budget et s’est cassé les dents face à des executives d’Hollywood pour qui Sf ne rimait pas avec gros budget…car c’était avant Star Wars.

« Jodorowsky’s Dune » nous conte donc une aventure, celle d’artistes qui ont irradié la Sf des années 80, de Alien à Blade Runner ou Star Wars, ou de l’Incal aux Méta-Barons, après s’être donnés à fond dans ce projet hors normes. Jodo se définit comme un général à la tête d’artistes guerriers dont l’objectif était de livrer une adaptation qui révolutionnerait le genre, un chef d’orchestre fou qui réussit à fédérer des talents divers autour d’un idéal de film somme. Jodo fut le catalyseur et le destructeur de son projet, son originalité faisant peur aux studios américains et faisant trébucher le film sur la dernière marche avant le décolage.

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Il est toujours passionnant de voir pourquoi et comment un film qui avait tout pour devenir un objet culte, s’est vrillé et s’est transformé en échec. On se souvient du doc « L’enfer d’Henri Georges Clouzot » ou de l’excellent « Lost in la mancha » sur le Don Quichotte de Terry Gilliam qui fit naufrage.
Mais le talent de  Frank Pavich est de mettre au centre du récit cet iconoclaste artiste touche à tout qu’était Jodo, qui nous fit l’honneur d’être au forum des images un dimanche soir pour présenter le film. Agé de 84 ans, l’homme est bluffant d’optimisme, de rage créatrice, de volontarisme et insuffle au long métrage un vent de fraicheur incroyable. Mais surtout, le recul amusé, 30 ans après ce terrible échec, donne lieu à un récit parfois hilarant. Car c’est la surprise de « Jodorowsky’s Dune », oui, le film est drôle, très drôle.

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Au lieu de présenter cette histoire comme un cataclisme artistique, Frank Pavich choisit au contraire de retenir l’émulsion de ces artistes, leur grain de folie, leur indépendance acharnée, et l’héritage évident qu’ils ont laissé, réutilisant eux mêmes leurs matériaux dans d’autres oeuvres passées à la postérité. Ou comment positiver un échec pour construire autre chose de grand sur une autre route. En voyant Nicolas Winding Refn, réal de Drive, ami et fan de Jodo témoigner, se vanter malicieusement d’être le seul à avoir lu l’énorme « bible » du story board (il en resterait deux au monde) avec les commentaires de Jodo…en entendant Jodo souhaiter que même après sa mort son projet renaisse…on se prend à rêver…et au final c’est la réussite de Jodorowky, son film n’existe pas mais il est bien plus culte que celui boursoufflé qu’a pondu David Lynch quelques années plus tard.

Mais même sans ce film ou sans sa reprise en main dans X années par un autre visionnaire, ce documentaire suffit à vous ouvrir la boite à imaginaire. Les non afficionados de Dune peuvent aussi prendre part à ce voyage excentrique car au final on y parle juste de liberté créatrice, de la l’art pour transcender la mort, lui survivre, se projeter et toucher à l’universel…c’est enthousiasmant et c’est beau, très beau…

 

 

N°6 – « Effets secondaires » de Steven Soderbergh

 

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Je ne pensais pas pouvoir mettre un jour 4 gros lapins bien assurés à Steven Soderbergh. Il faut dire que l’animal m’a souvent agacé avec sa filmographie éclectique mais très inégale. L’homme est coutumier du fait de sortir un à deux films par an, à tourner plus vite que son ombre, surtout dans les années 2000, pour livrer au final des films malins et roublards mais très moyens au final. Son « Sexe, mensonges et vidéo » lui valu une palme d’or en tout début de carrière pour un film surestimé mais qui comportait déja les limites du réalisateur. Il rêvait de devenir un auteur ultra bankable et s’y évertué avec des films biens consensuels comme « Erin Brockovich » ou la trilogie « Oceans eleven« . Et puis il lui fallait une caution auteuriste et ses insupportables « Bubble », « Full frontal », « Girlfiriend expérience », étaient là pour montrer sa recherche artistique en même temps que provoc.

Mais Soderbergh vaut bien mieux que cela quand il prend le temps. Son « Traffic » est un bijou en terme de recherche de mise en scène et de scenario. A 50 ans et à la veille de prendre une retraite de cinéaste qu’il a annoncée partout, il sort donc son dernier film, « Effets secondaires« . Et c’est comme si il voulait prouver une bonne fois pour toute la virtuosité et le sens du récit qu il a assimilés très tôt via sa cinéphilie puis son travail de stakhanoviste compulsif.
« Effets secondaires » est l’un de ses plus brillants exercices de style dont Sir Alfred Hitchcock ou Brian de Palma n’auraient pas rougi. Il aborde la thématique de l’addiction médicamenteuse aux antidépresseurs et du lien pervers entre le milieu médical et l’industrie pharmaceutique, débutant son long métrages avec une première demi heure haletante, passionnante. Elle pose tout de suite un cadre propice à ce qui va suivre. Tout comme avec la lutte anti drogue dans « Traffic », il pose des questions sensibles sur le mélange des genres, de morale et d’argent, mais son but est ailleurs. Son film aurait pu s’essouffler et devenir un pensum si il n avait pas opté pour un thriller et une rupture de ton d’une efficacité redoutable, où quand mise en scène et scénario ne font qu’un pour divertir, intelligemment. Le film ne vous lâche pas un instant quitte à ce que les rebondissements foisonnent de toute part. Mais l’atout essentiel est ici le casting.

Rooney Mara et Catherine Zeta Jones sont excellentes. Jude Law trouve quant à lui son meilleur rôle. Il est juste parfait et prouve de façon magistrale toute la finesse de son interprétation. Bien entendu, tout le monde s’accorde à dire que Jude Law est bon acteur mais ce dernier s’est souvent planté dans ses choix. Il était bon mais avec un manque de bol incroyable, dans des opus de grands metteurs en scène peu inspirés en général, que ce soit chez Spielberg (A.I), Kenneth Branagh (Le limier), Wong Kar Wai (my blueberry nights), Antony Minghella (Par effraction), Fernando Mereilles (360), David O Russell (J’adore Huckabees), Jean-Jacques Annaud (Stalingrad)…et je ne cite pas les films oubliables. On connait Jude Law mais à Part « Bienvenue à Gattaca« , citez moi un très bon film dans sa filmo…

La chose est donc reparée et j’espere que sa carrière va s’épaissir dans le bon sens mais c’est une question d’opportunité car Jude est très demandé, juste pas dans les bons projets. Il tourne fort heureusement pour Wes Anderson en ce moment.
Courez donc voir « Effets secondaires, une réussite indéniable et une façon ultra classe pour Soderbergh de tirer sa révérence…pour l’instant…il n’a que 50 ans et largement le temps de changer d’avis…

 

 

N°5 – « 9 mois ferme » de Albert Dupontel

 

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Albert Dupontel revient avec son meilleur film depuis Bernie, jouissif et méchamment drôle, fidèle à l’humour du réalisateur et à ses references. Il est vrai que j’avais trouvé « Enfermé dehors » poussif et pas très drole, versant trop dans la carricature sociale. Et puis « Le vilain » etait réussi mais un peu trop sage, trop lisse. En revanche il avait trouvé dans ce dernier une esthétique qu’il n’avait pas autant auparavant.
Ici Dupontel retrouve l’idée d’un duo avec une actrice de talent, Sandrine Kiberlain, qui s’était faite rare ces dernières années et revient ici avec un rôle de pétage de plomb idéal. Dupontel la met d’ailleurs au premier plan et a l’humilité de ne pas trop se mettre en avant, offrant à chaque second rôle des scènes hillarantes. Car oui, « 9 mois ferme » déclenche des hurlements de rire avec un comique mélant tex avery et le cartoon, comme toujours chez Dupontel mais aussi un humour facon Monty Python ou Fluide glacial.

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La caméra sert le scénario et les situations cocasses et crée une vraie différence avec les comédies francaises formatées et souvent laides en terme d’image. Ici tout est léché, ne condidérant pas que de bons acteurs et de bonnes répliques ou gags suffisent. Non, Dupontel est précis et exigeant et c’est tant mieux pour nous. Quel bonheur de voir un rire intelligent, sans stars du petit écran ou du one man show recasées par des potes dans un truc gentillet.

Mais attention, Albert Dupontel se permet même des touches de poésie voir de tendresse pour ses personnages, avec la pudeur qu’on lui connait mais qui rajoute encore à ce film qui a déja atteint son but initial : faire rire.

C ‘est comme si Dupontel, après avoir expérimenté des idées pendant 15 ans sur des longs métrages de très bonne facture, revenait avec une certaine maturité tout en retrouvant la fougue et les délires de Bernie.

Il est plaisant et rassurant d’avoir un artiste comme lui dans le paysage cinématographique francais. Non content d’être un excellent acteur chez les autres, l’homme a créé un style de comédie qui lui ressemble et dont on souhaite qu’il en fasse plein d’autres du même niveau d’excellence.

 

 

N°4 – « Frances Ha » de Noah Baumbach

 

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Le réalisateur Noah Baumbach et son actrice Greta Gerwig, coscénaristes, nous offrent avec Frances Ha un film merveilleusement gai, frais, et joyeux.
Pourtant, l’histoire de Frances n’est pas très marrante. Danseuse en devenir mais trop vieille pour faire carrière, elle n’a plus de fric et plus d’avenir professionnel. Pire, son mec la largue car elle est trop proche de sa meilleure amie et colocataire, Sophie.

Et puis Frances a un problème, elle est trop franche, trop naturelle, et trop bizarre. Disons qu’elle est particulière. Et surtout, qu’elle ne veut pas grandir. Ca lui plait de vivre comme ca, de boire, de faire l’amour et de se sentir libre, en éternelle étudiante…sauf qu’elle a 27 ans.

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L’un des atouts majeurs de « Frances Ha » est de réussir à saisir quelquechose de pas si courant au cinema, l’amitié féminine. En entrant dans l’intimité de cette amitié dans ce qu’elle a d’attachant et de cruel parfois, le film vous cueille et en sort les plus belles scènes, vraiment émouvantes. On se dit au début que le personnage risque d’agacer, mais c’est sans compter sur le scénario, et léactrice, suffisament barrée mais pas trop, juste assez pour emporter l’adhesion et la bienveillance. Sa nonchalance  réchauffe dans un monde un peu trop normé et balisé vers la « réussite ».

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Cette réussite sociale, et amoureuse sont autant de schémas de vie que la société recommande à Frances, afin de devenir adulte. « Tu es incasable » lui dit un de ses amis, un peu interessé. Car oui, il faut se caser et choisir une voie, et devenir une grande, abandonner ses rêves, ici celui d’être danseuse professionnelle. Seulement voila, Hana n’est pas comme cela et ces choix…elle ne voit pas pourquoi les faire. C’est ce qui fait que le film est frais réjouissant. Elle aime son immaturité. La naiveté, la gaucherie et le naturel du personnage vous emportent. On pense évidemment à Woody Allen pour le lieu (New York), le noir et blanc et les dialogues infinis comme dans Manhattan ou Hannie Hall.
Sauf qu’ici il n’est pas question d’une histoire d’amour mais d’une histoire de choix, de route à trouver quand tous les autres de son âge sont déjà partis. Nostalgique, drôle, ce film est décalé à l’image de son personnage et c’est l’une des excellentes surprises de cette année.

 

 

N°3 Ex aequo -  « Django unchained » de Quentin Tarantino

 

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J’ai vu « Django unchained » en avant première ! Et outre le fait que Quentin Tarantino a l’air d’un mec bien sympathique et barré, ce fut LA grande classe de découvrir son nouvel opus dans de telles conditions.
Tarantino continue donc à revisiter le passé de l’Amérique avec, comme dans « Inglorious basterds« , trois objectifs. D’abord il revisite un genre, après le film de guerre façon « 12 salopards« , c’est au tour du western Spaghetti, toujours entre le pastiche et l’hommage. Ensuite l’animal veut nous donner un film fun et jouissif. Enfin il donne aux opprimés de l’histoire une vengeance et une revanche par procuration puisque le cinéma permet toutes les libertés. La controverse de Spike Lee sur le fait que Tarantino serait raciste parcequ’il utilise le mot « nègre » est d’autant plus stupide que non seulement le film est un playdoyer contre toute forme d’avilissement mais qu’en plus, Spike Lee devrait commencer par refaire de bons films, après on en reparlera.

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Tarantino commence donc « Django Unchained » par 45 minutes de scènes absolument géniales, drôles, dans le pur style qu’on lui connait, entre dialogues perchés à se plier en quatre et violence gratuite et stylisée mais oh combien brillante et racée. En gros, il nous enchaine plusieurs scènes qui devraient devenir cultes. On pense à un mixte entre « Kill Bill » et « Inglorious basterds« . A ce titre, le rôle qu’il a écrit pour Christoph Waltz est en or. Autant l’acteur allemand était bluffant en Nazi sadique, pervers et cultivé chez les Basterds, autant son personnage de sympathique chasseur de primes raffiné est une force indéniable du film. Waltz est un acteur au charisme qui crêve l’écran.

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Puis vient un petit ralentissement de rythme mais qui n’endommage pas la rapidité à laquelle passent ces 2h50. Et là, Léonardo Di Caprio entre en scène! Autant dire que tout cinéphile rêvait de voir le petit génie du jeu dans un rôle d’immonde ordure ! Alors la déception c’est qu’il cabotine et qu’il ne surprend pas. Il est très bon, son rôle est taillé pour lui mais il ne réserve aucune surprise. Le tout accompagnant un rythme plus lent et bavard, ceci donne au long métrage la même impression de rupture de rythme que dans « Inglorious basterds », compensée par une fin digne de très bon moments de « Kill bill ». Ca saigne, ça gicle durant le film mais c’est un pur bonheur régressif ultra réferencé avec deux ingrédients qui en font un des très bons Tarantino. La bande originale et les dialogues sont au top, avec le même effet euphorisant !
Bref, grande réussite que cet opus, qui devrait s’insérer dans une trilogie sur l’histoire américaine. Le prochain reviendrait au « débarquement », cette fois ci avec des soldats noirs américains devenus fous et prêts à buter du soldat blanc quel que soit son uniforme, tout un programme ! Et on l’espere d’un aussi bon niveau que son western !

 

N°3 Ex aequo – « Le Loup de Wall Street » de Martin Scorsese

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En s’attaquant à l’histoire délirante de Jordan Belfort, jeune homme issu d’un milieu modeste, devenu courtier multimillionnaire en vendant du vent, Martin Scorsese renoue avec les histoires bigger than life qui ont abouti à certains de ses chefs d’oeuvres comme « Les affranchis » ou « Casino« . La longueur du récit, 3 heures se déroulant à toute vitesse et la folie des personnages nous ramène forcément à ce must du must du grand maitre.

Mais c’est aussi près du superbe et écorché « A tombeaux ouverts » qu’il faudrait rapprocher ce « Loup de Wall Street« , pour sa mise en scène au couteau, frénétique, son rythme délirant ne faisant qu’un avec son sujet.

Et pour leur cinquième collaboration, Léonardo DiCaprio livre une prestation hallucinante. C’est probablement le meilleur acteur de son âge et pour son père de cinéma qu’est Scorsese, il nous livre l’une de ses meilleures performances, génial de bout en bout.

Quand en sortant du film, on se dit qu’aucun autre acteur actuel n’aurait pu interpréter ce rôle, c’est que pour le coup, Léo est au top de sa forme.

DiCaprio avait déjà interprété pour Scorsese un grand mégalo addict aux drogues avec Howard Hughes dans « Aviator« . Mais le film souffrait de longueurs et DiCaprio en faisait peut être un peu trop, justement.

Ici il est parfait. La débauche de grand n’importe quoi, de drogues en tout genre et de prostituées défilant dans les bureaux de la compagnie de courtage, sont autant de pétages de plombs euphorisants parfois, et transgressant la morale la plupart du temps. On peut être choqué par les lancés de nains mais ce qui marque le plus, c’est justement cette absence totale de limites morales, de bornes. Belfort et son équipe n’ont qu’un seul crédo, se faire du fric et partir du principe que tout est possible.

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Cette exagération du mythe américain où n’importe qui peut partir de rien et se contruire au sens capitalistique du terme, n’est cependant ni condamnée ni adoubée par Scorsese.

Ce dernier se contente de transposer une histoire hautement cinématographique par ses excès et se garde bien de rendre sympathique ou antipathique le personnage. D’ailleurs, l’idée de le juger ne vous traverse pas durant le long métrage, au même titre que le DeNiro de Casino ne suscitait pas de dégoût. Ici nous avons à faire à des malfrats en col blanc, prêt à tout et n’importe quoi. La seule différence est qu’ils ne tuent pas et vendent du rêve de devenir riche. Ils surfent sur les illusions entretenues par l’American way of life. A ce titre la scène avec Matthew MacConaughey est assez bluffante, même si pour le coup, son discours est un peu caricatural.

Virtuose et chaotique, le film est cynique sur l’envers du modèle américain, provocateur en diable, souvent très drôle. Mais l’absurdité de cette fuite en avant cache aussi l’obsession du personnage pour le plaisir, tel un ogre jamais repu, près aux comportements les plus suicidaires et dangereux pour avoir la possibilité de jouir une fois de plus.

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Cette passion dévorante et cette course d’un type qui brûle la vie par les deux bouts, a forcément un côté enivrant mais aussi une facette sombre qui font du film une oeuvre bien plus complexe qu’elle n’y parait. Le rapport des américains à l’argent et du monde actuel aux apparences est décortiqué avec brio. « Le loup de Wall Street » est rock’n'roll et peu fréquentable mais il a la force de vous amuser et de vous tendre un miroir de nos vils instincts matérialistes sans jamais montrer du doigt, juste en se moquant, comme les blagues de mauvais goût du personnage principal.

« Le Loup de Wall Street » est donc le grand film qu’on attendait de Martin Scorsese après son « Hugo Cabret » un peu ennuyeux et beaucoup trop sage. Scorsese a 71 ans et il reste l’un des plus grands cinéastes en vie, à la carrière impressionnante, alignant des bijoux régulièrement, avec la même fougue qu’un jeune cinéaste. Alors certes, il revient à un genre qu’il maitrise parfaitement, loin de ses expériences sur « Gangs of New York » ou « Shutter Island« , mais se serait débile de se plaindre qu’un grand cinéaste conserve son style pour nous livrer un nouveau chef d’oeuvre. Or ce « Loup de wall street » en sera probablement un.

 

N°2 – « La Danza de la Realidad » de Alejandro Jodorowsky

 

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Scénariste culte de l’Incal de Moebius et d’autres Bd Sf assez excellentes, cinéaste iconoclaste des années 70, de « La Montagne sacrée » hallucinogène à son western « El Topo« , Alejandro Jodorowsky est un personnage marquant. Je vous avais parlé dejà de lui cette année avec le brillant documentaire sur l’adaptation de Dune qu’il a failli monter fin des annees 70 (voir ici).
Mais 2013 est aussi le retour du chilien au grand écran après 20 ans d’absence!

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Et vous savez quoi ? Fellini et Buñuel ne sont pas morts ! Ils revivent grace à un jeune réalisateur de 84 ans, complétement barré !
« La danza de la realidad » raconte l’enfance d’Alejandro Jodorowsky au Chili et plus particuliérement de son rapport à un père communiste autoritaire et fan de staline. Et dans le film, c’est le fils de Jodorowsky qui joue, son père !

J’avoue ne pas être fan du suréalisme de Buñuel, Fellini ou de l’épure provocatrice de Pasolini.

Mais ici, « Jodo » ne fait pas que s’en inspirer, il y rajoute son experience de la Bd, avec un humour taquin, et balance une poésie et des tableaux visuels d’une grande beauté, une imagerie entre le kitch et le délire démiurge. Mais il le fait avec un sens du récit limpide, ce qui était un peu la crainte que j’avais, ayant vu ses précédentes oeuvres. Non ici, le film est plutôt facile d’accès et convoque juste le fantastique et l’imaginaire au beau milieu du réel.
Jodo raconte son enfance tel un mélange de rêves et de souvenirs. Sa mère ne s’exprime qu’en chantant comme une cantatrice, et pisse sur son père pour le soigner de la maladie, exemple hallucinant de ce qu’on peut voir dans cette oeuvre totalement libre, furieuse et tendre à la fois, une ode à la vie et à l’héritage.

Jodorowsky joue pour de vrai son personnage aujourdhui, qui parle derrière son double enfant et apporte l’experience qu’il tirera plus tard de ses aventures de gamin tiraillé entre idées communistes du père et profonde croyance catholique de la mère. Il renvoie dos à dos les cultes politiques et religieux, se moque d’un dictateur pantin façon Chaplin et fait preuve d’une mise en scéne vigoureuse assez bluffante.

Il apporte un vent d’air frais cinématographique en convoquant les fantômes de son passé et ceux du cinéma suréaliste. Mais comme il aime à le dire, la meilleure facon de rendre hommage c’est de violer l’oeuvre et de la faire sienne.

J’ai été scotché par cet intriguante déclaration d’amour à son passé, ce regard malicieux et perché d’un vieil homme vers le terreau de sa personnalité. Quel hommage magnifique à ses racines ! Quel spectacle de clown fou ! Courrez y !

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N°1 – « Mud » de Jeff Nichols

 

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Pour être très franc, je suis allé voir « Mud » pour deux raisons. L’excellent accueil critique et le fait que mon meilleur ami ait été touché. Car de Jeff Nichols, j’avais surtout le très mauvais souvenir de « Take shelter« , sorti l’an dernier, encensé également par la presse et qui m’avait très sérieusement ennuyé.

Cette « seconde chance » donnée à Nichols fut donc la bonne. « Mud » est un récit initiatique sur le passage de l’adolescence au monde adulte mais ce n’est pas que celà.

On a un peu peur tout au long du long métrage qu’un cliché surgisse à un moment et rompe le charme de ce bel équilibre, fragile, cette belle histoire d’amitié entre un marginal fou amoureux d’un amour impossible et deux gamins de 14 ans qui, en cherchant de l’aventure, finissent par la trouver et même par apprendre bien plus encore.

Ils se font défenseurs d’une histoire qu’ils fantasment car ils ne connaissent rien des rapports amoureux, ils ne font que les deviner au travers des relations entre leurs parents, ou de leurs premiers tâtonnements avec les filles. Ils y vont avec cet aplomb du jeune homme qui ne connait rien mais qui veut être un homme et le prouver, même si ses sentiments d’enfant le rattrapent souvent pour lui rappeler que la vie d’adulte c’est rude, enfin, en tout cas, çà en a sacrément l’air. Et du panache, Matthew McConaughey en a sacrément lui aussi. Cet acteur plutôt cantonné aux rôles fadasses quand il était le beau blond jeune premier, a su en quelques rôles décoller, à l’approhe de la quarantaine. Il incarne à la fois toute la naiveté d’un gamin qui s’est élevé tout seul en pleine nature, bercé de bien des illusions, et cet homme mur façonné par cette nature sauvage et ses multiples déceptions avec la femme de sa vie. Cet amour impossible est l’un des arcs scénaritisiques vraiment touchants du film. Un récit sans pathos, avec une économie de mots par moments, car les situatons parlent d’elles mêmes.

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Le fait de faire découvrir au spectateur l’identité de ce Mud par le regard admirateur de ces deux ados est excellente. Ils cherchent à devenir des hommes et voient donc forcément ce mystérieux Mud à travers le prisme de leurs aspirations propres, de leur idée de la virilité, de leur espoir dans une pureté de l’amour homme-femme, dans l’idée que les sentiments sont immuables, sauf qu’ils ne le sont pas. La prise du temps abime bien des choses et les plus naifs en sont pour leurs frais. Mais loin de tout cynisme, le film porte sur ses épaules un regard tendre sur cette découverte de l’envers du décors des adultes.

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Le long métrage pourrait avec ces seuls ingrédients, cette seule utilisation de la nature comme personnage à part entière (comme dans Take shelter), suffire à sa réussite. Sauf que les seconds rôles sont tout aussi bons, de Mickael Shannon en oncle sympa à Sam Shepard en vieil homme qui a lui connu les déceptions jusqu’au bout du bout. Le rapport père fils constitue lui aussi une histoire secondaire qui donne un relief au tout. Sans crier gare, Jeff Nichols, y aborde l’incommunicabilté entre un père et un fils dont la pudeur virile se fendille, confrontée à l’impuissance du père à sauver son couple. Ce dernier ne peut prouver qu’il est porteur d’un projet qui puisse motiver son épouse et sauver du naufrage l’échec de leurs rêves, de leurs aspirations qui se sont éloignées, confontés au mur du quotidien. Et puis « Mud » montre deux adolescents découvrant que le temps détruit les plus belles histoires, eux qui ne rêvent que d’aventure et d’idéal et pour qui « Mud » incarne un peu tout celà. Cette projection qu’ils se font du futur, de ce que c’est qu’être homme, est d’autant plus touchante qu’elle est faite avec retenue, comme les personnages, pour qui montrer n’est pas franchement un truc de mecs. La mélancolie de ce récit d’aventure vous touchera probablement. A brasser des thèmes aussi universels, Nichols aurait pu sombrer dans un mélo chiant, sirupeux et démonstratif. Il n’en n’est rien. Au contraire, on ressort plus léger de cet exercice d’équilibriste particulièrement réussi.

 

Voilà, l’année 2013 se boucle sur des cow boys tarantinesques, un vieux réalisateur chilien libre comme un jeune homme fougueux et irrévérentieux, un Matthew MacConaughey crevant l’écran dans un rôle simple et déroutant…

2014 aura t elle autant de richesses et autant de films de niveau 4 à 5 lapins ? …Une vingtaine en 2013 ! exceptionnel !

Rendez-vous dans les salles obscures et avant celà  De l’autre, côté, perché avec le blanc lapin…puisque je vous mijoterai comme chaque année ma sélection des films les plus attendus de 2014 ! Et une sélection très exhaustive !

Une cinquième année qui sera riche de surprises ! Je n’en doute pas une seconde !

Les meilleurs films de l’année du blanc Lapin – Partie 1 (de 20 à 10)

14 décembre, 2013

Comme chaque année depuis 4 ans, le Blanc Lapin vous livre son classement des films préférés de cette année. C’est subjectif et heureusement mais faites moi confiance, les 20 films sélectionnés sont tous bons, tous 4 lapins minimum au compteur.

Alors pourquoi 20 alors que les autres années c’est 15 ? Et bien parceque 2013 aura été riche en films de très bon niveau et qu’il me semblait dommage de ne pas reparler de certains d’entre eux une dernière fois avant de refermer ce millésime. Ca peut aider à sélectionner les films à voir en Dvd ou ou redifs sur des chaines cablées.

Petite précision, le Blanc Lapin n’a pas vu le Scorsese ni le film de Joseph Gordon Lewit et ces deux là, qui sentent très bon, passeront donc sur 2014 puisqu’ils sortent le 25 décembre.

Allez on commence, avec la critique du blanc lapin à chaque fois…

 

Les meilleurs films de l'année du blanc Lapin - Partie 1 (de 20 à 10) dans Dossiers hr_Passion_1

N°20 - »Passion » de Brian de Palma
Avec ce remake du dernier film d’Alain Corneau, et alors que « Crime d’amour » était plutôt mineur et raté, Brian de Palma renoue avec le brio de sa mise en scène.
On retrouve le maître enfin, après plus d’une décennie de films mineurs et décevants. De Palma revient au thriller sexuel qui a fait son succès dans les années 70 avec « Obsessions« , « Pulsions« , ou « Body double« .
« Passion » traite donc du rapport de force et de séduction entre deux femmes à des postes clé d’une grande société de publicité. La séduction de Rachel McAdams, méconnaissable en blonde sulfureuse s’oppose à l’attitude sage et soumise de son apparente victime, Noomi Rapace. Cette dernière excelle comme d’habitude et use de son visage énigmatisue pour cacher tant ses doutes que sa propre duplicité. De Palma va alors se faire plaisir et rendre un superbe hommage à sa propre filmographie mais aussi à celle d’un certain Alfred Hitchcock, poussant le suspens avec une accéleration d’images et de thèmes musicaux jusqu’à l’obsession. A la manière d’un Polanski avec son « The ghost writer« , De Palma synthètise son cinéma et s’autoréférence pour mieux le moderniser et livrer un film d’un faux classicisme mais dont l’impact est surprenant d’efficacité.
De palma fait monter la pression sur quelques choix de mise en scène radicaux parfois très eighties qui auraient pu s’avérer ridicules ou has been mais qui au contraire s’affirment avec classe. Le jeu d’ombres de la plupart des scènes qui suivent la déclaration de guerre des deux femmes est assez impressionnant.
Le film est sulfureux mais ne vire ni dans le voyeurisme ni dans l’érotisme chic, préférant utiliser les codes du thriller et se jouer de cette fausse relation lesbienne.
Les retournements se mèlent au mélange entre rêve et réalité, se jouant du spectateur comme les personnages se dupent eux mêmes entre eux.
Brian De Palma est donc de retour en très grande forme à 72 ans et c’est forcément une excellente nouvelle. Après la renaissance artistique de son pote Francis Ford Coppola il y a quatre ans, on peut se rassurer qu’un tel artiste ne soit pas enterré et qu’il taquine de nouveau les sommets sur lesquels il nous a si souvent transportés.

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N°19 – « Mobius » de Eric Rochant

Le pitch : Grégory Lioubov, officier des services secrets russes est chargé de trouver le moyen de faire tomber un homme d’affaire russe. Installé à Monaco avec son équipe, il va recruter Alice, une jeune requin de la finance qui travaille pour sa cible. Mais Grégory va entrer en contact direct avec elle et entamer une liaison, rompant la règle d’or qu’on lui a toujours inculquée…la passion va naitre entre eux et tout remettre en cause…

Le retour d’Eric Rochant, après six ans d’absence, s’effectue en force, le réalisateur français nous livrant un film d’espionnage digne de ses ainés américains, avec un truc en plus.

L’auteur d »Un monde sans pitié » nous avait déjà montré il y a presque 20 ans avec « Les patriotes« , qu’il savait mener de bout en bout une histoire d’espionnage en rendant son univers des plus secs, inhumains et crédibles dans les rapports entre agents. On retrouve ici la même signature mais avec un cadre différent des services secrets israeliens puisqu’ici c’est le cynisme de la haute finance internationale qui mène la danse. En ceci le film est nettement plus incisif que « Le capital » de Costa Gavras, alors même que le sujet n’est pas là. Mais son approche est juste et plus fine.

Moebius-d-Eric-Rochant_portrait_w674 dans Films - critiques perso

Le grand atout du long métrage c’est d’allier mise en scène au cordeau, avec une tension de bout en bout, empruntant aux classiques de l’espionnage mais avec des espions et des personnages de chair et de sang. Jean Dujardin est très loin de ses rôles de comiques et rappelle qu’il est bon acteur dans tous les registres. Crédible en homme tiraillé entre la fidélité à son père spirituel et l’amour naissant, son visage exprime très bien le doute qui s’installe, là où pourtant ce n’était pas gagné. On a tellement l’habitude de le voir utiliser son visage élastique pour faire rire, que l’agent Oss 117 aurait pu flinguer cet agent très sérieux.

Quant à Cécicle de France, outre qu’elle est toujours aussi belle et méconnaissable les cheveux blonds et mi longs, elle trouve à nouveau un rôle à la mesure de son talent. L’alchimie des deux acteurs était indispensable et elle se voit à l’écran. Ce qui manque souvent dans les films d’espionage c’est l’humain car le genre restranscrit des individus se comportant comme des êtres de sang froid. Ici les scènes d’amour sont sensuelles et touchantes. L’armure des deux personnages si sûrs d’eux, qui se fendille, donne au film un très beau souffle, et transforme un thriller super bien mené en une histoire d’amour poignante.

Möbius est un film sophistiqué, précis, humain et au déroulé implacable, où l’intime se mèle à la manipulation avec classe. On suit le ruban sans se douter de l’issue. Une grande réussite.

 

 

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N°18 – « Prisoners » de Denis Villeneuve

 

Après son excellent « Incendies« , oscar du meilleur film étranger, Denis Villeneuve revient cette année avec deux films très bien accueillis par la presse. « An enemy » sortira en 2014 mais pour l’instant c’est son « Prisoners » avec Hugh Jackman et Jake Gyllenhaal qui nous impressionne.

Villeneuse garde le sombre et l’ultra dark qui caractérisait « Incendies » dans ce thriller à couper au cordeau. Jackman joue un père dont la fillette s’est faite enlevée avec celle de ses meilleurs amis et qui est persuadé qu’un jeune simple d’esprit est le kidnapeur ou le complice. Gyllenhall joue lui l’enquêteur de police très professionnel mais méthodique qui tente de résoudre son affaire sous la pression du père, qui veut se faire justice lui même.

« Prisoners » nous dresse un tableau de l’américain de classe sociale modeste, entre reclusion sur lui même et paranoia.

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Le film installe au bout d’à peine 5 minutes un suspens halletant, une course contre la montre pour retrouver deux fillettes qui peuvent mourir à tout instant selon qu’elles ont été laissées seules enfermées ou qu’au contraire le pervers se trouve avec elles. Et au jeu du suspect, Denis Villeneuve brouille les pistes suffisamment pour nous perdre en même temps que le personnage de Jackman, très bien dirigé, se perd dans des fausses pistes, tout comme le flic impuissant devant ce qui leur semble irrésolvable.

Le seul suspect étant quasi muet et mentalement dérangé, chacun va se trouver confonté à un mur de silence, et au risque de faire erreur, de ne pas s’interesser au bon suspect. Bien sur, l’état psychologique des deux familles est parfaitement rendu. Mais surtout, le film ne sombre pas dans le mélo et la tension permanente nous embarque sans lâcher prise sur quand même 2h33 de film, ce qui est assez fort en soit.

Villeneuse profite donc de son redoutable thriller pour aussi aborder le thème de l’autojustice, de la limite morale de chacun face à l’horreur. A quoi est on prêt pour sauver deux enfants des griffes d’un monstres ? Peut on tout faire ou donner sa confiance aveugle dans la police, qui n’a pas forcément les moyens suffisants de remuer ciel et terre. L’impuissance des familles, de la population et du flic constituent ainsi le climat général pesant du film, au bon sens du terme, car il nous immerge dans la torpeur des familles.

On pense à « Mystic River » d’Eastwood pour la perte de repères moraux de personnages confontés à l’horreur et à « Zodiac » de David Fincher pour la traque du criminel fantôme, collés derrière chaque protagoniste.

Denis Villeneuve signe l’une des excellentes surprises de cette fin d’année.

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N°17 – « The immigrant » de James Gray

Cinq ans d’attente nous séparent du précédent et magnifique film de James Gray, « Two lovers« . Le cinéaste a de nombreux projets mais a beaucoup hésité. Et puis l’animal est très respecté en Europe mais pas franchement reconnu aux Etats-unis, sur ses propres terres.

Pourtant James Gray est l’un des plus grands réalisateurs de sa génération, il est aussi doué et marquant que Wes Anderson, Darren Aronofsky ou Paul-Thomas Anderson.

Comme à son habitude, son film « The immigrant » s’est fait descendre à Cannes avant de retrouver des couleurs dans la presse française de cette semaine, lors de sa sortie.

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Gray rerouve son acteur fétiche, son double de cinéma, Joaquin Phoenix qui est parfait comme à son habitude, mélange d’animal fougueux et blessé. Mais cette fois-ci le réalisateur décide d’une part de livrer le premier rôle à une femme, Marion Cotillard et d’autre part de s’attaquer au film en costunes. L’histoire se déroule en 1921 à New York et suit Ewa, jeune immigrée polonaise dont la soeur est gardée à la frontière en quarantaine dès leur arrivée, pour cause de tuberculose. Ewa n’aura de cesse que de récupérer sa soeur et va pour se faire tomber sous la coupe d’un proxénète. Mais les rapports entre eux vont s’avérer plus nuancés et complexes qu’on pourrait l’imaginer.

Ceux qui n’aiment pas Cotillard risquent de ne toujours pas aimer. Perso, je trouve qu’elle joue bien, en tout cas dans ce film, elle n’en fait pas trop. Son accent polonais est impeccable et elle reste fragile sans jamais tomber dans la démonstration d’actrice. Gray arrive à donner à son histoire particulièrement sombre, des élans de drames qui font penser justement à ses précédents opus, où chaque personnage n’est ni bon ni honnête. Chacun essaye de se sortir comme il peut de la misère, quitte à exploiter l’autre, mais pas sans sentiments, pas de façon détachée mais avec une ambiguité touchante.

La construction du film manque certes quelques peu du souffle qu’on a pu connaitre dans les précédents opus, mais globalement, le film vous tient en haleine et ne peut pas vous laisser indifférent. Il est vrai que James Gray sort rarement les violons et préfère une certaine pudeur, un certain recul que de verser dans du lacrymal démonstratif. Mais c’est tout ce qui accentue l’impact émotionnel de ses histoires.

Gray rend ainsi hommage à sa propre famille qui a du repartir de zéro une fois le pied en dehors du bateau, à ces millions d’anonymes qui ont du s’abaisser et accepter l’humiliation avant de s’intégrer. Le sous-texte politique, le regard historique et critique de James Gray sont des élèments clés de la réussite du long métrage. Le célèbre chef op Darius Khondji enrichit le film d’une superbe lumière chaude dans les intérieurs et glaciale en extérieur, accentuant l’antagonisme entre la liberté pour l’héroine de fuir dans l’inconnu ou celle d’accepter de poursuivre la prostitution dans un cocon protégé.

La subtilité du film et l’habituelle mais classieuse mélancolie de James Gray font de « The immigrant » l’un des très bons films de cette fin d’année à ne surtout pas louper.

 

N°16 – « Jeune et Jolie » de François Ozon

François Ozon confirme avec son nouveau long métrage qu’il sait trouver des sujets vraiment originaux dans le cinéma hexagonal actuel et les porter à l’écran avec classe.

En choisissant d’aborder la prostitution d’une jeune mineure, il sait très bien que son thème peut être hélas d’actualité, aux vues des articles divers sur des étudiant(e)s se prostituant pour arrondir facilement leurs fins de mois. Mais son film aurait pu verser dans le sordide, le misérabilisme, le voyeurisme, le consensualisme d’une dénonciation à la fois moralisatrice et déjà traitée maintes fois…

On aurait pu craindre aussi une certaine provoc déjà rencontrée chez lui mais qui aurait pu virer au très mauvais goût.

Ozon évite tous ces écueils et réussit de nouveau à transcender son concept, tout comme dans son dernier, « Dans la maison« .

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Il faut bien entendu apprécier de nouveau son casting d’une très grande justesse, que ce soit le rôle principal porté par Marine Vacth que les parents joués par Géraldine Pailhas et Frédéric Pierrot, parfaits.

Mais surtout, Ozon aborde la prostitution sous un angle plutôt inédit. La jeune femme découvre le sexe mais pas l’amour, pas les sentiments et se tourne vers la prostitution par pure transgression, par provocation, par curiosité et surtout, volontairement.
Elle n’est pas malheureuse et c’est ce qui pourrait choquer…l’absence de dénonciation. C’est qu’Ozon préfère zapper cet aspect car on se doute bien qu’il n’est pas question de faire l’apologie, de juger ou de dresser un portrait complet du sujet mais plutôt de s’intéresser à la façon dont la jeunesse d’aujourd’hui conçoit le sexe et l’argent.
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Le sexe est partout, facilement disponible. Tout se vend tout s’achète et dès lors dans ‘esprit du personnage, la distinction entre ce qui est bien ou mal n’est pas évident. Elle assume son choix, elle désire se perdre, elle recherche quelquechose, une sensation, une excitation. C’est l’acte transgressif qui la pousse plus que le besoin. Elle n’est pas en manque d’argent, issue d’un milieu plutôt aisé. Non, ici ce qui l’attire est ailleurs et ce qui lui manque aussi. Cette froideur et cette absence de sentiments naissants pour un garçon de son âge sont troublants mais pas surprenants forcément.
François Ozon conte cette histoire avec une grande fluidité, une mise en scène sans fioritures, efficace, une BA adaptée, et alterne brillamment le cocon familial rassurant où l’héroine ne manque de rien et cet ailleurs, cette fuite, cette mise en danger vers laquelle cette jeune fille trop jolie cherche à s’aventurer. Un mal qui n’a pas de raisons évidentes aux yeux de l’extérieur mais qui s’exprime de cette façon chez ce personnage en construction, qui cherche ses repères, ses limites, en s’abimant volontairement, sciemment.
La sortie de l’adolescence peut s’avérer cruelle et violente, la métaphore d’Ozon est en ce sens bien plus intéressante que l’histoire tapageuse d’une gamine qui fait la pute. Explorer la perversité et le coté sombre est toujours délicat, Ozon arrive à rester équilibré tout du long. Son film est sec et juste, restant à la distance suffisante pour prendre la hauteur nécessaire avec son sujet et éviter tous les clichés qui auraient pu s’accumuler. Excellente réussite.

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N°15 n- « Only god forgives » de Nicolas Winding Refn

Ultra attendu depuis le succès critique et public de « Drive« , Nicolas Winding Refn entre en compétition pour la palme d’or aujourd’hui.

Et si vous voulez mon avis …il la mérite !

Mais attention, beaucoup d’entre vous risquent de ne pas aimer, du tout. Car si le réalisateur danois reprend Ryan Gosling en héros quasi muet, sa mise en scène est plus proche de celle de « Walhalla rising, le guerrier silencieux« , à savoir une économie de mots associée à un climat, une lenteur, parsemée d’excés de violence. Un film d’ambiance plus qu’une histoire. Mais quand on a du style et de la classe, on n’a pas forcément besoin de scénario.

Ce dernier tient sur un ticket de métro et n’aurait rien à envier d’un film bourrin de vengeance façon Steven Seagal. D’ailleurs, certains spectateurs m’ont bien gonflé dans la salle à rire à soupirer ou s’émouvoir des giclées de sang. De grâce, si vous n’aimez pas, ayez le respect de le garder pour vous. D’autres à côté peuvent adorer. Et ce fut mon cas. Exprimez vous sur des forums ou sur des blogs mais pas dans une salle…

Le pitch est donc débile. Julian deale de la cocaine en thailande avec son frère, en se servant d’un club de boxe thaïlandaise comme couverture. Mais son frère, ordure de première, se fait descendre par un flic vengeur, après avoir violé et tué une jeune fille. La mère des deux hommes débarque et décide de venger son fils ainé.

Kristine Scott Thomas est méconnaissable et crêve l’écran dans le rôle de cette mère « monstre », castratrice, sèche, impitoyable. Gosling est lui aussi parfait mais on n’en doutait peu. Le rapport entre ce dernier et cette mère, le complexe qu’il a développé, les blocages que lui ont infligé cette gorgonne sont illustrés avec brio. Tout comme la violence sourde, tout comme la détermination du flic, interprété par l’impassible Vithaya Pansringarm, génial.

Alors oui, certains reprocherons à Nicolas Winding Refn de prendre la pause, à la limite de son autocaricature. C’est vrai qu’on n’en n’est pas bien loin, mais justement, il prend le risque.

« Only God Forgives » est un exercice de style majestueux, sombre et envoûtant. Mais il vrai que Refn devra changer un peu de style la prochaine fois, au risque de se vautrer dans le tapis rouge de Cannes 2015 ou 2016…

La bande son est presque aussi réussie que dans « Drive ». J’entend d’ici les reproches sur la violence gratuite du film, éternels relans de spectateurs n’ayant pas compris grand chose au génie du bonhomme. Qu’on m’accuse de snobisme, je m’en fout.

L’immoralité du film est coupée de scènes décalées et drôissimes où l’antagoniste de Ryan Gosling se met en scène. C’est radical, c’est rouge, et putain, c’est bon !

Mais forcément, le film est moins grands public que « Drive »…

 

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N°14 – « Shadow dancer » de James Marsh

Belfast, 1993, alors que les dirigeants de l’IRA négocient la paix, certains irréductibles poursuivent les attentats. Collette fait partie d’une famille d’activites mais se fait prendre. Mac (Clive Owen), agent secret du MI5 lui laisse le choix entre 25 ans de prison et espionner sa famille.

Excellent film que ce « Shadow dancer » sur un thème pourtant maintes fois porté au grand écran…quoique. Justement, ce n’est plus sous l’angle républicain et impérialiste que cette histoire est racontée mais plutôt vue d’une victime du système, d’une enfant du terrorisme, qui n’a pas franchement eu le choix.

Elle est malheureuse, son quotidien familial sent la mort et la perte d’êtres chers sacrifiés pour la cause. Et de futur ou d’idéal, il en est ici peu question, comme si au bout d’une guerre de dizaines et dizaines d’annés, les forces étaient épuisées, lassées, des deux côtés. La mise en scène très sobre met d’ailleurs l’accent sur le climat froid et sec de l’Irlande et sur la pauvreté des habitants et souligne cet état de fait, la guerre larvée ne fait que des morts et n’avance pas, des deux côtés.

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Le personnge de Collette, est portée par une Andrea Riseborough excellente à la mine défaite et fatiguée mais aussi mystérieuse et mutine, comme si le poids des secrets lui avait appris dès le plus jeune âge à ne rien exprimer. C’est d’ailleurs une certaine fausseté des rapports familiaux, des non dits et une vie terroriste parallèle qui font de ce milieu un univers hostile, glacé et étouffant.

Le film arrive à maintenir l’haleine tout du long par un astucieux suspens autour de l’enquête du personnage de Clive Owen. Car les menteurs sont des deux côtés, y compris chez les anglais.  Ce jeu de dupe dont des vies de civils comme d’activistes sont à la clé, est réellement porté à l’écran avec une efficacité redoutable. Elle l’est d’autant plus que James Marsh préfère filmer les silences que les dialogues et arrive ainsi à rendre l’ensemble bien plus percutant.

Le réalisateur ne prend aucun parti, il part d’un constat, dresse un tableau et utilise la crédibilité de cette situation pour surfer sur certaines recettes du thriller et livrer une des très bonnes surprises de ce début d’année.

Je vous propose la bande-annonce pour vous inciter un peu plus à y aller, le film ayant hélas eu peu de pub, il restera peu longtemps à l’affiche, dépéchez vous…

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N°13 – « Les amants du Texas » de David Lowery

Très bien accueilli dans divers festivals cette année, « Les amants du Texas » mérite tout le bien qu’on en a dit mais m’a surpris par sa traitement.

Le film a été vendu comme un pseudo Bonnie and Clyde version années 2010 mais ce n’est pas tout à fait celà, et c’est tant mieux.

L’histoire suit effectivement un couple de gangsters dans les années 60, Bob et Ruth,  mais il s’intéresse surtout à l’après arrestation de Bob. On sait dès le départ qu’il s’évadera de prison pour la rejoindre mais comment réagira t elle quatre après, alors qu’elle lui avait promis de l’attendre, avec leur petit fille, née alors qu’il était déjà sous les barreaux ? D’autant qu’un jeune flic présent lors de leur arrestation, joué par un Ben Foster tout en nuances, essaie de séduire Ruth et de l’amener dans le droit chemin. Et loin d’être un intru, son personnage est surprenant.

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Rooney Mara et Casey Affleck sont très beaux dans ce film et forment de façon crédible les deux faces d’une même pièce, un couple passionné, qui s’est connu enfant, qui s’est aimé dans la transgression criminelle et qui était un couple fusionnel. Mais la séparation et l’âge peuvent-ils avoir une incidence ? C’est l’histoire d’un amour impossible car si lui rejoint sa belle, il la condamne à l’errance et met en danger leur fillette et eux deux. Et puis elle trouve bien des qualités au policier qui la courtise et lui offre un autre futur.

De ce scénario très simple, David Lowery arrive à tirer un très beau film, tendre et désabusé à la fois. Le sursis des personnages et le danger qui les guette, l’impossibilité pour eux de se réunir, forment un creuset idéal pour illustrer comment une histoire d’amour peut résister ou fondre selon les assaults. Il aborde la thématique du choix de l’un des deux amants pour la normalité, pour se sauver soit et sauver l’autre. Et le film joue tout du long sur la décision qui sera faite entre la fuite en avant et le sacrifice amoureux qui signifie le suicide de la relation. Il faudra attendre la dernière minute pour savoir vers quelle direction ira la très belle et énigmatique Ruth, portée par une Rooney Mara parfaite. La voix nasillarde de Casey Affleck est utilisée avec soin tout au long des lectures des échanges épistolaires entre le couple. Mais le réalisateur prend surtout un parti pris, celui de filmer avec lenteur et de baigner son film d’une beauté naturelle qui fait forcément penser à Terrence Malick. Il y’a pire comme inspirateur.

Le film pourrait s’apparenter à une lente ballade sentimentale dont l’épilogue ne pourra pas vous laisser indifférent. C’est beau comme tout parcours de vie brisé, comme toute histoire qui aurait pu s’écrire autrement et dont l’épilogue tient à un fil. Et c’est un très joli film qui raisonne des regrets les plus beaux.

 

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N°12 – « The Master » de Paul Thomas Anderson

 

Voila enfin le nouveau film de Paul Thomas Anderson, l’un des meilleurs réalisateurs américains du moment, à la carrière sans fautes, de « Boogie nights » à « There will be blood », en passant par « Magniola« .
Il faut dire que « The master » est un rescapé car depuis 6 ans qu’il traine comme projet, il a bien failli ne pas se tourner, les grands studios ayant eu peur du thème, la montée d’une secte qui ressemble étrangement à la scientologie. Et sans la milliardaire productrice Megan Ellison, Anderson n’aurait pu aborder ce sujet fascinant qu’est le rapport entre le gourou d’une secte et son numéro deux, et la montée en puissance de ses idées dans une Amérique des années 50, déboussolée par la seconde guerre mondiale.

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La première évidence du film c’est que la double interprétation de Philipp Seymour Hoffman en gourou et Joaquin Phoenix en disciple est magistrale, récompensée à juste titre au dernier festival de Venise. Joaquin Phoenix avait quitté les plateaux depuis 5 ans et revient donc maigri et transformé. En jouant cet homme alcoolique, ex marine brisé par la guerre, il rencontre un rôle d’une grande finesse. En jouant à la fois vouté et parlant avec la bouche déformée, Phoenix est bluffant. Face à lui, Seymour Hoffman confirme qu’il est l’un des meilleurs acteurs au monde. Il donne à cet avatar de Ron Hubbard une bonhommie séduisante et dangereuse.

Mais là où Anderson est très fort, c’est qu’il ne présente pas les dirigeants de la secte uniquement comme des manipulateurs mais plus comme des aficionados déboussolés par le charisme d’un homme. Et cet homme complexe est lui même un peu fou et croit en partie aux délires qu’il tente de théoriser. Le détournement qu’il fait des esprits est manifeste, telle une grande entreprise de reformatage des pensées, de croisade non denuée d’intêrét personnels et financiers.

La démonstration d’Anderson est subtile. Sa mise en scène épurée et classieuse sert le recit car contrairement à ce que certains ont reproché à ce trop bon élève qu’est le metteur en scène chouchou des festivals, le manque d’émotion de l’ensemble est volontaire. Anderson ne cherche pas à provoquer de l’empathie mais plutôt à décortiquer un mécanisme et un caractère. Sa réalisation très proche de « There will be blood » permet justement de conserver la distance nécessaire. Tout comme l’infame pétrolier que jouait Daniel Day Lewis dans l’opus précité, il ne servait à rien d’épouser de trop prêt l’humanité du gourou. C’était même dangereux pour le propos général. Grâce à ce parti pris, Hoffman nous livre la figure d’un homme qui peut entrainer derrière lui des centaines de personnes sur de petits détails de personnalité, mélangeant théories scientifiques fumeuses pour créer une nouvelle croyance qui sera d’autant plus suivie qu’elle sera abérante !

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Et puis « The master » est aussi une histoire d’amour entre deux hommes hétéros que tout oppose. D’un coté l’ intellectuel délirant, ogre égocentrique qui avale toute personnalité sur son passage et de l’autre la bête blessée sans aucune direction, sans attaches et totalement exclue de la société. Les deux se fascinent autant qu’ils se détestent, s’aiment autant qu’ils se rejettent. Paul Thomas Anderson nous montre que même un grand gourou de secte peut être faillible et dépendant d’un être très éloigné de lui. Le sujet est donc brillament traité, du jeu à la mise en scène, un grand film.

 

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N°11 – « Gravity » de Alfonso Cuarón

Il est difficile de faire une critique d’un film aussi attendu et dont on parle depuis longtemps, teasé par d’éminents réalisateurs comme James Cameron.

Il faut dire que le concept de Gravity est fort et que son réalisateur, Alfonso Cuarón s’est illustré par le passé avec de bons films comme « Y tu Mama tambien« , « Harry Potter et le Prisonnier d’Azkaban » ou encore l’excellent film de SF, « Les fils de l’homme« .

Le film est en effet un tour de force technique assez bluffant. Il commence par un long plan séquence aboutissant sur l’explosion de la station spatiale de deux cosmonautes propulsés dans l’espace et laissés à eux mêmes.

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Puis les séquences s’enchainent avec deux personnages et deux acteurs parfaits dans leurs rôles. Sandra Bullock est plutôt habituée aux comédies sentimentales et pour ce film, elle change radicalement de registre en interprétant une scientifique qui n’a plus d’attaches sur terres. Georges Clooney apporte quant à lui la dose d’humanité et d’humour nécessaires, contrebalancant cette femme qui se retrouve seule au monde au sens propre comme figuré.

La réussite majeure de Gravity est de vous immerger dans l’espace, dans son silence, son infinité, et de faire en sorte que vous y plongiez comme aucun film n’a réussi à le rendre de façon aussi crédible. Le réalisme est sidérant, que ce soit la violence des chocs en apesanteur que la vitesse. Des images somptueuses au service d’un film dont on pourrait craindre l’ennui puisque la nana va quand même se retrouver seule à flotter dans l’espace en attendant la mort. Et même 1h35, c’est long.

Sauf que bien entendu, Alfonso Cuarón prévoit des rebondissements et ne nous permet pas un instant de relacher la tension de ce survival hyper réaliste, sans aliens, juste une femme, l’univers et la terre à rejoindre à tout prix.

Mais pourquoi? Pourquoi rejoindre la terre ? C’est là que le film prend une dimension plus intéressante encore que le résultat technique. Qu’est ce qui fait qu’on a un instinct de survie et pourquoi ?

Le film réussit à y répondre mais fait à mon sens deux fautes de goût qui le font trébucher sur la dernière marche menant au chef d’oeuvre tant hurlé par toute la presse.

D’abord une scène montre Bullock dans une position faisant référence à 2001, l’Odyssée de l’espace…une scène que j’ai trouvée facile là où le film évite pourtant la niaiserie et le pathos. Car même dans les pires moment, Gravity arrive à émouvoir de façon adulte, avec le recul de l’individu ayant pris conscience de sa petitesse face au grand vide. Une espèce de sagesse et de déterminisme qui marque les personnages et donne justement au film une belle patine. Le second écueil est aussi cette fin pompière et particulièrement chargée en terme de symbolisme…c’est dommage, Cuaron aurait pu soit éviter cette musique insupportable soit couper son film deux scènes plus tôt.

Mais ne boudons pas notre plaisir, Gravity est un excellent mixte de divertissement et de réflexion, de film grand public et de film d’auteur, original, novateur.

 

Voilà pour la première partie de mes coups de coeur cinéma 2013, les 10 meilleurs, la suite, c’est pour dans quelques jours…

Les pires films de l’année 2013 du Blanc Lapin

8 décembre, 2013

La fin d’année approche et il est temps de dresser les bilans, hisoire de se souvenir, de ne pas faire du temps un effacage permanent.

Alors le blanc lapin va commencer parcequ’il brulerait volontiers, avec les pires films de l’année ! Sélection oh combien subjective…

 

N°9 – « Lincoln » de Steven Spielberg

Les pires films de l'année 2013 du Blanc Lapin dans Dossiers lincoln-spielberg

Voici enfin le « Lincoln » de Steven Spielberg, vieux projet d’une quinzaine d’années et véritable arlesienne pour le pape d’Hollywood, qui a pensé successivement à Harrison Ford puis Liam Neeson dans le rôle titre avant de convaincre l’un des plus brillants et rares acteurs au monde, Daniel Day Lewis. Ce dernier est sans surprise confondant de ressemblance et sa partition est fine. Hélas, la réalisation de Spielberg, sans tomber dans ses pires travers, m’a laissé un peu sur le coté. Comme si ce dernier, c’était pris dans le tapis, à trop vouloir prendre au sérieux son sujet sans verser dans le pathos, chose qu’on lui a reproché tant de fois, de « ET », « La couleur pourpre » ou « Always » en passant par « Intelligence articielle » ou « Amistad ».
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Justement, Spielberg choisit le même thème que Amistad à savoir la lutte contre l’esclavagisme et s’intéresse plus particulièrement aux derniers mois de Lincoln, pour décrocher un vote en faveur de l’abolition et provoquer ainsi la fin de la guerre de Sécession. Moins sirop que Amistad, film le plus insupportable de Steven Spielberg, Lincoln provoque un intérêt par la sobriété des nombreuses scènes de dialogues et les rouages des manoeuvres politiques qu’a du entreprendre le sacralisé Lincoln pour tordre le cou aux préjugés et accélerer l’histoire. Mais voilà, la cause est tellement pleine de bons sentiments que dès que le personnage de Day Lewis part dans des élans lyriques, le sirop rejaillit et déborde.
Ce n’est pas la faute de l’acteur mais bien celle du réalisateur. La musique pompeuse de John williams n’aide pas franchement, les trompettes rappelant un peu trop la vocation du film à concourir aux Oscars et de flatter le patriotisme américain. Quant à l image quasi christique de Lincoln, elle a évidemment de quoi agacer le chaland, malgré tout le brio de Daniel Day Lewis, qui livre ici une performance de très haut niveau, comme à son habitude.
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L idée de montrer la grande histoire par le trou de la lorgnette, en entrant dans le quotidien du Président est pertinente. Spielberg réussit à humaniser le mythe et nous faire palper les hésitations et efforts intellectuels de chacun pour conceptualiser l’abandon de l’esclavage. Il explique aussi très bien le long chemin qu’il restait à parcourir pour l’égalité totale. Mais le didactisme de sa démonstration est un peu lourd, comme toujours chez Spielberg. Le film fait un peu le même effet que « La liste de Schindler »  à savoir qu il s’adresse avant tout à un public americain, Steven expliquant avec un académisme de professeur la grande histoire.
Le film est bavard et parfois trop. Le rythme lent colle en revanche bien aux manoeuvres politiciennes qui ont amené au vote, au risque d’être légèrement ennuyeux par instants.
Bref, Lincoln est un film honnête, bien réalisé mais un peu trop sage à mon gout…
N°8 – « Tip Top » de Serge BOZON

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Suite au meurtre d’un indic, deux femmes de la police des polices débarquent en banlieue lilloise pour mener l’enquête.
« Tip top » de Serge Bozon joue à fond sur le décalage complet de ses personnages iconoclastes dans un univers très proche des films d’Aki Kaurismäki.
Le grain est vieillot façon seventies et séries est allemandes des années 80. Sandrine Kiberlain et Isabelle Huppert s’en donnent à coeur joie dans leur jeu entre la désincarnation et le loufoque permanent. L’humour froid du film fonctionne très bien la premiere demi heure, aidé par un Francois Damiens nageant dans cet univers toc comme un poisson dans l’eau.

En revanche certains acteurs jouent comme des quiches et sont probablement des amateurs…pire, ils jouent mal les personnages s’exprimant de façon perchée.

Mais le problème du film vient ensuite par une accumulation de pauses, et de scènes toutes du même acabit, finissant par lasser votre devoué blanc lapin. La surenchère de rien a finit par m’ennuyer, tout simplement, l’incongruité des personnages faisant ressortir du long métrage uniquement du toc et une posture.

Ceci aurait probablement convenu à un moyen métrage. Mais tout le monde n’a pas le talent de Kaurismaki…c’est clair…le burlesque est à manier avec finesse…et ne doit pas laisser les acteurs en roue libre sinon le malaise prend le dessus….au risque de rendre l’objet filmique non identifié, un peu trop presomptueux et identifiable au final à un exercice de style hermétique et facile. L’idée de depart est bonne mais la paresse se voit trop.

N°7 – « Lone ranger » de Gore Verbinsky

Johnny Depp revient avec un nouveau blockbuster Disney et encore trois tonnes de maquillage sur la gueule avec « Lone ranger« …

Après un début de carrière très très fort, « Arizona dream« , « Dead man« , « Ed wood« , « Las vegas Parano« , ce brillant acteur s’est enferé à la fois dans des rôles funs et exagérés et à la fois dans une complicité destructive artistiquement avec son ami Tim Burton, dont la carrière a pris une direction bien terne et facile. Johnny Depp semble confondre jeu d’acteur et déguisement, transformisme et interprétation de personnages forcément outranciers. Peu de place pour des personnages nuancés. Et c’est bien dommageable.

Depp retrouve Disney et Jerry Bruckheimer, producteur de la franchise « Pirate des Caraibes« et le réalisateur des trois premiers, Gore Verbinski. Ca fixe tout de suite le niveau. Autant dire que le four monumental reçu par le film est amplement mérité ! 215 M$ pour 89 M$ sur le sol américain et 260 M$ dans le monde…

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N°6 - »Gatsby le Magnifique » de Baz Luhrmann
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L’adaptation de Scott Fitzgerald de 1974 avec Robert Redford et Mia Farrow m’avait relativement pétrifié d’ennui, avec une mise en scène relativement plate.
L’idée que Baz Luhrmann réadapte ce classique avec tout le manque de retenue qu’on lui connait était interessante. Et Léonardo DiCaprio en gatsby semblait parfait. Et comme Léo est un acteur brillant, il est Gatsby. Avec une classe qui force le respect, il est l’interet principal du long métrage.
Mais contrairement à « Moulin rouge« , Gatsby manque de souffle et de panache. Et la comparaison est facile puisque Luhrmann en fout plein la vue niveau visuel et décorum dès le début. Il nous prend par la main pour entrer dans des fêtes somptueuses mais dépourvues d’âme. C’est peut être volontaire mais cette mise en scène, plombée par une voix off qui ralentit le rythme, aboutit à un résultat inverse à l’objectif et on s’ennuie un peu voire beaucoup.Le film reste regardable car Leo est magnifique. Mais cette histoire méritait un traitement moins bourrin que cet étalage de couleurs et de rococo. La mise en scène et le montage écrasent les personnages. Carrey Mulligan, pourtant superbe actrice, devient une idiote sans aucun charisme.Dès lors l’histoire d’amour perd une bonne part de crédibilité. Je suis content financièrement pour Baz Luhrmann et DiCaprio que le film marche au box office mondial. Artistiquement, c’est un autre rendez vous manqué pour Léo après le « John Edgar » de Clint Eastwood. Et ce n’est pas de sa faute à lui, toujours très bon, mais bien celle d’une mise en scène qui manque furieusement de finesse et ne colle pas à son histoire. Dommage.
N°5 – « A la merveille » de Terrence Malick

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Terrence Malick était déjà culte quand il revint fin des années 90 avec « La ligne rouge« , après 25 ans d’abscence. « Le nouveau monde » qui suivit confirma que son génie était intact, et que personne d’autre que lui ne savait donner à dame nature ce rôle à part entière, cette poésie troublante emrobant toutes les scènes.

Avec « The tree of life« , il remporta la palme d’or il y a deux ans mais certains critiques commencèrent à le bouder pour son manièrisme jusque boutiste et ses longs plans contemplatifs limite new age. La naiveté de son propos sur la croyance n’aida pas les plus sceptiques à adhérer. Pour ma part, la magie opéra encore.

Celles et ceux qui n’ont pas aimé « The tree of life » risquent donc de détester ce « A la merveille« . Malick décide en effet de prolonger son expérience encore plus loin. Il s’intéresse ici à une histoire d’amour entre une française et un américain campé par Ben Affleck. Passée la surprise d’entendre parler français la moitié du temps et le fait que le début du film se déroule en France, le style Malick s’affirme avec un minimum de compromis. L’auteur décide de supprimer les dialogues et de nourir uniquement ses superbes images de voix off, essentiellement crlle de Olga Kurylenko, Ben Affleck étant quasi muet du film. Au début ceci fonctionne et donne un aspect aérien, intemporel.

Mais avouons le, au bout d’un moment l’espoir se fait jour de voir un début de dialogue reprendre le fil du récit, tout comme dans « Tree of life ». Mais ce moment n’arrive pas. Ben Affleck est parfait dans son rôle et exprime par de simples gestes tous les doutes du personnage. On voit très bien l’histoire se construire, puis la lassitude arriver subrepticement dans le couple, Affleck commencer à être moins investi que sa copine, elle en souffrir, le tout se déliter. Mais passée cette première étape, l’arrivée du personnage de prêtre de Javier Bardem s’insère mal. On ne voit pas trop le rapport de sa recherche de dieu avec le reste. Et surtout la lassitude s’éprend de nous, spectateurs, se disant intérieurement que l’on va devoir se retapper plus d’une heure de plans sans fil directeur narratif qui puisse être matérialisé par la parole. Le pari de Malick est osé mais extrême et l’ ennui l’emporte hélas, au moment où une énième aude à la nature nous déclenche un sourire plus narquois et agacé que contemplatif.
Terrence Malick reviendra avec deux films en 2014, avec un casting de malade comprenant Ryan Gosling, Christian Bale, Michael Fassbender, Natalie Portman ou Cate Blanchet.J’espère que son cinéma retrouvera un tour plus dialogué avec une trame moins décousue, car j’adore ce réalisateur mais il a atteint ici la limite de son expérimentation.

 

N°4 – « Le Congrès » de Ari Folman

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Après « Valse avec Bachir », on attendait le retour de Ari Folman. Curieusement, ce dernier choisissait d’abandonner l’animation pour faire un film mixant animation et prises de vues réelles, avec une vraie actrice, Robin Wright.

Et son thème était passionnant puisque « Le Congrès » suit une actrice de plus de quarante ans qui a fait de mauvais choix, dont la carrière est derrière elle et à qui des producteurs vont proposer un pacte terrible. Ils lui offrent un dernier contrat, à savoir qu’elle fasse scanner toutes ses expressions pour qu’ensuite le studio la récréé en image de synthèse et fasse jouer son double sans même recourir à elle.

Ainsi son image pourra t elle jouer pour la fin des temps sans jamais vieillir.

A l’heure où James Cameron envisage très sérieusement de produire des films ou concerts avec Marilyn Monroe ou le King, l’heure où la publicité déterre des icônes pour vendre ses produits (Steve McQueen, Grace Kelly, Audrey Hepburn…), le sujet n’est pas de tant science-fiction que celà.

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La technique existe, elle est là. Aujourd’hui les avancées de la motion capture utilisée sur Avatar permettraient de faire se cotoyer des acteurs d’aujourd’hui avec des monstres sacrés, morts depuis des décennies. Alors quel intérêt autre que commercial ? A priori l’objectif est putassier car comment retrouver l’âme de l’acteur ? Ce n’est pas un acteur tiers qui peut jouer comme l’acteur en question, l’enveloppe physique ne suffisant pas. Et puis d’un point de vue éthique, c’est tout simplement plus que limite.

Ici dans « Le Congrès », la première partie du film amène bien le sujet mais très curieusement l’abandonne en cours de route. On aurait aimé que ces questions soient approfondies, que des contre arguments soient avancés.

Mais il n’en n’est rien. Alors que Ari Folman disposait d’une excellente actrice, superbe, il préfère tomber dans un délire visuel animé, psychédélique et incompréhensible à biens des moments. Le film devient alors ennuyeux à force d’étaler des incohérences et de survoler son sujet en passant complétement à côté. Du coup, la frustration l’emporte. Bien partis sur 3/4 d’heure, le basculement dans l’animation agace, fatigue et vous sort complètement du long métrage, qui dure tout de même 2 heures…et quand on s’ennuie, c’est super long une heure…

Bref, Folman aurait mieux fait de virer totalement l’animation et de passer à un film classique. Ici il semble avoir eu la mauvaise idée de ne point poursuivre son scénario et de s’être laissé aller à un délire éreintant pour le spectateur.

Pour le coup son animation est désincarnée et ne risque pas de remplacer de vrais acteurs.

Une grande, très grande déception.

 

N°3- « Le Monde fantastique d’Oz » de Sam Raimi

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Prequel du Magicien d’Oz de Victor Flemîng, qui fut en 1939 une vraie révolution en technicolor, le film de Sam Raimi arrive enfin sur nos écrans. Plusieurs réalisateurs se sont succédés sur ce projet avant que Disney ne choisisse celui qui donna à Spiderman un accueil critique et public exceptionnel. Pour ma part, j’ai toujours trouvé la trilogie de l’homme araignée beaucoup trop consensuelle et ricaine à mon goût. Mais Raimi est un brillant metteur en scène.

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L’accueil par la presse du film est plutôt bon et met l’accent sur une comparaison avec le « Alice au pays des merveilles » de Tim Burton, que j’ai détesté, soulignant que cet Oz est moins laid, plus inspiré, et parsemé de clins d’oeils malins…Bon, soyons clairs, le début du film est très réussi, en noir et blanc, l’ introduction du charlatant qu’est Oz fait référence à tout un pan du cinema. Et l’évidence s’impose dès ces premières scènes, James Franco était un choix génial. Sa bouille de beau gosse au sourire charmeur et regard faux cul collent parfaitement au rôle. Il est l’atout principal du film et porte les meilleures séquences par sa roublardise et son coté petit garçon chenapant.
Le problème c’est que c’est bien la seule véritable réussite du long métrage. Les couleurs criardes du pays d’Oz sont en effet tout aussi écœurantes et fake que celles d’Alice. C’est assez moche en fait et là où le carton-pâte pouvait avoir du charme, les décos, arbres, champs, fleurs en image de synthèse donnent plutôt envie de fuir de ce pays d’Oz. On se demande d’ailleurs bien comment le magicien peut avoir envie de passer sa vie avec une sorcière niaise avec une couronne ridicule de Miss france sur la tête, ou une poupée de porcelaine plus chiante qu’une diva, ou un singe ailé un peu con et naif …ce pays d’Oz est un enfer.

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La présentation des populations fringuées comme dans le film d’origine fait flipper. Ok c’est un hommage mais le film d’origine a 74 ans ! Et l’imagerie aurait pu évoluer et s’adapter au public actuel. Les habitants du pays d’Oz sont tout simplement à baffer. La découverte du pays en lui même est plutôt expédiee, limitant la féerie à ces châteaux d’émeraude toc, comme construits en faux bijous de verre pour petites filles. Enfin la méchante sorcière est particulièrement ratée, caricaturale et pas effrayante du tout. Le film est donc fait pour les enfants mais même eux risquent de s’emmerder ferme et de rêver de devenir serial killers dans ce bon vieux pays d’Oz, histoire de liquider deux trois insuportables nains ou idiots du village…gratuitement. La sécurité à l’entree des parcs Disney devrait se renforcer …

Bref, la notion de poésie et d’imaginaire est subjective mais je ne pensais pas que celle des vieux Disney ringards reviendrait aussi vive.Alors bien sûr, il y a un sous texte sur le pouvoir du cinéma, sa capacité à faire croire aux gens en des choses tellement fortes, tellement belles que tout peut aller mieux après…plus balourd que celà, tu meurs. Terry Gilliam sait suggérer ce genre de message avec finesse, complexité dans un beau bordel fascinant. Là, tout est propre et idiot, avec des personnages sans aucun intérêt, aucune profondeur et un côté obscur tellement gentil que j’ai failli vomir du sucre d’orge.

C’est donc un film sans personnalité, lisse et vieillot que nous a livré Sam Raimi. On l’a connu plus Rock’n'roll avec ses Evil dead. Disons que lui aussi a du la trouver la montagne d’or dans laquelle James Franco se plonge, mais probablement dans le palais de la belle au bois dormant des parcs Disney, quitte à y perdre son âme. Il aurait mieux fait de fuir vers de tout autres cieux…il rejoint ainsi Tim Burton dans la cour des grands qui se sont totalement laissés bouffer par le fric et la paresse.

 

N°2 – « L’écume des jours » de Michel Gondry

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Michel Gondry a son public d’aficionados émerveillés par « La science des rêves » ou « Eternal sunshine of the spotless mind » et qui souvent l’ont des découverts par ses clips barrés de Björk.

C’est vrai que l’animal a un univers créatif singulier, une signature comme en ont des Terry Gilliam, Wes Anderson, Tim Burton ou Guillermo del Toro. Un réalisateur à l’imaginaire débridé ancré dans les effets visuels de bric et de broc, dans la nostalgie de l’enfance et de la capacité que l’on a tout petit à transformer notre quotidien par le rêve.

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J’ai toujours été sensible à Gondry mais je suis resté souvent sur ma faim, ce dernier ne réussisant pas à terminer ses films, laissant le scénario en roue libre ou s’appuyant trop sur ses délires visuels et pas assez sur un épilogue qui tienne la route. « Rembobinez soyez sympa » en est le cruel exemple, 1/2 heure très bonne puis l’ennui de la répétition.

Adapter Boris Vian relevait de l’impossible. Mais confier le projet à Michel Gondry était logique. Qui mieux que lui pouvait saisir la poésie du roman de Vian et illustrer par l’image les multiples métaphores ?
Seulement voila, passées les vingt premières minutes, le défaut précité de Gondry arrive mais bien plus tôt que d’habitude et surtout bien plus fort. Il y a comme une lassitude rapide devant cet étalage d’effets visuels délirants et charmants au demeurant. A trop montrer un monde irréel et trop appuyer sur l’univers qu’il cherche à reconstruire, il finit par nous détacher des personnages au point que l’on se fout complètement de ce qui leur arrive.

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L’univers de Gondry vampirise le récit et le laisse exempt de toute émotion. Et c’est un comble que la transposition du beau roman de Vian ne provoque aucun sentiment et se contente d’étaler un catalogue de trouvailles visuelles, écrasant de leur omniprésence tout le reste. A trop vouloir assurer le côté poésie, Gondry en a oublié comme d’habitude qu’il avait une histoire, des personnages à qui donner une âme. Romain Duris et Audrey Tautou sont bien trop transparents. L’enfilement d’effets « façon Gondry » tue l’histoire et n’en fait plus qu’un long, très long clip qui quand il se termine, laisse une grande frustration.

Le sens de la tragédie n’est vérirablement pas le fort du cinéaste. Ce défaut d’affect est véritablement le pire hommage que, l’on pouvait rendre à Boris Vian. Michel Gondry s’est planté et c’est agaçant car visuellement son film est splendide.

 

AND FOR THE FILM LE PLUS NAZE DE L’ANNEE

 THE WINNER IS …

 

N°1 – « Pacific Rim » de Guillermo Del Toro 

J’adore Guillermo Del Toro car il a un style, à lui, un imaginaire foisonnant et un talent qui a explosé dans ses deux Hellboy et dans le Labyrinthe de Pan.

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Ayant du abandonner son adaptation des « Montagnes hallucinées » faute de budget, il s’est tourné vers ce Pacific Rim, hommage aux films de monstres kaijus japonais (façon Godzilla) et aux robots vus aussi dans l’animation nippone (Goldorak and Co).
Il est vrai que le film impressionne par sa lisibilité, sa fluidité de mise en scène, Del Toro étant très doué pour les scènes d’action. Ces robots géants chargés de terrasser des aliens marins gros comme plusieurs immeubles, sont visuellement parfaits.  Les monstres, eux, sont très moches, leur look m’a un peu gavé.

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Au delà de cet aspect, le scénario est affligeant à bien des égards. Tout d’abord l’histoire est super con et ultra attendue. Les personnages sont caricaturaux, que ce soit Idris Elba en général qui plombe le film de discours patriotiques à deux balles, l’héroïne qui veut prouver qu’elle a des couilles mais qui est trop mais alors trop sensible, ou pires, les chercheurs fous chargés de donner la dose comique. Sauf qu’ils ne sont pas drôles du tout avec leur humour pour ados pré-pubères, et qu’on a envie qu’un monstre les avale et les mâche bien lentement.

Le casting est insupportable. Le trafiquant d’organes joué par Ron Perlman est ridicule, l’acteur surjouant façon badass, sauf que si pour jouer Hellboy c’était parfait, ici c’est juste chiant. Et puis la linéarité des rebondissements, tous attendus, a finis par m’achever. Il y a même un chien sympa ! C’est pour dire ! Transformers ce n’est pas terrible mais il n’y a pas de chien bordel !
Donc de Pacific Rim, il faut mettre à la poubelle tout ce qui n’est pas scène de baston! Et pour ces scènes là, vous en aurez pour votre argent. Sauf que la 3D ne sert à pas grand chose si ce n’est à vous piquer 3 ou 4 € de plus et à ternir la colorimétrie.
Pacific Rim est une grande déception. C est mauvais tout simplement. N’y allez pas! Profitez du soleil! Ou allez voir l’excellent Frances Haa (critique ici) !
J’espere juste que Del Toro ne va pas faire son Tim Burton gavé au fric des studios et qu’il saura retrouver l’inspiration, ca devient une priorité pour sa carrière artistique. Si le film pouvait ne pas trop marcher, ca l’obligerait à se concentrer sur ses scénarii.

 

Allez, d’ici quelques jours, votre blanc lapin préféré vous livrera le côté Jedi du bilan annuel !

Les meilleurs films du Blanc lapin 2012 – Partie 2 – N°7 à N°1

23 décembre, 2012

Après la première partie (Les meilleurs films du Blanc lapin 2012 – Partie 1), suite et fin du classement subjectif des meilleurs films du Blanc Lapin vus en 2012 avec ma critique à chaque fois…

 

N°7 – « The dark Knight Rises » de Christopher Nolan

Les meilleurs films du Blanc lapin 2012 – Partie 2 – N°7 à N°1 dans Dossiers 2096848-the_dark_knight_rises

Quatre ans après avoir scotché la presse et remporté le troisième plus grand succès de tous les temps au box office, Christopher Nolan conclut sa trilogie autour de son Batman réaliste et adulte.

Certains ont été déçus, peut être parceque « The dark knight rises » n’est pas exactement dans la continuité de style que « The dark knight » mais plutôt dans un mixte de « Batman begins » et du second volet. Car ce qui frappe c’est évidemment la cohérence de l’ensemble des trois films, les renvois aux deux précédents et la logique implacable de la trilogie. Bruce Wayne / Batman se construit par rapport à la mort de ses parents et l’évolution de Gotham city. Et les méchants qui s’attaquent à la ville, l’agressent comme un individu et se construisent eux aussi en creux par rapport à Gotham. Dès lors il serait injuste de passer au second plan le super méchant de cette histoire, Bane, joué par l’excellent Tom Hardy, au prétexte que le joker d’Heath Ledger était parfait. Bane est lui aussi un terroriste mais pas pour les mêmes raisons. Il est intelligent et bien plus dangereux physiquement. Mais il ne souhaite pas jouer avec batman, contrairement au Joker. Ce dernier était le nemesis de Batman, il avait besoin de Batman, et besoin du chaos et de l’anarchie comme toile de fond permanente pour satisfaire sa folie. Bane au contraire est encore plus flippant car il veut tout détruire, tout raser et ne pas laisser Batman survivre. C’est un méchant ultra violent et qui fait peur lui aussi car il a un but clairement avoué d’entrée et fonctionne comme un rouleau compresseur. En ce sens, Christopher Nolan a tès bien sélectionné l’ennemi du caped crusader.

Catwoman est quant elle campée par une Anne Hathaway très éloignée de la sulfureuse Michelle Pfeiffer de Tim Burton. Tellement éloignée que la comparaison ne vient pas à l’esprit. Son rôle s’imbrique parfaitement dans le scénario et rejoint plutôt le personnage du comic book, très ambivalent et inclassable entre alliée ou ennemie.

La relation entre Bruce wayne et Alfred (excellent Michael Caine) prend quant à elle une tournure touchante, une relation tout en délicatesse à comparer à la brutalité du long métrage. Mais la surprise vient de l’un de mes chouchous, le jeune Joseph-Gordon Levitt, dont la présence est importante à l’écran. Il apporte l’espoir, la lumière dans un Gotham en perdition, menacé d’être ravagé par Bane. Il incarne l’intégrité et le courage de jeunes de Gotham qui ont toujours cru en Batman et ne se sont pas laissés bernés par le sacrifice de ce dernier et de Gordon à la fin de l’opus précédent. C’est là aussi un choix de personnage et de casting inspiré qui fait prendre tout son sens à la naissance d’une légende et de ce qu’est un super héros dans l’imaginaire collectif. Joseph Gordon-Levitt apporte toute sa nuance de jeu à ce personnage clé, sans qui cet épisode n’aurait peu être pas atteint un tel niveau.

Christopher Nolan exploite aussi l’actualité et s’inspire des dérives criantes du capitalisme pour donner un peu de morale à tout cela. Pas une morale donneuse de leçon mais une humanisation des convictions et motivations des terroristes. Ca ne les rend pas moins effrayants mais c’est moins binaire qu’à l’accoutumée.

Et puis pour terminer cette critique plus que positive de ce petit bijou, Nolan a eu l’intelligence de terminer sa trilogie sur un final comme j’en ai rarement vu, une fin véritablement à la hauteur des promesses. Il va être très difficile pour un autre réalisateur de passer derrière Nolan et de donner une autre vision tout aussi pertinente de Batman. Personnellement je ne pouvais pas attendre mieux, c’est pourquoi je mets 5 blancs lapins. Nolan ne s’est pas répété, il s’est renouvelé et a imbriqué les trois films ensemble, c’est classe, très très classe.

 

N°6 – « La chasse » de Thomas Vinterberg

 dans Films

14 ans après son chef d’oeuvre, « Festen« , et deux ans après son retour artistique réussi avec « Submarino« , Thomas Vinterberg confirme qu’il a retrouvé l’inspiration et le talent qui lui a manqué pendant les années 2000, écrasé par son ultra succès très jeune.

« La chasse » a divisé la presse tant à Cannes qu’aujourd’hui lors de sa sortie en salles. Seule le prix d’interprétation masculine à Cannes pour Mads Nikkelsen ne suscite pas de controverse, tant son jeu est parfait.

Pour ma part, je suis de ceux qui ont adoré ce nouvel opus, et ne comprends pas le rejet d’une partie de cette presse ou l’affirmaton que Vinterberg opte pour la facilité, la lourdeur du propos, caricatural, offrant un film maladroit et malhonnète….n’en jetez plus ! Le snobisme de certains critiques a encore frappé, comme si ces derniers étaient incapables de pardonner à Vinterberg de ne pas avoir eu la carrière qu’on lui prêtait.

Ici, il  choisit de réaliser une sorte de double négatif de « Festen » à bien des égards. Son film n’atteint pas le niveau de cet illustre prédecesseur mais il frappe fort et juste sur une thématique souvent abordée au cinéma. Ici il est question du rejet de la foule, de la société mais cette fois l’injustice qui touche le personnage s’ancre dans une période où les scandales pédophiles ont parsemé l’actualité de blessures très vives et d’inquiètudes bien normales de tout parent normalement constitué.

L’homme que l’on observe est donc accusé par une fillette d’attouchements sexuels et cette fillette n’est autre que la fille de son meilleur ami. Il n’ y a pas de preuve de l’affirmation de l’enfant mais juste la parole de cette dernière et l’impossibilité pour l’adulte de se défendre. Vinterberg va nous montrer comment sur un rien, un mensonge d’enfant, toute la vie de ce type va basculer suite à l’engrenage du doute.

Une fois qu’un adulte se fait sa propre opinion sans fait objectif pour la valider, tous vont se mettre à croire au monstre, qu’ils ont vus partout dans les médias et qui pourrait donc se tapir auprès d’eux, parmi eux. Le déterminisme de ce jeu de massacre, d’exclusion et d’autopersuasion dans la haine et le rejet est finement abordé. Par quelques évènements, l’adulte va mettre la parole de l’enfant au dessus de tout et va même jusqu’à ne pas croire ce dernier lorsqu’il fait marche arrière et avoue son mensonge. On pense évidemment à l’affaire d’Outreau mais pas pour les erreurs judiciaires puisqu’ici la justice fait très bien son travail. « La chasse » montre les conséquences inaltérables de la rumeur, de l’opprobre, l’impossibilité de laver ces accusations, qui resteront quoiqu’il advienne.

L’homme se trouve traqué et dans l’impossibilité de prouver l’improuvable, un cercle vicieux qui donne le tournis et fait froid dans le dos, car ceci peut arriver à n’importe qui.

Il y a certes des clichés dans « La chasse » mais ils ne m’ont en rien gêné, l’objectif n’est pas là. Le fait que le héros soit clairement innocent est au contraire un choix scénaristique intelligent pour démonter un mécanisme. Le choix peut ne pas plaire à certains, moi je le trouve cohérent et bienvenu. Le trouble n’aurait pas été le même dans cette option de scénario.

Contrairement à « Festen » et davantage dans la veine de « Submarino« , Vinterberg choisit la lumière et l’espoir via ces quelques personnes qui décident de croire en l’humain qu’ils connaissaient et le soutiennent jusqu’au bout. Le personnage du cousin et celui du fils de l’accusé amènent une bouffée d’espoir, dressant au passage une belle image de l’amour père-fils et du lien familial.  « La chasse » parle aussi de la confiance dans un ami d’enfance, qui ne peut se prouver par rien de concret, juste par une connaissance de l’autre, de son « moi intérieur », de son humanité. Le film parle aussi de pardon, de communauté, et regarde de l’avant avec une fin tout de même très maligne et dénuée du cynisme que les détracteurs lui prêtent. Nous n’avons probablement pas vu le même long métrage.

La chasse est un grand film, implacable, glaçant, traversé de très belles touches d’humanité, d’émotion, sans pathos et avec le recul et la froideur nécessaire à ce type de sujet.

Une des grandes réussites de cette année.

 

N°5 – « A dangerous method » de David Cronenberg

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Après deux chefs d’oeuvre, « A history of violence » et « Les promesses de l’ombre« , David Cronenberg revient avec un film plus âpre et moins facile d’accès.

Faisant preuve d’un Grand classicisme dans la réalisation, le maitre prend son temps pour installer ses personnages et les laisser se livrer à leurs échanges intellectuels, au demeurant passionnants.
La relation entre Carl Jung et Sigmund Freud est alors disséquée par échanges verbaux et lectures épistolaires sur leur approche respective de la psychanalyse.

Une confrontation du père au fils spirituel va dès lors avoir lieu sous nos yeux…il faut tuer le père pour prendre son envol, illustration !Jung s’éloigne des théories de Freud tout en respectant son impact et son apport, il souhaite aborder la parapsychologie, apporter une réponse au patient, lui indiquer le chemin qu’il devrait suivre pour être épanoui en fonction de ses attentes. Freud souhaite quant à lui se limiter à la définition des causes d’un trauma. Il ne veut pas se transformer en dieu qui indique au patient que faire. Il reproche d’ailleurs à Jung ses origines ariennes et fait une remarque surprenante à la disciple de Jung qui est juive comme lui.

Il estime que Jung étant arien, il faut se méfier de son approche « supérieure » et influencée par la haute opinion qu’un arien a de lui-même. Réflexion rapide mais d’autant plus significative que Jung, sur le même sujet, ne comprend pas pourquoi faire une distinction d’origines et de religions, et n’adhère absolument pas au racisme de ces temps troublés.

Un bel exemple de la richesse et de la profondeur du propos, à savoir les limites du chercheur et de sa raison, même pour les découvreurs de cette discipline. Limites qui trouvent racine dans les rapports de classe, les règles sociales qui font tenir une organisation humaine, règles morales ou idées préconçues qui préservent de l’anarchie. Qui évitent et classent certains sujets pour ne pas mettre en péril les fondements d’un système d’organisation politique humain.

Freud souhaite d’ailleurs exclure la religion de leurs réflexion pour ne pas polluer leurs recherches mais se trouve tout de même rattrapé par un a priori, issu de l’oppression millénaire juive et du climat antisémite d’avant guerre.
Le personnage de Vincent Cassel est excellent car il montre un psychiatre lui même en fin de psychanalyse et qui s’est libéré de tous les carcans sociaux et moraux pour retrouver sa liberté totale, sexuelle en premier lieu. Un véritable anarchiste, très différent d’un révolutionnaire…
Il est donc question de sexe, de désir et d’amour, de la définition de la limite entre le désir pur et davantage, de l’impossibilité même pour ces éminents chercheurs de se départir de leur passions, même sur la longue durée. Cronenberg réussit donc une oeuvre certes aride mais d’une telle exigence intellectuelle qu’elle force l’intérêt et captive. Viggo Mortensen est brillant mais Michael Fassbender lui vole la vedette. L’acteur est un caméléon et prouve après « shame« , « hunger« , « fish tank » et « x-men first class » qu’il peut tout jouer. Quel plaisir qu’un tel acteur rencontre ce succès et soit aussi pertinent dans ses choix. En 2012, nous le verrons dans « Prometheus« , prequel d’Alien de Ridley Scott et nous verrons Cronenberg dans un tout autre style avec Robert Pattinson, de Twilight, un sacré défi pour le jeune homme et un pari gonflé pour le maitre canadien. « A dangerous method » est en tout cas une belle réussite, mais moins évidente à premier abord que d’autres longs de Cronenberg…

 

 N°4 – « Holy motors » de Léos Carax

holy-motors-affiche-4fc3749015757 dans Les meilleurs films du Blanc Lapin

Léos Carax est l’auteur maudit par excellence, une image un peu agaçante parfois mais pourtant bien vraie. Alors que « Mauvais sang » l’avait propulsé comme un jeune prodige estimé de tous, « Les amants du pont neuf » avaient créé le scandale par le coût faramineux du long métrage et le four au box-office qui s’en suivit, faisant oublier au passage la qualité du film. Puis ce fut un long désert, un « Pola X » pas terrible, et pas grand chose en vingt ans.

Dès lors, que ce soit le réalisateur lui-même qui ouvre la première scène de « Holy Motors » et nous invite à entrer dans son imaginaire est chargé de sens et de promesses.

Seulement voilà, pour celles et ceux qui voudraient de la cohérence et du scénario linéaire, il faudra repasser une autre fois. Car très honnêtement, on ne comprend pas tout. Et c’est tant mieux. L’acteur fétiche de Carax, Denis Lavant, endosse avec brio un rôle protéiforme, celui de Monsieur Oscar, un homme payé pour jouer des rôles et entrer dans la peau de vrais personnages. Edith Scob joue la conductrice de l’énorme Cadillac dans laquelle il se change et se maquille. Elle l’emmène d’histoires en histoires. Il faut bien évidemment y voir une métaphore ou plusieurs mêmes, dont celle du métier d’acteur, qui n’aide pas franchement à avoir des racines mais se résume plutôt à devenir un passeur de vies.

Cette très belle idée est particulièrement bien rendue et donne lieu à des scènes relativement perchées. Le danger de ce genre de film, c’est ne pas adhérer et de s’emmerder ferme. Pour ma part, ceci m’a touché, pas au point de crier au génie comme l’on fait certaines critiques à Cannes. Mais j’avoue avoir été bluffé à plusieurs reprises. Le film n’est pas prétentieux, il est juste décousu, volontairement, sans ligne directrice, ce qui s’avère perturbant mais pas chiant. On se retrouve simplement frustré de ne pas tout saisir tout le temps. Voir Kylie Minogue chanter avec mélancolie son amour gâché en pleine Samaritaine en ruine a quelquechose de kitsch et de poétique.

L’autre force du film est son humour, chose surprenante mais oui, Léos Carax s’amuse avec son spectateur, avec qui, dès le départ, il assume le côté toc du film. Il regarde la salle et l’invite à passer de morceaux d’histoires en morceaux d’histoire, comme dans un envers du décor surréaliste où les vrais gens seraient pour certains des acteurs qui se croisent et vivent de multiples vies. Le film se métamorphose, Carax s’autocite que ce soit en explorant cette samaritaine si proche de son fameux Pont Neuf ou en faisant revenir le personnage de Piccoli de « Mauvais sang ». C’est sûr que pour les non cinéphiles, ceci vous laissera de marbre.

Et puis grâce à ce choix sans concession, Léos Carax arrive à tourner plusieurs films et non un seul, laissant libre court à son talent de mise en scène, à la forme plutôt qu’au fond, le fond étant un long murmure délirant…

C’est une manière d’autoparodier sa propre vie d’artiste, cinéastes incapable de faire un choix sur une histoire à raconter et voguant de projets avortés en projets avortés depuis 15 ans. On ne comprend pas toujours un poème et ce n’est pas bien grave au final, le tout est d’en ressortir ému, transpercé de diverses sensations, de bribes d’histoires et de visuels fantaisistes, un film détonant par la liberté qu’il s’offre.

Un objet filmique non identifié et unique. Merci Monsieur Carax d’être revenu passer nous faire un clin d’oeil. Vous serez toujours le bienvenu.

 

N°3 – « Moonrise Kingdom » de Wes Anderson

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Voici enfin « Moonrise Kingdom« , première incursion en compétition officielle à Cannes pour l’un des meilleurs réalisateurs quadras hollywoodiens.
Il y a peu de metteurs en scène dont on reconnait la pate au premier plan. Comme dans « La vie aquatique« , Wes Anderson commence son film par des travellings virtuoses de camera au travers du  décor de la maison familiale des protagonistes. En accentuant cet aspect carton pate et décorum de cinéma, il nous insère avec brio dans ce cocon familial clos, maison isolée elle même sur une ile et, au passage, nous livre un clin œil, une invitation à entrer dans son petit univers.

Les couleurs jaunies très sixties sont complétées par un montage, un séquençage des scènes très efficace et d’un niveau bluffant. On ne sait pas où on va mais on y va en rythme ! Certains critiques reprochent à Wes Anderson de ne pas se renouveler, de toujours raconter une histoire de famille sur un ton situé entre nostalgie, absurde et déconnexion lunaire. Mais contrairement à un Tim Burton qui ne fait que « copier coller » sans âme ses marques visuelles, Anderson construit bien une autre histoire, différente des précédentes. La thématique est toujours familiale, une famille qu’on ne choisit pas, une adolescence qui laisse des traces, mais c’est le cas de la plupart des réalisateurs que de retourner à des sujets fétiches.

Ce qui interpelle dans ce nouvel opus, au-delà du jeu de cette brochette d’acteurs (Bruce Willis, Frances McDormand, Edward Norton, Bill Murray), c’est ce souci du détail dans chaque plan, cette délicatesse dans l’expression des  états d’âme de chaque personnage, tout en survolant l’ensemble avec un second degré permanent. Une légèreté qui prend racine dans une dérision assumée, qui pourtant traite de sujets bien en relief. L’image, la colorimétrie sont là pour accentuer cet espace isolé où cohabitent des protagonistes tous un peu perchés. Mais ces thématiques  n’en demeurent pas moins universelles et il serait dommage d’en zapper la profondeur.

« Moonrise kingdom » c’est un peu l’aventure et l’imaginaire de l’enfance qui rencontre la frontière de l’âge adulte.

Ces adultes sont tristes, dépressifs et n’ont plus de projets, plus d’entrain, ils restent coincés dans leur vie de famille comme Bill Murray et Frances MacDormand, couple qui ne se s’aime plus mais reste ensemble par commodité, pour les enfants.
Le burlesque des situations provoque des rires mais jamais des éclats car la tendresse qu’a Wes Anderson pour ses personnages est incroyablement communicative. Elle vous donne la patate car on se reconnaitra tous dans les errements de ces gamins qui cherchent à échapper à cette destinée peu reluisante et figée du monde des adultes.
Les enfants cherchent à être des grands et les adultes à jouer aux scouts ou aux amoureux adolescents plutôt que de prendre des décisions concrètes et engageantes. Un film sur le pouvoir de la naïveté. Les enfants veulent être libres et adultes le plus vite possible alors que les adultes cherchent à retourner dans cette période si particulière. Un chassé croisé drôle et rocambolesque.
Anderson est timide et cache ses messages derrière son drôle de style qui n’appartient qu’à lui mais qui en fait décidément un des très grands auteurs mondiaux d’aujourd’hui.

 

N°2- « Bullhead » de Michael R. Roskam

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Les belges sont décidément un peuple surprenant. Non contents de nous apporter régulièrement des artistes majeurs, du cinéma des frères Dardenne à Benoit Poelvoorde en passant Bouli Lanners, c’est cette fois-ci à un cinéaste flamand de faire une entrée fracassante avec « Bullhead« .

Ici point de comédie ni de chronique sociale, plutôt un exercice de style avec une approche cinéma de genre particulièrement inspirée, entre western et polar.

En nous plongeant dans le milieu des éleveurs de viande bovine mêlés au trafic d’hormones, Michael R. Roskam brasse les styles. Entre film de mafieux et chronique d’une enfance détruite , le réalisateur va suivre un jeune homme brutal, proche des animaux qu’il élève et abat. Tellement proche qu’il prend des stéroïdes et de la testostérone comme il injecte des produits chimiques à ses animaux.

Matthias Schoenaerts trouve ici un rôle difficile car quasi muet. Et ce dernier va exploser à n’en pas douter. Jacques Audiard vient d’ailleurs de le faire tourner dans son prochain film, « un goût de rouille et d’os » aux côtés de Marion Cotillard. L’année 2012 devrait donc faire connaitre cet acteur au grand public.

Mais c’est surtout un homme seul que l’on suit, un homme coupé du monde par son milieu rural, par l’aspect clanique de sa famille, par la chape mafieuse des hommes avec qui sa famille travaille, par l’infirmité qu’il essaie de combattre en devenant un sur-homme, en cherchant à réparer sa masculinité par l’ apparence de son corps. On se prend bien entendu d’empathie pour cette bête blessée et maladroite, cet homme rustre qui n’a d’humain que ses souvenirs mais dont le trauma originel explique tout le reste. Au-delà de cela, son amitié d’enfant coupée en plein vol avec un garçon qui reparait dans sa vie à l’âge adulte, rajoute une dimension supplémentaire à cette tragédie. Les parallèles entre passé et présent permettent alors au film de décoller vers des niveaux de dramaturgie très très hauts perchés.

Que dire aussi de la mise en scène ? Michael R. Roskam montre dès le départ son parti pris, en filmant la première scène par une caméra frolant la portière d’une voiture qui s’arrête et ne s’attardant pas sur le personnage principal mais sur l’homme avec qui il vient régler des comptes. Une façon d’introduire de nombreuses scènes. Il plante d’abord le décors et les protagonistes extérieurs pour mieux faire ressortir l’immixtion brute et violente du personnage dans un univers où il est forcément perçu avec crainte et interrogation, même par ses proches. L’image est léchée, le montage incisif, la lumière crépusculaire.

La vie peut faire d’un être un monstre et c’est toute la force du film que d’entrer dans cette origine du mal et d’en revenir bluffés par la qualité du récit, sans un gramme de graisse en trop, que de la chair brute et efficace, rien de plus. Un film saisissant sur le déterminisme social, un film noir comme rarement on a l’occasion d’en découvrir et une réussite évidente.

Après ce premier film très référencé, Michael R. Roskam va être très attendu pour la suite de sa carrière.

 

N°1 – « Amour » de Michael Haneke

 

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Voici une palme d’or évidente pour l’autrichien Mickael Haneke, trois ans après sa première palme pour un « Ruban blanc » un peu austère et auteuriste par rapport au reste de sa carrière.

L’homme a toujours eu un regard clinique, notamment sur la violence, d’où ces coups de poings comme « Funny games » ou « La pianiste« .

Mais cette fois-ci, il choisit un thème assez rare au cinéma et abordé de façon différente, que ce soit par exemple chez Julien Duvivier dans « La fin du jour » ou Ingmar Bergman dans « Les fraises sauvages« . Il nous parle de la fin de vie, de la vieillesse et de la mort, mais pas pour la confronter aux regrets, aux souvenirs ou à la jeunesse comme dans les deux chefs d’œuvre précités. Non, Haneke choisit de nous parler d’Amour, de l’amour d’un couple qui a vécu 60 ans ensemble, et de ce qui se passe quand la vieillesse s’empare d’une telle union, d’une telle proximité, d’une telle intimité. Il nous parle de ce qu’il reste d’un couple qui a traversé tant d’épreuves et se trouve au crépuscule de sa vie. Et contrairement à ce qu’on pouvait attendre de l’autrichien froid et distant, « Amour » porte très bien son nom et nous parle de cette tendresse profonde et de ce lien qui fait que ces deux personnes octogénaires ne peuvent vivre l’une sans l’autre comme mourir l’une sans l’autre.

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C’est un film beau et sublime car dépourvu de pathos, de sentimentalisme et bénéficiant du regard sensible d’un réalisateur connu pour son recul et du jeu tout en nuances et en retenue de deux immenses acteurs, Emmanuelle Riva et Jean-Louis Trintignant. Les deux auraient mérité le prix d’interprétation à Cannes mais le règlement du festival interdit au jury d’attribuer ces prix si la palme revient au film. Et pourtant, le film n’existerait pas tel quel sans eux. D’ailleurs Haneke a écrit le film pour Trintignant et a réussit un exploit, celui de faire sortir de sa retraite de 15 ans l’un des plus grands acteurs français, d’abord lassé de jouer autrement qu’au théâtre puis pour les raisons qu’on connait et la disparition de sa fille Marie.

Trintignant est majestueux, sa voix énonce avec clarté son texte avec le ton si particulier qu’on lui connait, face à une Emmanuelle Riva tout aussi classieuse et dont le rôle et loin d’être évident. Les deux acteurs arrivent à faire passer autant la dureté de ces deux êtres qui se connaissent par cœur et ont tout vécu ensemble que la tendresse dans des regards, des petits gestes qui lors de certaines scènes m’ont véritablement ému aux larmes.

Ils sont beaux tous les deux à l’écran et donnent à ce couple et cette marche vers la mort une dimension tragique, fataliste mais finalement pas si morbide que cela. « Amour » est un film parfois dur à regarder car il nous confronte à ce qui nous attend tous, au fait que nous sommes seuls face à la mort quoiqu’il arrive, quelque soit votre entourage. Le film rappelle et pose cette évidence dans une société où le jeunisme n’a jamais été aussi fort et la volonté d’être immortel jamais été autant bercée d’illusion par notre société marchande de rêve.  La sobriété et l’unité de lieu du récit, la froideur et la retenue de leur fille  interprétée par Isabelle Huppert, l’absence d’enfants et quasiment d’intervention extérieure, permettent justement d’isoler le couple dans un espace où le temps est suspendu. On imagine très bien tout ce qui a pu se passer dans leur appartement parisien, tous les livres qu’ils ont lu l’un à coté de l’autre, les moments où elle a joué du piano pour lui, les silences qu’ils ont su apprécier à deux. Les mots se font d’ailleurs économes à cet âge là car ils n’ont plus besoin d’exprimer le lien qui les unit, il se voit en les regardant se tenir la main et moduler le ton de leur voix pour parler plus doucement.

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La générosité d »Amour » est de nous livrer une belle leçon de vie, sur un sujet qu’on évite en général car on préfère ne pas le regarder en face. Un film pudique mais direct sur la fin de vie et le courage qu’il faut pour l’affronter dignement. Haneke a longtemps montré la cruauté de l’être humain dans toute sa profondeur et livre aujourd’hui une belle croyance dans ces mêmes individus et dans l’amour, qu’on définit si mal en général. Il démontre que la vie vaut d’être vécue ne serait-ce que pour ce type de lien, car même lorsque le corps vous lâche et qu’il se détruit, il peut rester cette tendresse jusqu’au bout. Haneke nous parle de ces vieillards qui s’en vont et en ont parfaitement conscience, qui ne veulent pas quitter la scène, qui ont toujours soif de culture, de savoir mais n’ont pas le choix et l’acceptent. Haneke aurait pu se contenter de filmer la déchéance mais il arrive à capter l’empathie, à filmer avec épure la fin d’une très belle aventure avec tout ce qu’elle projette de peur sur nous mais aussi de vérité.

C’est toujours un peu idiot de parler de chef d’œuvre mais pourtant, il y a des films qui sonnent tel quel dès leur première vision. Savoir que Jean-Louis Trintignant termine cette carrière sur cette brillante prestation est en soit un très bel adieu. Cette palme d’or était une évidence, oui.

 

Voilà, c’est finis pour les bilans 2012, place à 2013…vous retrouverez ici même d’ici peu ma sélection des 75 films que j’attend en 2013 avec crainte ou enthousiasme…

Les meilleurs films du Blanc lapin 2012 – Partie 1 – N°15 à N°8

16 décembre, 2012

Pour la quatrième fois, voici le classement des films préférés du Blanc Lapin vus en 2012.

C’est subjectif mais comme je le dis souvent, rares sont les grands films à côté desquels je passe tant je prend les tournages en amont, je veille aux accueils critiques et je regarde tout au bout d’un moment en Dvd ou autre.

Mais c’est vrai que par exemple l’an dernier, je suis passé à côté de « Blackthorn« , magnifique western sur Butch Cassidy, qui aurait figuré dans les premières places probablement.

Bien, je vous ai remis ma critique à chaque fois, parceque c’est pas tout çà mais c’est du boulot d’écrire ! Alors pour celles et ceux que ça intéresse…

Première partie donc, N°15 à N°8 !

 

N°15 – Ex Aequo – Chronicle de « Josh Trank

Les meilleurs films du Blanc lapin 2012 - Partie 1 - N°15 à N°8 dans Dossiers Chronicle_BENL_FA

« Chronicle » est LA surprise SF de ce début d’année puisqu’on ne l’attendait pas plus que cela. Enfin si, le buzz internet et l’excellente bande-annonce laissaient espérer une rencontre entre Cloverfield et le film de supers héros ados sympathique. Mais le nombre de déchets est tel dans le style que je reste toujours sur mes gardes.

Et bien le succès public (le film cartonne dans le monde) et critique est amplement mérité. En effet, le film de Josh Trank emprunte certes l’idée de Cloverfield appliquée au film de monstres ou de « Blair Witch »ou « paranormal activity » aux films d’horreur.

En ceci, rien d’original…sauf qu’une astuce assez maligne permet de rester dans le concept tout au long du film. Le réalisateur prend également soin de traiter les évènements extraordinaire au même niveau que les autres, ce que l’effet caméra à l’épaule du personnage principal souligne tout au long de l’histoire. Mais au delà du film concept, Chronicle reprend la thématique, chère aux supers-héros, de l’être incompris, pour la traiter de façon un peu différente. A la différence d’un Spiderman, nos trois « héros » ont certes des problèmes classiques liés à l’adolescence mais non seulement ils ne les vivent pas de la même manière mais en plus ils ne réagissent pas comme d’habitude, en cherchant à sauver le monde.

Non, ce sont des ados d’aujourd’hui, qui cherchent avant tout à plaire aux filles, à s’éclater, à porter de belles fringues et qui ne sont pas du tout adultes dans leur rapport au monde. Ils aiment une certaine futilité, un consumérisme assumé et faire la teuf. Mais leur conscience sociale est toute relative. Dès lors, pourquoi utiliser des pouvoirs pour aider les autres ? Bref, les trois branleurs que nous voyons ici se la jouent perso et c’est tout naturel chère Madame ! C’est con mais ceci donne un côté moins consensuel et gentillet. Et ça fait du bien. Alors on passe par certains clichés de l’ado rejeté de famille modeste, du mec sympa à qui tout réussit et qui est issu d’une famille bourgeoise, mais bon, ceci permet de construire une dramaturgie là où souvent dans le genre, elle se trouve expédiée en dix minutes.

Autres forces du récit, l’idée de la transmission de leurs supers pouvoirs et de leur découverte respective. C’est aussi jouissif que dans la série « Heroes » car nombreux sont ceux qui ont rêvé de posséder des pouvoirs à la Magneto et de voir comment ça fait et à quoi ça sert. Mais à la différence de la série pré-citée, on ne se perd ni dans les personnages ni dans une exposition trop longue de cette phase « découverte« . Bien entendu, la fin est classique et quelques peu décevante devant la fraicheur du début. L’essentiel est que Chronicle soit un bon divertissement, original dans son genre.

Enfin, comme tout bon film de SF, il faut un méchant pour qui on éprouve de l’empathie, qui ait des raisons et une histoire pour finir par être le bad guy. Et Dan Dehaan assure parfaitement le job. On reverra l’animal, très probablement.

Les effets spéciaux sont aussi une belle réussite. Ils restent utilisés à bon escient et de manière innovante, afin de rester des plus crédibles dans un quotidien très naturel.

Vous l’aurez compris, allez y ! C’est un film bien sympathique, efficace et plutôt malin.

 

N°15 – Ex Aequo – « Skyfall » de Sam Mendes

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La force des James Bond avec Daniel Craig c’est Daniel Craig lui même. Un type à la gueule bien virile, ultra classe et brut de décoffrage. C’est aussi le choix de coller à la réalité, de minimiser les cascades too much qui ont parfois fait virer certains films de la saga à la parodie, faisant perdre une certaine crédibilité et certains « effets boum boum » devenant lassants.
Mais c’est l’orientation du personnage qui fonctionne très bien. Le fait de vouloir briser l’image cliché de 007 et de dévoiler une face plus sombre que fun permet de rendre ce type attachant à défaut d’amusant. Ici, peu de place aux James Bond girls mais plus à l introspection du héros, façon « Batman begins« . Le rapport de Bond à son métier, à M, est au centre de l’intrigue. Judi Dench devient  le rôle secondaire au détriment salvateur des James Bond girls dont la présence reste homéopathique mais suffisante pour que le clin d’œil à la série soit présent. Depuis « Casino royale », il n’existe plus de romans de Ian Fleming à adapter. Et pour le coup, peut être que cette situation scénaristique permet d’offrir une nouvelle jeunesse au personnage.

Niveau casting, trois bons choix permettent au film d’avoir une personnalité différente des autres opus. Tout d’abord recruter Ralph Fiennes en supérieur de M était malin.
Quant à Ben Whishaw, découvert dans « Le parfum« , il interprète un nouveau Q, après une absence du personnage de plusieurs films, et il le fait avec beaucoup d’humour et de fraicheur. Le même second degré qui marque plusieurs scènes du film de références ciblées aux James Bond des années 70.
Et puis Pour réussir un bon film d’action ou de Sf, il faut un bon méchant, charismatique, humain, qui a de bonnes raisons et un passif pour expliquer sa hargne. Et en ce sens, choisir Javier Bardem, un des meilleurs acteurs au monde, est une idée géniale. On pense aux plus grands ennemis de Bond, ceux de Moonraker , le Docteur No ou encore Goldfinger. Il est impossible de ne pas tomber sous le charme de ce personnage déterminé, classieux et à fond dans sa propre mise en scène théâtrale. Bref, Bardem tente une nouvelle expérience capillaire après le « No country for old men » des frères Coen et livre un méchant mémorable, un point très fort du film.
Mais les acteurs ne font pas tout à cette réussite. Sur un scenario épuré et sans la surenchère qu’on a pu reprocher à certains films par le passé, Sam Mendes s’avère l’élément clé de la réussite de ce 23ème James Bond. C’est la première fois qu’un réalisateur de renom se colle à la franchise. Et après une filmographie variée et de très haute tenue, après même un bijou que sont « Les noces rebelles« , Sam Mendes arrive à s’emparer du mythe et l’amener vers une direction plus axée sur 007 lui même et ses questionnements, sans priver le tout de scènes d’action efficaces et directes. Il est donc possible que d’autres grands réalisateurs soient choisis par la production pour le futur. En tout cas, Skyfall m’a emballé, surpris par sa direction et sa façon de rendre hommage aux 50 ans du héros sans tomber dans la caricature. Un des meilleurs bond, assurément.

 

N°14- « De rouille et d’Os » de Jacques Audiard

 

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« De rouille et d’os » est le sixième long métrage de Jacques Audiard, attendu par nombre de cinéphiles tant sa filmographie impose le respect. De « Regardes les hommes tomber » à « Un prophète« , où il faillit remporter la palme d’or il y a trois ans, Audiard a toujours su créer l’évènement, par ses thèmes, sa direction d’acteur, son sens de la fluidité du récit, entre cinéma social et polar. Tout se déroule avec une telle mécanique dans un film d’Audiard, une telle maitrise de la technique et du rythme, que l’on se trouve bluffé à chaque fois.

Marion Cotillard interprète une jeune femme victime d’amputation des deux jambes, qui va s’accrocher à une brute, un homme dur sur qui les sentiments, les responsabilités et les questionnements existentiels n’ont aucune prise, ou si peu. Et pour interpréter ce bulldozer, Audiard a choisi Matthias Schoenaerts, acteur belge qui a explosé dans le récent et excellent « Bullhead« . C’est vrai que cette rencontre improbable a quelque chose de cinégénique. Deux êtres brisés vont apprendre à s’apprivoiser l’un l’autre, à reconstruire leur vie qui vient de s’effondrer. Attention, scénario casse gueule ! Même si c’est un grand classique du cinéma, même si l’histoire surprend moins que dans les précédents opus, Audiard réussit à maintenir une tension parsemée de petits moments de grâce, à l’image du visage de Marion Cotillard, blafard, qui renait peu à peu au contact du soleil et de cet homme montagne, qui ne la prend pas en pitié et la traite comme toute autre femme.

Que ce soit dans les scènes de combats de boxe ou celles de petits boulots pas très reluisants du personnage masculin, Audiard filme cette violence avec un esthétisme juste bien dosé. C’est que cette brute est délicate parfois et que cette écorchée mutilée fut une femme dure avant…exercice difficile que de le rendre à l’écran sans tomber dans des messages pompiers.

Lorsque l’on croise quelqu’un d’amputé, on évite de regarder trop directement, gêné de donner un tel regard à la personne…ici les membres coupés sont présents tout au long du film et bien exposés. Ils y sont montrés crument pour qu’ils finissent par être acceptés par le spectateur. Ce n’est plus une handicapée mais une survivante qui reprend gout à la vie. C’est bien la première fois qu’Audiard distille autant d’optimisme dans une histoire solaire, là où il nous avait habitués à du noir bien profond. Surprenant aussi de voir contée une histoire d’amour par cet artiste si pudique à son habitude. Audiard réussit haut la main cet exercice en évitant les clichés et en conservant l’âpreté de ses histoires tout en faisant avancer l’émotion par à-coups, par des événements forts. Le jeu de Cotillard et Schoenaerts y est pour beaucoup bien sur, comme toujours chez Audiard, l’acteur est dirigé avec grande classe et minutie.

« De rouille et d’os » est un très beau film, peut être pas mon préféré d’Audiard, mais à n’en pas douter l’un des grands films de l’année.

 

N°13- « Cosmopolis » de David Cronenberg

POSTER-FRANCAIS-POUR-COSMOPOLIS dans Les meilleurs films du Blanc Lapin

David Cronenberg est au top depuis 10 ans après ses excellents « History of violence« , « Les promesses de l’ombre » et son passé inaperçu « A gangerous method« , pourtant brillant (voir classement 2012, N°7 à N°1).

Pour son nouveau film, il choisit d’adapter le roman de Don Delillo publié en 2003 avec pour star Robert Pattinson, acteur à midinettes des films Twilight, dans lesquels son personnage de vampire était totalement inexpressif au milieu de scénari proches du vide absolu.

Premier constat à la vision du film, le pari de Cronenberg et le choix qu’a fait Pattinson leur a été bénéfique mutuellement. Ils vont d’ailleurs retourner ensemble très bientôt. Pattinson est parfait dans le rôle de ce jeune milliardaire dont la vie va s’effondrer en une journée. Il est froid, blafard et juste dans le ton. Rien à redire, sa carrière est lancée chez les cinéastes qui comptent.

Cosmopolis est un film qui a surpris pas mal de critiques, tout simplement parcequ’on s’attendait à du sexe, de la violence et du Cronenberg des années 90. Or c’est plutôt le Cronenberg de Vidéodrome teinté de celui de « A dangerous method » qui nous revient. Son film est incroyablement bavard, comme sur son précèdent sur Carl Jung et Sigmund Freud. Dès lors, le spectateur se doit d’être attentif et concentré tout au long du film. Et certains discours n’ont pas forcément de sens ni de cohérence d’une scène à l’autre. Le film déroute aussi par sa quasi unité de lieu puisque ce milliardaire se rend chez son coiffeur dans sa limousine et reçoit un à un ses collaborateurs, ses maitresses, sa femme, avec qui il disserte du monde capitaliste dans lequel il vit, de sa vision du sexe, du pouvoir, de l’argent… En l’absence de lien fort entre chaque binôme et en présence d’un flot de paroles ininterrompu, sans tellement d’action, le spectateur risque de se retrouver exclu de la limousine. Ce côté abscons du long métrage, qui demande un effort qu’on fournit rarement au cinéma, laissera la moitié du public sur le bord.

Et pourtant, même si je n’ai pas tout compris, j’ai beaucoup apprécié Cosmopolis.

Après tout, qui peut se targuer, sans snobisme, de tout saisir d’un bon David Lynch ?

Mais surtout, l’important ici n’est pas tant le fond du discours, qu’on comprend assez vite, mais plutôt l’atmosphère qu’il créé. La vie de ces êtres supérieurement intelligents est morbide. Tout y est calculé au millimètre près, tout est logique, afin de ne rien laisser aux hasards de la vie. Gagner de l’argent est un jeu mais qui finit même par les lasser, par ne plus les rendre heureux, alors même qu’ils ont quitté depuis longtemps tout sens commun. A trop analyser le monde et les rapports humains comme des animaux au sang froid, pour réaliser du profit, ils ont finit par devenir des excroissances qui n’ont plus goût à rien, plus de projection possible à part une fuite en avant vers un ultra libéralisme sans bornes, sans normes, sans but que de croitre pour croitre. Allégorie pas très complexe à saisir de notre monde actuel mais message efficace.

Ce bouhaha de théories nihilistes dépeint quelques privilégiés qui évoluent lentement vers leur chute, les révoltés casseurs de ce système ultra libéral sont vus de manière peu réaliste à travers les vitres de cette limousine, de ce long corbillard qui amène le personnage de Robert Pattinson vers une mort annoncée et limite souhaitée. Cosmopolis est avant tout un film symbole de notre époque, d’un monde où la réussite et le succès ont dérapé et créé des individus totalement désensibilisés ou totalement perdus car incapables de gérer cette distanciation. Le personnage a peur de la mort mais la recherche comme une excitation, l’argent n’a pas d’importance pour lui, c’est un jeu, une logique implacable et une jouissance pure que de savoir créer de l’argent. Mais de conscience morale, d’empathie pour son prochain, il n’en n’a pas. Pour quoi faire ? Ceci ne lui apporte rien et une action doit avoir un impact immédiat. Au même titre qu’un monde où l’information circule sur la planète à la vitesse de l’éclair, sa fortune peut s’effondrer en une journée. Il est comme un joueur de roulettes dans un casino. Il vit de l’excitation de sa chute et de sa maitrise du risque. Seule la maladie peut l’emporter, dès lors il se contrôle quotidiennement par un check up. Il ne construit rien, il rejoue tout, il joue le tapis.

Quant le personnage essaie tant bien que mal de définir une relation amoureuse avec son épouse de convenance, tous les calculs mathématiques du monde n’apportent pas de solution. La naissance d’un sentiment amoureux partagé et réciproque ne se planifie pas. Tentant de s’accrocher à son passé enfantin l’espace d’une coupe de cheveux, le milliardaire golden boy retrouvera quelques minutes un sourire. Mais cette recherche perpétuelle du profit, rassurante car maitrisable, l’a rendu totalement déconnecté du monde, déconnecté de sens. Le personnage cherche donc sa mort, son assassin pour comprendre ce qui lui est arrivé, ce qui le rattacherait de nouveau à la vie. Mais l’a t il jamais su ? Cosmopolis montre les limites de cette culture du winner, cette  fuite effrénée, cette peur de mourir, peur de vieillir, cette volonté de se croire immortel en s’enfermant dans cette course contre soi, mais qui finit de la même manière, sans appel vers la mort, mais seul.

Cosmopolis fait preuve d’une mise en scène et d’une direction d’acteur digne des meilleurs opus de Cronenberg mais prend le parti pris de ne pas se livrer facilement. C’est typiquement le genre de film qui vieillira peut être très bien et grandira en qualité avec les visions. Son rejet comme son adhésion n’ont d’égal que la vitalité artistique dont Cronenberg fait preuve à 69 ans.

 

N°12- « Argo » de Ben Affleck

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Après un excellent premier film, « Gone baby gone » et un solide second, « The town », Ben Affleck confirme tout le bien qu’on pense de son choix de carrière, celui de devenir lui-même metteur en scène, et s’offrir des rôles intéressants qu’on lui boudait quelques peu.

« Argo » s’intéresse par ailleurs à un épisode historique peu connu et développé, la libération de six otages ayant fuit l’ambassade des Etats-unis à Téhéran au moment de la prise de cette même ambassade par une foule de militants iraniens soutenant Khomeini.

La première force du film est d’éviter de tomber dans les clichés du film « histoire vraie » en optant pour un traitement scénaristique très malin. Bien qu’on connaisse la fin, Affleck va nous raconter l’histoire comme un thriller, faisant monter la pression et le stress sur de petits détails. Pourtant, cette mission suicide ne s’intéresse pas au côté humain et aux histoires personnelles des six individus à faire échapper d’Iran. La première partie du film suit au contraire l’agent de la CIA, joué par Ben Affleck, et son parcours pour monter une fausse production de film de science-fiction, convaincre les autorités que son projet farfelu est finalement le moins mauvais des scénari d’exfiltration de ses compatriotes.

Pour ne pas trop s’attacher et s’identifier aux victimes, il a choisi des acteurs aux visages inconnus, ce qui est une excellente idée. Ces hommes et femmes sont donc des gens ordinaires qui n’ont tout simplement pas de bol et ont eu un réflexe de survie en fuyant l’ambassade et en se cachant dans la capitale iranienne.

L’excellent John Goodman apporte quant à lui son physique charismatique à l’homme de l’art de l’industrie cinématographique, aidé par le génial Alan Arkin en vieux producteur cynique, distillant des touches d’humour plaisantes.

Le maitre mot du succès du film est donc cette mise en scène vive, ce montage, dirigés vers un but ultime, le suspens et cadré dans un contexte politique fort et une reconstitution historique des plus crédibles. D’ailleurs, Affleck n’oublie pas dans son préambule de rappeler brièvement l’historique ayant amené à cette révolution islamique. Le rôle des Etats-Unis et de leurs alliés vis à vis de l’avènement du Shah est clairement rappelé, montrant ce dictateur vu par l’occident comme un ami à qui l’ont pardonna de scandaleuses exactions par simple intérêt pétrolier. Un recul historique bienvenu et indispensable, qui nuance beaucoup de choses dans le récit final. « Argo » bénéficie d’un tempo, d’une orchestration qui en font tant un divertissement intelligent qu’une prise de distance par rapport à nos grands principes occidentaux, sans jamais juger les révolutionnaires mais en les regardant d’un œil extérieur, conscient de la dangerosité de leurs excès et de leur absence de limites mais aussi de nos fautes dans cet engrenage.

« Argo » est donc une bonne surprise et la confirmation d’un talent de plus en plus affuté de Ben Affleck, dans la droite ligne de ses prédécesseurs, Clint Eastwood, Georges Clooney, Robert Redford et bien d’autres…des acteurs de talent qui ont bien appris sur les plateaux !

 

N°11- « La taupe » de Tomas Alfredson

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Avec « La taupe« , Tomas Alfredson confirme le talent de mise en scène froide et méthodique qui l’avait fait connaitre avec « Morse« , film de vampires atypique où un enfant se prenait d’amitié pour une vampire adolescente.

Ici, c’est à un autre film de genre que le suédois s’attaque, tout en passant à Hollywood avec un casting quatre étoiles. Mais au final, il y est question aussi de solitudes tout comme dans Morse, peut être un fil directeur chez Alfredson…

Le film d’espionnage a débouché sur de multiples styles différents mais c’est dans les années 70 que quelques chefs d’oeuvres virent le jour sous la houlette de Francis Ford Coppola (Conversation secrète), Alan J. Pakula (Klute, A cause d’un assassinat, les hommes du Président), ou Sydney Pollack (les trois jours du Condor).

En adaptant « Tinker, tailor, soldier, Spy » de John Le Carré, spécialiste du genre, Tomas Alfredson se situe clairement dans l’hommage à ce cinéma seventies. Les histoires d’agents y prenaient leur temps, les dialogues étant souvent remplacés par des silences, des non-dits, des déductions laissées au spectateur, supposé suffisamment pertinent pour lier les scènes entre elles.

Et ici, c’est à la fois l’atout majeur et la limite du film. Certains seront largués peut être. Personnellement j’ai adoré cette façon de tisser l’histoire par des scènes décousues que le réalisateur laisse relier entre elles comme les pièces d’un puzzle. Ce petit jeu de déduction demande au spectateur d’être attentif et actif là où aujourd’hui le cinéma explique tout de manière didactique. Or tout le suspens du film repose sur cette enquête  de l’agent Smiley pour découvrir la taupe infiltrée par le KGB au sein de la direction des services secrets de sa majesté, le Cirque.

Alfredson filme Gary Oldman, tout en retenue so british, dans l’un de ses meilleurs rôles. Mais il n’oublie pas que ces espions sont aussi tous d’excellents dissimulateurs, capables de tout jouer. Et c’est sur du velours que Colin Firth, Mark Strong, Tom Hardy, John Hurt, Toby Jones, ou Benedict Cumberbatch vont livrer cette performance assez bluffante car feutrée. Il nous fait plonger dans ce sinistre quotidien d’agents secrets pour lesquels la vie privée n’existe pas. Ils sont ternes, d’un teint pâle, et évoluent dans des tons beiges et gris, comme vidés de leur humanité par des années de mensonges, de dupe, de manipulations et d’enquêtes. Ils sont sans identité et leur vie semble bien triste, voués à servir le pays mais soucieux de faire partie des cinq agents faisant partie du comité stratégique. Ils sont brillants mais vivent coupés du monde dans une bulle intellectuelle orientée de façon obsessionnelle sur l’ennemi. Ils semblent dépressifs pour certains, et seul le personnage de Tom Hardy, davantage impliqué sur le terrain et plus jeune, présente encore des réactions non totalement maitrisées, des envies soudaines de morale. L’amitié n’a pas sa place et c’est ce qui détruit ces individus d’exception. Comment croire au lendemain lorsqu’on ne peut faire confiance en personne ?

Alfredson procède par petites touches de peinture pour dresser ce tableau triste et sans concession d’hommes pour lesquels la vie ne peut être normale.  Le seul bonheur ne peut se résumer qu’en réussissant à surpasser leurs confrères, en excellant dans leurs objectifs, à défaut de quoi le seul espoir de respirer réside dans le passage à l’est, ce qui est le cas de cette taupe mystérieuse.

L’esthétique du film permet quant à elle de faire passer plus facilement le récit lorsqu’il s’avère un peu plus brumeux.  « La taupe » est un grand film paranoiaque comme on n’en n’a pas vu depuis des lustres. Un film d’ambiances et non d’actions, pour mieux faire toucher du doigt l’intérieur de ces égos perdus dont l’idéal s’avère bien confus.

Restituer une telle complexité devait passer par une mise en scène stylisée, un montage rigoureux et un jeu d’acteur d’une grande finesse. Tomas Alfredson devrait se voir ouvrir bien grand les portes d’Hollywood après ce succès tant critique que public, d’autant qu’il n’a pas été broyé sur son premier passage et qu’il a confirmé son style méticuleux. Le premier film important de cette année 2012. A ne pas rater.

 

N°10- « La part des anges » de Ken Loach

 

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La grande classe de Ken Loach est d’alterner le style de ses films et de montrer parfois des situations sociales déprimantes avec une belle politesse, celle du désespoir, qui passe par l’humour, la bonne humeur de personnages simples et résistants.

Et c’est vrai que j’ai eu le sourire aux lèvres tout au long du film. En montrant de jeunes écossais condamnés à des travaux d’intérêt général, Loach va explorer la naissance d’une camaraderie et d’une lutte de classe au milieu d’une vie sans avenir. Vous me direz qu’il n’y a rien de très nouveau…mais cette fois-ci, il choisit de nous conter une histoire lumineuse. Une histoire à la morale émouvante, où l’argent reste un moyen, pas une fin en soit, gagner le max de blé sur un coup a moins de sens que de remercier son bienfaiteur désintéressé. Les personnages refusent la violence physique et entreprennent un coup tordu pour se refaire, repartir sur des bases saines et sereines. Le film constitue en soit un beau pied de nez où les principes avares du capitalisme sont gentiment détournés par de petits robins des bois écossais aux trognes fort sympathiques.
On est dans le ton léger et drôle  mais pas pour autant un film mineur de Ken Loach. Le déterminisme social est tout aussi fort mais à 76 ans, Loach se veut combatif et optimiste. Et le regard tendre pour ses personnages paumés et exclus du système n’a d’égal que l’optimisme taquin et goguenard de l’ensemble du long métrage. Comme une soirée passée entre potes autour d’un bon Whisky, refaire le monde n’apporte rien de plus qu’un sentiment de se sentir moins seul et moins isolé. Voir un film de Ken Loach en mode choral, ce qui n’est pas son habitude, provoque un peu le même sentiment grisant. On est un peu chez soi, dans un univers connu et balisé au cours d’une filmographie riche de 30 longs métrages dont très peu de ratés.

Un cinéma qui ne donne jamais dans les grands discours, qui ne fait que montrer des pauvres se démerder comme ils peuvent pour surnager. Parfois c’est triste et noir, parfois c’est drôle et terriblement touchant comme dans cette « Part des anges », très réussie. Mais dans tout Ken Loach de bon niveau, c’est la justesse du scénario, du jeu d’acteurs non professionnels et du style épuré hérité du documentaire qui font que la recette fonctionne à merveille et font de Ken Loach un grand monsieur. Respect pour ce film et la régularité de cette filmographie, très classe.

 

N°9- « Twixt » de Francis Ford Coppola

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Francis Ford Coppola a été absent une dizaine d’années avant de revenir avec des films qu’il voulait à petit budget, souhaitant retrouver l’inspiration d’un jeune réalisateur, tenter de nouvelles expérimentations à 70 ans.

Si « L’homme sans âge » était un peu trop maladroit, il signait un bijou digne de ses plus grandes tragédies avec « Tetro« , il y a deux ans. « Twixt » poursuit ce sillon sans atteindre toute la poésie et la magie de « Tetro ». Le film a également divisé les critiques tant lors de sa présentation à Venise que lors de sa sortie la semaine dernière.

Coppola choisit donc de nous conter l’histoire d’un écrivain au rabais, sorte de Stephen King du pauvre, qui se retrouve dans un bled paumé pour dédicacer son dernier livre. Le shérif du coin, un peu frappé sur les bords, lui montre le cadavre d’une jeune fille assassinée, un pieu dans le cœur. Il lui propose de co-écrire un roman sur l’affaire, à base de vampires. L’écrivain va se laisser convaincre lorsqu’il croise, la nuit même, le fantôme d’une adolescente.

Coppola choisit de nouveau le numérique, pour le pire et le meilleur. La réalité semble sortir tout droit d’un mauvais téléfilm mais la bizarrerie de l’histoire fait penser a celles d’un Lynch et permet au final à cette laideur de passer.

Mais surtout, le maitre compense par des scènes de rêveries ou de réalité parallèle assez bluffantes où le burlesque côtoie la tragédie, la folie, et mixte les univers. Au centre de son récit, une tour d’horloge à sept cadrans indiquant des heures différentes, image balourde mais touchante du mélange entre passé présent et rêve.

Entre série B et film d’horreur seventies, ces histoires de vampires et de fantômes ont surtout pour objectif de servir de catharsis. Celle d’un homme, Francis-Ford Coppola, qui a perdu l’un de ses fils, Gian-Carlo, décédé en 1986, dans un accident de hors-bord. Le personnage de Val Kilmer, l’écrivain, a lui aussi perdu sa fille dans un tel accident. Coppola traite donc de manière directe de sa culpabilité d’avoir été absent pour son fils, de son nécessaire besoin d’exorciser ce vide en faisant de ce dernier une source d’inspiration pour son œuvre. Comme l’écrivain, c’est en se confrontant à ce fantôme qu’il a résolu ses problèmes. Et si le principal était l’inspiration, le manque de démarche créative. Val kilmer rencontre dans ses rêves un autre fantôme, celui d’Edgar Allan Poe, auteur qui inspira fortement Coppola tout au long de sa carrière. Ce dernier va guider l’écrivain, lui qui a également perdu un proche, son épouse, et dont l’œuvre fut marquée de ce décès trop prématuré. Le fantôme dit d’ailleurs  » We share this little ghost, my friend… », beau moment triste et mélancolique.

Coppola reprend sa patte de « Rusty James » et de « Tetro » et utilise un noir et blanc teinté de rouge vif, d’une très grande beauté plastique. Coppola mélange les genres, l’inspiration par le rêve qui mélange son propre passé et celui d’une histoire sordide de massacre. Il cite Beaudelaire dans le texte. Ce film trivial semble l’œuvre d’un homme totalement libre, et c’est ce qui fait un bien fou, un souffle frais de la part d’un maitre qu’on croyait enterré il y a quelques années. Ce coté affranchi des règles peut agacer certains mais ravir d’autres par tant d’audace.

Les affres de la création, le deuil d’un enfant décédé dont on ne s’est pas assez occupé sont traités avec une naïveté et une sincérité dans la démarche qui force le respect. Le film est boursoufflé comme  son acteur principal, Val Kilmer, revenu des morts, mais cela fonctionne…comme si Coppola avait trouvé un équilibre subtil.

Il est vraiment plaisant de voir l’auteur du « Parrain » et d’ »Apocalyse Now » retrouver une telle vigueur. Un film à détester autant qu’à déguster mais un film très original.

 

N°8- « Dans la maison » de François Ozon

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Après un « Potiche » très frais, François Ozon confirme la régularité de son talent singulier avec une histoire pour le moins originale.

A la manière de « Swiming pool », Ozon va nous parler de la fascination qu’une jeune personne peut provoquer sur un adulte dont les rêves sont un peu derrière lui. Ici c’est l’élève d’un prof de français, joué par un Fabrice Luchini, parfait pour le rôle, qui va tirer les ficelles d’un jeu pervers dont on ne sait pas quel est le but. Mais les rapports humains de dépendance n’ont pas forcément d’objectif. Ici, il est question de la mise en place d’un rapport qui s’auto-alimente et pousse les protagonistes vers des situations borderline peu à peu, sans crier garde, de façon insidieuse.

Sur la thématique de comment conter une histoire et l’écrire, travailler un style, créer tout simplement, le réalisateur nous parle de la mise en scène de sa propre vie, de l’obligation pour l’artiste de provoquer des émotions dans son quotidien pour trouver l’inspiration, de théâtraliser cette vie pour y trouver des histoires à raconter. Pour se faire, le réalisateur a trouvé un jeune acteur excellent. Ernst Umhauer est troublant car il porte sur son visage longiligne cette absence totale de valeurs et cette cruauté propre aux enfants intelligents qui découvrent froidement le monde des adultes, disséquant ce dernier comme un insecte en cours de sciences naturelles.

Luchini joue quant à lui un type qui a raté sa carrière d’auteur et procède à un transfert sur le jeune homme, cherchant à revivre la réussite qu’il n’a pas connue dans le talent de ce dernier qu’il tente de guider. Mais le manipulateur n’est pas l’adulte et le professeur se trouve rapidement pris au piège dans un engrenage dont la fin reste le grand mystère tout au long du film.

Le professeur pardonne tous les écarts et ne fixe pas de barrières au nom de l’accomplissement d’un art derrière lequel se cache un désir inassouvi, celui de créer une œuvre avec une imagination et un style qu’il n’a pas lui-même. Mais c’est aussi l’aspect addictif d’un récit fictionnel et de ses rebondissements dont Ozon nous traite en filigrane. Il assimile le voyeurisme du lecteur au comportement d’un drogué qui ne saurait dire stop en se cachant derrière l’approche artistique de la démarche malsaine de l’adolescent.

En refusant d’apprendre la morale à son élève, au nom d’un anticonformisme qu’il fantasme alors qu’il se trouve lui-même prisonnier de clichés, le maitre perd son rôle et surtout sa maitrise. Sa créature va se révéler moins fictionnelle que prévue et plus imprévisible, plus dangereuse. Le coté passionnel de ce rapport épistolaire va alors consumer la vie du brave professeur de français. C’est que dans un rapport passionnel, il y a parfois un maitre et un esclave, un qui gère son ascendant et l’autre qui suit derrière et ne peut que s’autodétruire. Et le rapport des deux s’entretient de lui même pour aller de pire en pire. Ici le manipulateur se retrouve être le pantin transporté dans une histoire qu’il ne peut plus arrêter.

Le récit de François Ozon peut sembler moins sombre que d’apparence, l’ironie permettant de désamorcer un épilogue que l’on espère surprenant et noir depuis le début. Et comme le personnage le dit lui même, une bonne fin doit couper net et ne pas être attendue. En ce sens, Ozon boucle son film avec élégance et classe et prouve qu’il a atteint une certaine maturité, se débarrassant des quelques derniers écueils que son sens de la provocation laissaient transparaitre parfois.

Une grande réussite.

Les pires films de l’année du Blanc lapin – bilan 2012 !

14 décembre, 2012

Voici pour la quatrième fois consécutive, mon bilan annuel des pires films de l’année !

Alors c’est toujours aussi subjectif étant donné que je n’ai pas tout vu et que surtout, je sélectinne beaucoup les sorties, ce qui m’évite pas mal de bouses.

N’hésitez pas à laisser des commentaires si vous n’êtes point d’accord..

N°10- « Cloclo » de Florent Emilio Siri

Les pires films de l'année du Blanc lapin - bilan 2012 ! dans Dossiers cloclo_BE_FO

« Cloclo » était attendu depuis longtemps, suivant la mode des biopics français initiée par « la môme« , « Coluche« , « Gainsbourg vie héroïque« , le diptyque sur Mesrine, avant de voir celui sur Yves Montand et bien d’autres figures françaises voir leur vie romancées au grand écran.

Le résultat est réussi question casting. Jérémie Renier ressemble  beaucoup à Claude François. Et si son jeu s’avère quelques peu hésitant au début, il devient plus crédible par la suite pour finir par emporter l’adhésion.

Autre qualité du long métrage, il n’est pas hagiographique et à la gloire du personnage. Bien au contraire, les défauts nous sont présentés sans lissage. Il était jaloux, perfectionniste obsessionnel, maniaque, volage, tyrannique, mégalo et se comportait comme un parrain gérant sa famille et sa petite entreprise.

L’histoire prend soin de décrire la conception de bien des tubes, adaptés et repompés de hits américains ou inspirés de sonorités pas encore connues dans l’hexagone à l’époque. L’homme y est présenté comme un ambitieux qui avait un don, celui de repérer des modes outre atlantique et de les importer pour les franciser. Une technique qui aurait du mal à fonctionner au jour d’internet et de la mondialisation immédiate de la culture. Jouer sur les décalages entre l’Amérique et nous s’avère impossible aujourd’hui en matière musicale…ce qui n’est pas le cas du côté ricain en matière de remakes de films étrangers…Le fait que les fils de Claude François aient adoubé le projet et autorisé l’utilisation de l’ensemble de la discographie est parfois un plus, parfois un handicap, certains moment semblant plutôt empiler comme des perles des refrains bien connus…

Intéressant parcours et drôle de vie que cet homme très seul, en perpétuelle soif de reconnaissance, de son père, des femmes, du public, d’une intelligentsia parisienne. Un ogre aux pieds d’argile, toujours conscient de la fragilité de sa notoriété, obsédé par l’échec, le fait de durer, le retour à la pauvreté connue par le passé. En ce sens, le film reste intéressant, que l’on ait dansé sur Alexandrie alexandra ou que l’on soit hermétique à cette machine à tube transcendant les générations. La conception de son propre mythe et le marketing qu’il développa fit de lui un précurseur.

Hélas, l’alignement chronologique des scènes et la mise en scène en elle même manque cruellement d’ambition, d’originalité. Au point que sans aller jusqu’à l’ennui, ce manque de souffle m’a plutôt porté de l’autre coté de l’atlantique, que Claude François scrutait si bien. Là bas, il existe un maitre du biopic, fatigué aujourd’hui mais qui livra « Amadeus« , « Valmont », « Larry Flint » ou « Man on the moon » avec un don pour éviter justement les écueils balourds du scénario didactique, qui à force de vouloir être complet, en oublie que nous sommes au cinéma. Et un film se doit d’avoir sa propre identité, sa propre proposition, sa propre vision d’une histoire. Florient Emilio Siri est doué et efficace (Nid de guêpes et l’ennemi intime étaient pas mal) mais avouons que ses idées lumineuses pour distiller un peu de poésie, tombent à plat voire frisent le cliché digne d’un pauvre téléfilm fauché. Il aurait été plus inspiré à rester sur sa ligne de direction très académique. Car trop de classicisme tue toute possibilité de sortir des rails sans tomber dans le ridicule. En fait le film est trop raide, trop propre sur lui pour déclencher une véritable émotion. Raconter l’histoire d’un connard ça peut donner « Barry Lindon » mais ça peut aussi donner un film au final un peu chiant, un peu oubliable très vite, pas une chanson ordinaire mais un film ordinaire. En fait, j’ai finis par regarder Jérémie Renier jouer bien Claude François, sans surprises, sans attente à part la fin, qu’on connait déjà. Et soudain, l’oubli.

N°9- « Wrong » de Quentin Dupieux

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Après « Rubber » et « Steak » avec Eric et Ramzy, Quentin Dupieux, poursuit sa filmographie volontairement perchée et très originale, mais il le fait aux Etats-Unis.

L’histoire suit Dolph, interprété par Jack Plotnick, inconnu jusqu’ici mais très bon dans son genre, un type viré depuis trois mois qui retourne quand même tous les jours à son bureau, sous les yeux de ses ex collègues effarés, et qui se réveille un matin sans son chien. Son toutou adoré, Paul, seule raison d’être de son existence, a disparu…son jardinier, interprété par Eric Judor vient lui annoncer que le palmier dans son jardin a disparu, remplacé par un sapin…Dolph appelle une pizzeria pour discuter de la raison du choix du logo sur le prospectus et tombe sur une folle qui veut coucher avec lui….et toute l’histoire est une suite de situations cocasses de ce type, parfois drôles parfois juste décalées. Un surréalisme revendiqué dès la première minute.

En sous texte, Quentin Dupieux dépeint une Amérique profonde vraiment à l’ouest entre consumérisme, petits jobs de merde et american dream en promo dans des balieues qui se ressemblent toutes, un peu comme le feraient les Coen mais avec un style qui se veut non sensique, entre les Monty Python et David Lynch ou Buñuel ou Resnais ? Non, pas vraiment, plutôt un style propre et c’est bien à la fois la force et la faiblesse du réalisateur.

Sa force parcequ’il faut avoir les couilles de partir sur ce type de narration au risque de larguer beaucoup de spectateurs. Et parcequ’il a vraiment un style, qu’on aime ou qu’on s’ennuie. La faiblesse parceque, à force de baser l’évolution de son scénar sur le loufoque, comme seul moteur du film, il finit par lasser et non par nous perdre. Car très vite, il est facile de comprendre que le film n’apportera pas grande surprise dans la narration puisqu’il n’y en n’a pas beaucoup, enfin très peu. Ensuite on espère que le réalisateur ne se contentera pas de l’aspect Ofni de son film et y apportera davantage, un fond. Hélas, le sous texte est quant à lui soit inexistant soit très lourd.

On a compris, pas la peine de multiplier les scènes avec des américains perçus comme des caricatures, des stéréotypes divers, sans aucune « normalité » autour d’eux. Quand on veut étayer une critique ou un portrait, il est toujours mieux, à mon sens, d’avoir du relief, du contre champ, bref ici, de la normalité. Parceque là très honnêtement, je me suis demandé ce que voulait nous dire le réalisateur. Et j’ai bien peur qu’il n’ y avait rien à dire, juste un style à exposer et sur exposer.

Le problème de « Wrong » en fait, c’est qu’il n’est pas assez brillant, pas assez hilarant (juste marrant), un peu trop autiste. Qui sait, peut être qu’un jour, un certain recul, une certaine maturité permettra au réalisateur français de toucher juste. Mais pour l’instant, ceci ressemble plus à un exercice de style, sorti d’école de ciné, un peu trop poseur parcequ’un peu trop à 100% dans un sens. Le moteur tourne à vide et on finit par un peu s’emmerder, gentiment, poliment car respectueux de l’effort de nouveauté.

Bref, un film intéressant par sa direction radicale et quelques scènes drôles mais tout de même cette impression amère de creux, de vide dans la structure et de perte de temps. C’est d’autant plus frustrant que Dupieux a un talent évident, peut être manque t il un peu de modestie pour penser qu’il réussira un film novateur sans plus de recherche créatrice qu’une accumulation sans but. Une facilité qui ne tient pas la distance.

N°8- The descendants d’Alexander Payne

TheDescendants_BENL_FA3 dans Films series - News de tournage

Avec « The descendants« , Georges Clooney trouve un rôle un peu atypique pour lui, celui d’un veuf, d’un cocu et d’un père de famille. Il casse ainsi son image de séducteur et joue pour l’un des chouchous des critiques américaines, Alexander Payne, réalisateur de « Sideways » et « Monsieur Schmitdt« .

Georges joue donc le rôle d’un avocat de Hawii, dont l’épouse se retrouve dans le coma après un accident de bateau et qui va devoir gérer ses deux filles, l’une de 7 ans et l’autre de 17, alors qu’il s’en est toujours peu occupé. Il va découvrir que son épouse le trompait et gérer la vente d’un terrain familial géré dans un trust dont il est le trustee.

Comme dans ses films précédents, un constat s’impose, son film est réussi, humain, cynique, critique mais un peu trop fadasse à mon goût. A trop vouloir filmer ses personnages en toute modestie et à hauteur d’homme, la mise en scène de Payne se fait trop discrète et trop humble.

Payne aborde diverses thématiques mais les effleure gentiment. La transmission d’un patrimoine, l’éducation et l’absence du père, la déliquescence du couple du fait des années…autant de sujets intéressants mais alignés aussi de façon très conventionnelle, comme des cailloux recueillis sur une de ces plages d’Hawaii et mis bout à bout sur un collier de perles vu mille fois …c’est joli de loin et assez décevant de près.

Le personnage est attachant, c’est celui d’un looser, qui a laissé défiler sa vie de famille sans y prêter garde, absorbé par son métier et ses responsabilités à la tête de son trust familial. Mais question loosers, je préfère ceux des frères Coen. Ils sont plus cons, moins chanceux mais carrément plus funky et drôles. D’ailleurs Clooney y a obtenu parmi ses meilleurs rôles dans « O’ brother » ou « Burn after reading« .

Cette façon dont Hollywood s’émerveille devant des histoires simples de familles est assez agaçante. Pourquoi porter un tel film, assez banal, aux nues pour conquérir les Oscars cette année ? Pour adouber Clooney et lui refiler une statuette ? Le scénario est  sans surprise, le film semble formaté pour le festival de Sundance, caricatural jusque dans son épilogue et son recentrage sur la cellule familiale, à la manière d’un « Little Miss Sunshine« , les personnages originaux et décalés en moins.

Si l’on en juge à la qualité du film et à l’ennui profond que j’ai eu en voyant « le stratège » avec Brad Pitt, « the Artist » mériterait en effet de nombreux oscars, les concurrents ne faisant pas le poids, tout simplement.

« The descendants » est un gentil film du dimanche soir, sitôt vu sitôt oublié…next !

 N°7- « J. Edgar » de Clint Eastwood

j.edgar_affiche dans Les meilleurs films du Blanc Lapin

Voici enfin « J. Edgar« , biopic sur John Edgar Hoover, monstre politique ayant créé le FBI et utilisé ce dernier au service des intérêts qu il estimait être ceux des Etats unis et les siens. Personnage complexe, il traversa les hautes sphères du pouvoir des années 20 au début des années 70. Ce manipulateur sincère dans sa démarche mais oh combien contraire à l’image d’Epinal de la démocratie, fut à ce point puissant qu’il fut inamovible de son poste jusqu’à sa mort. Aucun des huit présidents des USA qu il « servit » n’arriva à le déloger.

L’idée de voir un immense réalisateur, républicain de surcroit, s’attaquer au mythe, était une promesse de cinéphile…promesse d’un grand moment.

Hélas, mon triste constat à la sortie de la projection c’est que Clint Eastwood devrait peut être arrêter, à 82 ans, plutôt que d’enchainer des films mineurs tournés plus vite que son ombre. Le maitre a vieilli et ça se voit. L’ensemble est plus crépusculaire que jamais, la mort et l’héritage hantant particulièrement Clint depuis « Mytic River« .

Mais je m’attendais à tellement mieux de lui et surtout d’un personnage emblématique comme John Edgar Hoover. En mettant l’accent sur sa relation homosexuelle refoulée avec Clyde Tolson ou la fascination castratrice pour sa mère, Eastwood zappe beaucoup d’aspects politiques du personnage. L’idée de faire des allers-retours entre le seuil de sa mort et sa jeunesse pouvait sembler être une bonne idée afin d’aérer une carrière de stratège extrêmement riche. Hélas, le film sent plutôt le papy qui s’est oublié. Et le résultat est rance.

Vouloir donner un aspect humain au personnage n’était il pas plus une perte de temps pour cet individu de toute façon inclassable ? Que voit on vraiment de la stratégie de « consul à vie » comme Hoover aimait justement se définir… de ses croyances profondes et sa réelle dévotion aux Etats-Unis d’Amérique, quitte à passer au dessus des lois.

Son anticommunisme est appuyé à ses débuts mais ce sont ses interventions répétées sur 40 ans qui auraient du définir le contour de ce biopic. Son rapport à la mafia, totalement omis, son rôle dans l’écoute de personnalités du show biz et de la politique, et l’incidence sur les campagnes électorales, aspect totalement passé sous silence. Sa détestation des Kennedy père et fils aurait elle été mise de côté parceque Eastwood, en bon républicain, n’a pas souhaité montrer à quel point cet autre républicain fanatique était décidé à faire tomber ce mythe. Bien sur, il l’évoque comme il aborde la haine qu’il avait de Martin Luther King. Mais il ne fait qu’effleurer pour s’appesantir bien trop longtemps sur l’affaire Lindbergh. Elle est certes constitutive du début des pleins pouvoirs qu’il obtint du Congrès, mais fallait-il y consacrer un quart du film ?

Leonardo DiCaprio a beau jouer la moitié du film avec un masque assez mal fait, il transcende son personnage, sa diction, son regard vitreux…il confirme son statut d’acteur de premier plan, bankable et brillant par ses prestations, à faire pâlir ses congénères.

Mais ce rôle à Oscars ne suffit pas à sauver le film d’un enlisement moite. Et puis notons que le vieillissement des personnages est particulièrement raté, la prothèse de Clyde Tolson étant plus digne d’un épisode de Star Wars première trilogie.

Bref, « J. Edgar » est un rdv manqué d’autant plus agaçant que les planètes étaient alignées avec un acteur génial, un réalisateur culte et républicain, un personnage transversal de l’Amérique politique du 20ème siècle…si DiCaprio avait été mauvais, la frustration aurait été moins amère.
« J. Edgar » est un film d’un classicisme poussiéreux qui fait froid dans le dos, un film de vieux…Déjà retourné à la poussière…

 

N°6- « Take shelter » de Jeff Nichols

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Avec « Take shelter« , Michael Shannon trouve un premier rôle à la hauteur de son immense talent d’acteur, tout en nuances, et c’est une bonne chose pour ceux qui ne l’auraient pas repéré dans « les noces rebelles » de Sam Raimi aux côtés de Di Caprio et Kate Winslet.

Décrire la folie ou du moins la paranoïa et la schizophrénie n’a rien de simple lorsque l’on ne veut pas verser dans le rôle à oscars too much. C’est ce que réussit l’acteur, accompagné d’une Jessica Chastain tout aussi douce et délicate que dans « tree of life » de Terrence Malick.

Seulement voilà, moi qui adore les films tournant autour de la fin du monde, je me trouve très perturbé par l’accueil dithyrambique du film.  Je ne suis pas rentré dedans, demeuré sur le côté de cet objet me semblant mis en scène avec assez peu d’idées et au final une répétition des plus pénibles.

Jeff Nichols a décidé de nous faire vivre, vue de l’intérieur, la peur de fin du monde que ressent son personnage. La caméra est centrée sur lui, sur la moindre de ses réactions tout en montrant les personnages l’entourant comme si le fou c’était nous, spectateurs. Seulement voilà, tout repose sur la prestation de Shannon, et passée ce constat, rien de neuf dans l’enchainement des scènes, relativement attendues.

Et surtout, comme dans « Melancholia » de Lars Von Trier, sur le même thème et loué par la presse, je me suis ennuyé sec, très sec. Le réalisateur n’a rien à dire ou tout du moins l’exprime tellement mal, avec tant de non-dits que je suis resté sur le pavé. Je dois être un peu concon. Il faut probablement mieux m’expliquer les choses.

Bien sur, Nichols veut montrer la critique en creux de l’américain moyen reclus sur lui-même et défendant sa patrie contre des ennemis parfois imaginaires et parfois réels…dépassé par son statut de première Nation responsable des autres comme le personnage de sa famille, l’Amérique a parfois peur excessivement, et devient parano.

Mais moi j’ai été déçu, très déçu par ce premier évènement des films d’auteurs que j’attendais pour 2012.

Une platitude du propos que je déplierai peut-être ultérieurement si j’ai le courage un jour de me retaper 2 h de scènes identiques.

 

N°5- The Dictator de Larry Charles

Sacha Baron Cohen revient avec un nouveau personnage infâme à souhait après « Borat » et « Bruno » !
J’avais bien adhéré à l’humour débilo régressif des deux opus précédents et le thème de « the dictator » ouvrait un boulevard au comique américain. En pseudo dictateur nord africain entre Saddam Hussein et Muammar Kadhafi, la provoque de Cohen est en effet dans son élément, taclant au passage ses chers Etats Unis d’Amérique sur le thème de leur démocratie immaculée, montreuse de leçons. Il est vrai que quelques scènes du film déclenchent l’hilarité. Hélas, nombre d’entre elles sont…dans la bande-annonce.

Et si le mauvais gout est toujours roi pour le meilleur et pour le pire, Sacha Baron Cohen trouve ici la limite de son comique. En effet, en devenant célèbre et en côtoyant de « vrais acteurs » et des réalisateurs de renom (Scorsese, Burton, etc…) il a du se dire qu’il pouvait tourner un film comique « classique ». Sauf que voila, il a oublié un ingrédient, les cameras cachées de ses précédents longs métrages, qui parfois étaient des fakes et parfois de vrais vidéos piégeant des stars ou de simples ricains moyens. Ceci créait une atmosphère particulière. Sans cet élément, la recette s’essouffle, l’humour se fait plus consensuel et attendu et le temps entre deux éclats de rire devient comment dire, pénible car inintéressant et juste lourd.

Faire de l’ humour pas fin exige d’être brillant tout le temps, sans interruption. Sinon le rythme s’effondre et laisse apparaitre de manière encore plus béante les failles scénaristiques et le manque d’écriture ou d’inventivité.

Bref, pas sur que Sacha Baron Cohen ait intérêt à poursuivre ses films centrés sur un personnage ignoble caricatural…car à force de tirer sur la corde de sketches étirés sur tout un film, il risque d’agacer et de perdre très vite son public.  Qu’il poursuive sa carrière d’acteur normalisé serait peut être plus recommandé. On le verra notamment en Freddie Mercury chez Stephen Frears, ce sera l’occasion de constater si il sera une étoile filante ou une étoile tout court.

 

N°4 – Adieu Berthe ou l’enterrement de mémé de Bruno Podalydès

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A l’époque de la sortie du film, je n’ai même pas écrit de critique tant ce dernier m’a paru creux et toc, un produit purement monté pour plaire aux bobos parisiens. J’aime bien les frères Podalydès mais là ils ne se sont pas foulés et à partir d’une idée de bon court métrage ont décidé de ralonger la sauce. C’est probablement une des plus belles arnaques de l’année avec une bande-annonce très drôle mettant en vedette une Valérie Lemercier en grande forme, appuyée par une presse dithyrambique.

Sauf que tout était dans la bande-annonce, le reste étant du remplissage, des dialogues bavards pas drôle et ennuyeux et la véritable impression d’avoir été pris pour un con.

C’est dommage car je verrai désormais le travail de Podalydès avec méfiance en me disant qu’il est capable de prendre son public avec au pire beaucoup de négligeance et mépris, au mieux une paraisse difficilement excusable.

N°3- Blanche-Neige et le chasseur de Rupert Sanders

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Ce que j’ai bien aimé dans cette adaptation de Blanche Neige centrée sur le chasseur, c’est l’histoire de cul entre le réalisateur et l’actrice principale, Kirsten Stewart, qui trompait son ultra célèbre boy friend, Robert Pattinson. Parceque sinon, le film, j’avoue avoir été transporté dans les années 80, à l’époque de certains mauvais films d’héroic fantasy aux scénarios faiblards appuyés par des effets spéciaux râtés.

Ici, c’est le contraire, le visuel est excellent ! Mais justement, le décalage entre la technique et les dialogues ou l’écriture des personnages est tel qu’une dimension parallèle s’ouvre. Un voyage fascinant dans le néant narratif, un phénomène de plus en plus fort, le conte désincarné, à la manière du « Alice au pays des merveilles » de Tim Burton. Notez, c’est logique, on prend la même recette d’un conte pour enfants ultra connu et on balance beaucoup de pognon dans l’univers et les effets. Certaines critiques ont comparé la beautéde certains effets à l’imaginaire de Terry Gilliam. Si vous connaissez ma passion pour le bonhomme, vous imaginez mon agacement.

Un film d’héroic fantasy ne doit pas être géré uniquement par les informaticiens et les logicils capables de nous bluffer à l’écran. Une seule touche positive ressort du film, Chris Hemsworth, le Thor de Marvel. Il est mâle, très mâle et assure dans ce genre de rôle de brutasse. Sinon, c’est mauvais, pas écrit et navrant.

 

N°2 – Battleship de Peter Berg

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Peter Berg, c’est un peu un Zack Snyder (Watchmen, 300) mais sans talent visuel. Un pur faiseur, un mercenaire à la solde des studios, prêt à mettre en scène n’importe quel projet à la con, en étant peruadé qu’il a des idées et un talent. Ce type a quand même failli faire une nouvelle adaptation de Dune…quand on voit son navrant « Hangcock » avec Will Smith ou cette terrible adaptation du jeu de société « Touché coulé », on comprend ce que signifie industrie du cinéma. Ici, on a choisi un produit à vendre sur le nom du célèbre jeu. On retient à peu près les mêmes concepts sauf qu’on y introduit trois bombasses, une nana et deux mecs (Taylor Kitsch, Rihanna, Alexander Skarsgård qui cachetonne) et que l’équipe ennemie est composée d’extra terrestres. Le scénario s’arrête là, pas la peine de s’emmerder, y’a des jolies acteurs à voir, des effets spéciaux à la Transformers, pourquoi s’emmerder ?

Un film affligeant car sans aucune surprise, aucune écriture, des scènes vues 10.000 fois et une absence totale de considération pour le public.

N°1 – Avengers de Joss Whedon

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Il faut toujours se méfier des films qui font une quasi unanimité critique. Cet adage que pourtant je me répète sans cesse, ne m’évite pourtant pas ce genre de désagrément …

Car oui, « Avengers », LE film Marvel rêvé qui soit disant doit répondre aux attentes des lecteurs de comic book et au-delà, en leur offrant un vrai film de supers héros comme sur le papier glacé, et bien ce film là est à mon sens le pire  que j’ai vu en 2012.

Le premier Iron man m’avait fait sourire pour le personnage mais ennuyé pour les aventures d’un manque d’originalité confondant. Le second fut une torture. « Captain America » quant à lui, répondit bien à tous les clichés auxquels on s’attendait.

Ici, les supers-héros ont certes tous un espace à l’écran et une complémentarité qui les empêche de se cannibaliser. C’est sans doute la grande réussite du film. Mais alors que le début de l’histoire et la mise en place des personnages est un peu lente, les scènes qui suivent et qui se font s’affronter tel super héros à tel autre ont un côté rébarbatif jusqu’à épuisement. Il n’ y a aucune surprise et dès lors aucune tension dramatique. Dès lors, il est difficile de s’intéresser à ces fausses oppositions au-delà du plaisir visuel des effets spéciaux.

Mais bon, de nos jours, les films qui vous en foutent plein la vue à ce niveau sont légions. A la manière de films conçus comme des produits, comme un « Transformers« , « Avengers » aligne des scènes parlées très chiantes car incompréhensibles avec des scènes d’actions qui recherchent à chaque fois la surenchère. Dans les scènes soit disant « sérieuses », les personnages parlent avec des termes pseudos scientifiques proches du « bifidus actif » pour tenir au final des propos dénués de tout relief voire même risibles mais pas dans le bon sens. L’humour du film est celui de tout film d’action hollywoodien depuis les Die Hard avec Bruce Willis, et donc les vannes font rarement mouche, car ultra codifiées.

Alors la presse a opposé ce film aux Batman de Christopher Nolan, plus cérébraux et noirs et sans humour alors que « Avengers » serait le parfait opposé, fun, divertissant et léger. Je dirais plutôt décérébré, décomplexé mais horriblement fadasse par son absence totale d’idée scénaristique et de personnalité dans la mise en scène. Là où Nolan a réussi avec la trilogie « The dark knight« , c’est qu’il a insufflé des choix à contre courant très personnels. Il est sorti de la Bd reposant sur ses supers-vilains pour l’encrer dans une réalité proche d’une Amérique post 11 septembre, très réaliste. Et il a compris qu’un méchant sombre est toujours l’une des clés de la réussite d’un tel film. Sauf qu’il y a ajouté des personnages construits, un héros complexe, tourmenté, bref, humain.

Ce film fut un supplice !

Les meilleurs films de l’année 2011 du blanc lapin – partie 2 (N°7 à N°1)

23 décembre, 2011

Voici la seconde partie du dossier bilan de mes films préférés sur 2011. Bien entendu, je n’ai ni le bon goût ni l’outrecuidance de penser avoir tout vu. Disons que je sélectionne les films en fonction de leur parcours (que j’étudie bien en amont) et de leur accueil (même si je ne lis plus les critiques avant d’avoir rédigé la mienne). Sur cinquante films vus cette année au cinéma, je pense en avoir ratés assez peu. C’est disons le cas tous les ans puisque je vois les éventuels loupés par la suite et qu’il y a rarement de « grand oublié ». Mais si vous en notez, n’hésitez pas à me le signaler !

Voici donc mes 7 préférés, enfin 8…

 

N°7 – « Incendies » de Denis Villeneuve

Les meilleurs films de l'année 2011 du blanc lapin - partie 2 (N°7 à N°1) dans Dossiers incendies-207x300

Voici donc le film de Denis Villeneuve qui a beaucoup fait parler de lui avant sa sortie tant son accueil fut bon partout dans le monde, y compris en étant nominé aux oscars. Le réalisateur opte pour un scénario recelant un drame à multiples fonds, chacun enfonçant un peu plus le spectateur dans l’émotion des diverses révélations qui vont jalonner le film. Au fil de l’enquête de ces deux frères et soeurs sur leur mère disparue, plusieurs thèmes vont être évoqués et entremêlés.

Le postulat de départ est assez malin puisque le film ne cite pas le pays du moyen orient où la mère a vécu avant de s’enfuir au Québec. L’effet immédiat est que l’on se trouve un peu perdu, en attente de savoir quel pays est pris en exemple. Il s’agit bien entendu du Liban et de sa lutte fratricide entre musulmans et catholiques. Mais l’atmosphère d’enquête dans ce pays dont on ne cite jamais le nom est posée, une guerre honteuse qu’on veut oublier. Le périple commence alors dans le passé de cette mère décédée et mystérieuse. Chaque avancée du récit atteint alors son but puisque tous les sens sont en éveil et que l’on suit la fille de cette femme par un montage habile entre passé et présent. C’est un film sur le deuil, les deuils. Celui d’une femme pour sa vie gâchée au nom d’un idéal, celui d’enfants pour une mère qui les a doublement abandonnés et ne les retrouvera que par delà la mort. Un film sur le pardon. Pardonner à ses bourreaux pour revivre ou plutôt laisser ses enfants revivre. Film sur l’importance de la filiation et de la connaissance de ses parents pour se constituer une identité, une base pour se propulser en avant, comprendre les erreurs et les choix des ainés pour créer son propre cadre, forcément construit en creux, en confrontation avec les parents. « Incendies » utilise certes des ficelles parfois pompières mais atteint son but, bouleverser le spectateur et le laisser blafard. Un excellent film.

 

N°6-  « The artist » , Michel Hazanavicius

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Avec  « the artist » , Michel Hazanavicius a fait forte sensation au dernier festival de cannes, et créé la surprise. Hazanavicius ose un pari risqué et gonflé, en sortant un film muet en noir et blanc en 2011 ! Idée de génie, pas novatrice car déjà tentée par le passé mais toujours avec lourdeur…

Il faut dire qu’associer cinéma muet à comique burlesque façon Buster Keaton, Laurell et Hardy ou Chaplin, c’est oublier toute la poésie de cette époque là du septième art, toute l’écriture et la mise en scène qui font qu’un Fritz Lang muet ou parlant demeure une claque inaltérable avec le temps. Takeshi Kitano avait compris et porté à son paroxysme la richesse de ces silences dans le très beau « l’été de kikujiro« . Mais ici Hazanavicius frappe plus fort et livre un hommage très émouvant au cinéma à travers une histoire simple mais écrite avec finesse, basée sur le jeu sans fausses notes de ses acteurs. Jean Dujardin mérite amplement son prix d’interprétation cannois, commençant par jouer de son visage élastique pour caricaturer l’acteur de cinéma muet et glissant doucement mais surement vers une palette de jeu bien plus nuancée, au point d’en devenir un personnage extrêmement émouvant de loser. Face à lui, Berenice Bejo est confondante de justesse et crève l’écran au point de nous faire penser au fait qu’on ne la voit pas assez sur les écrans. Il nous rappelle de manière assez déroutante qu’un bon film n’a pas besoin de technique et de 3D mais juste d’un scénario solide entourés d’acteurs inspirés. Mais ce serait sans compter sur la mise en scène de l’auteur, sa dramaturgie. Il sait raconter des histoires et arrive à s’imprégner des tics d’un cinéma mort pour mieux nous démontrer que ce dernier bouge encore et qu’il s’est juste transformé et entouré de techniques de plus en plus élaborées. Hazanavicius, qui nous a fait mourir de rire avec ses irrespectueux « Oss 117 » choisit d’illustrer son film en contant une histoire d’amour, sous forme de drame et non de comédie. On rit peu durant la projection mais c’est la tendresse pour les personnages et leur profonde humanité qui touche de façon évidente et surprend d’autant plus qu’on n’attendait ni  Hazanavicius ni Dujardin sur ce créneau. Un exercice de style casse gueule qui aboutit à un film ambitieux, généreux et d’une nostalgie ultra classe.

 

N°5 – « Shame » de Steve McQueen

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« Shame » est le second long métrage de Steve McQueen, à l’homonyme tellement classe que ce jeune réalisateur black britannique se devait d’exceller dans la mise en scène. Après avoir remporté la caméra d’or à Cannes en 2009 avec « Hunger« , permettant au monde de découvrir Michael Fassbender, McQueen revient avec son acteur sur un tout autre sujet, l’addiction au sexe.

Fassbender interprète un baiseur fou dont le train train est bouleversé quand sa petite soeur débarque en ville pour squatter chez lui.

Et comme à son habitude, McQueen va laisser le temps au récit de se construire, n’hésitant pas à substituer les silences et la gymnastique du corps et des regards à certains dialogues. Et de nous livrer un film d’atmosphères, un film à l’image très léchée.

Le film présente les couleurs pales d’un monde de limbes, ce purgatoire de la mythologie grecque. Pourquoi ce personnage s’est il perdu ? La couleur pâle des scènes, la couleur du vide, sera aussi celle de l’absence de personnalité du personnage.  Ce dernier n’a aucune passion à part le sexe, aucun ami, aucune famille à part cette soeur venue d’ailleurs, aucune racine. Il a créé sa bulle, son monde aseptisé, un appartement blanc et sans âme, mais qui lui sert de lieu d’isolation. C’est d ailleurs pour cette raison que la présence de sa soeur le gêne, elle viole son intimité et son quotidien de baise. Elle amène de l’affectif là où il a réussi à faire le vide. Steve McQueen aborde une critique détournée du consumérisme et de la société zapping, laissant derrière elles des gens isolés et perdus. Sans tant de fond que cela.

Mcqueen utilise admirablement le corps de Fassbender, corps qui exprime davantage la souffrance que la jouissance avec cette fuite en avant dans du sexe désincarné. On en vient à éprouver une profonde empathie pour cet être déconnecté de toute joie, qui s’accroche à sa seule éjaculation pour rythmer sa vie.

Le plaisir semble se focaliser de plus en plus sur la conquête, l’acte en lui même n’étant qu’un enchaînement mécanique. Comme si la virilité du personnage ne pouvait que s’exprimer en laissant l’animal prendre le dessus. Un être devenu asocial dans la société cynique d’aujourd’hui, qui cherche à se raccrocher aux branches de sa bestialité pour se prouver qu’il existe. Un constat d’échec des rapports humains assez alarmant. On sort du film un peu décontenancé et heureux d’avoir une vie sociale ancrée dans la réalité. Le danger qui guette l’homme moderne est d’oublier ce qui forme le tissu social, au delà des rapports futiles. C’est le message assez juste et universel que Steve Mcqueen réussit brillamment à démontrer dans ce film qui fera date.

 

N°4 – « Polisse » de Maiwenn

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Avec ce quotidien de la Brigade de Protection des Mineurs, Maiwenn s’attaque à des sujets sensibles que sont la pédophilie, l’inceste, le viol de mineurs, la maltraitance physique. Autrement dit, un sujet casse gueule qui peut verser très vite dans le pathos.

Maiwenn Le Besco confirme après « le bal des actrices » sont talent évident de mise en scène de personnages et de direction d’acteurs avec un naturel confondant. Karin Viard est décidément l’une des meilleures actrices de sa génération. Joey Star trouve à nouveau un rôle extrêmement touchant et charismatique, à mille lieux de l’image de la star incontrôlable qu’il fut, il est très juste. On s’y croirait et l’aspect pseudo documentaire fait évidemment penser au brillant « L. 627 » de Bertrand Tavernier. Notamment parce que Maiwenn s’est inspirée de faits réels et que cette réalité dépasse la fiction et nous explose à la gueule dans certaines scènes déchirantes, lourdes d’émotions mais jamais de misérabilisme. Ces flics trop humains qui font face à des affaires extrêmement dures sur enfants, nous redonnent de l’humain en intraveineuse à travers leur quotidien.

Alors on peut reprocher à Maiwenn d’être une fausse modeste. Elle ne peut s’empêcher de se mettre en avant et de tomber dans le narcissisme en créant un rôle taillé pour elle, égocentré et caricatural, assez inutile et même agaçant. Allant jusqu’à nous montrer toute sa famille…sans grand intérêt pour l’histoire. Il est possible aussi de ne pas adhérer à ce patchwork d’histoires que l’on suit sans aller au bout, sous forme d’un espèce de zapping du glauque. Mais ce serait un peu se gâcher le plaisir d’un film choral très réussi, bien documenté et crédible et surtout très bien interprété, ponctué de scènes très drôles au demeurant.

Le film est violent par les mots et les situations mais il donne à voir systématiquement l’ambivalence de chacun de ces flics. Leur côté obscur, leurs contradictions, les traumas sécrétés par leur métier et le débordement de ce dernier sur leur vie personnelle, tout ceci permet d’embraser le film, de lui donner un souffle et une vigueur qui force le respect.

N°3 – « J’ai rencontré le diable » de Kim Ji-Woon

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Kim Ji-Woon a engagé son fidèle acteur Lee Byung-hun, de tous ses films, sorte d’Alain Delon coréen époque « le samourai » et a confié le rôle du tueur à l’excellent acteur de « Old boy« , Choi Min-sik, au visage impressionnant de violence, une tête de tueur qui vous glace le sang.  Avec « J’ai rencontré le diable« , le réalisateur franchit une étape, une maturité dans son art. L’ensemble des festivals qui l’ont accueilli lui ont rendu un accueil à la hauteur de la qualité du film, esthétique certes mais surtout qui fait montre d’une patte, contrairement à ses précédents films, bien trop référencés.
Et pourtant, tous les codes du film d’horreur sont là ainsi que l’absence de retenue du cinéma coréen. Il se lâche l’animal. La violence du long métrage est assez insupportable par moments et le film n’est pas à montrer aux âmes sensibles. Le sang gicle de partout, certaines scènes sont bien crades et choquantes et Kim Jee-Woon ne se refuse rien.
Mais il a l’intelligence de se baser sur un scénario classique et malin, sans aucune interruption de rythme, la spirale infernale n’ayant jamais de pause. Le flic poursuit un monstre qui ne sera jamais rassasié de crimes. C’est un homme mauvais, irrécupérable et d’une dangerosité hallucinante. Et pourtant le bon, l’homme blessé cherche à se venger, à faire sa catharsis en décuplant sa haine pour punir. Sauf que contrairement à un film à la Charles Bronson, le film a un but, un propos, un final, que je vous laisserai découvrir de vous-même.
C’est trash et certains scènes vous clouent au fauteuil de terreur mais c’est diablement efficace et plus profond qu’il n’y parait. C’est triste, c’est froid, c’est glauque mais c’est scotchant d’intensité. Kim Jee-Woon se permet même des touches d’humour dans les situations les pires.
Le contact d’un diable, d’un être sans aucune humanité rend t il mauvais ou ramène t il juste le poursuivant justicier à l’état de chasseur qui guette la bête…et se prend au jeu inhumain du bourreau car c’est un jeu enivrant. Il est plus facile de se venger que d’accepter que l’ordre et la justice légale s’accomplissent. La vengeance est l’acte basique et barbare de l’homme non soumis aux règles sociales et qui décide d’écouter sa haine naturelle plutôt que la raison. Kim Ji-Woon réussit donc, derrière l’apparente débauche de violence jouissive et écoeurante à nous pondre un bon plaidoyer contre la peine de mort. Et c’est ce qui est très très fort dans sa mise en abîmes et son traitement de l’évolution des personnages. Le mal pur est vraiment flippant et il est contagieux. Le film est excellent mais encore une fois soyez avertis du résultat à l’écran.
N°2 – ex æquo - « Black Swan » de Darren Aronofsky
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Voici enfin le retour de Darren Aronofsky après son lion d’or pour « the wrestler« , où Mickey Rourke renaissait de ses cendres devant la caméra du cinéaste. Certes, Aronofsky est l’un de mes chouchous, j’ai adoré tous ses films. Mais aujourd’hui il entre dans la cour des grands, des très grands.
Le film est un parfait mélange des deux longs métrages les plus réussis du cinéaste.
La force du récit est appuyée par une mise en scène de plus en plus étouffante, qui va en crescendo à la manière de « Requiem for a dream« . Une force centrifuge emporte peu à peu le récit à une vitesse de plus en plus grande. Mais de la même manière que dans « the wrestler« , où Aronofsky suivait Mickey Rourke en catcheur sur le retour, le réalisateur abandonne quelques peu les effets de style qu’on lui reprochait au temps de « the fountain » et de « requiem for a dream ».  Il sait à présent s’emparer d’une histoire comme personne, et l’on constate la même évolution chez lui que chez Fincher avec son « the social Network ».
Ici, Aronofsky reprend la même technique que dans « the wrestler » où son cinéma ressemblait plus à celui des frères Dardenne ou de Ken Loach qu’à celui de sa génération de cinéastes indépendants très formalistes, à qui on reprochait la forme au détriment du fond.  Ainsi, limite caméra à l’épaule, il filme en gros plans son actrice pour ne jamais la lâcher.
En délaissant le trop plein qui pouvait rebuter certains dans ses premiers opus, Aronofsky opte pour l’épure, donnant au jeu de Natalie Portman la possibilité de nous émouvoir et d’en prendre le temps. La peur et l’angoisse se lisent sur son visage et son corps si fragiles. Et en parsemant son film de touches fantastiques, il maintient le long métrage dans un genre indéfini et inquiétant, à la manière d’un Polanski ou d’un Kubrick, il conserve en permanence une tension forte. Ce cadre permet à Natalie Portman de livrer une prestation remarquable. L’expérience de cette dernière dans la danse classique accentue le réalisme des meurtrissures du corps qui se propagent à l’âme, ne sachant jamais si l’on nage en pleine schizophrénie et à quel moment le cauchemar se détache t il de la réalité.
L’utilisation des codes d’un cinéma de genre fantastique pour mieux perdre les repères du spectateur, permettent de l’emmener plus violemment vers l’apogée du récit, en accélérant, à la manière d’une ballerine qui tourne sur elle même jusqu’à perdre connaissance, jusqu’à s’abandonner. On s’aperçoit alors que le formaliste est toujours là, il est simplement plus discret, plus fin, plus abouti.
Et puis il y a l’histoire, la solitude du personnage, son unique obsession étant de devenir quelqu’un, être admiré aux yeux de tous, atteindre la perfection dans son art au sacrifice de tout le reste, la vie n’étant plus liée qu’à cet objectif, pas d’amis et peu de famille qui compte…un film bien plus profond qu’il n’y parait car il touche à quelquechose d’universel. Que recherche ton à réussir dans une vie ? Quel est le but, l’ambition, et pourquoi ? pour qui ? Le personnage de Portman le fait-il pour soi ou pour sa mère ?

Pour se transcender et défier la vieillesse et la mort, exceller dans un domaine pour se démarquer et se sentir moins seul ? Autant de questions que le film pose sans y répondre forcément, ou bien par allégories. Darren Aronofsky livre donc un film extrêmement riche et puissant, une réussite majeure qui le place parmi les plus grands.

 

N°2 – ex æquo - « Drive » de Nicolas Winding Refn

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Il est toujours émouvant de voir un auteur au style unique se révéler au grand public et récolter les grands prix, monter une marche de plus et s’imposer comme un grand, un très grand.

Au dernier festival de cannes, on attendait le réalisateur suédois de la trilogie « pusher« , de l’excellent « bronson » et du barré « whalla rising, le guerrier silencieux« .
Mais ce fut une surprise tout de même. Car c’est avec un film d’action, son premier film hollywoodien, que Nicolas Winfing Refn réalise son meilleur opus, son premier chef d’oeuvre.

Il est rare d’être frappé d’une telle cohérence, d’une telle évidence. Et Winding Refn utilise pour cela tous les codes du genre qu’il a si bien digérés. J’ai pensé à David Cronenberg pour le brio de la mise en scène, le même qui m’avait éclaboussé sur « history of violence ». Une histoire très banale mais un film majeur.

Et puis à David Lynch pour ces temps ralentis bercés d’une bande originale de haute tenue et tailladés de saillies bien sanglantes. Et puis des courses poursuites de voitures comme les deux ou trois du film, on n’en n’avait pas vu depuis combien de temps ? Très honnêtement je ne me souviens plus. En fait les courses de voitures m’ennuient profondément tant elles sont des passages obligés désincarnés de certains films du genre. Ici la tension est prégnante tout au fil du long métrage mais elle suit la vitesse du véhicule.

Et puis « drive », c’est la mise en lumière d’un immense acteur qu’on annonce de films en films comme la révélation des 12 derniers mois. Ryan Gosling est impressionnant. Ses dialogues se résument à quinze phrases mais il  crève l écran. Pourtant, ce n’était pas gagné avec un blouson en cuir avec un scorpion dans le dos. Un rôle en or pour Nicolas Cage dans un de ses multiples nanars récents. Mais ici, Ryan Gosling est mâle, très mâle.

A star is born. Oui, il faudra compter avec Ryan Gosling et c’est tant mieux, pauvres cinéphiles que nous sommes, dépendant de la chance.

Bien que je sois un fan inconditionnel de Terrence Malick, la palme d’or n’aurait pas du revenir à son « tree of life » mais bien au « drive » de Nicolas Winding Refn.

 

And the winner is…

 

N°1 – « Rabbit Hole » de John Cameron Mitchell

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Avec « Rabbit Hole« , John Cameron Mitchell signe son meilleur film et le retour au sommet de Nicole Kidman, qui, vous ne serez pas surpris, nous livre une prestation magistrale. Je ne l’avais pas vue aussi fébrile et dure depuis le « Eyes wide shut » de Stanley Kubrick.

Mais face à elle, Aaron Eckhart trouve un rôle à la mesure de son talent et ne démérite pas un instant. Il s’agit peut être de son meilleur rôle jusqu’à présent.

Avec un sujet pareil, le réalisateur a choisi un thème casse gueule, rarement abordé au cinéma et davantage au petit écran via des téléfilms ou des séries dont certaines (comme six feet under) n’hésitaient pas à traiter de la chose bien qu’elle ne soit pas franchement attractive en terme d’audience.

Et John Cameron Mitchell retrouve la recette de ses deux précédents essais « Hedwig and the angry Inch... » et « Shortbus » à savoir poser des questions simples crument, sans tabous. Dans « Shortbus », le spectateur voyait les acteurs se livrer à des scènes de sexe pornographiques mais ne retenait non pas du voyeurisme mais plutôt de la joie, de la jouissance et l’explosion des émotions et des tourments des personnages, qui se posaient beaucoup de questions existentielles entre quelques scènes un peu crues. Un sentiment étrange qui faisait disparaitre très rapidement le côté mal à l’aise des premières minutes. C’est comme si la sincérité avec laquelle le réalisateur explosait les tabous permettait tout de suite de franchir une étape pour aller plus loin dans l’exploration des personnages, non sans pudeur, juste sans voiles inutiles. Ici, il n’existe pas de mise en abime de la tragédie. Le metteur en scène estime que vous avez lu le pitch et que vous êtes assez grand pour comprendre ce qui s’est passé. Pas la peine de mettre en scène la mort de l’enfant. Ceci pour le coup aurait été du voyeurisme.

Non, ici il est question de deuil ou plutôt d’absence de deuil définitif. Comment exprimer ses émotions lorsque le pire vous arrive à savoir perdre votre enfant, très jeune.

La retenue des personnages est toujours contrebalancée par une violence sous-jacente mais jamais par un jeu d’acteur cherchant la performance façon « actors studio ».

Non, John Cameron Mitchell préfère utiliser l’humour noir par ci par là, une musique douce, des couleurs vives car la vie se poursuit, qu’il continue de faire beau temps.

La vie continue et les autres avancent tandis que le temps est figé ou qu’il bégaie pour les parents. Le manque et la tristesse se rappelant toujours à la mémoire, devenant simplement différents, évoluant, se transformant.

Le long métrage ne cherche pas à démontrer quoique ce soit, juste à filmer l’évidence, on ne partage pas la peine des autres, les personnes qui entourent une famille endeuillée de cette façon ne peuvent pas apporter grand-chose. Et les « survivants » font mine d’accepter ces politesses comme réconfortantes mais ceci reste du lien social, rien de plus. La peine est bien encrée et ne disparaitra pas. Il faut l’accepter et vivre avec.

On est seul face au drame même en couple, même au milieu d’autres parents touchés par ce malheur. Chaque deuil est personnel.On peut se raccrocher à Dieu mais quand on n’y croit pas il faut trouver autre chose et c’est ce que fait le personnage de Nicole Kidman. Le film n’est pas sans espoir, il n’est pas noir et sombre, non, il est plus complexe, il montre justement comment évoluent ces sentiments et comment extirper quelquechose d’un tel drame pour poursuivre sa route, même blessé de manière irrémédiable. 

John Cameron Mitchell signe un film profondément universel et d’une grande finesse, d’une sensibilité touchante car non versée dans le pathos gratuit, une œuvre bouleversante qui n’utilise pas du tout les travers du mélo mais plutôt une approche psychanalytique du sujet. Un film où l’intellect est servi par des acteurs en état de grâce. L’un des grands moments de cinéma de cette année. Probablement.

 

Voilà, c’est finis pour cette année 2011 pleine de surprises, un excellent cru, contrairement à ce qu’écrivent certains sites. Les films de ce classement sont tous d’un excellent niveau et il m’a été délicat de les départager. Ce n’est pas tous les ans de la sorte. N’hésitez pas à découvrir vos oublis en dvd…

Je vous donne rendez-vous tous les jours bien entendu sur « De l’autre côté, perché avec le blanc lapin… » mais en particulier début janvier où je vous livrerai un avant goût de ce qui vous attend au cinéma en 2012 avec deux dossiers complets sur les films les plus attendus version blockbusters et version films d’auteurs.

Merci pour votre fidélité.

Le blanc lapin

Les meilleurs films de l’année 2011 du blanc lapin ! – Partie 1 : N°15 à N°8

22 décembre, 2011

 Après « les pires films de l’année » du blanc lapin, voici ceux qui m’ont le plus marqués en 2011. Je vous laisse une critique raccourcie écrite par mes soins pour ces numéros 15 à N°8.

Les premiers feront l’objet d’une seconde publication.

N°15 – « Fighter » de David O.Russel

Les meilleurs films de l'année 2011 du blanc lapin ! - Partie 1 : N°15 à N°8 dans Ce qui vous attend au cinéma (sélection du Blanc Lapin) fighter-david-o-russel-avec-mark-wahlberg-chr-L-TsCmw3-224x300

Avec « Fighter », David O.Russel, réalisateur « des rois du désert », reprend un projet avorté de Darren Aronofsky, et sauvé par Mark Wahlberg, croyant dur comme fer au scénario. L’acteur doit être fier de sa persévérance. Le résultat s’avère brillant. La qualité fondamentale du film repose sur la prestation de Christian Bale, qui nous rappelle qu’avant d’être Batman, il est surtout un acteur caméléon incroyable. Le film est donc un récit du lutte acharnée de deux frères, l’un ex-petite star ayant raté sa carrière à cause de la drogue et son cadet étant l’espoir de la famille, en passe de devenir une étoile terne et éteinte avant son apogée. Le premier voit dans son petit frère une seconde chance de rattraper sa fierté, de réparer son passé, mais la drogue est plus forte. Tout l’entourage familial, lourd car accroché au héros de la famille, permet de dresser un état des lieux de l’Amérique profonde des quartiers pauvres, une Amérique de gens gros et obèses, sans travail et sans talents, le contraire de l’image véhiculée par les médias américains. Et la peinture n’a rien de l’apitoiement puisque la plupart des personnages dont la mère et les sœurs sont soit intéressées et dans une relation malsaine à leur frère soit dans un rapport exclusif d’adoration castratrice. L’argent ne fait pas le bonheur mais quand on n’en n’a pas, on se raccroche au seul espoir, l’individu de la famille qui peut en gagner. Il représente l’espoir de faire manger tout le monde mais aussi un rêve, une ascension sociale impossible aux autres. Une fierté comme bouclier contre les misères du quotidien.

Les combats sont filmés sans ralentis inutiles et avec un réalisme des plus froids, à l’unisson, du reste du long métrage, cru. La sueur ça pue, David O.Russel la montre. Et c’est tant mieux. On ressort donc du film grogui et ému, en ayant vu l’un des meilleurs films du genre depuis longtemps, bien longtemps.

 

N°14 – « Même la pluie » de Iciar Bollain

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En 2000, une équipe de production vient en Bolivie tourner un film sur la conquête espagnole par Christophe Colomb. Le réalisateur est jeune et souhaite montrer l’horreur du génocide espagnol. Mais dans cette période antérieure à l’arrivée au pouvoir d’Evo Morales, la situation sociale sur place est tendue. Les indiens qu’ils engagent pour devenir figurants sont préocupés par un autre problème, la privatisation par le pouvoir du système de gestion de l’eau dans la ville de Cochabamba. Et très vite, ces derniers désertent le plateau de tournage pour aller manifester.

Paul Laverty est le scénariste attitré de nombre de films de Ken Loach et on retrouve bien sa pâte dans cette histoire de combat social auquel Iciar Bollain apporte un talent de mise en scène indéniable, moins documentariste que celui qu’aurait adopté Loach.

Le film montre à quel point la bonne conscience des occidentaux présente ses limites face au colonialisme et aux traces qu’il a laissé dans l’histoire. Les intellectuels et défenseurs des droits de l’homme s’indignent du sort des Quechuas et autres peuples mayas ou incas massacrés par Pizzaro, Cortez ou Colomb. Mais quand il s’agit s’assumer ce passé, de se confronter à la pratique, à la réalité d’un peuple qui subit toujours l’exploitation des blancs, le discours reste théorique. Les individus se réfugient derrière la non-ingérence, derrière le fait que la mondialisation est un fait et que donc payer 2 $ par jour un figurant c’est normal et c’est tant mieux. Un gouvernement corrompu qui vend à la découpe les sociétés de gestion de l’eau à des multinationales, c’est certes le prolongement d’un long pillage et d’une longue exploitation des terres et d’un peuple d’amérique latine. Mais que peut on y faire ? C’est l’histoire…oui, mais l’histoire ne s’arrête pas aujourd’hui. On préfère fuir et se pencher sur les erreurs d’il y a plusieurs siècles, c’est plus confortable. Mais rassurez-vous, le film n’a rien de moralisateur, il fait juste un constat, pas très glorieux pour nous, certes. Iciar Bollain montre avec une grande finesse cette culpabilité qui s’exprime dans l’art mais pas dans les gestes car les vrais acteurs de leur vie, ce sont ceux qui crèvent de cette exploitation sur place, ceux qui se révoltent pour virer leurs dirigeants usurpateurs. Les personnages sont tous très bien interprétés de Gael Garcia Bernal à Luis Tosar, dont le visage buriné impose une force et un regard particulièrement à propos pour son personnage.

Le sujet du film comme son déroulé et sa mise en scène sont donc une excellente surprise, une bouffée d’émotion et d’humanité, une grande claque à notre hypocrisie et notre vision nombriliste du bien être de l’humanité.

 

N°13 – Animal kingdom de David Michôd

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David Michôd signe pour son premier long métrage un coup d’éclat, incisif et froid, comme la mentalité des individus qui composent cette famille de criminels, un long métrage récompensé par le 1er prix du festival de Sundance 2010, à juste titre.

En nous plongeant dans la vie quotidienne de ces fauves ni mafieux irlandais ni italiens, mais qui fonctionnent en clan, il nous montre à quel point le crime pour l’argent peut détruire ce lien familial justement et l’ériger en simple chaine qui lie des êtres seuls et perdus dans les tréfonds de leurs crimes. Car il n est pas question de sentiments fraternels ici, les hommes du clan ne s’aiment pas, ils chassent ensemble et se protègent car les forts ont besoin des faibles et inversement. L’humanité disparait pour laisser place au règne animal, le titre du film étant parfaitement choisi.

Et entre animaux, on sacrifie le plus faible pour sauver la meute en danger, sans regrets aucun. A ce titre le scénario fait froid dans le dos. Il n’y a pas d’honneur, de culpabilité et d’amour, juste un lien, l’argent, et une règle, survivre pour soit, ce qui nécessite l’unité.

Animal kingdom est un film choral porté par d’excellents comédiens aux caractères bien identifiés, centré sur une cellule familiale pervertie par l’intérêt commun, l’absence d’acte délibérément désintéressé vis à vis des siens et le poids des origines. Doit on les renier lorsque l’on sent qu’elles sont mauvaises et néfastes pour soit et pour les autres ? Dans les deux cas il s’agit du parcours d’indépendance d’un être que tout condamne à plonger dans la même marée que ses ainés. Un film sur l’identité, un excellent premier film australien, à ne pas manquer.

 

 N°12- « 127 heures » de Danny Boyle

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Avec « 127 heures » Danny Boyle prouve de nouveau qu’il est un touche à tout brillant puisqu’après l’adaptation de roman culte (« trainspotting »), le petit film noir très british (« petits meurtres entre amis »), le film de SF référencé (« Sunshine »), le film à oscars united colors of Bennetton (« slumdog millionaire ») ou le film de zombies décalé (« 28 jours plus tard »), il revient en très grande forme cette année et prouve de nouveau son éclectisme.

Ses détracteurs lui reprochent de privilégier la forme au fond. Il est vrai que question mise en scène, il atteint des niveaux de très haute facture. En utilisant tous les procédés, le split screen, le zoom à fond les vélos et toujours une caractéristique commune à tous ses longs métrages, une bande-originale décapante, au service de son histoire et du ressenti émotionnel du personnage.

Or au niveau de cet acteur quasi unique à l’écran, Boyle a fait la bonne pioche. James franco est tout simplement brillant. On ne voit que lui, on a très très peur de s’ennuyer durant son calvaire de 127 heures mais au final, l’animal dispose d’une palette de jeu riche et variée.

Boyle met en image l’immensité des paysages et la petitesse de l’homme de façon extrêmement simple, opposant sans cesse la bulle consumériste et technologique dans laquelle nous vivons aujourd’hui, détachés de la réalité, à la majesté de ces montagnes de l’Utah.

Danny Boyle dépeint au passage une manière d’appréhender la vie pour une génération de trentenaires globe-trotters, plus souvent portés vers ce type d’expérience que leurs ainés. Pour ma part, le film m’a touché particulièrement puisque j’ai connu ce sentiment d’abandon. Pas durant 127 heures, quatre seulement mais une éternité. C’était il y a quatre ans, dans un désert d’Argentine, la voiture embourbée dans le sable, sans eau, sans possibilité d’utiliser les portables, à marcher des heures pour trouver de l’aide dans un milieu où l’homme ne vit pas. J’ai vraiment connu le sentiment du personnage de « 127 heures », ce moment où l’on se dit que c’est très con mais que l’histoire va s’arrêter comme cela, pour un truc bête, pour ma part une erreur d’aiguillage. Tout d’un coup la nature devient hostile mais apaisante. L’idée fait son chemin. Et pourtant jusqu’au bout, l’instinct de survie est là, jusqu’au bout on cherche toutes les possibilités et on n’abandonne pas. On se résigne à la mort tout en gardant son sang froid et en tentant une issue. C’est très particulier comme expérience et ceci permet de mettre de la distance entre les contraintes du quotidien et les objectifs de vie, même si le stress revient au galop. Danny Boyle ne tombe à aucun moment dans le pathos gratuit. Il signe un film à la fois fun et détaché, certes tape à l’oeil mais pour ma part tout est question de virtuosité dans la mise en scène.

 

N°11- « Le discours d’un roi » de Tom Hooper

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Ce film du jeune Tom Hooper, conte une petite histoire dans le tumulte de la grande et un casting impressionnant.

C’est le genre de film qui m’exaspère et tombe très vite dans le sirop pour s’y engluer définitivement. Mais voilà, dans ce film, l’idée géniale du réalisateur est de justement profiter de ce quasi huit clos entre deux acteurs monstres (Colin Firth et Geoffrey Rush) pour raconter de façon fort originale un moment clé de l’histoire tout en livrant devant nous la naissance d’une très belle amitié.

Les rapports entre la royauté et le petit peuple sont parfaitement retranscrits, donnant à voir à quel point un monarque britannique peut se sentir dévoué à son « métier » mais très loin de la réalité, ne côtoyant jamais ses sujets et se sentant finalement extrêmement seul.

La truculence du médecin campé par Rush se confronte alors en permanence à la suffisance de ce roi. Un roi qui se refuse à perdre de sa superbe en acceptant d’avoir recours et besoin d’un prolétaire et surtout, de reconnaitre qu’il devient peu à peu son ami, son confident et un homme indispensable à sa fonction.

Le réalisateur arrive donc à dresser deux portraits des deux cotés de la barrière, à ciseler avec finesse ce qui fait qu’une amitié peut naitre entre deux individus que tout oppose. Mais surtout, il laisse aux deux acteurs la pleine mesure de leur talent, en optant volontairement pour une mise en scène très sobre et un choix de lieux limité et relativement épurés, afin que le spectateur se sente comme un patient, en confiance dans le décor. Ce film drôle et loufoque remporte donc tous les suffrages, même si d’élections, il n’est pas question ici, bien au contraire !

 

 N°10 – « the Tree of life » de Terrence Malick

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Terrence Malick était attendu pour ce long métrage tel le messie, le film ayant mis cinq ans à sortir des tiroirs et 35 à sortir de sa tête. Malick est un réalisateur rare et culte, respecté de tous pour son intégrité jusqueboutiste et son amour de la nature, pour la quasi perfection de ses oeuvres, des « moissons du ciel » au « nouveau monde« .

Son film a été accueilli par des sifflets lors de sa projection cannoise, symbole d’une attente cinéphile un peu trop forte et d’une réaction des critiques toujours aussi imbécile. On aime brûler ses icônes, quitte à le faire sans réfléchir.

Il faut dire que son film s’avère être d’une naïveté confondante, d’un lyrisme appuyé par une bande-son aux coeurs angéliques qui peut faire sourire pour un peu qu’on regarde son travail d’un air narquois.

Des chuchotements de phrases philosophico-religieuses ponctuent un récit au final ultra croyant en un dieu, EN un créateur, en cette nature si belle et si fragile. Un film qui rendra donc réfractaires les personnes athées et plus sensibles les croyants et les agnostics.

La mise en place de l’histoire est assez longue via une succession de tableaux de toute beauté sur la création du monde, comparable forcément à l’introduction culte de « 2001, l’Odyssée de l’espace » de Stanley Kubrick où l’on voyait des singes découvrir l’utilisation de l’outil et envoyer un os en l’air qui se transformait en vaisseau spatial.

Le film est déroutant à bien des titres. On est chez du pur Malick, son film le plus personnel, qu’il couve depuis qu’il a 30 ans, une ode à la nature et à la magie de la création, de l’évolution, de la vie et une relativisation des codes sociaux au regard de l’immensité de cette nature. L’homme et sa fierté, son égo, est bien peu de choses et passe à côté de l’essentiel.

Terrence Malick arrive à capter la construction d’un individu, d’un caractère par des sons et des images découpées de la vie quotidienne d’un jeune garçon des années 50. On le voit avec ses deux frères, sa mère douce et soumise et son père dur et soucieux d’élever des trois garçons à la baguette car la vie est pour lui une lutte où seuls les forts s’en sortent. Tiraillé entre les deux, entre la force et la douceur de cette même nature qui l’a créé, son père et sa mère, il va adorer l’une et détester l’autre avant d’en accepter la dualité, d’accepter la violence et la cruauté du destin, et de se tourner vers la foi en la création comme seul véritable réponse au sens de sa vie. « Père, mère, je vous porte en moi«   déclare Jack. Un beau résumé du film, un film sur l’acceptation de ses racines, et leur dépassement, qui est le sens même de l’évolution, au sein d’une espèce, au sein d’une vie d’homme, de l’infiniment grand à l’infiniment petit, tout est question de cycle.

La narration ou l’absence de narration est donc la clé de voute de ce poème, de cette prière qui divisera encore longtemps les critiques. Un vrai parcours spirituel vers Dieu. La mise en scène est sublime, les plans séquences contemplatifs, la photographie impeccable. Malick reste humble face à son propos. Son oeuvre est inclassable et lumineuse, de l’éveil à la mort tout comme à l’amour.

Il nous donne à voir un questionnement sur le sens de la vie et de l’évolution. Pourquoi connaitre tant de sentiments variés si c’est pour mourir de façon aussi rapide et vivre de façon aussi éphémère qu’un être moins évolué et moins doté de cette intelligence ? A quoi sert alors cet aboutissement supposé qu’est l’homme ?

 

 N°9 – « X-men first class » de Matthew Vaughn

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« X-men first class » est l’adaptation très attendue d’une série de comics books déclinant les célèbres X-men au tout début, lors de la création de l’école du professeur Xavier et l’histoire de l’amitié puis de la lutte entre Xavier et Magneto.

L’objectif clairement affiché du long métrage était de faire oublier les deux derniers films de la franchise, catastrophiques sur le plan artistique. Rassurez-vous, le pari est non seulement réussi mais dépasse même toutes les attentes.

En effet, l’équipe de production utilise habilement le contexte socio politique de l’époque des années 60. Le film est intelligent et surfe sur une uchronie à la manière des « Watchmen » pour marquer les racines des prises de consciences des mutants mais avec le fun et la nonchalance des sixties. La musique, les costumes et les codes couleurs ancrent la naissance de leur positionnement politique dans une période où les plus grands dangers et les plus grands espoirs se côtoyaient.

Le scenario prend le temps sur quelques scènes de rendre crédible l’amitié et le respect des deux personnages et parceque les acteurs ont un charisme évident. James McAvoy tord le cou au coté froid et intello de Xavier en montrant un homme brillant mais jeune et fêtard tout en restant « so british ». Michael Fassbender apporte à son Erik — Magneto une subtilité et une graduation dans la violence que même l’excellent Ian Mckellen restituait moins bien en vieux Magneto dans les premiers X-mens. L’acteur donne à son personnage assez de froideur et de masculinité bien frappée mais aussi de fêlures pour nous le rendre sympathique et comprendre son choix. Et quoi de plus idéal qu’un futur méchant que l’on comprend… Les effets spéciaux sont maitrisés et le scenario réserve son lot se surprises, y compris de trouvailles de mise en scène comme lors de l’entrainement.

Mais ce fond intelligent si rare dans un blockbuster n’est jamais développé au détriment de l’action. Tout comme dans un bon comic book, il n y a pas de lenteurs. Et comme Matthew Vaughn nous empile des scènes intimes et des vrais scènes dignes d’un James Bond, la sauce prend. Ici, l’aspect badass assumé et l’écriture des personnages permet au film d’atteindre un statut rare dans celui des films de supers héros, celui d’étalon. Il est à ce titre à classer du côté de « Batman, the dark knight« , « Watchmen« , ou « spiderman » même si perso Spiderman et son traitement patriotique par Sam Raimi me gonflèrent très sérieusement.

Bref, le film est très bon bien que tourné-monté en très peu de temps. Chapeau bas à Matthew Vaughn, Bryan Singer et leur équipe de production. X men va probablement repartir sur une nouvelle série fort sympathique.

 

N°8-  « Une séparation » d’Asghar Farhadi

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L’ours d’or  2011 est un film brillant et original sur la place de la femme en Iran mais aussi l’investissement de l’homme et son positionnement dans le cercle familial.

Une mention spéciale doit être faite au casting (Sareth Bayat, Sarina Farhadi, Leila Hatami, Kimia Hosseini, Shahab Hosseini) , irréprochable et récompensé par l’ours d’argent tant pour la distribution féminine que masculine. Il est vrai que le film repose énormément sur eux mais aussi sur son scénario, malin, qui part d’une situation banale pour embrasser une étude de moeurs originale car peu vue au cinéma, celle du couple en Iran aujourd’hui, vu de l’intérieur.

La comparaison est donc faite des rapports sociaux entre une classe moyenne qui s’en sort et vit confortablement et une classe sociale pauvre, davantage tournée vers la religion. Que veulent dire justice et morale dans chacun des couples et quelles en sont les limites quand la survie de la famille en dépend ? Ces thèmes vont se dessiner peu à peu à partir d’une histoire a priori simple qui va basculer à cause d’un accident.

Au-delà du drame et de la tension de l’excellent scénario, l’intérêt majeur est donc cette vision moderne qu’il renvoie de l’Iran. Le couple qui se sépare est ancré dans le 21ème siècle. Nader éduque sa fille pour qu’elle soit libre et indépendante, qu’elle fasse ses propres choix et ne dépende de personne et surtout pas des hommes. D’ailleurs c’est sa femme qui souhaite partir pour vivre à l’étranger et ne plus supporter les contraintes sociales et politiques. Mais il ne la retient pas, il la laisse libre. Et à trop vouloir jouer à cette modernité, elle qui voudrait qu’il la retienne et lui trop fier pour lui courir après, ne va t-on pas vers une désagrégation du couple plus inéluctable ? C’est qu’en milieu européannisé, on se sépare plus vite car les carcans religieux et sociaux ont bien moins d’emprise pour faire tenir un couple dans la tourmente.

Mais le réalisateur ne critique pas l’Occident, non, il tente de comparer les deux voies pour en faire ressortir les défauts inhérents. La voie religieuse du couple pauvre qui accuse n’est pas non plus la plus solide puisqu’au nom d’un honneur sur la base du Coran, on préfère mentir à son conjoint et travestir le tout. Au final, le mensonge et la peur de renoncer à sa fierté sont partout et aboutissent à la même chose. La liberté ou la contrainte de dogmes n’y font rien. Quand la confiance n’est plus là, que les règles propres au couple lui même sont violées, ce dernier explose.

« Une séparation » parle des tabous de ce grand pays et de leurs limites très rapidement atteintes. Il parle aussi de la fin de l’adolescence, de l’entrée dans l’âge adulte, dur, où il faut apprendre à vivre à plusieurs et séparément car les parents disparaissent, les couples ne sont pas éternels, et la fierté de l’individu reste au final un point de repère essentiel pour suivre une route, quelle qu’elle soit.

« Les pires films 2011 du blanc lapin ! », c’est parti pour le bilan côté sombre…

20 décembre, 2011

Pour la troisième année consécutive, sur « De l’autre côté, perché avec le blanc lapin…« , je vais vous dresser un petit bilan des pires films que j’ai vu au ciné en 2011. Vous trouverez une critique un peu plus courte que l’originale pour chaque film. Alors bien entendu, avec 50 films vus, j’en ai probablement zappé plein de très mauvais mais l’intérêt est aussi de reparler de certains longs métrages ayant recueilli d’excellentes critiques et qui m’ont sérieusement énervé !

N°11- « True Grit » de Joel et Ethan Coen

L’idée de voir Jeff Bridges retrouver les frères Coen 15 ans après «the big Lebowski», l’un de leurs chefs d’œuvre avait de quoi ravir. Le fait que les frangins les plus doués du cinéma s’attaquent à un genre aussi culte et vaste que le western était aussi gage d’excitation. D’autant que les Coen avaient annoncé un film sombre, violent, avec des vrais scalps, du sang…et au final, la seule chose sympa que je retiens ce sont que les cows boys se tiraient dans le dos…mais ce n’est pas nouveau…et c’est bien le problème. Ma déception est donc immense, les critiques sont enthousiastes de partout mais n’auraient-elles pas le syndrome habituel de sacrer systématiquement un auteur à partir du moment où il a aligné une petite dizaine de bijoux ? Car oui, ce western m’a particulièrement ennuyé. Entendons nous, Jeff Bridges est parfait dans le rôle du vieux briscard. La photo est magnifique, Matt Damon est bon, la jeune actrice aussi…mais le méchant est complètement fadasse, l’histoire ne réserve aucune surprise et ce consensualisme mou et attendu est relativement simple à expliquer. Il s’agit d’un remake de « 100 dollars pour un Shériff » avec John Wayne, film qui a non seulement mal vieilli mais qui était ringard et réac dès l’origine. Les Coen ont certes évacué les aspects hyper républicains de l’original mais n’y ont pas apporté leur touche, leur patte.

Si j’avais regardé ce film sans savoir qu’il s’agissait des Coen, je n’aurai pas été surpris de voir que Steven Spielberg avait produit…Disney aurait pu également filer des billes dans le projet tant le manque d’aspérité du tout m’a soufflé.

Mais où est passé le second degré légendaire des Coen ?

 

N°10- « the sound of noise »

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L’idée très sympathique et drôle est de voir des musiciens « ultra », réfractaires à la culture musicale considérée comme de bon ton, comme classique, se rebellant et commettant des attentats inoffensifs. La prouesse de leurs happenings est dans la première demi-heure assez jouissive puisqu’ils utilisent à peu près n’importe quel objet mais resitués dans un contexte particulier, une salle d’opération par exemple. On se dit alors qu’on tient peut être là un petit bijou d’humour décalé. Seulement voilà, passé cette idée ingénieuse de court métrage, le film patine et s’étire pour ne faire que renouveler des scènes du même acabit, marrantes certes, mais le problème et qu’on en attendait plus. On espère que le film va décoller, nous amener plus loin dans le délire. Or la surprise du début est trop forte pour permettre au scénario de rester sur la même tendance durant une heure supplémentaire. Et puis surtout, ces terroristes n’ont absolument aucun message culturel à faire passer. Organiser un concert en dehors d’un théâtre pour libérer l’art dans la rue, ce n’est pas nouveau, ça n’a rien de rebelle rebelle. C’est même limite consensuel. Le street art et les multiples festivals sont là pour cela. Ceci ressemble plutôt à un anarchisme bourgeois et bobo. Un film à voir par curiosité et pour vérifier si vous êtes bobos or not bobos…non là je vous taquine.

 

N°9 – « TRON l’héritage »

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« TRON l’héritage » est la suite du film TRON produit par les studios Disney en 1982 et où Jeff Bridges était happé par son jeu vidéo et confronté à un monde ultra hostile.

Que dire de cette suite ? Hum. Que je n’ai pas aimé…Si, au début puis lors du passage de « Derezzed » ou « End of line » du groupe Daft Punk.

En fait le film est un brillant clip du célèbre groupe et illustre avec grande classe et images somptueuses l’excellent album du groupe français, qui réussit là très haut la main son passage à la Bande-original de film. Les effets spéciaux sont magnifiques, aériens, et surtout la 3 D prend tout son sens, ce qui n’est que rarement le cas parmi tous les blockbusters sortis depuis Avatar.

Après ces quelques compliments, il m’est bien difficile de poursuivre même si le film s’est bien déroulé devant moi, sans trop d’ennui mais sans trop d’intérêt non plus. Le scénario tient sur un ticket de métro et la mise en scène est certes efficace mais pas suffisante pour emporter l’adhésion. Elle est juste « pas mal ». Mais avec une telle faiblesse de base, le film ne peut résister au ridicule de certaines scènes éculées qui font retomber comme un soufflet le film, à l’image de ces véhicules volants ou de ces motos du futur qui montent dans le ciel noir pour retomber de façon vertigineuse.

 

N°8- « Les chemins de la liberté » de Peter Weir

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L’adaptation du livre de Slawomir Rawicz, « A marche forcée » avait tout pour donner un grand film, épique, une grande aventure humaine.

En effet, l’auteur qui publia ce récit en 1956, racontait une histoire vraie, son histoire, puisqu’il avait lui même fuit le goulag pour atteindre l’Inde et traverser au passage une nature hostile avec ses compagnons, sur plusieurs milliers de kilomètres, à pied, le long lu lac Baikal, de la Mongolie, du désert de Gobi puis le Tibet et l’Himalaya.

Le réalisateur, Peter Weir, ce dernier a démontré avec « the truman show » ou « master and commander » qu’il savait jongler avec de très gros budgets sans perdre un talent bien réel pour appuyer sur les bonnes touches d’humanité et provoquer une émotion contenue mais pudique.

Or justement, c’est ici que le bât blesse, au niveau de la mise en scène de Peter Weir, qui ne décolle pas un seul instant, comme si ce dernier s’était contenté de filmer des paysages magnifiques, à la manière d’une longue pub pour des trecks organisés par « voyageurs du monde » ou « nouvelles frontières »… »…sauf qu’au bout d’un certain temps, un malaise nous prend…mais qu’est ce ? Un sentiment de linéarité, de déjà vu, dans la scène juste avant. Ah mais oui c’est cela ! J’ai finis par m’ennuyer, par me sentir un peu coupable de ne pas adhérer à cette histoire vraie, de ne pas avoir plus d’empathie pour ces individus qui ont existé. Peter Weir s’est donc laissé bercer par la beauté de cette aventure pour retranscrire gentiment son récit de manière extrêmement fidèle mais sans une once d’originalité. C’est qu’il n’est pas facile de ne pas se faire écraser par la nature non pas lorsqu’on y est confronté comme les personnages mais lorsqu’elle devient un personnage à part entière du film. Un film raté, qui s’épuise dans le froid ou sous le soleil de ces diverses contrées, qui s’assèche pour devenir anodin et déjà s’éloigner dans ma mémoire…

 

N°7- « Beginners » avec Ewan McGregor et Mélanie Laurent

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Beginners est le film parfait pour bobos. C’est tellement mignon cette histoire d’amour entre un très beau Ewan McGregor, So cute, et une si mystérieuse Mélanie Laurent, tellement à la mode en ce moment. Ils font des dessins, se cherchent, se trouvent, balancent deux trois phrases sur la vie, la mort…et puis il y a le personnage du père incarné par Christopher Plummer, seule réussite d’un film prétexte. En père s’étant découvert gay à 70 ans, l’acteur excelle et donne l’occasion de sourire. Mais passé cette bonne idée scénaristique, le reste est plat, ultra plat. Sans odeur, sans saveur. Une petite comédie légère qu’on oublie vite me direz-vous ? Et bien autant ne pas la produire. Il sort assez de films comme ceci chaque année pour éviter d’encombrer les cinémas de faux films underground qui se la jouent bohème.

 

N°6- « Captain America » de Joe Johnston

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Captain America avait tout pour être raté et pourtant, la presse fut bonne à la sortie. Il faut dire que les producteurs ont eu l’intelligence d’axer l’aspect patriotique du personnage au centre de l’histoire, à l’inverse de ce que tout énervé de l’Amérique bushiste aurait pu tolérer. Mais ils l’ont fait avec humour, assumant pleinement les origines de propagande guerrière pour introduire ensuite un film d’action plus classique. Sauf que dans cet exercice, il faut être doué pour ne pas sombrer dans ce que l’on veut éviter, et ne pas livrer un film justement bourré de clichés premier degré. Paul Verhoeven avait superbement réussit un film antimilitariste aux aspects fascistes avec son « starship troopers », faux film de propagande utilisant tous les codes du genre et n’indiquant que rarement au spectateurs qu’il était en face d’un fake.

Ici, les scénaristes se sont pris au sérieux et l’action très banale, basique et mille fois revue, emporte tout ce qu’il y avait d’intéressant dans quelques scènes de la première demi-heure. Au final, le film est sans aspérités. Un film effaçable du cerveau en dix minutes tellement il manque de chien, d’inventivité, de personnalité d’un vrai metteur en scène et non d’un faiseur comme Joe Johnston. Ce dernier nous avait déjà livré le pitoyable « wolfman » l’an dernier, qui figurait déjà en bonne place dans mes daubes des films de l’année 2010. Un habitué en somme !

 

N°5-  « World invasion – Los Angeles »

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« Battle Los Angeles« a réussi son marketing viral efficace avec des affiches et des bandes-annonces superbes. La fin du monde pouvait peut être s’illustrer d’un grand film de destruction massive ! Sauf que voilà, passé d l’idée de base de tourner l’invasion extra terrestre avec des caméras pourries, on s’aperçoit vite que le scénario n’existe pas, que les personnages n’ont aucune identité, que les dialogues sont simplistes et que les clichés s’accumulent comme si le réalisateur tentait d’obtenir un record dans le guiness book. On a droit à tout, absolument tout. Mais le problème c’est que ce n’est même pas drôle. Si au moins le film s’était transformé en nanar. Mais non, le long métrage se prend tellement au sérieux qu’on a vraiment l’impression de voir un court métrage distendu et pénible à regarder. Car s’ennuyer ferme devant un film d’action, c’est dur. On ne peut même pas dormir, le bruit des explosions vous réveille. Et d’un coup vous vous prenez à aimer « oncle boonmee », la palme d’or de l’an dernier, si chiante mais si bien adaptée à un sommeil réparateur. Non vraiment, la SF c’est pour des gens qui ont soit du pognon soit aucun budget. Entre les deux ça donne de mauvais faiseurs qui claquent tout dans trois pauvres effets. Tout le monde ne peut pas sortir un « District 9 » de sa petite tête…on le savait mais ça se confirme.

 

N°4- « Voir la mer » de Patrice Leconte

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J’adore Patrice Leconte lorsqu’il aborde des sujets casse-gueules et sait rester sur le fil du rasoir sans jamais se vautrer. Il a signé quelques chefs d’oeuvre avec Jean Rochefort, « le mari de la coiffeuse » ,  » Tandem » , « Ridicule » ou avec Michel Blanc dans  » Monsieur Hire » ou Daniel Auteuil et Vanessa Paradis dans « la fille sur le pont » .

Mais lui qui n’aime pas les critiques devrait parfois les écouter, car à verser dans l’autocaricature, on finit par pondre un mauvais film, puis deux puis que des mauvais films depuis dix ans. Mais où est passé Patrice Leconte ? Là où il aurait pu flirter avec la magie de « la fille sur le pont », il se plante totalement en oubliant l’essentiel de son cinéma au profit de simples postures. En effet, les dialogues ne sont plus travaillés et percutants, seule subsiste le côté naturel, décalé et impromptu des personnages. Sauf que ceci sonne creux et fabriqué. L’ex miss météo de Canal+, Pauline Lefèvre, est tout simplement à baffer. Elle minaude durant tout le film, regard en dessous, avec un jeu bien trop lisse et uniforme pour tenir la distance et surtout insuffler du souffle à une histoire uniquement basée sur le charisme du personnage féminin. Tout comme sur « l’homme du train » , Leconte part d’une bonne idée de départ, un bon pitch mais n’arrive pas à retrouver la verve de ses meilleurs longs métrages. Et comme si il était paresseux ou peu inspiré, il se contente de combler ce vide par un choix d’acteur principal non attendu, mais qu’on n’attendra plus. Cette impression de carrière en roue libre m’attriste vraiment de la part d’un artiste de son niveau. Le rêveur qui est en lui ne doit plus se laisser aller à tant de facilité et de mièvrerie du propos. Il a passé l’âge.

 

N°3 – « Les aventures de Tintin, le secret de la Licorne » de Steven Spielberg

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Merci, merci Steven Spielberg pour m’avoir enfin donné un avis tranché sur Tintin et Hergé !

Grâce à lui, j’en suis certain, je déteste ce personnage et tout l’univers qui l’entoure !

Je n’ai jamais été touché petit par le reporter belge et ses aventures qui me gavaient là où Indiana Jones, soit disant proche de Tintin, éveillait en moi un vrai goût de l’aventure. On peut reconnaitre à Spielberg d’avoir été très fidèle. Un peu trop même. Techniquement la motion capture est impressionnante même si la texture de la peau pose à mon avis problème. Quant aux personnages, je les trouve simplement vides d’intérêt. Haddock est à moitié con, les Dupondt agaçants de débilité et pas drôles du tout, ou d’un humour daté. Tintin est toujours aussi asexué et tête à claques, Milou trop fort, tellement qu’on l’enverrai bien sur la lune le clébard, pour avoir des vacances. Normal qu’Hergé y ait pensé par la suite. Et puis Spielberg enchaine scène d’action sur scène d’action sans aucune relâche. Probablement le fait d’avoir condensé plusieurs albums. Personnellement ceci m’a fatigué…au bout d’un quart d’heure. Aucune pause. Aucun travail des personnages, unidimensionnels. Pour un film en motion capture c’est embêtant. …quant à l’aventure, peut être séduira t-elle les tous petits ou les fans invétérés de Tintin, auquel cas tant mieux pour eux ! Mais moi je me suis profondément ennuyé. Tout est attendu et sans aucun souffle à part celui de mon voisin qui s’impatientait autant que moi. « Tintin et le secret de la licorne » était long, chiant et je n’irai pas voir la suite. Un des pires films de l’année. Venant de Spielberg, ca fait mal.

 

N°2 -  « Super  8 » de JJ Abrams

Avec « Super  8 », JJ Abrams revient deux ans après son reboot de « star trek » et toujours avec l’aura de ses succès télé « Lost » et « Alias ».

Le producteur du film est Steven Spielberg, dont Abrams est un grand fan et qu’il considère comme son exemple, son maitre à penser dans le cinéma de grand divertissement avec de gros effets spéciaux. JJ Abrams a clairement voulu rendre hommage à son mentor en filmant son blockbuster à la mode des années 80, même ambiance, même montée en puissance de la tension, même exposition des personnages, même générosité des effets spéciaux, même naïveté dans l’entertainment.

Sauf que son film ressemble justement aux productions Spielberg des années 80 et pas les plus fines, d’un point de vue scénaristique, justement. Rendre hommage c’est bien, mais réaliser un film que l’on a déjà vu cent fois, c’est moins bien, c’est même chiant, très chiant. Alors il est vrai que les gentils n’enfants n’ont pas de gentil toutou ou d’ami noir à sacrifier. On a évité ce cliché. Spielberg a prouvé qu’il savait réaliser des films adultes. En revanche il patauge en général dans le pathos dès qu’il s’agit de sentiments. Il confond sentimentalisme avec émotion. Le film semble daté et vieillot au fil du visionnage. A quoi servait il de produire ce mausolée du plus mauvais de la filmo de Spielberg ? A m’énerver peut être. Surtout que l’on compare d’autres films de monstres récents comme l’excellent « the host » du coréen Bong Joon-ho, qui lui a su s’inspirer de ses prédécesseur pour faire autre chose, insérer une vraie réflexion sociétale, un véritable humour décalé.

J’aimerais juste savoir ce que les critiques dithyrambiques qui ont porté aux nues ce navet ont pris comme substances illicites pour voir le film. Ceci m’intéresse véritablement. Ce qui m’agace donc c’est qu’on associe l’enfance à une période gnangnante et concon en gros. L’idée de départ de ces petits cinéastes en herbe est bonne. C’est le traitement qui est affligeant. Comme un papy qui gatouille devant un gamin. La même vision aseptisée de vieux qui ont décidément perdu leur âme d’enfant.

 

And the winner is …

N°1- « Sucker punch » de Zack Snyder

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Zack Snyder a beaucoup de détracteurs depuis son adaptation de la bande-dessinée « 300 » de Frank Miller  à l’imagerie crypto gay très belle certes mais vide de substance. Des combats s’enchainaient au ralentis avec une palette graphique des plus bluffantes mais le film était juste une démonstration avec de vrais acteurs qui aurait fait bonne figue en ouverture d’un jeu vidéo…

Mais était ce encore du cinéma ? Ensuite, il osa s’attaquer à la bande dessinée culte « Watchmen » et réussit l’impossible en restant ultra fidèle au comic book et en l’utilisant comme un storyboard de grand luxe.

Et bien pour « Sucker punch« , vous prenez les inconvénients des deux, vous secouez très fort, vous vous tappez quand même 2h30 à attendre, c’est long, très long. Vous ressortez super énervé, avec une envie curieuse de massacrer votre prochain, à l’image des héroines du film. Quel ennui ! Un ennui énervé…c’est un sentiment étrange. Son film est un prétexte, pour démontrer tout son talent de mise en scène d’action avec de très jolis effets spéciaux, une photographie superbe et une imagerie mixant steam punk, manga, jeu vidéos de combats…et puis ses fameux ralentis, là il se lâche. Mais passé la première scène de baston, toutes se ressemblent et deviennent de plus en plus creuses. Un film en manque total d’originalité pour gros machiste hétéro. Wahou !  J’attendais une scène lesbienne entre deux d’entre elles, on aurait été dans le cliché jusqu’au bout. Mais non, le film doit rester grand public. Les méchants sont tous des robots ou des êtres non humains. Dès lors il n’ y a pas une goutte de sang. Enfin si à un moment pour faire pleurer mais moi ça m’a fait rire, jaune… Des nanas pulpeuses avec des guns ! les scènes d’émotion pathétiques alternant avec des phrases philosophiques sur le sens de la vie…du grand n’importe quoi. Très adolescent. Je m’inquiète à ce stade pour l’état mental du réalisateur. Il est resté bloqué. Mais ses rêves d’enfants n’ont rien de poétiques, ils sont froids et font plus penser à un ado à la sexualité refoulée qu’à une boite de pandore à l’imaginaire débordant.

Non ma conclusion surtout est que Zack Snyder est un très bon faiseur, que ça lui a réussi sur « Watchmen » mais que pour ses autres films, il faut lui subtiliser le crayon ou la souris, comme ses héroines piquent des objets à droite à gauche. Mais surtout ne pas le laisser écrire, c’est une catastrophe. « Sucker punch » a autant à voir avec un film que moi avec le dressage d’éléphants. N’y allez pas ! Je vous aurez fait gagner 2h30. C’est précieux

 

C’est terminé pour ce troisième bilan annuel des pires daubes vues par votre serviteur, rdv dans quelques jours avec les meilleurs films 2011 du lapin blanc, en attendant de nous projeter dans un dossier spécial sur les sorties de 2012 et ce que nous réserve l’année prochaine…

Yvan

 

Les meilleurs films 2010 du lapin blanc suite et fin (Partie 2 : N°9 à N°1)

18 décembre, 2010

Voici la suite du classement de mes films préférés vus au cinéma en 2010. N’hésitez pas à me signaler d’affreux oublis, des pépites que j’aurais loupées.

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N°9- « I love you Philip Morris » de Glenn Ficarra et John Requa

Les meilleurs films 2010 du lapin blanc suite et fin (Partie 2 : N°9 à N°1) dans Bandes-annonces iloveyouphilipmorris01

Je déteste la plupart des comédies « gay » ou « gay friendly », qui tombent systématiquement dans la caricature de l’homo. Et bien ne vous fiez pas à l’affiche du film qui montre un Jim Carrey et un Ewan Mac Gregor en « grosses pédales » flashies…

Le film raconte l’histoire vraie, ce qui semble d’ailleurs hallucinant, d’un homme ayant menti toute sa vie et fait des allers et retours en prison par amour pour un autre homme, Phillip Morris (Ewan Mac Gregor), rencontré en prison justement. Jim Carrey nous livre là un festival de ce qu’il sait faire de mieux, alterner sans cesse entre pitrerie loufoque et tragédie bien sentie. L’histoire est proche de « Catch me if you can » (arrêtes moi si tu peux) avec Léonardo Di Caprio. L’histoire d’un gamin pour qui tout commence au mensonge d’origine de ses parents, qui l’ont adopté, fissure qui dictera toute sa vie, une vie de mythomane jusqu’à l’excès souvent très drôle. L’humour parfois bien trash a choqué l’amérique puritaine et a entrainé quelques difficultés de distribution du film. Il faut dire qu’on voit rarement ce genre de blagues homo sur grand écran. Mais justement, c’est là où le film est très fort. L’histoire n’a rien de communautariste, les personnages principaux auraient pu être hétéros, ceci n’aurait rien changé au fond.

L’intérêt principal du film réside dans cet individu clownesque mais sincère, qui se cache derrière divers masques de personnages afin de disposer d’assez d’argent pour rendre heureux l’homme qu’il aime. Seulement voilà, à force d’empiler des masques, le visage élastique devient de plus en plus rigide et quand ces derniers tombent il n’y a rien derrière…ou plutôt une histoire à écrire, un adulte à construire, juste un gamin qui a joué à être quelqu’un d’autre entre temps, juste l’espace de quelques dizaines d’années. Troublant.

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N°8- « Mother » de Joon-ho Bong

 dans Dossiers
Une mère cherche à disculper son fils d’une accusation de meurtre. Mais son fils a tout contre lui puisqu’il est légèrement attardé…
Le réalisateur coréen surprend à chaque film, que ce soit son film de monstre teinté de critique sociale avec « the host » ou son superbe polar « memories of murder« . Avec « Mother« , il change de nouveau de style tout en gardant un peu des ingrédients de ses précédents longs métrages. En fait il récréé un style, entre le thriller psychologique, la chronique sociale teintée d’humour noir, l’enquête policière classique, ou le mélodrame familial. Il nous brouille les cartes pour mieux entretenir le suspens et l’émotion. Mais pas de l’émotion tire larmes, bien au contraire, il nous montre les limites de la résistance, de la lutte pour un être aimé. Au bout de 2h de long métrage, l’empathie provoquée par cette mère « courage » nous explose à la tronche dans un des plus beaux final des films sortis cette année. Une très grande réussite.

La bande-annonce :

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N°7- « Shutter Island » de Martin Scorsese

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Cette adaptation du livre Dennis Lehane, adapté également en bande-dessinée, par l’un des plus grands réalisateurs au monde avait de quoi nous faire crever d’impatience. Et bien le résultat est brillant, notamment grâce à son fidèle acteur et chouchou, Léonardo Di Caprio, qui trouve là un de ses rôles les plus torturés et aboutis et prouve encore une fois qu’il est le meilleur dans sa classe d’âge. Il l’a re-prouvé trois mois plus tard dans « Inception » dans un rôle assez proche. Des quatre collaborations entre Léonardo Di Caprio et Scorsese, c’est la meilleure avec « Gangs of New York ».

C‘est un excellent thriller avec un twist final réussi, une musique oppressante et un Martin Scorsese qui s’intéresse davantage que d’habitude aux tréfonds de l’âme. C’est la première fois je crois qu’il filme des cauchemars ou des souvenirs, le fash back n’étant pas très présent dans son oeuvre. Scorsese utilise toute la profondeur de ses références cinéphiles de Shock Corridor de Samuel Fuller en passant par Hitchcock ou Lynch. Il utilise son aisance de mise en scène pour mieux nous perdre, multipliant les scènes à doubles fond selon l’idée que l’on se fait du récit. C’est à la fois de l’horreur, du suspens, du rêve trouble mais en tout cas c’est un bijou et un grand film dans sa filmographie.

La bande-annonce :
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N°6 – « A single man » de Tom Ford

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1962, Jim, professeur d’université à Los Angeles, vit reclus dans le deuil de son compagnon, décédé d’un accident de voiture quelques mois plus tôt. Seule sa meilleure amie, Charley (superbe Julianne Moore) pimente un peu sa vie. Il n’a goût à rien, il veut mourir.

Tom Ford, le célèbre couturier, passe à la réalisation dans un film doté d’une photographie et d’une utilisation du bruitage impressionnants. Tom Ford sait très bien filmer les corps, la peau, les regards et leurs non-dits, le souffle léger d’un personnage. Cette élégance dans l’expression des caractères ne les rend pas moins terriblement humains…et ce n’était pas gagné compte tenu de l’excès de style. Ainsi au final, de l’émotion se dégage de toute cette histoire, de la mélancolie, de la tristesse, de l’ironie, de l’espoir…et surtout, une belle allégorie de la vie et de la mort, du couple et de la réussite de ce dernier. Des messages simples ponctuent donc ce film dont la photographie si léchée n’est qu’une façade, tout comme l’image que ce professeur véhicule de lui même. Elle n’est qu’un rempart contre l’extérieur. Rester parfait en apparence pour que rien ne le touche, rien ne l’atteigne. Qu’il puisse conserver tel un trésor l’image du bonheur brisé un soir de pluie. Qu’il puisse s’enfermer dans son deuil et dans son image si parfaite à l’extérieur comme dans un écrin.

Colin Firth exprime admirablement la solitude, la tristesse, le manque de l’autre. Il faut voir la façon dont il pleure à l’annonce de la mort de son homme. Impressionnant de nuances. Julianne Moore et Nicolas Hoult sont au diapason. Le twist final est impérial. Un film tenu de bout en bout avec un soucis du détail vraiment plaisant. 

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N°5- « Inception » de Christopher Nolan

Inception dans Films series - News de tournage

 

Ce qui frappe le plus à la vision de ce film tant attendu, deux ans après « Batman-The dark knight« , c’est la minutie, le timing d’orfèvre, l’exigence avec laquelle Christopher Nolan et son frère Nathan ont écrit le scénario. Un récit labyrinthique et architectural faisant référence lui même à ce voyage dans l’esprit d’autrui, cette Inception.

Nolan nous livre un film intelligent, qui part du postulat que le spectateur l’est aussi. A la fin de la projection, on se dit que c’est très rare de tomber sur de tels films, libres dans leur construction parceque l’auteur a permis au studio Warner d’obtenir l’un des plus gros succès du box office il y a deux ans avec Batman. Et qu’est ce que c’est jouissif de visionner un excellent thriller de science fiction, d’un tel niveau formel et d’une telle rigueur d’esprit là où Hollywood nous assène des remakes, reboots et suites en pagaille.

Christopher Nolan décide donc d’invoquer tous ses thèmes de prédilection pour nous livrer un film somme. Nous retrouvons les références à la mémoire et à ses méandres (Memento et Insomnia), les regrets d’une relation gâchée et la volonté de rattraper le passé, de se reconstruire une identité (The dark knight) ou la manipulation des illusions (Le prestige). Mais à ceci Nolan ajoute ce qu’il a appris sur Batman begins, le cinéma d’action.

Léonardo Di Caprio habite son rôle avec la même intensité que dans Shutter Island et s’affirme à nouveau comme l’un des plus grands acteurs du moment, ayant perdu au fil des derniers Scorcese son physique poupin tête à claque et s’étant masculinisé avec l’âge.

Bande-annonce :

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N°4- « The Ghost Writer » de Roman Polanski

Ghost-Writer-Poster dans Les meilleurs films du Blanc Lapin

A 77 ans, Polanski signe l’un de ses meilleurs films, une compilation de tout ce qui fait le génie du bonhomme, un regard ironique et brillant sur une carrière qui ne l’est pas moins. Pour moi, cela faisait 20 ans qu’il n’avait pas signé de film marquant. L’histoire de ce « ghost writer » est celle d’un écrivain, Ewan Mac Gregor, choisi par l’entourage d’un ex-premier ministre, Adam Lang (Pierce Brosnan), pour rédiger ses mémoires et lui servir de nègre.

Cet écrivain est reclus sur une île, qui semble hostile par son mystère, le temps pourri qu’il y fait, l’isolement de la maison dans laquelle il est logé et surtout les énigmatiques personnages qui l’entourent. Une situation idéale pour faire monter une paranoïa hitchcockienne. Mais c’est bien à lui même que Polanski fait des clins d’œil. A sa propre filmographie, à « la neuvième porte » et « frantic » pour la course poursuite et le jeu de pistes, à « pirates » et « le bal des vampires » pour l’humour décalé, à « le locataire » ou « répulsion » magnifique film oppressant avec Catherine Deneuve…et enfin les cadavres dans le placard de politiciens bien sous tous rapports (« la jeune fille et la mort »). C’est donc un film somme.

Il est vraiment plaisant de voir un thriller différent, qui a une personnalité et un style, celui du réalisateur. Par exemple, là où la plupart des films du genre mettent la pression très vite, Polanski agrémente de touches d’humour assez surprenantes les premières scènes pour les espacer de plus en plus. Il avait tenté ce genre de mélange dans « la neuvième porte » mais le résultat était hélas totalement raté.

Ensuite, l’utilisation du lieu est toute caractéristique. Cette grande maison aux baies vitrées donnent l’illusion de liberté alors que lorsque le personnage met les pieds dehors, il ne peut rien faire, c’est une île où il n’y a rien. Le temps est triste, venteux, pluvieux, pas très rassurant. L’isolement, le vrai est bien là, glacial. Et une fois cette impression bien présente, le cadre est dressé et le danger peut surgir de nul part, la tension est à son comble. Enfin, les personnages qui peuplent cet univers si particulier ont tous quelque chose à cacher sous leurs dehors pas forcément antipathiques. C’est un peu la même impression que les chers voisins de Mia Farow et John Cassavetes dans « Rosemary’s baby » du même Polanski. Des individus malsains, qui cherchent quelque chose d’autre que la raison officielle du livre de mémoires à écrire.

Enfin, il s’amuse de son rapport aux Etats-Unis, cet endroit où il ne peut plus mettre les pieds depuis 30 ans. Il moque par l’absurde l’hypocrisie de leur puritanisme érigé en étendard. Les défenseurs de la bonne morale savent si bien s’assoir dessus quand l’intérêt de l’empire entre en jeu. Un film élégant, sans fioriture, où il n’y a pas de scène inutile. Terriblement efficace et bourré d’adrénaline.

Bande-annonce :

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N°3- « Moon » de Duncan Jones

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Duncan Jones a certes pu monter ce film grâce à l’aide de son papa, un certain David Bowie….mais avec le peu de moyens qu’il avait pour réaliser un film de SF, son premier film, ce jeune homme s’en sort très haut la main et signe l’un des meilleurs films de science-fiction depuis bien longtemps.

Ce huis clos entre ce cosmonaute et lui-même est si bien écrit, si bien pensé, que de multiples sentiments et réflexions jaillissent là où a priori on ne s’attend à rien. Si un film comme Alien et tous ses avatars se base sur l’immensité de l’espace et la solitude d’un personnage pour créer de l’adrénaline, « Moon » au contraire va chercher des thèmes bien plus terriens.

Car si la science-fiction peut certes s’avérer ludique voir régressivement jouissive, elle atteint également des sommets de profondeur spirituelle lorsqu’elle titille des thématiques universelles qu’elle arrive à isoler des considérations terrestres pour mieux en tirer la substantifique moëlle.Tout le talent de Duncan Jones est donc d’utiliser au mieux le jeu de Sam Rockwell, de révéler assez vite les ficelles du scénario tout en gardant sous la pédale quelques éléments de récit surprenants, de laisser filtrer de la poésie au milieu du cauchemar, de l’espoir vu de la lune, espoir qui s’identifie sous la forme de notre planète bleue mais que l’on ne voit jamais, curieusement. En effet, plus la solitude du personnage s’ancre sur cette lune si froide et si vide de tout humain, plus la terre et ce qu’elle représente s’inscrit en creux. C’est assez fort d’arriver à faire ressentir ce sentiment étrange d’isolement et d’espoir lié uniquement à l’appartenance à un monde, à une espèce. Toute la thématique du film est donc l’identité, l’identité en tant qu’être humain, au milieu de l’univers. Une puissante mélancolie s’échappe de cette vision, portée par la superbe bande originale de Clint Mansell (Requiem for a dream, the fountain).

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N°2 – Submarino de Thomas Vinterberg

 

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Thomas Vinterberg revient enfin…12 ans après son chef d’oeuvre écrasant et premier film, « Festen« .

Il est parfois mortel artistiquement de commencer très haut. Et la chute fut dure pour le jeune danois…De retour dans son pays natal avec « Submarino« , Vinterberg n’abandonne aucunement la noirceur sans fond et limite suicidaire de ses protagonistes, balayés par un vent froid, celui d’un certain pragmatisme social. Non, la vie n’est pas belle dans le quart monde, les soucis de certains vont au delà des besoins consuméristes que notre société créé aujourd’hui… Ceci fait un peu Miss France d’asséner ce genre d’évidence… mais tout est une question de support, or celui de « Submarino » est d’une grande classe. Vinterberg nous livre une mise en scène sobre,  dans une grisaille permanente, d’une colorimétrie parfois proche du gris foncé ou au contraire du blanc. Le blanc pur de l’enfance gâchée des deux personnages, deux frères séparés par un drame originel lorsqu’ils avaient une dizaine d’années.

Thomas Vinterberg s’évertue cependant à tordre le cou aux préjugés…déchéance sociale n’est pas synonyme de pauvreté morale ou intellectuelle. Et même sans aucune carte entre les mains, il y a des chemins, des mauvais très souvent, et puis le malheur apporte parfois une occasion de rebondir, de s’extirper dans un dernier souffle de survie. Le film traite de la culpabilité, de l’acceptation de son passé, de l’absence de communication entre des êtres censés se tenir les coudes, souvent par maladresse ou par abandon. Mais c’est dans le lien filial que  le film prend toute son ampleur dramaturgique.  Il est  l’ultime barrière contre la dureté du monde extérieur, l’ultime bouée avant de lâcher prise.

Passer dans ce style de cinéma après Ken Loach, Stephen Frears, les frères Dardenne ou Robert Guediguian n’est pas facile tant de si grands films ont été réalisés. Aronofsky a surpris tout le monde avec « The wrestler » il y’a deux ans. Thomas Vinterberg n’aura pas le même succès mais c’est une grande claque de cinéma à laquelle j’ai eu droit.

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Et le meilleur film de l’année pour moi fut le premier vu cette année ! Impossible de trouver un concurrent sérieux à cette majestueuse claque, à savoir…

 

N°1 – TETRO de Francis-Ford Coppola

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Il y a des moments rares au cinéma où l’on contemple une œuvre en ayant la certitude qu’elle est en train de nous faire chavirer, que l’on regarde un chef d’oeuvre. Et comme le mot est galvaudé, je vais juste préciser ce qu’est un chef d’œuvre pour moi. C’est lorsqu’un artiste arrive à imposer cette œuvre avec un style qui lui est propre, un jeu d’acteur irréprochable, un choix de casting brillant, enfin une histoire qui vous empêche de perde haleine. L’intensité dramatique ne tombe jamais dans le pathos, il n’y a aucun moment de relâche, chaque scène est parfaite. Le noir et blanc rappelle bien entendu « Rusty James » avec Mickey Rourke et Matt Dillon, d’autant que le jeune acteur, Alden Ehrenreich a des similitudes avec le magnétisme de Matt Dillon jeune. Et puis l’utilisation de la couleur est effectuée avec brio. Pourtant TETRO est bien plus abouti. Cette histoire de famille sur deux générations recèle en elle des moments aussi intenses que les tragédies shakespeariennes que sont « le parrain 1″ et surtout « le parrain 2″. C’est en auteur parfaitement libre, produisant son film tout seul, un film d’art et essai, à 70 ans, que Francis Ford Coppola revenait sur la croisette l’an dernier mais hors compétition. Et il n’était pas très content car il était fier de son film, il le disait partout, il n’avait pas signé une telle œuvre depuis fort longtemps.

Et bien il n’avait pas menti, cela fait 18 ans qu’il a tourné Dracula, son dernier film potable. 30 ans son dernier chef d’œuvre, Apocalypse now.

C’est donc une vraie joie de le retrouver. Une leçon de mise en scène car seuls les maîtres arrivent à impressionner sans aucune débauche de moyens.

 

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